Gijsels Hugo - Le Vlaamsblok - I - PDFCOFFEE.COM (2024)

Hugo Gijsels

LE VLAAMS BLOK Traduction de Nadine Laurent

Editions Luc Pire

Espace de Libertés

Table des matières Introduction................................................. 7 Première partie .......................................... 19 Le Mouvement Flamand et le Vlaams Blok en Flandre.................................................. 19 1914-1945 ................................................. 2 0 La Première Guerre mondiale et les partisans du Front...................................... 23 L'ordre nouveau en Flandre ...................... 31 Le contexte international........................... 54 La collaboration pendant la Deuxième Guerre mondiale........................................ 66 La chasse aux juifs, L'holocauste.............. 79 1945-1978 ................................................. 87 Le temps des catacombes.......................... 87 1954: la Volksunie .................................. 108 Le VMO, plaque tournante de l'extrême droite ....................................................... 129

Avant le Vlaams Blok............................. 168 Le Vlaams Blok en chantier.................... 196 Le Pacte d'Egmont .................................. 203 Après 1978 .............................................. 222 La progression électorale ........................ 222 Le 24 novembre 1991 ............................. 234 La nouvelle collaboration ....................... 238 Le cordon sanitaire.................................. 255 Deuxième partie ...................................... 266 Le Vidame Blok tel qu'en lui même ....... 266 L'amnistie................................................ 269 Les adversaires........................................ 276 Bruxelles ................................................. 285 La criminalité .......................................... 292 La culture ................................................ 306 La politique de défense ........................... 341 Les dissidents .......................................... 353 L'économie.............................................. 362

L'Europe.................................................. 367 Le fédéralisme......................................... 376 La famille ................................................ 384 L'homosexualité ...................................... 396 Le Pélerinage de l'Yser ........................... 401 Les contacts internationaux..................... 407 L'islam..................................................... 436 La communauté juive.............................. 447 L'Eglise ................................................... 459 Le nationalisme....................................... 467 L'enseignement ....................................... 477 La coopération au développement .......... 492 La presse ................................................. 503 Le racisme............................................... 515 Le révisionnisme..................................... 554 Les syndicats........................................... 589 Les femmes ............................................. 604 L'interruption volontaire de grossesse .... 616

Troisième partie ...................................... 620 Qui est qui dans le Vlaams Blok ? .......... 620 Karel Dillen............................................. 623 Les parlementaires .................................. 632 Les personnages secondaires .................. 707 Postface ................................................... 773 Bibliographie........................................... 778 Lexique ................................................... 782

Introduction Depuis les élections parlementaires du 24 novembre 1991, la Flandre se retrouve face à un problème épineux : la montée en force de l'extrême droite. En effet, ce dimanche fatidique, le Vlaams Blok a obtenu 36 sièges dans les cinq Conseils provinciaux flamands et 18 sièges au Parlement national. Et malheureusement, il est à craindre que lors des prochaines élections, le Vlaams Blok obtienne encore plus de voix. Mais ce qui est plus grave encore, c'est que pour la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale, un parti politique s'est ingénié à faire jouer au racisme un rôle de premier plan dans la politique belge. Actuellement, dans les milieux politiques en Flandre, on s'arrache les cheveux et on se demande comment on a pu en arriver là. Nous ne pouvons que constater

qu'il s'agit des retombées d'une politique de l'autruche qui dure depuis des années. Depuis la création du Vlaams Blok en 1978, jusqu'à la fin des années 80, les partis politiques traditionnels se sont retranchés derrière une stratégie de l'ignorance et du silence. Tous se sont dit qu'il valait mieux agir comme si l'extrême droite n'existait pas vraiment en Belgique, qu'il était préférable que les médias y prêtent le moins d'attention possible et qu'ils minimisent les violences de ces extrémistes. En agissant de la sorte, tous pensaient condamner le Vlaams Blok à rester un petit parti marginal. C'est ainsi qu'aujourd'hui encore, il n'existe en Belgique aucune étude faite par un parti politique ou par un syndicat, ou même par une institution scientifique ou universitaire, qui traite de l'extrême droite dans sa totalité et de façon permanente. Les politiciens ne cessent de s'inquiéter des signaux émis par les électeurs, mais ils n'ont jamais ou rarement prêté attention à cet

autre signal bien plus préoccupant, le signal d'alarme émis par le Vlaams Blok. Les partis démocratiques combattent le Vlaams Blok sans le connaître. Avant le 24 novembre 1991, je n'avais malheureusement pas rencontré d'homme politique qui ait pris la peine de lire le programme du Vlaams Blok. Au début des années 80 déjà, il était clair que le Vlaams Blok tirerait profit de cette politique de la « débrouille » propre à notre pays. Dès le début 1984, on avait jeté les bases d'une politique raciste déchaînée, dont le Blok s’est empressé de se servir pour bâtir le succès qu'on lui connaît actuellement. Du reste, c'est à cette époque que remontent les origines mouvementées du Blok et que se jouèrent les premiers actes d'une pièce où le leader à vie du Vlaams Blok, Karel Dillen, tint un rôle clé. Après la Deuxième Guerre mondiale, Karel Dillen fit partie du groupe de

nationalistes flamands de l'occupation allemande. Ces Flamands nourrissent, aujourd'hui encore, une admiration sans bornes pour l'ordre nouveau et pour les figures dominantes de la collaboration, et ils auraient même tendance, parfois, à nier l'existence de l'holocauste. Dès la Libération, ils ont tenté de se regrouper sous la bannière de partis politiques comme la Vlaamse Concentratie ou le Vlaams Nationaal Blok ou par le biais des journaux comme le Rommelpot, le Wit en Zwart et le 't Pallieterke. C'est à: cette époque également qu'a été créé le Vlaamse Militanten Organistie, une milice privée illégale (plus tard rebaptisée Orde VMO). Leur objectif politique principal était double : obtenir l'amnistie totale et inconditionnelle des criminels de guerre condamnés et parvenir à créer un état flamand indépendant. De ces partis et journaux ne subsistent aujourd'hui que le magazine 't Pallieterke et l'organisation VMO (Dillen collabora aux deux). Leur point de chute se trouve à Anvers. D'autres

organisations ont été créées dans leur sillage; il s'agit entre autres de Were Di, Voorpost, Protea, pour n'en citer que quelques unes. A cette époque, Karel Dillen s'active déjà fiévreusement à se trouver un rôle phare. En 1948, il prend part à un congrès dans la ville de Malmö, en Suède, où sont présents les nazis de tous les coins d'Europe qui tentent de se rassembler pour reformer un mouvement nazi international. Lors de ce congrès, Dillen rencontre l'auteur du premier ouvrage révisionniste, qui nie l'existence des camps de concentration et l'holocauste. Quelques années plus tard, ce livre paraît en Belgique. La traduction est de Karel Dillen. En 1954, apparaît la Volksunie. Bien qu'à l'origine, ce parti regroupe aussi bien des flamingants fervents que des partisans de l'amnistie, Dillen hésite à s'y rallier. Il commence par créer le mensuel

« intellectuel » d'extrême droite Dietsland Europa et prend de plus en plus part aux actions du VMO. Ce n'est que quand il est certain d'avoir assuré ses arrières qu'il devient membre de la Volksunie. On lui propose immédiatement le poste de président de l'importante section Volksunie jongeren à Anvers; Dillen se proclame alors le chantre de la pensée nationaliste et extrémiste du parti. Alors que le parti connaît un succès électoral grandissant, la tendance démocratique s'y fait également de plus en plus sentir. Dillen, tout comme les dirigeants du VMO, dont Bert Eriksson, Xavier Buisseret et Wim Verreycken désapprouvent cette évolution politique. Les leaders de la Volksunie, quant à eux, connaissent de plus en plus de problèmes relatifs aux actes de violence perpétrés par le VMO et aux opinions ouvertement néonazies de l'organisation. Lorsqu'en 1975, le président de la Volksunie, Hugo Schiltz, dénonce les

membres du VMO comme étant "les punaises du Mouvement flamand", la rupture est définitive. En 1977, et pour la première fois, la Volksunie siège dans la majorité gouvernementale et signe le Pacte d'Egmont. C'est le début de la Belgique à trois Régions. La mouvance de droite du Mouvement Flamand estime qu'il s'agit là d'un accord totalement insatisfaisant et s'y oppose donc fermement. Les derniers extrémistes de la Volksunie, avec à leur tête le sénateur Lode Claes, quittent le parti. Pour l'extrême droite, le Pacte d'Egmont tant critiqué représente le catalysateur rêvé grâce auquel il devient possible de regrouper les militants des différentes organisations afin de créer un parti politique. Le problème, c'est que Karel Dillen n'est pas le seul à entretenir de grands rêves politiques. En effet, alors qu'il crée le

Vlaams Nationale Partij (le Parti National Flamand) le 1er octobre 1977, Lode Claes, pour sa part, fonde le 19 novembre de la même année, le Vlaamse Volkspartij. Vu l'imminence des élections législatives, Dillen et Claes décident, fin 1978, de participer à la bataille électorale du 17 décembre en regroupant leurs partis sous la même bannière, celle du Vlaams Blok. Contre toute attente, Karel Dillen est choisi à Anvers tandis que Lode Claes n'est pas élu à Bruxelles. Peu de temps après, Claes quitte la vie politique et Dillen hérite des membres du Vlaamse Volkspartij. Le Vlaams Blok devient alors un parti à part entière. Dès le départ, il est clair que le Vlaams Blok va servir de couverture aux organisations d'extrême droite et néonazies. Aussi bien les leaders militants du VMO et du Voorpost, que les groupuscules « intellectuels pondérés » comme Were Di, Dietsland Europa, ou le lobby pro apartheid, tireront profit de la situation. Parmi ces

gens, on retrouve également tous les ultraconservateurs qui veulent « améliorer le monde » et qui font partie d'organisations comme Pro Vita (un mouvement contre l'avortement), IPOC (une association qui combat les réformes scolaires) ou qui sont des adeptes de l'intégrisme catholique. Il y a également les « amicales » (en voie d'extinction) des anciens collaborateurs, des ex-SS et des combattants de l'Est qui sont séduits par l'amnistie tellement revendiquée par le Vlaams Blok. Le ciment qui fait tenir le Vlaams Blok est celui de la haine virulente que ses membres éprouvent à l'égard des immigrés et des réfugiés politiques. Pour retrouver les « racines politiques » du Vlaams Blok, il faut remonter aux années trente et quarante, époque où les principes qui fondent le Vlaams Blok aujourd'hui sont posés dans les milieux de la collaboration. Mais si l'on veut mieux comprendre le cheminement de ce

parti, il faut remonter encore plus loin, à la Première Guerre mondiale précisément, où l'on assiste à la véritable période de gestation de la lutte antidémocratique qui a tant imprégné le Mouvement Flamand de la période 1930 à 45. C'est pourquoi, il m'a semblé logique de m'attarder quelque peu sur l'origine du Blok, de développer et d'analyser son histoire de 1978 à nos jours, et de faire la même démarche pour les organisations d'extrême droite de la même mouvance que ce parti. Dans la seconde partie du livre, j'examinerai l'action politique et les différents textes de bases du Vlaams Blok. Il ressort de la logique du parti, de ses principes, des textes du réunions, de ses pamphlets, de son programme électoral, de son journal et de ses textes pour la formation des cadres, que non seulement le Vlaams Blok est un parti fondamentalement contre l'immigration, mais qu'il éprouve également un sentiment de haine virulent à l'égard des

syndicats, de l'émancipation de la femme, du mouvement pacifiste, des organisations écologistes, des homosexuels, des chômeurs, des journalistes, de la littérature et du théâtre contemporains, des professeurs de religion et de morale, des Hollandais, de la démocratie,... On peut également évaluer la signification d'un parti comme le Vlaams Blok en prenant connaissance de la personnalité de ceux qui en tirent les ficelles. La troisième partie de ce livre consiste en un « Who is Who » du Vlaams Blok. Il s'agit des portraits des 18 parlementaires du Vlaams Blok, des 36 élus membres de Conseils provinciaux, des 23 élus membres de Conseils communaux et de touts les mandataires importants du parti. Enfin, pour terminer par un cliché peut être éculé : désormais personne ne

pourra plus prétendre qu'il ou elle n'était pas au courant. Hugo Gijsels

Première partie

Le Mouvement Flamand et le Vlaams Blok en Flandre « C'était l'époque (peu après la Deuxième Guerre mondiale, H.G) où, à Dixmude et ailleurs, comme par exemple lors de la Fête de la Chanson à Gand, nous avions pour habitude de tendre le bras droit au moment où l'on entonnait l'hymne flamand. Je me souviens d'une commémoration dans la salle Gruter, à Anvers. J'étais assis à côté du père Stracke. Dès le début de l'hymne, il tendit le bras... A cette époque, ce bras tendu n'avait aucune connotation idéologique, n'était pas le prolongement d'un passé révolu, il ne signifiait pas non plus une quelconque vénération à l'égard d'Hitler». ( Karel Dillen, dans Wij, Marginalen, 1987)

1914-1945 Herman Todts, dans l'introduction de son dossier publié en 1983 dans l'hebdomadaire Knack, qui couvre plus de quarante ans de vie politique en Flandre (de 1940 à 1980) déclare : « Au départ, il y avait la guerre, la collaboration et la répression. Il est impossible d'établir une chronique politique de la Flandre contemporaine sans mentionner, fût-ce brièvement, cette période troublée de notre histoire. Il est clair que toute la génération politique qui a du pouvoir et de la notoriété en Flandre aujourd'hui a dû, d'une manière ou d'une autre, confronter ses idées et ses actes aux événements de presqu'un demi siècle. » La thèse de Todts se base aussi et surtout sur l'histoire du Vlaams Blok et de la mouvance d'extrême droite du Mouvement Flamand qui est à l'origine du Vlaams Blok.

Pour le Mouvement Flamand, la fin de la Seconde Guerre mondiale semblait signifier également la fin de son existence. Entre 1945 et 1950, beaucoup de personnalités du Mouvement Flamand et plus encore de ses adhérents avaient été arrêtés pour avoir collaboré, à différents échelons, avec l'occupant allemand. A cette époque, un grand nombre de ces collaborateurs avaient fui à l'étranger, dans l'espoir qu'avec le temps on oublierait leur collaboration avec les nazis. Entre le 18 septembre 1944 et le 31 décembre 1949, les parquets militaires belges ont ouvert au total 346 283 dossiers traitant d'actes d'incivisme. En Belgique, 53 712 condamnations seulement ont été prononcées, dont 1 247 condamnations à mort, parmi lesquelles 242 ont été effectivement exécutées. En outre, en septembre 1945, le ministre libéral Adolf van Glabbeke édicta une loi stipulant que

toute personne soupçonnée de collaboration n'avait plus le droit de voter et encore moins de se présenter aux élections. Cette interdiction s'appliquait aux 346 283 Belges pour lesquels on avait constitué un dossier de collaboration. Par ces mesures, le gouvernement de l'époque voulait à tout prix empêcher le milieu de la collaboration ou plutôt l'électorat d'avant guerre de Rex et du Vlaams Nationaal Verbond (VNV) d'exercer quelque influence que ce soit dans le domaine politique. Du même coup, mais pour un temps seulement, le Mouvement Flamand fut décapité.

La Première Guerre mondiale et les partisans du Front Après la Première Guerre mondiale, le Mouvement Flamand se retrouva en quelque sorte dans la même impasse qu'après la Deuxième, pour un certain temps du moins. En réalité, les racines historiques de la collaboration lors de la Deuxième Guerre mondiale remontent à l'époque de la Première Guerre. Un médecin militaire, Hilaire Gravez, déçu et mécontent de l'attitude indifférente des officiers francophones à l'égard des soldats flamands, décida de créer le Frontbeweging (Mouvement du Front), en collaboration avec Hendrik Borginon, Filip de Pillecyn et Adiel Debeuckelaere. Cette organisation clandestine, dont faisaient également partie Cyriel Verschaeve, Frans Daels et Joris van Severen, militait pour l'autonomie de la Flandre et la création d'une armée flamande qui servirait sous les ordres d'officiers

flamands. Le gouvernement belge ne prêta aucune attention à ces exigences. Ainsi, en 1917, en pleine Flandre occupée, le Conseil flamand fut créé (dont un des instigateurs principaux fut le docteur August Borms). C'est ce même Conseil qui s'adressa à l'occupant allemand pour lui faire part des exigences flamandes d'avant guerre dans l'espoir de donner ainsi une impulsion au processus de séparation effective entre la Flandre et la Wallonie. Le Conseil savait vers quoi tendait ce genre d' « activisme » et quels en étaient les buts. Néanmoins, dès l'été 1915, et sous l'impulsion d'August Borms, ils incitèrent ouvertement à collaborer avec l'occupant allemand. Il était clair que les Allemands ne resteraient pas insensibles aux plaintes des Flamands et, ce faisant, obligeraient pratiquement leurs partenaires flamands à collaborer. En 1917, la séparation

administrative de la Belgique, accordée par les Allemands, ainsi que la flamandisation de l'Université de Gand (en 1916) servirent de prélude à une action commune aux Allemands, au Conseil flamand, au Front et aux activistes. Ainsi, en 1918, par des tracts lancés par la force aérienne allemande, quelques soixante mille soldats flamands qui combattaient au front furent invités à déserter massivement. Après la libération, toutes les actions de ce genre furent naturellement jugées comme étant des actes de haute trahison et condamnées comme telles. A la Libération, la plupart des chefs de file de la collaboration de 1914 1919, ainsi que beaucoup de soldats qui avaient répondu à l'appel à la désertion, fuirent en Hollande et furent condamnés par contumace. Par ailleurs, des activistes notoires comme le poète Wies Moens, le professeur Lodewijk Dosfel, le docteur August Borms et le père Desideer Adolf

Stracke eurent droit à des procès retentissants. Durant les premières années d'après guerre, l'establishment politique francophone et une grande partie de la population se montrèrent, logiquement, très méfiants à l'égard du Mouvement Flamand. Cependant, la mise en quarantaine du Mouvement Flamand fut de courte durée. Grâce aux ténors les plus actifs du Mouvement, comme Camille Huysmans, Frans van Cauwelaert ou August Vermeylen, qui avaient rejeté toute forme de collaboration avec les Allemands, le Mouvement Flamand fut à même de rétablir son ancienne combativité. En 1919, Hendrik Borginon, Herman van Puymbrouck et Adiel Debeuckelaere, créèrent le Frontpartij (le parti du Front) qui participa la même année aux élections législatives. Le Frontpartij récolta 61 000 voix, ce qui lui permit d'obtenir 5 sièges à la

Chambre. A l'origine, le Frontpartij était en fait un cartel électoral démocratique et antimilitariste, né de l'action de personnes et de partis régionaux militant pour l'autonomie de la Flandre. A Anvers, le parti du Front pouvait compter sur l'appui des communistes, tandis qu'en Flandre Orientale, il s'alliait avec les partisans de Daens pour former un cartel électoral. En 1919, les points principaux de leur programme politique étaient « l'intégrité linguistique de la Flandre, l'amnistie pour les personnes condamnées en 1919, le rétablissement de la neutralité nationale d'avant guerre et la fin de la suprématie francophone ». Durant les années qui suivirent, le parti connut un succès électoral mitigé, même si certaines personnalités figurant sur les listes du Front furent élues tels Joris van Severen, Jeroom Leuridan, August Borms et Staf de Clercq. Au début des années trente, il régnait un malaise profond au sein du parti

du Front, dû aux divergences d'opinions politiques qui avaient fini par morceler son électorat. Les fédéralistes étaient opposés aux séparatistes, les démocrates aux partisans de l'ordre nouveau, cet ordre nouveau dont l'avancée en Italie, en France et en Allemagne interpellait également les Belges parce qu'il touchait une corde sensible dans l'opinion publique. Les idées de Mussolini et de Hitler supplantaient de plus en plus l'antimilitarisme démocratique et c'est ainsi que certains membres du Frontpartij, dont Wies Moens et Joris van Severen, optèrent pour ce qu'ils appelaient le solidarisme nationaliste. Les positions extrémistes et autoritaires que van Severen adoptait publiquement provoquèrent, à la longue, un sentiment de malaise dans son propre entourage. Par exemple, en 1927, van Severen critiqua ouvertement le pélerinage de l'Yser en ces termes : « Nous en avons assez de ce pacifisme sentimentaliste, nous

en avons assez de ces discours vains et fumeux, de ce lyrisme vide qui cache une apathie générale, plus qu'assez. Les souffrances du peuple flamand, que l'on nous ressasse sans cesse, sont à nonante pour cent dues à la bêtise et à la lâcheté, ne renforcent rien, empoisonnent surtout. Qu'on cesse une bonne fois pour toutes d'en parler et qu'on encourage la bravoure. » Wies Moens et Joris van Severen ne furent pas réélus lors des élections parlementaires de 1929. Ils se retrouvèrent financièrement démunis et isolés politiquement. Un an plus tard, la direction du parti du Front rejeta les idées, jugées hérétiques, de van Severen et l'exclut définitivement du parti. Van Severen n'en resta pas là. La même année, il avait commencé à oeuvrer en Flandre Orientale et Occidentale pour la réalisation d'un rêve qu'il caressait depuis longtemps : la formation d'une milice

flamande avec un commando de choc, armé et en uniforme. Cette milice flamande fût l'ébauche de ce qui allait exister par la suite.

L'ordre nouveau en Flandre Le Verdinaso

En octobre 1931, sous la houlette de Joris van Severen, Juul de Clercq et Wies Moens, le Verbond van Dietse nationaal solidaristen (Verdinaso) fur créé. Le Verdinaso, dont la devise était Dietsland en Orde (Dietsland et ordre) se voulait le défenseur élitaire flamand de l'ordre nouveau. L'organisation voulait un « solidarisme » corporatiste en les classes et prônait l'organisation de l'Etat par un pouvoir fort. Elle s'opposait également au régime des partis ainsi qu'à la notion de démocratie parlementaire. Le Verdinaso ne souhaitait absolument pas devenir un parti politique. Dans son hebdomadaire Hier Dinaso, le Verdinaso ne cachait pas son admiration pour Hitler et Mussolini et les articles antisémites injurieux qui paraissaient se faisaient de plus en plus rageurs.

Joris van Severen devint presque immédiatement le leader incontesté et absolu du Verdinaso. Grâce à ce groupe militairement structuré, Joris van Severen espérait concrétiser son rêve le plus fou, celui de détruire l’Etat belge et de construire sur ses ruines le Groot Nederland (l'Etat thiois). Dès le départ, il put compter sur l'appui de partisans dans le milieu nationaliste flamand, Ajoutons enfin qu'il est le père spirituel du slogan (1928) : « La Belgique ? Qu'elle crève ! » (« België Barst ! »). Le 12 juin 1975, dans un article élogieux à l'égard de Joris van Severen paru dans l'hebdomadaire 't Pallieterke, Arthur de Bruyne, sous le pseudonyme d'Emiel de Volder, écrit ceci à propos du Verdinaso : « Le Verdinaso est un mouvement de lutte, antiparlementaire, antidémocratique, antilibéral, antimarxiste, et qui ne prend pas part aux élections. Le Verdinaso veut un

Etat thiois, « sans les Wallons » mais avec les Flamands francophones. Ses membres combattront « l'argent et la francmaçonnerie », le libéralisme, la propagande de la lutte des classes, le matérialisme. Le Verdinaso est une nouvelle manifestation du Mouvement Flamand. Van Severen en particulier, y apporte un nouveau style. Les membres de cette milice, soumis à une discipline de fer, portent fièrement l'uniforme. Le Verdinaso a son propre drapeau orange, blanc et bleu dont les emblèmes sont la charrue, la roue et le glaive.... Le Verdinaso se développe, mais lentement. Ses locaux, ses réunions, ses manifestations font l'objet d'attaques de toutes sortes par des marxistes, des communistes et des socialistes. Le gouvernement a pris des mesures sévères contre ceux qu'il considère comme étant des extrémistes anti-Belges très dangereux. Aux Pays Bas, le Verdinaso compte déjà quelques centaines de membres... » Précisons que l'auteur de cette prose fut lui

même militant du Verdinaso jusqu'en juillet 1934. Trois ans après la création du Verdinaso, Joris van Severen changea son fusil d'épaule et proclama la nouvelle orientation. Le leader se fit belgiciste : la Belgique ne devait pas être détruite mais bien conquise de l'intérieur. On troqua l'idéal du Groot Nederland (l'Etat thiois) contre celui du Dietsland (la Nation thioise) qui, selon van Severen, incluait la Wallonie, le Luxembourg et le nord de la France, se confondant ainsi avec les Pays Bas Bourguignons de l'époque de Charles le Téméraire. En 1937, van Severen redéfinit son projet politique comme suit : « Verdinaso veut réunir la Belgique, la Hollande et le Luxembourg en un seul royaume : le Dietsche Rijk (le Royaume thiois), mais aussi rassembler les colonies appartenant à la Belgique et à la Hollande pour former un empire : le Dietsche Imperium (l'Empire thiois). »

Ce revirement d'attitude coûta à van Severen la sympathie des nationalistes flamands. Cyriel Verschaeve lui tourna le dos tandis que Wies Moens, le chef de la propagande du Verdinaso, quitta le mouvement. Mais, d'autre part, il gagna ainsi les faveurs d'une partie de la bourgeoisie néerlandophone et francophone, qui, plus tard, soutiendra financièrement le mouvement. Sous la direction, incontestable, de van Severen, les militants du Verdinaso atteignirent bientôt le nombre de 10 000. Dans son sillage, on créa également le mouvement, important, des étudiants (les Dinaso Studenten avec, comme figures de proue, Lode Claes, Norbert Dewitte et Jef van Bilsen), une section féminine (Verdivro) et un mouvement de jeunes (le Dietsche Jeugd). D'autre part, on regroupa les différentes professions par section pour former le Verbond van Dinaso Corporaties. Ceci donne une petite idée de ce que

représentait le solidarisme au sein de cette communauté flamande. Après quelques années, le Verdinaso possédait des sections dans cinq provinces hollandaises. Le chef de l'organisation, pour la Hollande, était Ernst Voorhoeve, un orateur qui, avec son discours intitulé L’Ordre Dinaso, la démocratie est l'opium du peuple, parcourait les villes et les campagnes dans le but de trouver de nouveaux membres pour le Verdinaso. C'est sous son impulsion qu'en 1939, le Nationaal Socialistische Beweging (NSB) (le Mouvement National Socialiste) d'Anton Mussert, le Zwarte Front (le Front Noir) d'Arnold Meyer et le Verdinaso Hollandais se sont rassemblés sous une même bannière, pour former le Verbond der Nederlanders (L'Union des Néerlandais). Grâce à cette nouvelle ligne de conduite adoptée par l'organisation, d'autres sections, francophones cette fois, furent formées en Wallonie. Elles avaient pour

tâche principale de publier deux magazines : Pays-Bas Belgiques et l'Ordre Thiois. Enfin, Verdinaso créa une milice paramilitaire bien entraînée, la Milice Dinaso (DM), dont les membres étaient vêtus d'un uniforme de velours vert. Après l'adoption d'une loi relative aux milices privées, l'organisation changea de nom et d'uniforme. Ce véritable commando de choc, composé d'un millier de personnes environ et à la tête duquel se trouvait Jef François (et aux Pays Bas, B. Bolder), portait le nom de Dinaso Militanten Orde (DMO). Son uniforme consistait en un pantalon d'équitation noir, des bottes noires, une chemise verte et une cravate noire. Le Verdinaso avait donc des troupes paramilitaires de choc qui pouvaient s'entraîner dans des camps spécialement aménagés à cet effet. Ses membres portaient l'uniforme, mais le Verdinaso propageait surtout une idéologie franchement antijuive et fasciste. L'organisation constituait donc

une des antennes principales du nazisme allemand en Flandre. Les hagiographes de Joris van Severen, comme Luc Delafortrie, Arthur de Bruyne ou André Belmans par exemple, ont toujours fait observer que le leader et son organisation n'ont jamais rien eu à voir avec la collaboration avec le nazisme, qu'en outre, l'organisation Verdinaso a toujours combattu Hitler, le nazisme et le fascisme et que l'Alliance n'était pas raciste. Cependant, la réalité nous prouve le contraire. Quelques exemples. Dans son hebdomadaire, Hier Dinaso, datant du 5 janvier 1935, le mouvement Verdinaso décrit clairement sa position vis à vis des Juifs « Aucun autre peuple que les Juifs, ne nourrit en son sein autant de psychopathes, autant de suicidaires, de malades et de gens atteints de maladies vénériennes, et on ne trouve nulle part ailleurs autant d'individus qui comblent leur existence uniquement d'ersatz d'amour... De par le simple fait de leur existence, les juifs sèment partout les germes de la désolation et de la putréfaction, parce que

leur ambition est de s'élever sur les ruines d'autrui ». Pour ceux que cette prose et d'autres textes de la même veine, n'auraient pas totalement convaincus, il existe encore d'autres écrits de cet acabit, comme par exemple La problématique juive, éditée par Lannoo Tielt. Dans un numéro de novembre 1936 de Jongdinaso, l'hebdomadaire de la section jeunes du Verdinaso (dirigée par Arthur Raman), on trouve le compte rendu d'une razzia contre des Juifs dans un parc de la ville. Il s'intitule « La Jeunesse anversoise s'érige contre les juifs ». En voici un extrait : « ...ensemble ils ont mobilisé une petite armée dans les autres quartiers populaires et ce groupe, formé d'une soixantaine de personnes, s'est rendu au parc par un beau jour ensoleillé. C'est alors que le nettoyage a commencé, on a tabassé et expulsé du parc tout ce qui était ou avait l'air juif, avec des pétards on a fait danser comme de beaux diables les Elus aux nez crochus, les

Anversois s'attendaient à une nouvelle fuite vers l'Egypte. Malheureusement pour les Juifs, il n'y avait pas de Mer Rouge. La police anversoise, fidèle à sa réputation, n'a pas été prompte à intervenir; c'est ainsi que le parc a été proprement nettoyé. » Il est évident que le Verdinaso était partisan du nazisme. La preuve en est que régulièrement, l'organisation publiait gratuitement dans son journal Hier Dinaso des comptes rendus officiels du Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei (le parti d’Hitler, le NSDAP). Par exemple, dans le numéro du 12 décembre 1936, où parut également un article plaidant pour la suppression des syndicats, figurait un discours prononcé par Josef Goebbels lors d'un congrès du NSDAP à Nuremberg intitulé : « A propos du rôle de l'Empire juif dans le bolchevisme ». Ce discours, dont voici un extrait, a été traduit et publié dans sa version intégrale : « ... en réalité, le bolchevisme est le pouvoir le plus

abject et le plus sanglant que la terre ait jamais connue, et que les Juifs ont mis en place dans le but de s'arroger une autorité incontestable... » Par ailleurs, le Verdinaso s'était fait un point d'honneur, inquiétant pour le moins, de publier dans Hier Dinaso la liste des noms des administrateurs et des collaborateurs d'entreprises, de journaux, d'universités hollandaises et belges, qui étaient juifs et/ou d'obédience maçonnique. Le but était évidemment de jeter le discrédit sur ces personnes et ces institutions, ou du moins de susciter la violence à l'encontre des individus. L’Université libre de Bruxelles (ULB), de par son caractère libéral et la présence de professeurs juifs dans son établissement, fut la cible privilégiée de ces campagnes diffamatoires. La lecture de Hier Dinaso infirme définitivement la thèse selon laquelle les

partisans de l'ordre nouveau ignoraient l'existence des camps de concentration dans l'Allemagne de Hitler. En effet, dans le numéro du 6 février 1937 faisant référence au Westfälische Zeitung on admet le fait (tout en le minimisant) qu'il existait des camps de concentration en Allemagne. A l'origine, et contrairement à ce que beaucoup de personnes concernées prétendent aujourd'hui encore, il y avait un cercle très large de gens qui connaissaient l'existence des camps de concentration et ce, bien avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Dès 1933, l'agence de presse internationale Inpress avait diffusé à travers le monde des informations terrifiantes à propos de la terreur exercée par les nazis. En décembre 1933 d'ailleurs, une commission d'enquête venue à Paris pour recueillir les témoignages des prisonniers qui étaient parvenus à s'échapper des camps, arriva à la conclusion que les camps existaient bel et bien et que la torture et les massacres étaient pratiques courantes.

Après le départ de Joris van Severen et ses acolytes du Frontpartij et la formation du Verdinaso en 1931, la tension ne fit que s'accroître au sein du parti. Par ailleurs, le Verdinaso aspirait à une Nation thioise indépendante et s'opposait farouchement à l'Etat belge. En outre, beaucoup de membres du Frontpartij se sentaient attirés par l'antiparlementarisme de van Severen et la vague fasciste qui submergeait l'Europe gagnait du terrain dans les milieux nationalistes flamands. Lors des élections législatives de 1932, le Frontpartij perdit deux sièges à la Chambre (Herman Vos et Ward Hermans) et un siège au Sénat (Edmond van Dieren). Une autre figure de proue du parti, Staf de Clercq, disparut du Parlement. Suite à une erreur administrative de la part du Frontpartij lors du dépôt des listes électorales, il dut céder son siège à Hendrik Borginon. Au début des années trente, le Frontpartij n'étant pas parvenu à adopter un programme politique global ni une ligne de conduite générale, le parti menaça de se dissoudre.

Naissance du VNV

Dans l'entourage du Frontpartij, l'existence même du parti donnait lieu à d'âpres discussions. La question qui se posait à tous était de savoir s'il fallait oui ou non que le nationalisme flamand adopte la notion d'ordre nouveau. En 1933, la cause est entendue : le 7 octobre, sous l'impulsion de Tony Herbert, Gérard Romsée, Raymond Tollenaere, Hendrik Elias et Hendrik Borginon, le Vlaamse Nationaal Verbond (VNV, L'Union Nationale Flamande) est fondé. L'objectif de ses initiateurs est de « rassembler les différents mouvements nationalistes flamands pour créer une union forte ». La transition ne s'est pas faite sans problème. En effet, le VNV, pour pouvoir tenir tête au Verdinaso, s'est vu contraint d'adopter les idées et les structures fascistes, structures fondées sur le principe un peuple, un chef. A la demande des membres du VNV et après bien des hésitations, Staf de Clercq accepta d'endosser le rôle du

dirigeant fort et incontestable. Dès la création du VNV, beaucoup de personnes de tendance libérale ou progressiste quittèrent l'organisation à cause de la ligne politique fasciste qu'elle avait adoptée. Grâce au Verdinaso, le VNV eut bientôt sa propre milice, qui paradait en uniforme noir, et adopta également le salut nazi, en remplaçant simplement « Heil Hitler » par « Houd zee ». En outre, il est prouvé qu'à partir de 1938, et peut être plus tôt déjà, le VNV était financièrement soutenu par Berlin. Bien des surenchères politiques avaient été faites par rapport au Verdinaso. D'autre part la mouvance démocratique du VNV avait disparu. On peut deviner qu'à partir de ce moment, il devint facile d'attiser une haine virulente à l'égard des Juifs, des marxistes et des humanistes. Non seulement le parti embrassait le national socialisme

d'Adolf Hitler, mais il s'efforçait également de damer le pion à tout ce qui concernait la mouvance antisémite. Logiquement, une telle politique devait mener le VNV à la collaboration avec les nazis. Dans la presse éditée par le VNV – au départ, le journal De Schelde, ensuite à partir de 1936, le journal Volk en Staat et l'hebdomadaire De Nationatist – les Juifs étaient décrits comme « un peuple de parasites et de profiteurs sans patrie, une race d'étrangers qui gêne les Flamands, et que le peuple de la Nation thioise a le devoir de démasquer ». Même lorsque le modéré Hendrik Elias succéda à Staf de Clercq, à la mort de ce dernier en 1942, et que l'on prédit dans un même temps la chute du IIIe Reich, le VNV resta attaché à l'idéologie nazie. Pour preuve, une citation extraite d'un article rédigé en mars 1944 dans De Nationalist par le bouillant Rob de Jonge : « La foi, l'obéissance, le combat ! Telle était, il y a 20 ans, la devise des chemises noires de Mussolini, voilà de quoi se nourrissaient ces combattants farouches. Telle est la devise qui a été reprise par tous

les combattants et penseurs révolutionnaires de tous les pays où l'esprit nouveau entra en conflit avec les anciennes idées : le capitalisme, la franc maçonnerie, la ploutocratie juive et leurs complices communistes... En Europe, seuls les Européens ont le droit de vivre, de travailler et de diriger; seuls un peuple sain et ses dirigeants issus du peuple entrent en ligne de compte. Nous avons pris les armes pour combattre la masse aveugle excitée par les juifs et les franc-maçons. Nous luttons afin que ces éléments étrangers au peuple soient vaincus et nous ne nous laisserons pas dicter notre conduite par ces rebuts de la société. Nous avons entamé le combat avec ferveur, nous continuerons chaque jour à lutter avec ferveur. » D'après le VNV, « la démocratie avait survécu à elle même » et n'avait pas la moindre chance de vaincre une Nation thioise indépendante. Selon De Clercq et Elias, on ne parviendrait à créer cette

Heelnederlandse Dietsland que par le biais du nazisme et une structuration nationale socialiste de l'Europe. Comme le Verdinaso, le VNV voulait que l'on réorganise la Nation flamande sur un mode unitaire et solidaire. Lors de la proclamation de la création du VNV en 1933, on formula cela dans les termes suivants : « De même que la nation connaîtra un nouvel essor, nous donnerons un nouveau tournant socio économique à la communauté du peuple. Nous combattons le libéralisme économique et politique et ses conséquences désastreuses telles que la suprématie du grand capital, la prolétarisation des masses, la lutte des partis, l'anarchie dans la vie de la nation. Nous combattons le marxisme et son matérialisme, sa lutte des classes et son internationalisme incapable. Nous voulons rétablir la solidarité entre les nations, rassembler tous les peuples dans une même fraternité, pour le bien être de tous. »

En 1936, le VNV connut sa première grande victoire électorale. En effet, grâce à ses 166 626 voix, le parti obtint 25 sièges au Parlement. Rex, le parti fasciste francophone de Léon Degrelle, récolta un succès égal puisqu'il fit lui aussi une percée électorale étonnante en raflant 21 sièges au Parlement, dont 3 en Flandre. Cette année là, Rex et le VNV signèrent un accord stipulant que les deux partis promettaient de ne pas interférer dans les affaires politiques de l'autre et que Rex, pour sa part, se cantonnerait à défendre un fédéralisme limité. Cet accord (que le journal socialiste Vooruit appela l'imposture de Rex) ne résista pas très longtemps car Degrelle refusait de soutenir la demande d'amnistie pour les collaborateurs condamnés et parce qu'il avait personnellement eu maille à partir avec le cardinal Van Roey. Ce conflit avec l'Eglise a d'ailleurs donné lieu en avril 1937, à une déclaration officielle de la part de l'Archevêché, proclamant : « Rex représente un danger pour le pays et pour l'Eglise ».

Cependant, le VNV cherchait à s'unir avec des associations plus respectables et les trouva. En effet, le VNV et le Katholieke Vlaamse Volkspartij (le KVV, le prédécesseur du CVP) étaient politiquement proches. Après la Première Guerre mondiale et en particulier à cause de l'instauration du suffrage universel, le KVV avait perdu sa majorité parlementaire et le parti avait introduit la représentation des classes (comme les ouvriers, les indépendants, les agriculteurs,... ). Les flamingants du KVV sentirent alors que la chance s'offrait à eux de renforcer leur position et ils s'associèrent au VNV. Enfin, Gaston Eyskens, Edgar de Bruyne et Alfons Verbist signèrent, au nom du KVV, un accord avec Gérard Romsée, Hendrik Elias et Hendrik Borginon, qui agissaient au nom du VNV. Dans cet accord, les deux partis se prononçaient pour le fédéralisme et pour un ordre corporatiste. Cet accord, connu sous le nom de Vlaamse concentratiebeweging (Mouvement de concentration flamand) servait aussi et surtout la formation d'un front de droite

opposé au mouvement ouvrier. A ce sujet, la presse de droite fit continuellement la comparaison avec le communisme en Russie, le gouvernement du front populaire en France et la guerre civile d'Espagne. Le VNV connut son plus grand succès électoral durant la période 19361939. En 1936, le parti participa aux élections législatives sous le nom de Vlaamsch Blok et réussit à obtenir le double des sièges qu'il avait déjà. Le VNV dut cette victoire au fait que son concurrent politique idéologique, le Verdinaso, ne participait pas aux élections et par conséquent les anciens membres du Frontpartij donnèrent leurs voix au VNV. Par ailleurs, le VNV continuait de chercher à s'unir avec d'autres organisations politiques afin de former des cartels électoraux. C'est ainsi qu'en 1938, le VNV prit part aux élections communales à Anvers avec l'Eenheidsfront (le Front d'Union) et l'organisation des classes moyennes, sous le nom de Vlaams Volksblok (le Bloc

Populaire Flamand). Lors des élections parlementaires anticipées de 1939, Florimond Grammens, candidat indépendant, se trouva en tête de liste, à Anvers, du Vlaams Nationaal Blok, un autre nom de façade pour le VNV. Bien que le mouvement ouvrier et les partis traditionnels aient dénoncé et combattu ce parti comme étant un parti nazi pro allemand lors de la campagne électorale, le nombre de ses électeurs ne diminua pas. En effet, aux élections de 1939, le VNV obtint seize sièges à la Chambre tandis qu'au Sénat, il gagna même un mandat grâce à ses douze sièges. De Vlag

En novembre 1936, fut également fondée la « communauté ouvrière germano flamande » qui, plus tard, sera connue sous le nom tristement célèbre de De Vlag, sigle

du Deutsch Vlamische Arbeitsgemeinschaft. A l'origine, le mouvement De Vlag était une association culturelle germano flamande qui, grâce à l'appui financier de l'Aussenstelle West du Reichsstudentenführung, compta bientôt de nombreux partisans dans le milieu académique et culturel flamand. Les activités de De Vlag consistaient principalement à organiser des congrès, des voyages d'études en Allemagne, des concerts et des conférences. Le mouvement éditait également son propre magazine, du même nom. C'est sous la houlette de Jef van de Wiele, un professeur d'athénée, que De Vlag prit un virage idéologique différent et devint à proprement parler une organisation de propagande nazie. Mais ceci n'empêcha pas un grand nombre de personnalités flamandes d'en devenir membres et de participer aux séjours peu coûteux en Allemagne nazie, qui servaient bien évidemment à sa propagande. Parmi ces personnalités, il y avait entre autres Filip de Pillecyn, Cyriel Verschaeve, Frans van der Elst, Prosper de Troyer et August Servaes.

Le contexte international En Espagne

L’Europe était partagée idéologiquement (les libéraux les catholiques, les riches les pauvres, la gauche la droite, le pacifisme le militarisme) et ses lignes de démarcation se confondirent en 1936 lors de la Guerre Civile d'Espagne, obligeant alors l'Europe à faire un choix. En Espagne, le Frente Popular une coalition de partis de gauche gagna les élections de 1936. Le 17 juillet de la même année, une partie de l'armée qui était sous les ordres de militaires fascistes, dont le général Franco, se rebella contre le gouvernement régulier. L’Allemagne, l'Italie et le Vatican offrirent ouvertement aux insurgés un appui financier et militaire des plus considérables. Officiellement, les autres pays décidèrent d'appliquer une politique de non-ingérence, mais officieusement, certains, dont la

Belgique et les Pays Bas, ont plus ou moins soutenu les fascistes. Les Brigades Internationales, composées d'environ 40 000 soldats, dont 1 725 Belges, et qui étaient issues du mouvement ouvrier international, se portèrent à la rescousse de la république. En 1939, grâce à l'appui international massif, le caudillo sortit victorieux de cette guerre et soumit l'Espagne à une dictature fasciste, qui persista pendant des dizaines d'années. En France

Dans un tel contexte international, il était logique que le fascisme puisse s'installer également en Belgique. La grande récession économique qui touchait également le Vieux Continent accentua l'opposition entre la gauche et la droite et ce, dès octobre 1929. En France, cette opposition prit forme sous les traits de l'Action Française, dirigée par Charles

Maurras, qui représentait un catalyseur idéal et fascisant, et du Front populaire, formé par le parti communiste de Maurice Thorez, le parti socialiste de Léon Blum et les radicaux socialistes d'Edouard Daladier. Bien que le Front populaire ait gagné les élections en 1936, l'Action Française exerçait une énorme influence sur l'opinion publique française. L'Action Française militait avec ardeur pour un Etat fort, dans lequel ni les Juifs ni les communistes n'avaient leur place. En Italie

Après la Première Guerre mondiale, la situation en Italie était catastrophique. L’extension territoriale promise par les alliés n'eut pas lieu, l'économie était à son niveau le plus bas et la situation financière du pays était franchement dramatique. Benito Mussolini sentit qu'il devait saisir sa chance. A l'époque, Mussolini (qui avait été tour à

tour professeur, déserteur et journaliste) était directeur du journal Popolo d'Italia. En 1919, il fonda le Fascio di combattimento et reçut aussitôt l'appui de la bourgeoisie italienne qui voyait en lui le seul politicien capable d'empêcher une révolution sociale en Italie. En 1921, son parti, le Partito Nazionale Fascista, conquit 21 sièges au Parlement. Après la fameuse marche sur Rome du 28 octobre 1922, le roi Victor Emmanuel III lui confia la tâche de former un gouvernement. Dès 1926, Mussolini et son parti, dont les pouvoirs reposaient essentiellement sur les actes de violence commis par les Chemises Noires, une organisation paramilitaire, transforma l'Italie en une dictature policière où les libertés politiques et syndicales firent bientôt place à un corporatisme solidariste. Et, bien que Mussolini ait hésité il avait des « ambitions européennes » -, la Guerre civile d'Espagne le précipita dans les bras d'Adolf Hitler.

Le corporatisme solidariste dont Mussolini par ailleurs n'était pas le père spirituel, connut une expansion mondiale dans les années trente. Cette doctrine politique naquit en fait dans la seconde moitié du dix neuvième siècle, en réaction à l'influence grandissante du libéralisme et du socialisme et trouva des adeptes en particulier dans les milieux catholiques. L'évêque allemand Wilhelm von Ketteler, qui, vers 1860, appela à la trêve entre le prolétariat et le capital, et le théologien moral allemand Heinrich Pesch, sont en fait les principaux fondateurs du corporatisme. Par ailleurs, l'idée d'organisation corporatiste de la communauté fut reprise en 1891 dans l'encyclique papale Rerum Novarum et dans l'encyclique Quadragesimo Anno de 1931. Sous l'influence de Mussolini, La Tourdu Pin et Sorel, l'Italie fut réorganisée sur une base corporatiste : ce fut l'instauration d'une communauté dirigée par un chef autoritaire,

et dans laquelle la corpora c'est à dire les classes socio-professionnelles) et les employeurs feraient abstraction de leurs intérêts personnels afin de servir au mieux ceux de la communauté et de l'Etat. En Allemagne

Après la Première Guerre mondiale, l'Allemagne se retrouvait elle aussi économiquement affaiblie et appauvrie. En outre, le pays ayant été condamné par le traité de Versailles à payer des dommages de guerre, il connut une terrible détérioration tant au niveau de son économie que des finances de l'Etat. Parallèlement, le taux de chômage de l'Allemagne était énorme. Suite à la révolution d'Octobre en Russie, la lutte de la classe ouvrière et de la gauche révolutionnaire s'accentuèrent également dans la république de Weimar et se terminèrent par la révolte ouvrière de 1919 à Berlin, dirigée par Rosa Luxemburg et Karl

Liebknecht ainsi que par la naissance de l'éphémère république soviétique de Bavière. Des dizaines de milliers de vétérans de guerre allemands étaient sans travail et complètement démoralisés. Ils formèrent dès lors des groupuscules en armes, de tendance de droite et d'extrême droite. Une de ces bandes armées était dirigée par un excaporal, un certain Adolf Hitler. La troupe d'Hitler commença à faire de la politique, s'appuyant sur la rancoeur provoquée par la défaite de la nation, la grandeur perdue du royaume, la pauvreté, la peur de la bourgeoisie face aux révolutions et le chômage. Le Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei (NSDAP) fut créé en 1920, et servira de levier à Hitler pour parvenir au pouvoir. Déjà en 1920, le programme du parti NSDAP comportait une variante du

slogan « Eigen volk eert » (Le peuple d'abord) formulée comme suit à l'époque : « Seuls les membres du peuple ont le droit d'être citoyens de l'Etat. Seuls ceux qui sont de sang allemand forment le peuple, peu importe leur religion. C'est pourquoi il est impossible qu'un juif fasse partie du peuple ». En janvier 1923, l'Allemagne ayant refusé ou étant dans l'incapacité de respecter ses engagements et de rembourser aux alliés le montant des dommages causés par la Première Guerre mondiale, les troupes françaises et belges envahissent la région de la Ruhr. Suite à cette intervention, la monnaie dévalue complètement; en deux semaines, le cours du mark passe de 6 750 à 50 000 pour un dollar. Le 9 novembre 1923 à Munich, Adolf Hitler, à la tête du NSDAP et de son Sturm Abteilung (SA), tente de renverser le

pouvoir, mais sa tentative de coup d'état échoue et il se verra alors interdit de séjour pendant cinq ans. En réalité, il sera assigné à résidence au château de Landsberg pendant neuf mois. C'est pendant cette période que Hitler dicte à Rudolf Hess la première partie de Mein Kampf (la deuxième partie sera publiée en 1927), le manifeste qui servira de base au nazisme et au IIIe Reich. Les trois piliers de la doctrine de l'Etat Populaire, décrite par Hitler dans Mein Kampf, sont l'antisémitisme, l'antibolchevisme et le pangermanisme. Dans le climat d'insécurité et de chômage croissants qui sévissait à l'époque, tout le monde se sentait interpellé par les propos d’Hitler. Le parti d'Hitler, le NSDAP, était le parti qui allait résoudre les problèmes aussi bien de l'ouvrier que du banquier, de l'agriculteur que du noble, du raciste que du petit commerçant.

Diaboliser le communisme et le socialisme, valut automatiquement à Hitler le soutien des banquiers et des industriels. Dès 1927, Le RheinischWestfälischen Kohlen Syndicat décida d'accorder un don annuel de 6 150 000 marks à Hitler et quand ce dernier fut au pouvoir, l'aide financière fut doublée. De 1933 à 1945, les grands trusts et les banquiers mirent à sa disposition un total de 60 millions de marks. Le groupe IG Farben y ajouta encore personnellement la somme de 84 millions. En traitant avec Hitler, tous ces généreux bienfaiteurs savaient à qui ils avaient à faire. Le 17 janvier 1932, lors d'une conférence au Club Industriel de Düsseldorf, Hitler avait clairement détaillé son programme économique qui prévoyait notamment la suppression des syndicats, la liberté pour les chefs d'entreprises, un plan de réaménagement des travaux publics et le réarmement du pays. A l'époque, l'Allemagne traversait la plus grande crise

économique de toute son histoire. Le nombre de chômeurs se chiffrait entre trois et six millions. Les propositions d'Hitler pouvaient améliorer la situation dans l'industrie. Ils devaient également savoir que l'homme à qui ils apportaient leur appui financier était aussi celui qui allait ordonner le massacre des Juifs, des communistes, des socialistes, des homosexuels et des Tziganes. Tout cela figurait dans Mein Kampf, dont 100 000 exemplaires avaient déjà été vendus en 1932. Le 30 janvier 1933, Hitler fut nommé Chancelier. Un an plus tard, le Parlement fut mis hors jeu et la chasse aux juifs commençait « officiellement ». La même année, les syndicats furent dissous et les partis socialiste et communiste interdits. Les autres partis politiques disparurent d'eux mêmes. Le 14 juillet 1933, le NSDAP était le seul parti politique encore autorisé. La chasse aux Juifs connut un essor dont on ne mesura pas immédiatement l'ampleur. De

1933 à 1939, on édicta 250 lois à l'encontre des Juifs. Le NSDAP invita à boycotter les entreprises et les commerces juifs tandis que les Juifs furent exclus de la fonction publique dès 1933. On interdit également les mariages entre Juifs et non juifs, qui étaient par ailleurs punissables en vertu de la loi de 1935 « pour la protection du sang et de l'honneur allemands »...

La collaboration pendant la Deuxième Guerre mondiale A la fin des années trente, il était clair aux yeux de tous qu'Hitler revendiquait la suprématie sur l'Europe. En 1936, l'Allemagne occupa la Rhénanie et le 12 mars 1938, les troupes allemandes envahirent l'Autriche. Lors de la Conférence de Munich, la France et la Grande Bretagne se plièrent aux exigences d'Hitler et lui accordèrent en échange de la paix la région allemande des Sudètes située en Tchécoslovaquie. Le Japon, quant à lui, revendiqua le monopole sur l'Océan Pacifique, envahit la Chine et occupa la Mandchourie. L’ltalie revendiqua les régions autour de la Méditerranée et attaqua l'Albanie et l'Abyssinie. Ensemble, ils formèrent les puissances de l'Axe (Berlin Rome Tokyo), et conclurent en 1940 le pacte des Trois Puissances, regroupement auquel s'associèrent plus tard la

Yougoslavie, la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie, la Bulgarie et la Finlande. Le 1er septembre 1939, l'armée allemande envahit la Pologne. Le 3 septembre, la France et la Grande Bretagne, qui avaient promis à la Pologne d'intervenir en cas d'attaque allemande, entrèrent en guerre. Un mois plus tard, le 6 octobre exactement, les dernières troupes polonaises se rendaient. La Belgique et les Pays Bas proposèrent alors leur médiation aux forces belligérantes; l'Allemagne refusa tandis que Von Ribbentrop assurait à la Belgique et aux Pays Bas que leur neutralité ne serait pas violée. Le 9 avril 1940, les troupes allemandes envahirent la Norvège et le Danemark et le 10 mai de la même année, l'Allemagne entra en conflit avec la Belgique, les Pays Bas et le Luxembourg. Dix huit jours plus tard, l'armée belge

capitulait tandis que le corps expéditionnaire britannique fuyait le continent européen via Dunkerque. « C'était comme si les vacances avaient commencé trop tôt », déclara Karel Dillen en 1988, dans une interview accordée à l'hebdomadaire Panorama à propos de l'occupation allemande d'Anvers. Le 10 mai 1940, Dillen n'avait que quatorze ans, il aurait pu difficilement jouer un rôle quelconque pendant l'occupation, Par contre, en ce qui concerne ses chefs politiques spirituels, August Borms, Staf de Clercq, Jef van de Wiele, Cyriel Verschaeve, Jef François et des douzaines d'autres personnalités, il en allait tout autrement. Pour ceux qui défendaient l'ordre nouveau, le moment était en effet venu de lutter corps et âme, parfois avec un succès inégal, afin de gagner les faveurs de l'occupant allemand.

Pour le Verdinaso, l'occupation tourna en véritable cauchemar. Les mois précédant l'offensive allemande, Joris van Severen avait bien témoigné son soutien à l'égard de l'armée belge et du roi Léopold, mais les autorités belges quant à elles n'avaient pas oublié le passé de celui qui avait consacré des années à la propagande nazie. Son nom figurait donc sur la liste des « Belges suspects » et susceptibles de collaborer avec l'ennemi. Le 10 mai 1940, Joris van Severen et Jan Rijckoort sont arrêtés par la police et conduits à la prison de Bruges. Cinq jours plus tard, Van Severen et quatre vingt autres détenus sont transférés, sous la garde de la gendarmerie, à la prison de Béthune, une ville du nord de la France. Ensuite, les Belges sont confiés à la Garde Mobile Française. Selon les services de renseignement militaires français, le groupe est conduit le 19 mai à Abbeville sur Somme. La prison de Abbeville étant déjà

surpeuplée, les Belges sont emmenés sous la garde de soldats français dans la cave d'un kiosque situé hors de la ville. Le lendemain, après un bombardement allemand, des soldats français complètement ivres les sortent de leur cachette et les assassinent. Ce sont les troupes allemandes qui assiègent Abbeville le jour même, qui enterrèrent ensuite la dépouille de van Severen dans le cimetière communal. Aujourd'hui encore, le mausolée de van Severen, d'ailleurs érigé au frais du VTB VAB, reste un lieu de pélerinage où, chaque année, se déroule une cérémonie commémorative et où les représentants du Vlaams Blok, de Were Di, de Voorpost et du VMO ne manquent jamais à l'appel. Pour le Verdinaso, la mort de Joris van Severen signifiait le début de la fin. Le premier signe annonciateur du déclin du mouvement apparut en août 1940, lorsque Jef François et Pol le Roy, aidés du Militärverwaltung, publièrent le premier

exemplaire de guerre du magazine Hier Dinaso. Certains membres ne partageaient pas la nouvelle démarche adoptée par l'organisation et quittèrent donc le Verdinaso. Le groupe de Jef François s'engagea de plus en plus dans la voie de la collaboration et en mai 1941 finit par se rallier au Mouvement d'Union du VNV. Le DMO et la milice du VNV se regroupèrent pour former la Brigade Noire tandis que Jef François s'engageait dans la Légion Flamande. Enfin, le journal Hier Dinaso fut repris par le VNV et rebaptisé De Nationaal Socialist. Dès le début de l'occupation allemande, il était clair que le VNV, sous la houlette de Staf de Clercq, allait tenter par tous les moyens d'évincer ou d'absorber les autres organisations concurrentes pour que l'occupant finisse par le considérer comme le seul interlocuteur valable. Quelques jours après l'invasion allemande, Staf de Clercq promit le soutien du VNV à l'occupant. Pour

les dirigeants du VNV, la guerre était finie et l'Allemagne allait enfin imposer à l'Europe un nouvel « Ordre européen ». Le VNV espérait qu'en coopérant loyalement avec les nazis et en établissant le dialogue avec Hitler, ceux ci les aideraient à mettre sur pied le projet qu'ils chérissaient par dessus tout : la création de l'Etat thiois réunissant les Pays Bas et la Flandre. Mais le commandement militaire allemand ne respecta pas sa promesse. De son côté, le VNV avait commencé à s'acquitter d'une autre tâche, la récupération de la politique du NSDAP, de ses rituels et de son langage politique. En août 1940, le VNV fonda la Brigade Noire au commandement de laquelle on retrouva l'avocat Raymond Tollenaere, un partisan féroce du nazisme. En novembre 1940, dans un discours de Staf de Clercq, la politique de collaboration menée par le VNV fut enfin clairement énoncée : « La Belgique était notre ennemi. L'Allemagne n'est pas notre ennemi. Nous avons confiance dans le Führer. Nous ne

doutons pas de cela, ce qu'il fera sera bien fait. » L'atout principal du VNV était sans conteste la création du Mouvement d'Union National Socialiste. Le 10 mai 1941, Staf de Clercq et Léon Degrelle signèrent un accord qui visait surtout à la formation d'un ordre national socialiste selon lequel la Flandre serait attribuée au VNV et la Wallonie à Rex. L'accord spécifiait également que Rex Flandre et le mouvement Verdinaso de Jef François se subordonnaient au VNV. En outre, tous les mouvements de jeunesse qui adhéraient au national socialisme furent regroupés et placés sous la direction de Walter Bouchery au sein du VNV même, les garçons dans l'organisation Blauwvoetvendels et les filles dans l'organisation Dietse Meisjesscharen, pour former la « Jeunesse Flamande Nationale Socialiste ». Beaucoup de membres de la Jeunesse Flamande Nationale Socialiste rejoignirent ensuite l'organisation nazie

Hitler Jugend Flandern. Certaines personnes dans l'entourage de Walter Bouchery, mécontentes de cette situation, tentèrent de remplacer le nom de Jeunesse Flamande Nationale Socialiste par Dietse Blauwvoetvendels. En novembre 1940, sous l'impulsion de Hendrik de Man et grâce à l'appui des Allemands, l'Unie van Hand en Geestarbeiders (UHGA) fut créée; c'était une organisation qui remplaçait les syndicats qui ne pouvaient plus fonctionner suite à l'occupation allemande et dont certains opéraient dans la clandestinité. Après la désignation par les nazis d'Edgar Delvo du VNV à la tête de l'Union, le « syndicat d'union » corporatiste marcha bientôt sur les brisées nationales socialistes et reprit les idées solidaristes du VNV. Fin 1941, le VNV parvint à prendre le contrôle de la vie culturelle en Flandre.

En accord avec le commandement militaire, le VNV créa le service culturel provincial, aidé d'un conseil culturel interprovincial dirigé par le prêtre Cyriel Verschaeve. Comme ce dernier n'avait pas de cesse que proclamer publiquement son adhésion totale au nazisme, il fut présenté par les dirigeants nazis comme étant le chef spirituel du peuple flamand. Le VNV n'était pas la seule organisation à collaborer avec le nazisme. Dans environ la moitié des communes de Flandre, les bourgmestres étaient des membres du VNV. En outre, Gérard Romsée, une des figures de proue du VNV, devint secrétaire général du Ministère des Affaires intérieures. Mais le VNV avait également un rude concurrent, sur son flanc droit. Avant la guerre déjà, Staf de Clercq entretenait des liens étroits avec l'Abwehr et le commandement militaire établi à Bruxelles, alors que Jef van de Wiele et le mouvement De Vlag étaient totalement

soutenu par les SS. DeVlag était soutenu et financé par Berlin et ce, contre la volonté du commandement militaire en place. C'est à Berlin également que l'on décida de restructurer l'organisation et d'en faire un mouvement politique radical national socialiste dont la pensée maîtresse était « la race biologique et l'état national ». Même si Jef van de Wiele était considéré de fait comme le dirigeant national du mouvement, dans la réalité, on installa à la présidencegénérale de l'organisation le SS Obergruppenführer Berger. D'après van de Wiele l'organisation comptait, fin 1941, 15 000 membres. Pour mieux gagner les faveurs de l'occupant allemand, van de Wiele n'éprouva aucune difficulté à échanger les idéaux du Mouvement Flamand contre l'idée d'une Flandre simplement « district » de l'Empire Allemand. C'est ainsi que van de Wiele introduisit un nouveau serment politique dans De Vlag : « Persuadé que l'Empire

rendra à mon peuple sa puissance et sa grandeur, je promets de placer ma confiance absolue dans Adolf Hitler, mon Führer, et dans l'Empire qu'il bâtira ». Cette attitude rendit dès lors totalement impossible la fusion tant espérée par le commandement militaire entre le VNV et DeVlag. Lorsque le 22 juin 1941, les Allemands attaquèrent la Russie, les Allemands, aussi bien que le VNV et De Vlag, comprirent que le moment était venu de proposer au peuple flamand de collaborer avec l'occupant allemand. Le même jour, Staf de Clercq tentait de persuader la jeunesse flamande de s'engager dans la Waffen SS afin de combattre « l'empire juif, la franc maçonnerie, la ploutocratie et le bolchevisme », et dans un même élan il fit l'éloge de " »Adolf Hitler, le Führer de tous les Germains ».

Lorsqu'en août 1942 on créa la Légion Flamande parallèlement à l'Algemene SS Vlaanderen contrôlé par De Vlag, De Vlag et le VNV entamèrent une énorme campagne de propagande qui avait pour but de recruter des jeunes flamands pour aller combattre au Front de l'Est. Le 11 septembre 1942, devant une foule de 15 000 partisans réunis au Palais des Sports d'Anvers, Staf de Clercq déclara : « Je considère notre peuple néerlandais en Flandre comme étant au côté de l'Allemagne dans le conflit l'opposant à Moscou et à Londres ». Cyriel Verschaeve, quant à lui, entama un périple à travers les villes et les campagnes afin de persuader la jeunesse flamande de s'engager dans la lutte contre le communisme : « C'est une guerre sainte que l'Allemagne a déclaré à la Russie et la jeunesse flamande a le devoir spirituel d'y prendre part ».

La chasse aux juifs, L'holocauste Pour les dirigeants des mouvements pour l'ordre nouveau, la collaboration totale avec l'occupant, ne donnait lieu à aucun sentiment de culpabilité. Au contraire, dans la presse qui collaborait, les rédacteurs en chef tels Ward Hermans (De SS Man), Pol le Roy et Antoon Mermans (du De Nationaal Socialist) ainsi que Jan Brans (de Volks en Staat) ne se gênaient pas pour propager leur haine virulente à l'égard des Juifs et pour menacer publiquement les opposants au nazisme de déportation dans un des camps de concentration. Pour preuve, quelques citations. Le 22 février 1941, le journal De SS Man, journal de guerre des SS germains en Flandre, publia un petit poème sans signature et intitulé « Le Juif »:

« Cela sent l'ail et sous sa barbe on voit courir les poux. C'est un affreux bonhomne avec un vieux col froissé. Quand il voit de l'or, ses yeux injectés de sang sortent de leurs orbites Et de ses lèvres écaillées s'échappe un ricanement des plus sournois. Il a profité jusqu'au bout et de la manière la plus hypocrite des fermiers de mon pays. Les travailleurs de mon pays, il les a tournés en bourriques comme du vulgaire bétail. Dans la haine il a trahi mon pays entier avec des mensonges. Il a causé dans ma patrie néerlandaise des souffrances inimaginables. Mais le sang néerlandais ne lui a pas gardé rancune. Et en bandant, il secoue les derniers mensonges de sa barbe pleine de poux, Maintenant qu'il a sournoisement mis ses mains dans le coffre d'or dans l'espoir vain d'épargner l'anéantissement du 'Talmud'. » Et le 26 juillet, le SS Man dit encore : « Et pour tout ce qui se trouve sur notre chemin, il y a les SS, la police politique du

national socialisme. Pour ceux qui s'opposent à nous, les SS brandissent un poing de fer, le fouet des camps de concentration, parce que sans les camps de concentration jamais rien ne fonctionnera en Flandre! » On ne se contentait pas d'écrire des articles au sujet des camps de concentration; un certain nombre de personnalités flamandes allaient même jusqu'à les contempler sur place. Un de ces célèbres touristes de l'holocauste est le fameux August Borms, père spirituel des mouvements pour l'ordre nouveau en Flandre. En 1943, August Borms accompagné de sa fille, visita des régions de l'Europe de l'Est qui avaient été envahies par les nazis. Pendant son voyage, il visita entre autres, les usines pour les travaux forcés IG Farben à Auschwitz Birkenau, sans conteste un des camps d'extermination les plus sinistres de l'histoire. A son retour, Anita Borms publia quelques articles enthousiastes

à propos de ce voyage dans le magazine féminin du VNV Vrouw en Volk. August Borms demeure pourtant, aux yeux de quelques Flamands en particulier, « un martyre flamand » et même un « Christ flamand ». Au vu de tous les événements qui se déroulaient alors, il n'est pas étonnant que le milieu de la collaboration ait participé avec tant d'enthousiasme à la chasse aux Juifs. Le 28 octobre 1940, l'occupant allemand annonçait la première mesure prise contre des Juifs. A partir de cette date, tous les juifs en dessous de quinze ans furent obligés de s'inscrire au registre communal des Juifs. Les Juifs se virent également interdire l'accès aux services publics, à l'enseignement supérieur, à la magistrature et à la presse. Les entreprises appartenant aux Juifs durent apposer cette affiche dans les trois langues : « Jüdische Unternehmen Joodse onderneming - Entreprise juive » .

En juin 1941, les biens et les propriétés des Juifs furent répertoriés et à partir du 29 août, on les assigna à résidence à Anvers, Bruxelles, Charleroi et Liège. Dans les mois qui suivirent, on « nettoya » les établissements scolaires de la présence des Juifs. A partir du 27 mai 1942, ils furent obligés de porter l'étoile jaune. En août de la même année, partait de la caserne Dossin située à Malines le premier train fantôme rempli de Juifs. Sa destination : Auschwitz. Il y aura encore 27 autres convois. On en connaît les terribles conséquences. L'occupant fit appel aux membres du VNV (parmi eux les bourgmestres du VNV, dont le dirigeant Hendrik Elias), de Rex (dirigé par Léon Degrelle), de l'organisation De Vlag (dirigé par Jef van de Wiele), de l'Algemeen SS Vlaanderen (dirigée par René Lagrou et Robert Verbelen), du Mouvement Pédagogique Néerlandais (dirigé par Bert van Boghout) et de l'organisation Défense du Peuple (dirigée par René Lambrichts, un

avocat anversois). Des centaines de Belges participèrent aussi bien à la chasse aux juifs, chasse qui avait pris une ampleur démesurée, qu'à la surveillance de la caserne Dossin à Malines ou au travail de bourreau dans le camp de concentration de Breendonk. Les nazis eux mêmes ont publiquement admis que les Belges les avaient beaucoup aidés. Le 29 juillet 1943, le Conseil de guerre allemand déclare à Anvers que « Malgré l'importance des forces de police (allemandes) déployées, les arrestations de dizaines de milliers de Juifs à Anvers n'ont pu se dérouler que grâce au concours du mouvement d'ordre nouveau qui s'était donné pour tâche de rechercher les Juifs et de les amener à la police SS ». Ce sont les mêmes organisations et la même politique dont aujourd'hui, Karel Dillen et le Vlaams Blok se proclament les héritiers spirituels. En 1983, Dillen déclara : « Ma sympathie allait aux noirs; je veux dire par là les nationalistes thiois qui ont

emprunté la route de la collaboration d'une manière ou d'une autre ». En 1988, il reprit la formule en ces termes : « Nous remarquions bien que les juifs disparaissaient mais à Anvers, cela se passait d'une manière bien moins flagrante qu'aux Pays Bas par exemple. Nous n'avions pas la moindre idée de ce que ces gens devenaient ensuite. » Enfin, en 1990, Dillen admit que « les nationalistes flamands sont les héritiers des collaborateurs de 40-45 ». Entre-temps, tout le monde connaît le prix chèrement payé par l'humanité entière à Hitler et ses collaborateurs : l'holocauste coûta la vie à environ six millions de Juifs (des milliers de Tziganes et d'homosexuels furent également exterminés mais on n'en connaît pas le chiffre exact), tandis qu'au total, environ 55 millions de personnes furent massacrées. A ce chiffre, il faut ajouter les 35 millions de blessés, les 20 millions de personnes disparues et les 190 millions de réfugiés.

40 998 Belges furent emmenés en Allemagne, 13 750 d'entre eux perdirent la vie. Des 25 257 Juifs déportés de Belgique, 1 205 seulement ont survécu aux horreurs des camps d'extermination. Enfin, les nazis exécutèrent 2 019 Belges appartenant à la Résistance, Au total, 91 828 Belges moururent durant la Seconde Guerre mondiale.

1945-1978 Le temps des catacombes Les Flamands qui avaient collaboré ont évidemment dû payer pour les actes qu'ils avaient commis. Pendant les années de l'après guerre et en dépit des peines qui avaient été prononcées à l'époque de la répression, tout le monde continua à se méfier, à juste titre d'ailleurs, du mouvement nationaliste flamand. Les collaborateurs nationalistes flamands les plus connus n'avaient en effet pas fait les choses à moitié. Il fallut attendre les années cinquante pour que le nationalisme flamand connaisse un regain politique. C'est pourquoi, dans le milieu nationaliste flamand, on emploie le terme de « temps des catacombes » pour la période recouvrant la première décennie après la Seconde Guerre mondiale.

Evidemment, certaines personnes n'attendirent pas le verdict de la justice. Wies Moens se réfugia aux Pays Bas, Cyriel Verschaeve et Robert Verbelen trouvèrent refuge en Autriche. Là, Verbelen travaillera d'ailleurs pour les services de renseignements américains. Léon Degrelle se cacha en Espagne. Leo Poppe s'envola pour l'Argentine. Immédiatement après la guerre, la plupart de ces collaborateurs tentèrent de réunir à nouveau les partisans de l'ordre nouveau dans le but de former des organisations qui honoreraient les traditions national-socialistes. Leo Poppe, un ami intime de Joris van Severen, qui était pendant l'occupation le secrétaire de rédaction de Vooruit, le journal de guerre « volé », joua un rôle important au sein du Mouvement de Jeunesse National Socialiste Flamand et du VNV puisqu'il fur également le rédacteur en chef de Jonge Nationaal Socialist. A la libération de la Belgique, il se réfugia en

Allemagne où, avec Jef van de Wiele, René Lagrou, Cyriel Verschaeve, Hendrik Elias et Pol le Roy, il tenta de créer un « gouvernement flamand en exil ». C'est Leo Poppe qui fur le chef de la propagande de ce projet inabouti. Après l'Armistice, Leo Poppe se cacha à Paris, où il prit le pseudonyme de Jan Breughel et se fit passer pour un artiste peintre en prétendant être un descendant de Pierre Breughel. En 1947, alors que la police française était sur le point de l'arrêter, il réussit à s'enfuir vers l'Argentine via l'Espagne, grâce à la complicité d'une organisation catholique. Là bas, il trouva du travail dans un hôtel de Buenos Aires. A partir de 1948, utilisant le prétexte du 11 juillet, Poppe commença à réunir les Flamands qui s'étaient enfuis en Argentine avant la répression pour former le groupe « Vlaanderen in Argentinïe » (la Flandre en Argentine). En 1954, ce groupe publia le premier numéro du magazine De Schakel

(L'anneau). Le but de la rédaction était, grâce à ce magazine, de maintenir le contact entre les Flamands réfugiés en Amérique Latine et leurs homologues spirituels vivant au Benelux. A côté des annonces destinées aux familles, on trouve également dans De Schakel des contributions qui reflètent exactement le contenu des articles publiés dans la presse d'extrême droite en Flandre, avec des thèmes comme les revendications pour l'amnistie, propagande pour le Vlaams Blok, des articles contre les immigrés (!), la lutte contre l'avortement, le maintien de l'apartheid en Afrique du Sud et du régime dictatorial de Pinochet au Chili. Parmi les membres et les collaborateurs de la rédaction, on trouve en plus de Leo Poppe, Achiel Verstraete, un ancien sénateur du VNV et gouverneur de Flandre Orientale pendant la guerre, condamné par contumace; Willem Smekens, un ancien journaliste du journal du VNV Volk en Staat, et Vital Elewaut, un membre

du VNV qui, à la fin de la guerre, fuit la Belgique avec vingt-cinq autres personnes d'une manière pour le moins spectaculaire (en utilisant un hydravion qui, après cinq jours de vol, atterrit en Argentine). Parmi ces gens, on retrouve également Jef Robijn et Bert Rits (tous deux membres du Front de l'Est et condamnés), ainsi que Renaat van Thillo. Van Thillo, ingénieur, avait dirigé à partir de novembre 1940 le Vrijwillige Arbeidsdienst van Vlaanderen (le Service des Travailleurs Bénévoles de Flandre) contrôlé par les SS, organisation qui recrutait des volontaires pour aller travailler en Allemagne. Van Thillo avait été condamné par contumace. Il en allait de même pour la famille Byttebier, qui avait construit le Mur de l'Atlantique. Jetje Claessens et Jeanne de Bruyn furent également des collaborateurs de De Schakel dès la première heure. Jetje Claessens avait été chef du bureau central du mouvement Meisjesscharen, de la Jeunesse Flamande Nationale Socialiste, qui en 1941, faisait partie des organisations réunies de jeunes

pour le VNV, Rex et le Verdinaso. A la même époque, Jeanne de Bruyn était cadre au VNV. En 1944, elle prit la place de Jan Brans comme rédactrice en chef du journal Volk en Staat. Le contact pour la Belgique de De Schakel est Roeland Raes, sénateur et vice président du Vlaams Blok. Régulièrement, dans le mensuel du Vlaams Blok, on propose aux gens de s'abonner ou de verser des subsides au journal De Schakel. Après la guerre, la situation était difficile pour les collaborateurs qui avaient été condamnés et qui étaient restés en Belgique. Certaines peines prononcées à leur encontre étaient exagérément lourdes et variaient selon les régions et les auditeurs. Cependant, très rapidement, l'équilibre fut complètement renversé. En 1948, Paul Struye, Ministre de la Justice de l'époque, commua presque toutes les condamnations à mort en peines d'emprisonnement à perpétuité. En 1952, soixante pour cent des

personnes condamnées avaient récupéré leurs droits civiques (dont le droit de vote). Début 1954, il ne restait plus en prison que 1 500 personnes déchues des droits civiques. Cependant, aujourd'hui encore, à cause de ces procès pour collaboration, subsiste une rancune tenace chez les nationalistes flamands, qui n'ont de cesse d'exiger l'amnistie. Les opposants à l'amnistie, quant à eux, font observer qu'une telle décision signifierait la volonté de tirer un trait sur le passé et le pardon des fautes commises par les criminels de guerre, attitude qu'il est difficile d'exiger de la part des victimes de la collaboration (ou des familles des victimes de l'holocauste). En 1947 déjà, le Parlement prit des « mesures de clémence » qui permettaient à toute personne, encourant une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement, de récupérer ses droits civiques sur simple demande adressée au Procureur du Roi. On exigeait seulement de la part du demandeur de faire figurer dans

sa requête ses regrets pour son attitude durant l'occupation. En fait, 8 000 personnes étaient concernées par cette mesure de clémence mais 7 000 d'entre elles, considérant qu'elles avaient bien agi en collaborant avec les nazis, refusèrent d'exprimer des regrets ou des remords quelconques. Dès la libération, les nationalistes flamands s'employèrent à reconstruire un certain fondement politique sur base du malaise provoqué par les condamnations et les demandes d'amnistie. Ce n'est que dix ans après que leurs tentatives commencèrent à s'avérer fructueuses. En attendant, dans le milieu des collaborateurs, il fallait tout d'abord retrouver un semblant d'organisation qui ne provoquerait pas de réaction de la justice et de la police. Aussi, à la fin des années quarante, on créa à Anvers une association

indépendante du nom de Berkenkruis (la Croix de bouleau) dans le but d'établir une collaboration mutuelle avec les membres du Front de l'Est. En 1950, l'organisation prit sa forme définitive et fut rebaptisée Union Flamande des Anciens Combattants du Front de l'Est. Suite à des problèmes avec la justice, l'organisation fut dissoute et remplacée en 1953 par l'association Sint Maartensfonds, une organisation qui, bien que figurant sur la liste officielle des « mouvements subversifs », existe aujourd'hui encore et jouit d'une certaine notoriété par le biais de son journal. Officiellement et d'après ses statuts, cette organisation s'est donné comme tâche d'offrir une aide matérielle et morale aux personnes nécessiteuses. Cependant, vu les chahuts, les débats et les pélerinages qu'elle organise, il semblerait que son objectif principal soit plutôt d'honorer les nazis. Il en va de même pour le contenu du magazine Berkenkruis. En effet, Berkenkruis

fait étalage d'une haine virulente à l'égard des Juifs ainsi que d'une admiration sans bornes pour des nazis comme Klaus Barbie et Adolf Hitler. Par ailleurs, les personnes qui participent à l'élaboration du journal sont des collaborateurs notoires (condamnés) comme Ward Hermans, Jef François, Jan Vincx, Leo Poppe, etc. L'organisation opère également sous d'autres noms. En Wallonie, elle s'appelle « Les Bourguignons », à Gand « Vriendenkring Sneyssens » (Le Cercle des Amis de Sneyssens) et aux Pays Bas « Homo Sapiens ». Le SintMaartensfonds a également sa section en Argentine. Certaines figures célèbres du Vlaams Blok comme Filip Dewinter, Karel Dillen et Roeland Raes participent aux activités du Sint Maartensfonds et les soutiennent également. L'association Hertog Jan van Brabant (Duc Jean de Brabant) est la division brabançonne du Sint Maartensfonds. Ses

statuts prévoient : « de créer, à partir de ses affiliés, une communauté ayant comme règle de conduite aussi bien sur le plan matériel que moral de développer la camaraderie et les vraies valeurs que l'on avait commencé à protéger en 40 45 et que l'on a récemment rectifié à tort ». Dans Periodiek Contact, le magazine de l'association, l'auteur (invité) hollandais Jan Wakrl traduit les objectifs de l'organisation en ces termes : « Parce que le national socialisme signifie amour pour la race et la patrie... parce qu'à un moment le Führer Adolf Hitler voulut exalter la foi de millions de gens et les engager totalement à créer un monde germain meilleur, pour la sauvegarde de la race du Nord... C'est pourquoi, bien que je sois né après la guerre, j'ai choisi le Führer et son idéologie, le national socialisme. Le nouveau Führer arrivera, c'est certain, pas si nous, national socialistes, nous nous contentons d'espérer, mais seulement si nous y croyons et nous le

voulons de toutes nos forces... ». Dans le même magazine, on peut également lire que c'est par la faute des juifs que la Seconde Guerre mondiale a éclaté. Les années précédentes, l'association Hertog Jan van Brabant s'était contentée d'organiser des réunions pour ses affiliés, des réjouissances et des fêtes de printemps, de participer à des rassemblements organisés par d'autres associations comme le Sint Maartensfonds par exemple, et de faire acte de présence lors de commémorations diverses (à la mémoire d'August Borms et de Rudolf Hess entre autres). Il y a peu de temps encore, André van Hecke et Remi Leenaerts, tous deux têtes de liste du Vlaams Blok à Bruxelles, respectivement pour la Chambre et le Sénat, dirigeaient l'organisation. Enfin, il faut également citer le Broederband (la Fraternité), un organisme

assez modéré coordonnant des cercles d'amitié locaux composés d'anciens membres du VNV. Le Broederband a été fondé en 1956 par Arthur de Troyer et publie, depuis 1960, une revue du même nom dont la démarche est identique aux publications des organisations de même mouvance. Ses articles enflammés glorifient également la collaboration ou font souvent appel aux autorités pour demander l'amnistie des collaborateurs. En outre, on y trouve régulièrement des articles concernant des personnalités appartenant aux mouvements flamands prônant l'ordre nouveau, comme Verschaeve, Borms, van Severen et Tollenaere. Pendant les années qui ont suivi la libération et en attendant des jours meilleurs, les anciens membres du Verdinaso, du VNV, de De Vlag et de la Hitler Jugend (la Jeunesse hitlérienne) se regroupèrent dans différents mouvements de jeunesse, groupes de danse folklorique et organisations

culturelles. C'est ainsi qu'en 1944, Jef Vervaecke fonda à Bruxelles, avec l'aide du père Max Wildiers, le Zilvermeeuwtjes (les petites mouettes argentées), un mouvement de jeunesse qui « acceptait exclusivement les enfants noirs », selon leurs propres termes. Sous prétexte de développer une aide caritative pour les familles des collaborateurs dans le besoin, le mouvement recommençait en fait à transmettre aux jeunes les idéologies de l'ordre nouveau par le biais de cours d'éducation physique, de chant et de danse. En 1946, à Anvers, Karel Dillen et Wim de Roy fondèrent le Sint Arnoutvendel. Wim de Roy avait été, durant la Guerre, membre des Blauwvoetvendels. Le Sint Arnoutvendel reprit ni plus ni moins les anciens idéaux du VNV en mettant l'accent sur le principe d'autorité. Il y régnait une telle atmosphère empreinte d'austérité que même au sein du milieu de la collaboration, il finit par provoquer des

critiques, ce qui n'empêcha pas le tandem Dillen De Roy d'éditer au nom du Sint Arnoutvendel la revue Kampf, dont le titre se référait directement au Mein Kampf d'Hitler (en 1946, c'est à dire un an après la Guerre!). Le magazine critiquait sans ambages les procès de la répression et publiait également des demandes d'amnistie. Parallèlement, en 1946, à Anvers, Staf Vermeire créa le groupe Artevelde. L'idéologie était plus ou moins identique à celle du SintArnoutvendel. Dès le début, le Sint Arnoutvendel avait conçu son propre uniforme constitué d'un pantalon noir, d'une chemise bleue et d'une cravate orange. A partir de 1947, les mouvements de jeunesse qui étaient assez disséminés furent regroupés pour former le Jeugdverbond der Lage Landen (l’Union des Jeunes des Pays Bas, JLL). Ainsi que son nom l'indique, ce mouvement de jeunesse se rattachait à

l'ancienne tradition du VNV qui est le rassemblement des Pays Bas et de la Flandre en un Etat thiois basé sur une union solidariste corporatiste. De même, immédiatement après la Guerre, à Gand et à Bruges on vit apparaître des groupes de jeunes émanant du milieu de la collaboration. Leurs réunions, où étaient présents entre autres Rudolf van Moerkerke, Jaak de Meester et Mark Mares, ressemblaient plutôt à des assemblées secrètes où l'on discutait de la collaboration, du nationalisme flamand et de la répression. Ce sont eux qui, en 1947, fondèrent le magazine Vive le Gueux!, retitré en 1949 Blauwvoet. Les rédacteurs étaient Manu Ruys, Rudolf van Moerkerke, Jan Olsen, le Hollandais Bert van Blokland, etc. Lorsqu'en 1947, la revue devint le journal de ralliement du JLL, on y publia plus ouvertement encore les idéaux de

l'ordre nouveau et il devint alors évident que l'organisation avait décidé de prendre la même trajectoire idéologique que le Verdinaso. En 1949 d'ailleurs, un numéro spécial de Vive le Gueux! fut entièrement consacré à Joris van Severen. L'Union des jeunes était devenue une véritable structure militaire avec un code strict incluant un serment de fidélité envers Dieu, la Nation thioise et le JLL. On éveillait chez les jeunes une idéologie élitaire. Le principe d'autorité de l'aristocratie dont se réclamait le JLL déclarait que dans chaque peuple, chaque catégorie, les meilleurs et les plus forts moralement et socialement domineraient, pourvu qu'ils aient reçu une formation adéquate. Cette minorité de dirigeants naturels prendrait alors en toute responsabilité la charge des décisions sociales pour la masse. Beaucoup de gens voyaient d'un mauvais oeil les activités de cette nouvelle organisation de jeunesse. La presse toutes

tendances confondues, celle de gauche aussi bien que des journaux comme Le Soir par exemple, comparaient ces nouveaux mouvements à la Hitler Jugend et les parlementaires finirent par se sentir interpellés par la question. Il y eut même un attentat à la bombe perpétré dans les locaux du groupe Artevelde à Gand. Cependant, d'autres personnes estimaient que le JLL ne persévérait pas suffisamment dans l'optique de l'ordre nouveau. En 1949, un conflit idéologique éclata, provoquant le désistement d'une partie des organisations qui créèrent alors leur propre alliance : l'Algemeen Diets Jeugdverbond (ADJV, L'Union générale de la jeunesse thioise) et le Rodenbachvendel qui, pendant un temps publiera la revue Were di!. Après une concurrence qui dura quelques années, les différentes organisations de jeunesse émanant du milieu de la collaboration décidèrent finalement de rejoindre l'ADJV au début des années

cinquante. Cette alliance reprit à son compte les principes du VNV et recruta presque exclusivement ses membres dans les familles d'anciens collaborateurs. Les autres affiliés, quant à eux, obtenaient le statut spécial de membre secret. Parallèlement aux activités traditionnelles, on y organisait annuellement des cérémonies à la mémoire de Cyriel Verschaeve, August Borms et Theo Brouns ainsi que des soirées en l'honneur des soldats qui avaient combattu au Front. Au début des années cinquante, l'ADJV voulut, par l'intermédiaire d'Henk Schumacher, un ancien nazi hollandais, mettre sur pied une section néerlandaise. A l'époque de l'occupation, Schumacher avait été membre de la SS, du Mouvement National socialiste (NSB) et avait combattu au Front de l'Est. A sa libération en 1950, il avait envoyé des circulaires à ses anciens contacts dans le but de les regrouper, en vain. Ce n'est qu'en 1956 que Dick Andrée

fonda à La Haye la section néerlandaise de l'ADJV : de Prins Willem van Oranjegroep (l'organisation Prince Guillaume d'Orange). Dick Andrée était un ancien membre du Front Noir (Zwartfront) qui avait lui aussi combattu au Front de l'Est. Son organisation Prince Guillaume d'Orange était en fait le prélude à la création du Nationaal Onafhankelijk Jongeren Verbond (l'Union Nationale Indépendante des jeunes) et comptait, au moment de son rattachement à l'ADJV, 24 membres. Ce sont effectivement les mouvements de jeunesse qui ont donné une nouvelle impulsion à la politique du Verdinaso, du VNV et à l'idéologie nazie après la Deuxième Guerre mondiale, mais leur rayonnement et leurs effectifs étaient réduits. En effet, le nombre d'affiliés à l'ADJV n'a jamais dépassé le cap des 700. Très vite, dans le milieu de la collaboration, on parvint à la conclusion que si l'on voulait persuader politiquement le plus grand

nombre de gens possible, afin d'exiger l'amnistie pour les collaborateurs, il fallait à tout prix remettre sur pied un parti politique, un courant d'opinion auquel même les nationalistes flamands qui n'avaient pas collaboré, pourraient se rallier. Les deux groupes ayant en commun des sentiments anti-Belges et donc nationalistes, ils finiraient forcément par se retrouver.

1954: la Volksunie Retournons un instant à la période de l'après guerre et attardons nous sur 1954, une année phare pour les groupes nationalistes flamands. En effet, cette année là, des nationalistes flamands rassemblés autour de Frans van der Elst, un avocat bruxellois, ont fondé la Volksunie. Avant la création de la Volksunie, d'autres tentatives pour former un parti politique sur base du nationalisme flamand s'étaient avérées infructueuses. En 1949, la Vlaamse Concentratie (Concentration Flamande), dont Karel Dillen était un des militants, avait connu un échec électoral cuisant. La Vlaamse Concentratie était un parti luttant contre la répression de l'après guerre et qui n'avait à son programme politique qu'un seul point l'amnistie pour les anciens collaborateurs. Le parti avait tiré son nom du mouvement Vlaamse Concentratie, qui était l'appellation

de l'accord entre le VNV d'avant guerre et le parti catholique. Lors des élections parlementaires de 1949, le parti récolta 100 000 voix mais c'était insuffisant pour obtenir un siège. Dans son sillage, Bob Maes créa la première version du VMO (Vlaamse Militante Organisatie, plus tard rebaptisée Vlaamse Militanten Orde). De même, en 1949 toujours, Dillen, Herman Senaeve et Toon van Overstraeten, furent à la base de la création de la jong Nederlandse Gemeenschap (JNG) qui fonda en 1956 et à l'initiative de Dillen le magazine Dietsland Europa. Dès le début, les rédacteurs d'extrême droite du magazine se considérèrent comme les gardiens du nationalisme purificateur en Flandre. Dillen, pour sa part, avant de s'affilier au JNG, militait dans l'organisation d'extrême droite Sint Arnoutvendel à Anvers.

A la même époque, certaines personnalités avaient déjà essayé de fonder un parti politique portant le nom de Volksunie. Les initiateurs étaient Juul de Clercq, un ancien du Verdinaso, Willy van Hille (un magistrat gantois déchu), Herman Wagemans, Herman Todts et l'avocat Gilbert Claus. Ce parti embryonnaire se disait solidariste, rejetait le système parlementaire démocratique et était contre la répression. Il reçut l'appui de l'hebdomadaire Voorpost, lequel se fit l'écho de la réunion du 8 mai 1949 prévue dans la salle Gruter d'Anvers qui devait avoir la création de la Volksunie. Au début des années cinquante, Dillen, alors âgé de 25 ans à peine, entretenait de bonnes relations avec le Mouvement Social Européen (MSE), la première organisation néonazie internationale de l'après guerre alors dirigée par René Binet, Maurice Bardèche et Per Engdahl. En 1977, l'écrivain français Patrice

Chairoff a d'ailleurs publié une étude dans laquelle il dit que Karel Dillen était effectivement présent au congrès inaugurant le MSE à Malmö en mai 1951 : « Le bureau suédois du Nysvenska Rörelsen ayant été choisi comme centre européen de liaison, le Congrès décida la formation d'une Commission d'études, présidée par Per Engdahl, et composée de Karl Heinz Priester (RFA), Maurice Bardèche et Odette Moreau (France), Ernesto Massi (Italie), Manuel Ballesteros (Espagne), Roland Timmel et Wilhelm Landig (Autriche), Karel Dillen (Belgique) et enfin le lieutenant colonel Gayre of Gayre and Nigg (Grande Bretagne). » C'est ce groupe d'étude précisément qui formula la proposition de former un « mouvement à l'échelle européenne » et qui conduisit à la création du MSE. C'est du Mouvement Social Européen que découle le Nouvel Ordre Européen (NOE) dont le premier président était l'ancien colonel SS d'origine suisse Gaston Amaudruz et le théoricien René Binet, des personnalités que nous

rencontrerons plus tard dans le paysage idéologique de Karel Dillen. Comme il a été dit précédemment, Maurice Bardèche était également présent au Congrès de Malmö. Bardèche est l'auteur d'un des tout premiers livres révisionnistes, livre publié en 1947 sous le titre Nuremberg ou la terre promise. Selon Bardèche, les camps de concentration auraient été construits seulement après la Guerre par les juifs eux mêmes qui, pour les besoins de la cause, auraient utilisé des décors de cinéma provenant d'Hollywood. Cette « bible » du révisionnisme fut publiée en Flandre en 1952 dans une traduction néerlandaise de... Karel Dillen. Une autre revue du nom de Opstanding, éditée par Walter Bouchery, réunissait des membres du Verdinaso, des anciens du VNV et des nationalistes flamands que l'on retrouvera ensuite dans le

Mouvement Flamand et à la Volksunie. Cet hebdomadaire publiait en abondance les articles d'Henri Tarirez, alias Spartacus, un journaliste bruxellois qui fut condamné pour avoir collaboré avec les Allemands. A part Tanrez, d'autres personnes comme Filip de Pillecijn, Andries Bogaert, Leo Wouters, Toon van Overstraeten, Staf Verrept, Arthur et Hector de Bruyne et Karel Dillen écrivaient dans la revue Opstanding des articles prônant leur idéologie nationaliste de droite. En avril 1951, cet hebdomadaire publia sous la plume de Frans van der Elst une des premières grandes plaidoiries en faveur de l'amnistie. L'avocat anversois Walter Bouchery qui avait été condamné à mort par contumace fut acquitté en appel, au grand étonnement général. Il possédait une imprimerie, la « Luctor », et c'est lui qui édita, en 1947, le journal Wit en Zwart, en collaboration avec Frans van der Elst, Jaak van Waeg, Jos Custers (un ancien membre

du VNV), Ferdinand Brieven et Leo Picard. Ensuite, il y eut une crise de confiance au sein de la rédaction à l'égard de Bouchery et Wit en Zwart disparut. En 1949, Bouchery commença à publier un autre magazine, Opstanding. La plaidoirie en faveur de l'amnistie pour les collaborateurs, écrite par Frans van der Elst, dont il est fait mention ci dessus, était en fait le texte d'une conférence donnée par Van der Elst lors du « Paascongres der Vlaamse Jongeren » (le Congrès pascal de la Jeunesse Flamande, organisé par le « Nationaal Actiecomité » (NAC) (le Comité d'Action Nationale) dirigé par Wim Jorissen. Pendant quelques temps d'ailleurs, Karel Dillen et Toon van Overstraeten avaient fait partie de la direction du NAC. Avant que le Congrès de Pâques n'ait lieu, ils avaient quitté le NAC, estimant que les aspirations nationalistes flamandes n'entraient pas assez en ligne de compte dans les principes du comité qui pratiquait

une politique proche du Verdinaso. Après le Congrès, ils firent circuler une motion pour protester contre les « manipulations » durant ce Congrès. Durant quelques années, pour le moins mouvementées, les discussions concernant l'amnistie donnèrent lieu à des empoignades régulières entre les opposants et les partisans de cette mesure. En fait, la plupart des initiatives prises à l'époque par les nationalistes flamands échouèrent systématiquement. Le 20 septembre 1953, un groupe de jeunes d’Anvers organisa le « Vlaamse Nationale Landdag » (journée Nationale Flamande) dont les thèmes étaient « l'amnistie » et « le fédéralisme ». L’initiative venait de Karel Dillen, Bob Maes, Rudi van der Paal, Toon van Overstraeten, Bert Hermans, Dries Bombeke et Jan de Moor. Les organisateurs avaient pris soin de louer la salle Billard Palace mais à la dernière minute, le gérant leur refusa l'entrée. Parant au plus pressé, les participants décidèrent d'emménager au

Palais des Sports. Mais là, des membres de la résistance les attendaient. De violentes bagarres éclatèrent à l'entrée du Palais des Sports. Finalement, Frans van der Elst, Karel Dillen, Toon van Overstraeten et Herman Wagemans parvinrent à lire leurs discours, mais dans une salle pratiquement vide. Début 1954, Van der Elst, Frans Lambrechts, Gust Aernauts, le professeur Walter Couvreur et Wim Jorissen décidèrent de participer aux élections parlementaires conjointement avec les représentants de la Vlaamse Concentratie et du Boerenfront, sous la bannière d'un même parti appelé « Christelijke Vlaamse Volksunie » (Union Chrétienne du peuple flamand). Malgré les efforts réunis, seul Herman Wagemans fut élu sur la liste pour la Chambre à Anvers. Il fallut attendre le 21 novembre 1954 pour que le milieu de la collaboration

et le mouvement nationaliste flamand parviennent enfin à former une organisation politique durable. Ce jour là, dans le café Saint Michel à Bruxelles, une centaine de Flamands se mirent d'accord pour former un nouveau parti politique. Une fois de plus, on retrouvait à la base de ce projet Frans van der Elst, Walter Couvreur, Herman Wagemans, Wim Jorissen, Frans Lambrechts et Louis van Kerkhoven. Le 15 décembre à Anvers, les statuts de la Volksunie furent officiellement signés et, Lambrechts et van Kerkhoven ayant déjà quitté le navire, on retrouva à la tête du parti les sept personnes suivantes : Walter Couvreur, Frans van der Elst, Herman Wagemans, Rudi van der Paal, Wim Jorissen, René Proost et Ludo Sels. On avait soigneusement choisi chaque personne qui ferait partie de ce groupe. Bien que ce parti fût contre la répression, aucun de ses sept dirigeants n'avait été condamné après la Guerre.

Cependant, d'autres personnalités comme Ward Rolus, Bob Maes et Walter Rolus collaboraient dans l'ombre. Peu de temps après, d'autres personnalités rejoignirent la direction générale du parti. il s'agissait d'Adolf Cuypers (Anvers), Bob Maes (Zaventem), Victor Bouckaert (Roulers), Marcel Senesael (Hoogstade), Jan de Bondt (Dixmude), Richard van Leemputten (VeIzeke) et Hendrik Balthazar (Anvers). Après quelques hésitations malgré l'essouflement de l'organisation, ils étaient restés attachés à la Vlaamse Concentratie, Karel Dillen et Toon van Overstraeten décidèrent de rejoindre la Volksunie. Mais avant de s'engager à fond dans le parti, Dillen se fit fort de resserrer les liens qu'il entretenait avec le VMO qui, dès 1954, se mit à la disposition de la Volksunie. En réalité, Dillen est le véritable mentor politique du VMO. Ce n'est que quand il fut certain d'avoir des bases personnelles solides et qu'il eût développé son mensuel Dietsland

Europa que Dillen décida, en 1957, d'adhérer à la Volksunie. On lui proposa immédiatement le poste de président de la section Volksunie Jongeren d'Anvers. Trente ans plus tard, Frans van der Elst, explique les motivations qui animaient les fondateurs du parti : « Idéologiquement, nous fûmes totalement convaincus par l'idéologie, par le concept national flamand, nous avions été atteints dans notre sens de la justice parce que nous ressentions comme profondément injuste la répression et les préjudices qu'avait endurés le Peuple flamand dans l'Etat belge. Nous ne voulions et ne pouvions pas nous résigner à accepter la défaite du nationalisme flamand ou sa soumission par la répression. A nos yeux et parce que nous étions convaincus, il était clair que le nationalisme flamand n'avait rien perdu de sa valeur. Malgré le fait de la collaboration, l'idée qui avait animé tant de générations précédentes et qui nous était destinée, qui avait propulsé pendant plus

d'un siècle le Mouvement flamand, avait conservé son pouvoir d'attraction sur nous. D'après ce que je sais, aucun d'entre nous n'a jamais fait partie d'un parti politique traditionnel. En tous cas, en ce qui me concerne, la Volksunie est le premier parti politique auquel j'ai adhéré. Nous n'étions pas des dissidents, étant donné que nous n'avions fait partie d'aucun parti politique existant. Nous étions des nationalistes flamands ». Dans cette déclaration, van der Elst se contenta de mentionner la collaboration alors qu'à ses débuts, le parti avait fait du milieu des collaborateurs son groupe cible. La Volksunie est le seul parti qui, dès sa création en 1954, estima qu'il fallait à tout prix obtenir l'amnistie et la réhabilitation pour les collaborateurs. Il était par conséquent inévitable que les gens qui se considéraient comme les « victimes de la répression » se rallient à ce parti.

Anvers était en quelque sorte la capitale du parti, non seulement parce que les nationalistes flamands étaient quantitativement bien représentés dans la ville portuaire mais surtout parce que Rudi van der Paal, alors président du parti pour Anvers, possédait des talents d'organisateur hors pair. Au début, le parti reçut un appui financier particulier de la part de Robert Standaert, de Balgerhoeke, de Frans Wymeersch un industriel de Sint-Niklaas, et de Jules Dhondt. A cela, il faut également ajouter les bénéfices résultant du travail de collecte de fonds mene par des membres du Vlaamse Militanten Organisatie (VMO), une organisation qui dès le départ, avait offert ses services à la Volksunie. Sous la direction de Bob Maes, Wim Maes et Kamiel van Damme, le VMO installa à cette époque des sections de son organisation un peu partout en Belgique, à Anvers, Bruxelles, Gand, Bruges, Roulers et Alost, sections dont la Volksunie utilisait les services soit pour coller des affiches, soit pour assurer le maintien de l'ordre. L'uniforme porté par les

membres du VMO consistait en une chemise grise, un pantalon noir et une cravate noire. Son fonctionnement interne et la façon qu'il avait de déployer ses forces en public rappelaient de façon évidente le VNV, la Brigade Noire (Zwarte Brigade) et la milice du Verdinaso. Le comportement en public du VMO jeta de plus en plus le discrédit sur la Volksunie. En 1963, lorsque le VMO refusa de supprimer le port de l'uniforme et de cesser tout acte de violence, Frans van der Elst, le président de la Volksunie, décida de cesser officiellement toute collaboration avec l'organisation. Néanmoins, le VMO continua à travailler comme auparavant pour la Volksunie, pour assurer le service d'ordre et pour coller les affiches du parti. En attendant, le VMO avait commis pas mal d'exactions, son palmarès était bien fourni. La première Vlaamse Militanten Organisatie avait été fondée en 1949 par Bob Maes, qui devint par la suite sénateur Volksunie, et que la Vlaamse Concentratie

avait pris sous son aile. Dans les années cinquante, bien que Bob Maes demeurât le dirigeant officiel de l'organisation, c'est en fait son homonyme Wim Maes (sans lien familial avec le premier) qui contrôlait le VMO. Wim Maes avait été politiquement formé à l'Algemeen Vlaams Nationaal Jeugdverbond (AVNJ, Union Générale de la Jeunesse Nationale Flamande), la section des jeunes du VNV. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il avait été membre de la Dietse Militie Zwarte Brigade (la Brigade Noire), la division militaire de VNV. Il avait également pris part à la Fabriekswacht, ce qui lui avait valu après la guerre une condamnation à une peine d'emprisonnement de trois ans. A cette époque, beaucoup de gens considéraient la Vlaamse Concentratie et, plus tard la Volksunie, comme une réminiscence du nazisme et des courants politiques similaires de l'ordre nouveau. Jusque dans les années cinquante, leurs

réunions donnaient régulièrement lieu à des manifestations d'opposition qui sombraient parfois dans une extrême violence. Le but essentiel du VMO était de protéger ces réunions politiques. Officiellement du moins. A l'origine de la création du VMO, il était déjà clair que l'organisation n'avait pas comme seule tâche de protéger, ainsi qu'elle voulait bien le montrer. Le 14 décembre 1953, après seulement quatre années d'activités au sein du VMO, 16 militants de l'organisation se virent condamnés pour formation de milice, par une justice qui avait enfin fini par réaliser l'ampleur du danger. A l'origine de cette condamnation, on trouve l'intention de la direction du VMO de perturber violemment une fête organisée à Dixmude en l'honneur de la patrie. Le plan fut découvert un peu trop tôt et seules quelques centaines de membres et sympathisants du VMO furent arrêtés et placés en détention préventive. Bob Maes, quant à lui, fut maintenu deux mois en préventive.

En 1961, la tension au sein de la tête de la Volksunie était parvenue à son comble. En effet, cette année là, cinq parlementaires de la Volksunie furent élus. Il était donc grand temps pour le parti de s'assagir. Le 3 octobre, la rupture était officielle. Ce jour là, l'agence de presse Belga annonçait dans un communiqué que la Volksunie et le VMO avaient de commun accord rompu leurs relations. Officiellement, la Volksunie reprochait au VMO ses attitudes et son uniforme tandis que le VMO accusait le parti de ne pas avoir consulté sa base. Cependant, tant au sein de la Volksunie que du VMO, beaucoup s'interrogeaient sur les vraies raisons de cette séparation. Il était probable qu'à ce moment là, le VMO avait déjà été infiltré par des informateurs de la BSR. Peu après la séparation, les conséquences furent connues. En septembre 1963, le VMO avait mis au point un raid nocturne à Ostende, qui devait se dérouler peu de temps après le pélerinage

de l'Yser. En approchant de la plage, le commando du VMO qui était prêt à agir fut, à son grand étonnement, intercepté par la police qui devait donc être parfaitement au courant de ses projets. Dans la confusion qui s'ensuivit, quelques militants parvinrent finalement à Ostende à bord d'une camionnette et de six voitures. Là, ils recouvrirent des dizaines de façades et d'enseignes avec du goudron. Quelques uns d'entre eux furent arrêtés et 17 autres membres du VMO, dont Kamiel van Damme, Wim Verreycken, Xavier Buisseret et Wim Maes, furent poursuivis en justice et condamnés à payer de fortes amendes et des dommages et intérêts. Wim Maes fut en grande partie à l'origine de la radicalisation du VMO. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il avait fait partie de la Dietse Militie Zwarte Brigade et s'était retrouvé en prison à la libération. Au début des années soixante, il était secrétaire d'arrondissement pour la

Volksunie à Anvers. Selon ses propres dires, Wim Maes était capable de réunir à n'importe quel moment plus de cinq cent militants et en vingt quatre heures, il lui était même possible de rassembler 1 500 hommes. L'aile droite de la Volksunie aidait en fait le VMO. A l'initiative de Rudi van der Paal, Bert Raets et Rik Ballet, le « Steuncomité Aktie Oostende » (Comité de Soutien Action Ostende) fut créé. Ce comité proposa alors d'organiser des collectes de fonds avec l'aide du journal 't Pallieterke et d'envoyer des lettres de sollicitation afin de réunir la somme de 400 000 francs, dans le but d'aider les militants du VMO qui avaient été condamnés, ainsi que leur famille qui étaient dans le besoin. Cette proposition a été réitérée dans les années quatre vingt par le Vlaams Blok.

Il est peu probable que van der Elst, le président de la Volksunie, n'ait pas compris dès le début des années soixante le danger qui résidait dans de telles pratiques. De toute façon, le parti pouvait très bien se passer de son aile droite, de ses policiers infiltrés et de ses provocateurs déchus. Après le divorce entre la milice et le parti, Hector Goemans et Wim Maes qui depuis 1958 dirigeait officiellement le VMO, tentèrent à plusieurs reprises de pénétrer le parti via les Volksunie Militanten (VUM), le nouvel organisme de propagande, mais leurs tentatives échouèrent chaque fois. Le 12 juin 1971, le VMO première version (qui d'après les services de police n'avait jamais compté plus de 125 membres) successivement dirigé par Wim Maes (jusqu'à sa mort en 1968) et par Bob Maes, fut dissoute. En compensation des services rendus, Maes fut nommé sénateur Volksunie.

Le VMO, plaque tournante de l'extrême droite La dissolution du VMO ne signifiait pas pour autant la fin du nationalisme flamand d'extrême droite. Par ailleurs, le terme dissolution est un bien grand mot pour ce que représentait en fait la décision du 12 juin 1971. Officiellement, il avait été déclaré que la décision avait été prise suite aux problèmes internes causés par le changement à la tête du VMO. Les nouveaux dirigeants, pour leur part, étaient dans l'incapacité de faire face à certaines options. En réalité, Bob Maes n'était plus capable de tenir les rênes du pouvoir face à un groupe de gens gravitant autour de Bert Eriksson et qui progressaient fortement dans l'organisation. En décidant de dissoudre le VMO, Maes espérait tromper la police judiciaire avec qui, à partir de fin 1970, le VMO connaissait de sérieux problèmes. A l'époque en effet, des militants du VMO avaient agressé une équipe qui collait des

affiches pour le FDF à Laeken et cette agression coûta la vie à Jacques Georgin, un Bruxellois francophone. La police effectua alors une septantaine de perquisitions. Au même moment, le VMO connaissait d'autres gros ennuis suite aux procès intentés contre certains de ses activistes qui avaient participé aux violentes émeutes dans le parc de Stekene, où le 30 juin 1969, le VMO avait organisé une journée commémorative en l'honneur de SS morts au combat. Dans sa déclaration qui annonçait la dissolution officielle du mouvement, la direction expliqua qu'elle avait décidé de « ne plus exposer ses militants à l'intimidation policière ». Cependant, certains chefs de file du VMO n'avaient pas la moindre envie de baisser les bras. Parmi eux, il y avait notamment Bob Maes, Armand alias Bert Eriksson (membre de la Hitler Jugend dès 1943), Kamiel van Damme (ancien collabo, membre pour un temps du Vlaams Blok),

Piet Peeters (ex-Front de l’Est) et Luc Vermeulen (qui émigra à Were Di, fonda ensuite Voorpost et adhéra finalement à Protea). Le 2 juillet 1971, quelques semaines à peine après la dissolution du VMO, Piet Peeters et Bert Eriksson fondèrent le Vlaamse Militanten Organisatie nouvelle version. A partir de cet instant, le VMO se développa pour devenir une milice néonazie pure et dure. Officiellement toujours, le VMO n'avait plus rien à voir avec la Volksunie, toutefois il restait actif en marge du parti. A Anvers en particulier, le VMO continuait de soutenir les candidats de la Volksunie et se révéla être une équipe de colleurs d'affiches redoutable. Les paras du VMO (c'est à dire l'unité de combat de l'organisation) continuaient à mener des actions violentes, agrandissant ainsi le fossé des divergences entre la Volksunie et le VMO.

Entretemps, la Volksunie avait suivi de près et pris en compte le mouvement de démocratisation de mai 68. Ainsi, Daniel Deconinck, avocat bruxellois et député Volksunie, se mit à défendre une option flamingante social progressiste qui tendait plus vers le fédéralisme que vers le nationalisme. La mouvance de droite du parti n'accepta pas ce virage politique et exclut Deconinck ainsi que ses partisans. Plus tard, Deconinck adhérera au Brusselse Rode Leeuwen pour atterrir ensuite au Vlaams Volkspartij (VVP) dirigé par Lode Claes. L’avocat anversois Hugo Schiltz quant à lui, avait commencé sa progression au sein de la Volksunie, tandis que de plus en plus de figures progressistes, soutenues par les Volksunie Jongeren, passaient également à l'avant-plan; parmi eux, André de Beul, Maurits Coppieters et Nelly Maes. En mai 1972, ces derniers prirent part aux manifestations pour le Vietnam organisées

par OXFAM et le groupe de travail humanitaire X. A cause de son engagement, Nelly Maes en particulier dut affronter les brimades de l'aile droite du parti. Aujourd'hui encore, dans les publications du VMO et du Vlaams Blok, on la surnomme « Nelly la Rouge » (Rode Nelly). En outre, les radicaux de la Volksunie se disaient scandalisés par ce qu'ils appelaient la concupiscence du pouvoir au sein de la direction du parti. Ils considéraient que la Volksunie était devenue un parti d'agitation par rapport au CVP et ils estimaient que dans ces conditions, il valait mieux que le parti ne prenne aucune responsablité gouvernementale. Le fait qu'en 1965, le parti ait statutairement pris une voie pluraliste, se démarquant par la même occasion du prédicat « chrétien », n'était plus acceptable aux yeux de l'aile extrémiste du parti. En 1970, tout était clair pour Karel Dillen : la Volksunie était devenue un parti de gauche; il décida donc de démissionner

du parti et de son conseil. Les années suivantes, il s'engagea à nouveau à fond pour Were Di et son enfant spirituel, le magazine de Were Di, Dietsland Europa. De plus, comme il avait les mains libres, il put travailler d'arrache pied pour des organisations comme le VMO et plus tard, Voorpost et Protea. A partir de 1975, Dillen écrivit régulièrement des articles sous son propre nom dans Alarm et, entre 1975 et 76, il publia une biographie de Wim Maes, le dirigeant du VMO décédé en 1968, un livre dont on vanta les qualités dans Alarm pendant des mois et que Bert Eriksson s'empressa de vendre dans son café ODAL. Entretemps, la présence à la tête du VMO de Bert Eriksson fut remise en question. En 1973, un groupuscule de gens qui gravitaient autour de Xavier Buisseret, Siegfried Verbeke et Roeland Raes, décidèrent de passer à l'action et de prendre le pouvoir. Le groupe reprit la direction du conseil de rédaction d'Alarm et Xavier

Buisseret prit la tête des opérations. Ce renversement de pouvoir avait surtout une signification idéologique. Les nouveaux leaders se référaient à Karel Dillen et à son mouvement Were Di : Buisseret voulait faire du VMO une organisation fasciste antichrétienne et nationaliste flamande comme l'était Were Di. Lui-même accordait beaucoup d'importance aux démonstrations militaires et paramilitaires. En 1974, avec quelques dizaines d'autres membres du VMO, il suivit un entraînement dans un club paramilitaire situé à Moorsele. Lorsque Buisseret prit le pouvoir, il procéda également à une sorte d'épuration de l'organisation, excluant entre autres Piet Peeters. Bert Eriksson, quant à lui, fut autorisé à se faire membre. En 1977, ce dernier reprit la direction du VMO et Piet Peeters réintégra l'organisation. Ce changement à la tête de

l'organisation survint après une série d'incidents relatifs aux perpétuelles confrontations entre la police et le VMO. En couverture du numéro de mai 1977 d'Alarm, Karel Dillen put écrire un article traitant du fédéralisme, en guise de hors d'oeuvre comme on pourra le constater plus tard. Dans cet article, Dillen accusait les Belges francophones d'essayer de déraciner les Belges de régime linguistique différent et de commettre un « génocide spirituel ». Dans le numéro de juin 1977 d'Alarm, on publia sous la responsabilité de Xavier Buisseret, quelques directives à l'intention des militants : « D'après nous, il faut que les membres du VMO et tous les jeunes nationalistes radicaux cessent enfin de pratiquer cette espèce de scoutisme national flamand avec lequel ils pensent naïvement faire peur à leurs opposants... Nous devons absolument, et avec tous les moyens dont nous disposons, instaurer un climat de terreur, de danger et d'insécurité

pour les francophones du Brabant flamand (et ailleurs, au littoral, à Gand, à Courtrai, à Mol, etc), mais aussi pour les traîtres flamands, afin que l'envie leur passe de venir chercher la quiétude dans nos pâturages ». Pratiquement, cela signifiait : « Nous devons casser les fenêtres des villas avec des catapultes et des écrous, endommager ou détruire les propriétés et les autos (par exemple quand les gens sont partis en vacances), mettre le feu aux habitations privées et aux entreprises qui ont une influence francophone, détruire et saccager les institutions culturelles des 'franskiljons', détruire les équipements et les établissements occupés par les 'franskiljons' (l'électricité, le gaz, les liaisons routières, etc.), envoyer des lettres de menace, faire des appels téléphoniques intimidant, organiser des campagnes de dénigrement, pratiquer des enlèvements et maltraiter de diverses façons tous les 'franskiljons' qui détiennent le pouvoir (les politiciens, les commerçants, les fonctionnaires, les prêtres, etc.); il faut intimider les promoteurs

immobiliers, en sabotant par exemple leurs travaux de construction. Ce faisant, nous sommes conscients que nous créons une situation de guerre civile, mais en réalité, la guerre civile est déjà en place, puisque l'intégrité de notre territoire et de notre peuple est chaque jour un peu plus menacée ». Pour les milieux judiciaires, cette prose signifiait un appel au terrorisme. C'est pourquoi la section policière de la PJ d'Anvers décida d'entamer une enquête policière et ce, dans le plus grand secret. Il faut croire que les autorités judiciaires n'avaient pas été suffisamment discrètes. Apparemment la direction du VMO avait été informée de l'intérêt porté par la justice à son égard puisque Xavier Buisseret s'empressa de publier dans le numéro suivant d'Alarm un rectificatif dans lequel il déclare « se distancer des directives du mouvement », ce qui, durant les années suivantes, n'a pas empêché les militants du

VMO de transposer dans la pratique, aussi bien que dans le texte, les directives en question, au départ à l'encontre des francophones et plus tard aussi et surtout contre les anticonformistes, les immigrés, les libraires progressistes, les homosexuels,... Le rectificatif, ainsi nommé par Xavier Buisseret, se vit attribuer une conclusion très éloquente. Le dernier paragraphe du texte dit ceci : « Cependant, la valeur effective de telles actions est des plus incertaines et ce, certainement dans les conditions actuelles. En outre, de telles pratiques exposeraient les Flamands de Bruxelles à des représailles bien plus sévères, d'autant plus que les francophones disposent de dizaines de milliers d'alliés sur ce point il n'y a pas de doute, et des alliés bon marché : les travailleurs immigrés ». Comme par hasard, on pouvait lire juste à côté du rectificatif de Buisseret, un article écrit par Karel Dillen dans lequel ce dernier

exhortait les militants du VMO à continuer d'agir comme ils l'avaient fait jusque là, sans tenir aucunement compte de la calomnie ou de l'opposition auxquelles ils allaient être confrontés. En 1977, Buisseret et ses partisans quittèrent le VMO, laissant derrière eux une organisation et ses militants dans la déroute la plus totale. Par ailleurs, Buisseret avait emporté certains documents administratifs et le carnet d'adresses des abonnés d'Alarm. On trouvera une explication à ce geste un peu plus tard. Buisseret mit sur pied un nouveau magazine d'extrême droite, HARO. La plupart des anciens militants du VMO se répartirent dans les organisations Were Di et Voorpost. Dans le pavé des collaborateurs de HARO, on peut trouver les noms de Siegfried Verbeke, Rocland Raes, Herbert Verbeke, Peter Lambrechts, Lidwina van Onckelen, Bart Stevens et Prik, l'ancien dessinateur du VMO.

Dans le premier numéro de HARO, la direction expliqua que le magazine était le successeur spirituel d'Alarm et qu'il était indépendant de tout mouvement ou parti politique. La situation changea toutefois rapidement. Après quelques années, HARO disparut de la circulation tandis qu'Alarm, dont le rédacteur en chef était à présent Nand Verbeeck, un membre du VMO à Malines, continua de paraître. Dès le début, HARO étala un antisémitisme obscène, affirma que le journal d'Anne Frank était un faux et nia l'holocauste. HARO fut diffusé et vendu via le café ODAL d'Eriksson, sous la responsabilité de Voorpost et plus tard aussi via le service de propagande du Vlaams Blok. Buisseret, quant à lui, se retrouva deux jours après sa démission du VMO à la même table que Karel Dillen, qui lui confia alors le poste de chef de la propagande d'un parti de création récente, le Vlaams Nationale Partij (VNP). Lorsqu'Eriksson

dirigeait le VMO, Buisseret avait également occupé pendant quelques années le poste de chef de la propagande du VMO. De son côté, Dillen devint un collaborateur permanent auprès de HARO. Dillen collaborant au magazine, il fut vraisemblablement facile pour la rédaction d'HARO d'aller rechercher les anciens amis de Dillen qui appartenaient au Mouvement Social Européen (MSE) et au Nouvel Ordre Européen (NOE). HARO diffusa largement leurs textes foncièrement anti-Juifs, dans lesquels ils niaient le génocide commis sur les six millions de Juifs durant la Deuxième Guerre mondiale. Roeland Raes lui même analysa en détail dans HARO le travail de René Binet, le théoricien français du racisme qui était une ancienne relation de Karel Dillen et l'inspirateur du MSE et du NOE. Raes recommanda particulièrement le livre révisionniste intitulé Contribution à une éthique raciste, écrit par Binet et édité par NOE. HARO reprit également à son compte la diffusion de la traduction néerlandaise par

Karel Dillen du livre de Maurice Bardèche, Nuremberg ou la terre promise. Sous la direction de Buisseret et d'Eriksson, les actes de violence commis par le VMO s'intensifiaient, conduisant tout droit l'organisation à un procès pour formation de milice. Nous avons emprunté en partie le palmarès des actes de violence perpétrés par le VMO dans la liste dressée par nos propres soins et que l'on retrouve dans le livre De Barbaren Migranten en racisme in de Belgische politiek, publié en 1988 aux éditions EPO : Le 12 décembre 1978, deux membres du VMO, Jos de Jonghe et Werner van Steen, attentent à la vie du footballeur polonais Lubanski. Quatre coups de feu sont tirés. Lors de l'attentat, l'entraîneur Vacenovsky est blessé. Le 10 février 1979, une manifestation contre l'immigration organisée

par le VMO à Schilde se termine en bagarre générale avec la police. Le 15 avril 1979, le VMO, sous l'égide de Bert Eriksson, envahit les locaux de l'école francophone « Les Abeilles » à Mortsel. D'importants dégats matériels sont à déplorer. Le 12 mai 1979, trois militants du VMO incendient un café turc à Anvers, rue de Bréderode. En mai 1979, le VMO met le feu à une voiture appartenant à un Fouronnais francophone. En juin 1979, le VMO organise un camp d'entraînement militaire à Houffalize, une commune de Wallonie. En août 1979, le VMO suit un entraînement dans un camp militaire du groupe néonazi Hoffmann dans la région de Nuremberg.

Le même mois, lors d'un contrôle routier, des militants du VMO sont arrêtés pour transport illégal d'armes à feu. En organise Nisramont.

septembre 1979, le VMO un camp d'entraînement à

Le 29 septembre 1979, le VMO prend part à un entraînement dans un camp paramilitaire international à Nîmes, une ville du sud de la France. Le 21 octobre 1979, le VMO avec à sa tête Bert Eriksson, assiège la maison communale de Fourons et occupe le bâtiment. Le 22 octobre 1979, la police judiciaire de Termonde effectue une perquisition au domicile d'un des chefs du VMO, Leo Robbijns à Tamise, où elle trouve et confisque du matériel militaire ainsi qu'un fusil à lunette et un poignard SS. Le 13 janvier 1980, le VMO provoque des émeutes lors de l'inauguration de l'exposition « Kind en Apartheid »

(L'enfant et l'apartheid) organisée dans la salle des concerts à Bruges. Des fenêtres sont brisées et à la fin de l'inauguration, des bagarres éclatent entre le VMO et les forces de police. Le 2 février 1980, un commando composé de 7 membres du VMO attaque une librairie progressiste de Malines, « De Rode Mol ». L’intérieur du magasin est complètement saccagé et deux personnes présentes au moment de l'attaque sont blessées. Les auteurs sont arrêtés et condamnés à des peines de prison et à des amendes. (Les auteurs sont Rudolf Dosfel, Edward Hernie, Florent Mulder, Joost Pyck, Luc Dieudonné, Dirk Dockx et Johnny Massenhove.) Le même mois, Juul Brogniet, Johan Dijlst, Michel Cornelissen et Eric van der Keilen, tous militants du VMO, commettent un attentat à la grenade de gendarmerie au « Café des Sports » à Mouland. En mars 1980, le VMO attaque un bal organisé par d'anciens combattants. Lors

de l'attaque, quelques personnes sont blessées. Les coupables parviennent à s'échapper et ne seront pas poursuivis. Le 13 avril 1980, le VMO prend d'assaut le Beffroi de Bruges et blesse grièvement le carillonneur de la ville, Eugeen Uten. Lors du grand procès du VMO, seize militants seront poursuivis pour ce méfait. Le 20 avril 1980, un commando de quinze militants du VMO prend d'assaut une salle du Schoolmuseum à Gand, où se déroulait une exposition contre l'apartheid. Six visiteurs, dont un enfant de 10 ans et un autre de 8 ans, seront brutalisés. L'exposition sera en partie détruite. En octobre 1980, le VMO enlève Marc Nève et le maltraite. Bien que les auteurs de l'enlèvement soient connus et que la victime ait déposé plainte, personne ne sera inquiété Le même mois, une délégation du VMO qui avait convenu d'une réunion avec

le Ku Klux Klan aux Etats unis est expulsée du territoire américain. Le 4 octobre 1980, Voorpost, Were Di et le VMO organisent à Anvers une manifestation contre les immigrés, manifestation par ailleurs interdite. Le 15 novembre 1980, le VMO provoque des émeutes à Crainhem. Patrick Cooreman, un militant du VMO, est arrêté pour port d'arme illégal. Dans les années septante, Roger Spinnewyn, chef d'arrondissement à Bruges, et ses fils, Jim, John et Willy se retrouvent à l'avant scène du VMO. En 1960, Spinnewyn crée la section flamande occidentale du VMO et pendant des années, il participe sans exception à toutes les activités de l'organisation. D'un seul coup, en 1973, grâce à l'opération Brevier orchestrée par Eriksson ainsi que par son fils John et lui même, Spinnewyn devient une personnalité flamande célèbre.

Lors de l'opération Brevier, les trois hommes volèrent la dépouille du prêtre poète collabo Cyriel Verschaeve dont la tombe se trouvait dans un cimetière du Solbad Hall en Autriche et la transférèrent en Flandre. Grâce à leur exploit, Spinnewyn et ses fils furent autorisés par Eriksson à participer à l'organisation de toutes les activités importantes du VMO. L'attentat manqué contre la personne de José Happart en 1979, l'attaque de la Maison Communale de Fourons Saint Martin en 1979, l'attaque du Beffroi de Bruges en 1980, toutes ces opérations furent organisées et menées par Roger Spinnewyn ou l'un de ses fils. En 1975 et 1980, Spinnewyn se rendit également en Grande Bretagne et en Irlande du Nord pour participer à des entraînements dans des camps paramilitaires. En 1975, lors d'un entraînement dans un camp paramilitaire situé à Essex et organisé par les néonazis anglais de Column 88, Spinnewynn entraîna

les participants au maniement des explosifs. En 1980, on le retrouve également dans un camp d'entraînement de l'organisation protestante d'extrême droite Ulster Volunteer Force. Pendant quelques années, il fut également le représentant du VMO auprès du World Anti Communist League tandis que le Anti Kommunistisch Front, un mouvement créé en 1976 par le Front de la jeunesse, le Solidaristische Beweging et le VMO, établit son siège au domicile de Spinnewyn à Bruges. Par conséquent, nul ne s'étonnera que Roger Spinnewyn soit connu dans les milieux d'extrême droite pour avoir de nombreux contacts à l'étranger. C'est ainsi qu'en 1980 à Bruges, à la veille du pélerinage de l'Yser, il joua les hôtes avec Karel Dillen pour une communauté hétéroclite composée de personnes de tous bords : Friedhelm Busse et Michael Kuhnen (du VSBD d'Allemagne de l'Ouest), Mike Griffin et Tim Burrows (de la Ligue St-

George anglaise), Mark Frideriksen (du FANE, la Fédération d'Action Nationale Européenne, devenue les Nouveaux Faisceaux Européens en France), Harmt Marx (la deuxième figure de proue du groupe Hoffmann en Allemagne), G. Kohlen (qui trouva la mort dans l'attentat perpétré au Bierhalle de Munich) et le « nouveau philosophe » français Alain de Benoist. Roger Spinnewyn a exploité pendant des années le café De Rubenskelder, situé près de la grand place de Bruges, qui était en fait le local de réunion du NJSV, alors dirigé par Filip Dewinter et Frank Vanhecke. Dewinter était à l'époque surtout actif au sein de NJSV et Voorpost, mais il entretenait également de bons rapports avec le VMO. Quand en 1984, la VMO organisa une cérémonie commémorative sur la nouvelle tombe de Cyriel Verschaeve, Filip Dewinter, président national du NJSV, ainsi que Roger Spinnewyn firent tous deux une allocution. Roger Spinnewyn lut une lettre

du dirigeant du VMO Bert Eriksson qui se trouvait alors en prison. C'est du local du NJSV que partaient également les militants du VMO et du NJSV pour aller rendre des visites un peu particulières aux gens qui fréquentaient les cafés et les maisons de jeunes progressistes. Généralement, ces « rencontres » se soldaient par le saccage de l'établissement et pour certains, par un séjour à l'hôpital. Entretemps, Karel Dillen et le VMO continuaient d'entretenir d'excellents rapports. Cela se confirma le 28 octobre 1979 lors d'une cérémonie commémorative organisée par le VMO en l'honneur de Staf de Clercq, un ancien dirigeant du VNV, et sur la tombe même de ce dernier. Il avait été prévu que Bert Eriksson fasse un discours public à l'intention des personnes présentes à la commémoration, ce qui n'était pas vraiment possible puisqu'il était toujours en prison. C'est donc Karel Dillen qui parla à la place de Bert Eriksson. Dans son allocution,

Dillen fit l'éloge de la politique de collaboration du VNV et parla en ces termes de Bert Eriksson : « je suis fier et reconnaissant de pouvoir parler au nom d'un grand leader flamand comme Eriksson ». Depuis 1963, la Volksunie et le VMO n'avaient officiellement plus aucun contact entre eux mais, en réalité, ils eurent l'occasion de travailler ensemble à maintes reprises. Dans les années septante, il était courant que le VMO fasse du porte à porte ou colle des affiches électorales pour la Volksunie à Anvers. En 1974, la direction du VMO publia même un communiqué dans lequel elle proposa qu'en cas d'élections, tous les différends entre la Volksunie et le VMO soient mis de côté et que le « VMO fasse tout pour que la Flandre soit unanime derrière la Volksunie ». En outre, certains mandataires de la Volksunie comme Leo van de Weghe, Kamiel van Damme, Hector Goemans, Leo Wouters et Bert Hendrickx,

soutenaient de plus en plus activement le VMO. La situation dégénéra lorsque Hugo Schiltz, le président de la Volksunie de l'époque, déclara le 22 mai 1976 lors d'une interview accordée à l'hebdomadaire ZIE Magazine à propos du VMO : « ...une communauté folklorique absolument insignifiante ... mais on ne peut pas toujours empêcher les punaises de grimper aux murs ... D'ailleurs, on trouve partout des fous qui aiment jouer aux petits soldats et qui croient qu'ils sont des hommes parce qu'ils portent un ceinturon... ». Ces paroles atteignirent durement le VMO. Ce que Hugo Schiltz ajouta dans la même interview à propos du Partij van de Arbeid (le Parti du travail) appelé, à ce moment là, Amada : « ... vraisemblablement des jeunes gens conscients et généreux... » fut proprement insupportable aux yeux du VMO.

Aussi, l'organisation réagit elle violemment dans le numéro d'Alarm de septembre 1976 sous la plume de Karel Dillen qui, bien que ne faisant pas partie du VMO, condamna à tout jamais Hugo Schiltz comme hérétique et proclama haut et fort qu'il était prêt à porter lui même et avec fierté, le titre honorable de « punaise ». Dans le même numéro d'Alarm, le VMO recommanda à ses partisans d'infliger une correction à « la mafia de Schiltz » lors des prochaines élections communales. Sous la présidence d'Hugo Schiltz, les dissensions entre la Volksunie d'une part et le VMO et d'autres organisations d'extrême droite d'autre part, ne firent que s'aggraver. Schiltz, et avec lui d'autres cadres politiques mieux disposés à l'égard de la démocratie, progressèrent rapidement dans la hiérarchie du parti. En novembre 1973, Hugo Schiltz devint président du bureau politique du parti et un an plus tard, il succéda à Frans van der Elst à la direction

du parti. La disparition de van der Elst à la tête de la Volksunie provoqua la colère de la vieille garde et de la mouvance d'extrême droite du parti qui voyait en lui le garant de la « fermeté des principes » du programme et de la stratégie politique du parti. Par ailleurs, Hector Goemans et Bob Maes, qui avaient toujours soutenu le VMO, perdirent de leur influence sur la Volksunie si bien que les militants d'extrême droite du parti virent leur identité s'affaiblir de jour en jour sous la présidence d'Hugo Schiltz. Simultanément, l'électorat du parti s'érodait. A l'époque de van der Elst, pendant plus de ving ans, la Volksunie n'avait jamais connu de défaite électorale. Avec son nouveau président par contre, le parti perdit deux sièges à la Chambre en 1977 et six de plus en 1978 (avec une perte de 40 % des voix à Anvers). L'extrême droite en attribua évidemment la cause à la seule présence d'Hugo Schiltz à la tête du parti.

En réalité, la Volksunie avait commis l'erreur d'entrer dans le gouvernement Tindemans II et de ratifier le Pacte d'Egmont. Pour de nombreux nationalistes flamands, la signature du Pacte d'Egmont était un échec cuisant pour la Flandre. A l'époque où le Vlaams Blok faisait ses premiers pas dans la politique, le VMO traversait une des crises les plus graves de son existence; c'est à ce moment que l'on assista au « fameux » procès du VMO au cours duquel 109 militants d'extrême droite rendirent enfin compte de leurs actes devant un tribunal. Inévitablement, cela rejaillit sur le Vlaams blok qui, contre vents et marées, continuait à défendre le VMO. Par ailleurs, on pressentait un malaise au sein du VMO depuis quelques années déjà. A l'automne 1979, le 4 octobre exactement, l'hebdomadaire francophone Pour publia des photos des camps d'entraînement paramilitaires organisés par le VMO à La

Roche, dans les Ardennes, provoquant un véritable séisme dont les répercussions dépassèrent largement les milieux néonazis. L'affaire parvint même jusqu'au Conseil du Cabinet ministériel et Martens, Premier Ministre à l'époque, fit savoir qu'il chargerait le Collège du Procureur Général d'enquêter sérieusement sur cette sombre affaire. Le camp d'entraînement était situé dans les Ardennes et pourtant le dossier qui traitait l'affaire fut confié aux instances judicaires d'Anvers, sous prétexte que le quartier général du VMO était situé à Anvers, au café ODAL de Bert Eriksson. De ce fait, c'est le procureur général Verheyden qui fut chargé de l'affaire. Quelques années auparavant, Verheyden, qui entretenait des liens solides avec l'aile droite du CVP, avait été compromis dans une fâcheuse histoire alors qu'il était co fondateur du club pro apartheid Protea. Comme par hasard, Verheyden confia le dossier des camps d'entraînement au juge chargé d'enquête,

Alex van Coppenolle, un magistrat que l'on peut difficilement qualifier de citoyen irréprochable. En effet, pendant l'occupation, Alex van Coppenolle avait été membre du Dietsch Studenten Keurfront, une de ces nombreuses organisations partisanes de l'ordre nouveau pendant la guerre. Alex van Coppenolle est également le fils d'Adriaan van Coppenolle, le commandant en chef de la gendarmerie (pro nazie) pendant l'occupation. Pendant ses études à Anvers, il avait également été impliqué dans pas mal de bagarres de rue, en octobre 1953 notamment, contre les anciens résistants. A l'époque, les anciens détenus des camps de concentration et les anciens combattants réunis dans le Comité voor Beroep op het Land, protestaient contre le gouvernement qui avait décidé de gracier les plus grands collaborateurs (dont le bourreau du camp de Breendonck) condamnés auparavant. D'après des coupures de presse de 1953, van Coppenolle avait formé et armé un commando d'extrême droite qui s'en prenait régulièrement aux réunions de

protestation du Comité (notamment à Anvers et à Gand). Quelques années après ces méfaits, on retrouve Alex van Coppenolle dans l'aile droite de la Volksunie. Lors des élections parlementaires de 1959, van Coppenolle prit la troisième place en tête de liste de la Volksunie. Après les divulgations de Pour, le lendemain, Van Coppenolle rencontra Bert Eriksson et ils discutèrent pendant trois heures afin de trouver un terrain d'entente. Lors d'une conférence organisée par Van Coppenolle, on prétendit que les photos publiées dans Pour n'avaient pas été prises dans les Ardennes, mais en Allemagne, version largement répandue par Eriksson également. Ensuite, Van Coppenolle prétendit tout simplement que les photos étaient truquées et il délivra un mandat pour que l'on perquisitionne dans les locaux de Pour afin de retrouver des armes et des uniformes, ceci malgré le fait que le jour même de la publication des photos dans son

magazine, le rédacteur en chef de Pour se soit déclaré prêt à fournir à la justice toutes les preuves matérielles ainsi que les fameuses photos. Finalement, van Coppenolle dut se rendre à l'évidence : il dut reconnaître l'existence des fameux camps d'entraînement paramilitaires qui s'étaient déroulés en juin de la même année. Du reste, le 6 juin, Eriksson lui même l'avait raconté aux autorités judiciaires d'Anvers alors qu'il était interrogé dans le cadre d'une enquête relative à l'attentat perpétré par le VMO contre un café turc dans le quartier sud d'Anvers. Mais même sans les déclarations d'Eriksson, la magistrature d'Anvers aurait dû le savoir. En lisant Alarm, le mensuel du VMO, on pouvait constater que l'organisation était militairement structurée et qu'elle organisait régulièrement des camps d'entraînement. Les années précédentes, le VMO avait même publié dans Alarm des photos de ces camps. En admettant que les

autorités judiciaires n'aient pas attaché d'importance aux publications du VMO avant que Pour n'ait tiré la sonnette d'alarme en publiant les photos, on peut difficilement concéder qu'elles n'étaient pas (ou n'auraient pas pu être) informées des excès du VMO. L'organisation avait sans cesse maille à partir avec la police, la BSR et la justice, et on ne compte plus les nombreux procès intentés à ses membres (consécutifs aux émeutes dans les Fourons et à Stekene, aux bagarres déclenchées par la pièce de theâtre inspirée de la vie de Cyriel Verschaeve, aux échauffourées lors du pélerinage de l'Yser, aux messes données en français perturbées par leurs soins,...). En outre, le haut commandement de l'armée avait été informé par les services de renseignement militaires des aspects inquiétants du mouvement. Suite à ces informations, le commandement provincial de l'armée avait interdit à ses soldats l'accès aux cafés notoirement fréquentés par les

membres du VMO comme De Leeuw van Vlaanderen et ODAL à Anvers et l'auberge Bristol en Piraat à Turnhout, une décision dont Karel Dillen s'était plaint le 30 novembre 1980 auprès du Ministre de la justice de l'époque, Frank Swaelen. De plus, lors d'une conférence de presse donnée à l'occasion de la création de la pièce de théâtre relatant la vie de Verschaeve, Bert Eriksson proclama que dans un avenir très proche, le VMO emploierait les armes. De son côté, Xavier Buisseret, dans une interview accordée le 10 octobre 1974 au magazine Humo, déclara que le VMO avait prévu des entraînements paramilitaires pour ses membres, « mais que personne n'était obligé d'y participer ». Au vu de tout cela, il est clair qu'il faut rechercher ailleurs encore les motifs qui ont conduit certains magistrats à mal diriger l'enquête judiciaire.

L'existence des camps d'entraînement avait déjà provoqué pas mal de remous au sein de la classe politique. Simultanément, le Sénat belge interpellé (le 24 octobre 1979 exactement) par le sénateur Perin au sujet des milices privées et du fonctionnement des services de police, et qui avait eu à débattre de la question, décida le 13 mars 1980, de mettre en place une commission d'enquête parlementaire, suggérée par le sénateur socialiste Joz Wijninckx, qui traiterait aussi bien des problèmes posés par le maintien de l'ordre en général que du « respect et de l'application de la loi du 19 juillet 1934 relative à l'interdiction de formation de milices privées ». La commission parlementaire accéléra tant et si bien l'enquête que l'on put rapidement constituer un certain nombre de dossiers judiciaires pour qu'enfin le 19 janvier 1981, l'organisation VMO soit déclarée coupable d'avoir formé une milice privée illégale. Le 4 mai 1981, le tribunal de première instance d'Anvers jugea que, selon la loi de 1934, le

VMO constituait une milice privée dont l'appartenance était punissable par la loi. En conséquent, on prononça 101 condamnations à l'encontre des militants du VMO. Les dirigeants du VMO, dont Bert Eriksson, Roger Spinnewyn, Jef Gladiné, Flor Mulder, Ferdinand Verbeeck, Cesar Spitaels et Joost Pyck furent condamnés à des peines d'emprisonnement fermes et à des amendes sévères. La Cour d'Appel confirma la plupart des peines. Karel Dillen qui avait senti venir l'orage depuis longtemps, avait entretemps fondé en collaboration avec Leo Wouters l'association Stracke Noodfonds. Grâce à cette association, domiciliée à l'adresse privée de Dillen, des fonds furent récoltés afin de venir en aide aux militants du VMO qui avaient été condamnés. On attira les donateurs potentiels en disant que « beaucoup d'argent serait nécessaire maintenant que la troisième répression belge avait frappé plus fort encore et que des

dizaines de jeunes Flamands avaient été condamnés à des peines d'emprisonnement et à des amendes totalement délirantes ». Ce fonds d'aide doit son nom à Desideer Adolf Stracke, un père jésuite qui fut condamné pour « activisme » après la Première Guerre mondiale. Après la Seconde Guerre mondiale, le père Stracke fréquenta surtout les milieux d'extrême droite et il fut souvent invité à parler en public lors de cérémonies commémoratives en l'honneur de Wies Moens et Cyriel Verschaeve. Lorsqu'il mourut en février 1970, ce furent Arthur de Bruyne et Karel Dillen qui prononcèrent l'oraison funèbre. Filip Dewinter et Francis van den Eynde fondèrent à leur tour le comité Uilenspiegel qui allait protéger politiquement les militants du VMO condamnés. D'après ce comité, les condamnés étaient des « prisonniers politiques ». Dewinter et van den Eynde ne tenaient pas compte du fait que certains de

ces condamnés devaient effectivement purger leurs peines de prison à cause de leur passé criminel. Par exemple, Jan Vandecauter devait purger ses trois mois de prison parce que, par le passé, il avait déjà été condamné pour vol, attentat à la pudeur et viol avec violence sur la personne d'un enfant. Tous ces actes horribles commis par Vandecauter n'empêcha pas Dewinter de le considérer comme une victime de « la répression qui actuellement frappe durement le mouvement national de droite ... »

Avant le Vlaams Blok Il va de soi que le président de la Volksunie, Hugo Schiltz, n'était pas mécontent d'être débarrassé du VMO. Il en avait plus qu'assez de ses « belles mères », comme il les appelait familièrement. Et le VMO n'était pas la seule « belle mère » de la Volksunie. Were Di et Voorpost jouaient un rôle identique mais plus idéologique encore vis à vis de la Volksunie et, plus tard, du Vlaams Blok. En 1962, des nationalistes flamands créèrent à Anvers le Were Di, le Verbond van Nederlandse Werkgemeenschappen (l'Union des Groupes de Travail thiois), ces mêmes nationalistes qui, durant la guerre, avaient milité dans divers mouvements de jeunesse faisant partie d'organisations pour l'ordre nouveau. En fait, Were Di constitue le prolongement idéologique du DOB, le Dietse Opvoedkundige Beweging (le Mouvement Educatif thiois), qui avait été créé par Bert van Boghout et des partisans libéraux de

Wies Moens dans une école normale communale d'Anvers, deux ans avant que n'éclate la Seconde Guerre mondiale. Ce groupe relativement peu étendu appartenait aux « groupes populaires thiois ». Dès sa création, il publia son propre magazine Diets Opvoedkundig Tijdschrift (Magazine Educatif thiois), dont l'éditrice responsable était Rosa de Guchtenaere. Pour Van Boghout et certains de ses amis (Jef Cleyberg, Staf van Velthoven et Jos van den Eynde), le Dietse Opvoedkundige Beweging représentait la base de lancement idéale pour fonder le Dietse Arbeiders Partij (DAP), le Parti Ouvrier thiois, peu avant l'occupation allemande, par analogie avec le NSDAP. L'activité principale de ce petit parti anversois particulièrement efficace consistait à distribuer des tracts antibelges dans l'armée. A cause de l'occupation, l'enquête judiciaire relative à cette

propagande illégale fut contrecarrée et classée sans suite. Peu après la capitulation allemande, la plupart des membres du DOB et du DAP, dont Van Boghout par exemple, rejoignirent le NSBiV, le Nationaal Socialistische Beweging in Vlaanderen (Mouvement National Socialiste en Flandre) dirigé par Piet van Rossem. Le NSBiV entretenait des contacts étroits avec le NSB hollandais dirigé par Anton Mussert et collaborait inconditionnellement avec les Allemands. Le NSBiV disposait de sa propre unité de combat, le Weer Afdeling, dont faisait partie Van Boghout, et qui paradait dans un uniforme obligatoire brun et noir comportant l'insigne de la croix gammée. Son admiration pour le nazisme avait amené Van Boghout à être envoyé au Front de l'Est dans les rangs de la Waffen SS. Après la Libération, cette action le conduisit tout droit à la prison et il fut déchu de ses droits politiques.

Lorsqu'il fut libéré, il adhéra au Landelijke Vereniging van VlaamsNationale Ouders en Opvoeders (l'Union Nationale des Educateurs et des Parents nationaux flamands), un mouvement qui avait été fondé en 1962 par un groupe de personnes de l'entourage de Karel Delahaye, président de la Volksunie à Anvers, mouvement dont le nom deviendra assez rapidement: Verbond van Nederlandse Werkgemeenschappen Were Di. Were Di était la devise de l'Algemeen Diets Jeugdverbond (ADJV), fondée en 1949 par Staf Vermeire, Oswald Vandelanotte et Wilfried Aers. L'ADJV était le mouvement de jeunesse nationaliste le plus important de l'après guerre, militant pour la pensée néerlandaise. Le docteur Karel Delahaye appartenait à la mouvance de droite de la Volksunie. Il était également le premier président du lobby pro apartheid Algemeen Nederlands Suidafrikaans Vlaams Verbond (ANSAV) (Union Générale Hollande Flandre Afrique du Sud). Pendant la

Deuxième Guerre mondiale, Delahaye avait aussi été le chef du Dietse Blauwvoetvendels, le mouvement de jeunesse du VNV, pour la région d'Anvers. Le programme politique de Were Di reposait en particulier sur l'idéologie thioise, la demande d'amnistie totale et inconditionnelle et le maintien des valeurs flamandes traditionnelles (voir plus loin dans le chapitre). Were Di s'érigeait également en protecteur de la Volksunie et en défenseur d'une ligne politique nationaliste flamande pure et dure. L'organisation a bâti sa réputation grâce à la publication de son magazine mensuel Dietsland Europa que s'arrachent les milieux flamingants. A l'origine, Dietsland Europa était indépendant de Were Di. Pour des motifs évidemment idéologiques, le premier numéro de la revue parut le 1er mai 1956.

Dietsland Europa était alors publié par le Jong Nederlandse Gemeenschap (Communauté des jeunes thiois) alors dirigée par Karel Dillen, Herman Senaeve et Toon van Overstraeten. Durant la Seconde Guerre mondiale, Van Overstraeten, à peine âgé de seize ans, s'était engagé dans l'infanterie de la Légion flamande et était parti combattre au Front de l'Est. Plus tard, il devint sénateur Volksunie. Au début, c'étaient Karel Dillen, Fidelis de Volder, Herman Senaeve et A. Cuypers qui dirigèrent la rédaction de Dietsland Europa. En couverture de la revue, on pouvait lire la devise « Nec spe, nec metu » (sans espoir, sans peur). Le magazine avait comme objectif d'assurer la formation d'une génération de jeunes nationalistes. Ce n'est pas un hasard si Dietsland Europa a fait son apparition au moment des tribulations du mensuel Opstanding qui, entre 1949 et 1956, changea une demi douzaine de fois de nom et de propriétaire. A partir de 1953, Karel Dillen, Van Overstraeten et Senaeve avaient collaboré à Opstanding au nom de la Jong

Nederlandse Gemeenschap. Après que Opstanding, rebaptisé Volksbeweging (Mouvement Flamand), soit devenu pour un temps et sous la direction de Rudi van der Paal, à l'époque le responsable pour la propagande du parti, le magazine officieux de la Volksunie, la direction de la jong Nederlandse Gemeenschap prit la décision d'éditer son propre magazine. Les initiateurs du projet trouvaient leurs racines politiques dans les groupes prétendument populaires thiois. Ils se référaient ouvertement à l'organisation d'avant guerre jong Nederlandse Gemeenschap, chapeautée par Jeroom Leuridan, le chef du VNV pour la région, le berceau de l'ordre nouveau, où le VNV et le Verdinaso recrutaient leurs cadres. Le programme de base un peu confus de Dietsland Europa, dont l'écriture avait été confiée à Karel Dillen et qui était intitulé « Une réponse à nous même » (Antwoord aan onszelf), parut dans la première

publication de la revue mais entretenait un certain flou quant aux objectifs politiques du magazine. Cependant le contenu global de cette première publication révéla un peu mieux dans quel cadre de référence politique se situait la rédaction. Diestland Europa publia en couverture de son premier numéro un « poème » de Wies Moens, ancien membre du Verdinaso qui avait pris la fuite en Hollande. Dans les pages internes, il rendait hommage aux collaborateurs, comme le docteur August Borms et Theo Brouns, exécutés, tandis que Bert van Boghout, le futur dirigeant de Were Di, fit la promotion du livre Gefangener des Friedens, écrit par le célèbre nazi allemand Rudolf Hess. Au départ, Dietsland Europa dut affronter quelques problèmes qui mettaient en péril l'existence du magazine. Avant la fin de la première année de sa parution, le magazine se débattait déjà dans les ennuis financiers dont on attribua la cause à Fidelis

de Volder, le gestionnaire financier de la revue. Ce dernier fut donc exclu de l'organisation. Après une pause forcée, mais de courte durée, Dietsland Europa reparut grâce à la Jong Nederlandse Gemeenschap, à partir du 1er janvier 1957, et avec un tirage de quelques centaines d'exemplaires. A partir de mai 1962, on publia Ter Waarheid, un autre mensuel de même tendance que Dietsland Europa, publié par les éditions Oranje. Staf Vermeire était à l'époque le rédacteur en chef de ce magazine, de même qu'il était à la tête des éditions Oranje. Staf Vermeire était également le fondateur de la Fédération de Blauwvoet et membre du conseil de direction du jeugdverbond der Lage Landen (Union des Jeunes des Pays Bas) dont faisait également partie Karel Dillen. Le nom du magazine et la ligne politique rédactionnelle étaient inspirés du magazine portant le même nom, que Joris van Severen, chef du Verdinaso, avait lancé dans les années vingt.

Maurice Cailliau, Roeland Raes, Arthur de Bruyne (ancien membre du VNV et de la Vlaamse Concentratie), Herman Thuriaux et Staf Vermeire contribuèrent à la rédaction des treize numéros de Ter Waarheid. On arrêta la publication du magazine en 1963, suite à des problèmes financiers, mais en 1964 il fusionna avec Dietsland Europa, qui était lui aussi au bord de la faillite. La plupart des rédacteurs et des collaborateurs de Ter Waarheid rejoignirent Dietsland Europa et devinrent par la même occasion membres de Were Di. Etant donné que pas mal de rédacteurs de Dietsland Europa, tels que Karel Dillen, Roeland Raes, Bert van Boghout et Herman Thuriaux, faisaient également partie de Were Di, les deux équipes n'éprouvèrent aucune difficulté à travailler ensemble et en 1968, Dietsland Europa devint le magazine officiel de l'organisation Were Di. Malgré l'union de Ter Waarheid et Dietsland Europa et la fusion ultérieure avec

Were Di, le magazine se contentait de vivoter sur des bases financières particulièrement fragiles. En réalité, en reprenant Ter Waarheid, Were Di avait hérité d'un magazine totalement déficitaire. C'est grâce aux apports financiers de Karel Lacroix, le trésorier de Were Di qui prit en main la gestion du magazine, que les repreneurs de Ter Waarheid réussirent à faire survivre Dietsland Europa. Entre parenthèses, Lacroix membre du VNV, avait été condamné pour appartenance à la police SS. Après sa libération, il redevint imprimeur, cette fois à l'imprimerie WILDA d'Anvers, milita pour la Volksunie et siégea au conseil d'administration de deux associations, Were Di et Grensland. Jusqu’à la création du Vlaams Blok, en 1978, Were Di et Dietsland Europa furent dirigés par Karel Dillen, Roeland Raes, Bert van Boghout, Luc Vermeulen et Karel Lacroix. Le noyau central de ces groupes reçut l'aide et les conseils de Bob

Maes (Sénateur Volksunie et ancien du VMO), Alois Verbist (ancien résistant), Raf van Hulse (chef de la Hitler jugend en Flandre), Marleen Vandommele (KVHV), Jef Vercauteren (Centrum Traditie), Staf de Lie (Volksunie), Francis van den Eynde (alors Volksunie) et Kris Naudts (Alternatief). Le programme de Were Di, « Were Di Nationalistische Grondslagen » (« Were Di Fondements Nationalistes »), élaboré entre autres par Roeland Raes, Edwin Truyens et Bert van Boghout, est d'après ses auteurs basé sur les principes élaborés dans le passé par des gens comme Wies Moens, August Borms, Alain de Benoist, Cyriel Verschaeve et Joris van Severen. Ces principes englobent les concepts « d'inégalité » et « d'élite néerlandaise », ce dernier se référant aux personnes qui dirigeraient la Société. Naturellement, le terme d' « élite » concerne Were Di et l'expression « prendre la direction » signifie

l'accomplissement d'une révolution conservatrice. Logiquement, ce bouleversement politique aboutit à la création d'un Etat néerlandais qui se sépare politiquement de la Wallonie. Il est clair qu'il n'y a pas de place pour les immigrés dans cette Flandre utopique conçue par Were Di : « En ce qui concerne l'immigration, nous la concevons comme provisoire et naturellement notre préférence va aux Européens qui nous sont les plus proches ». Le pluralisme, le syndicalisme et le féminisme sont également exclus. Ainsi, on accorde une importance fondamentale à la famille nombreuse traditionnelle et aux valeurs qui s'y rattachent. Were Di rejette par conséquent l'avortement, projette la réinstauration de l'autorité masculine dans la famille et écarte toutes les nouvelles formes d'éducation.

En ce qui concerne le système social, Were Di plaide pour un solidarisme corporatif où l'influence des partis politiques et des syndicats serait fortement atténuée. En ce qui concerne la défense, l'organisation considère que l'OTAN est un mal nécessaire puisqu'il permet à l'Europe de se prémunir de la menace de la « dictature soviétique ». A long terme, l'Europe des Peuples deviendrait la troisième puissance mondiale, et développerait entre autre son propre arsenal nucléaire. Enfin, d'après Were Di, le Mouvement pour la Paix n'est rien d'autre qu'une cinquième colonne dirigée par Moscou. A propos de l'Afrique du Sud, l'organisation Were Di se déclare partisane de l'apartheid et du développement séparé, ce qu'elle définit comme étant « la seule politique humaine viable ». Fondamentalement, Were Di n'est pas opposée à l'aide au développement, cependant, l'organisation, considérant la

prépondérance de ses intérêts personnels, elle la limite en ces termes et de cette façon : « Dans tous les cas, l'aide doit servir à renforcer notre prestige personnel... Notre choix se portera de préférence sur les pays avec lesquels nous avons des liens historiques, linguistiques et culturels... Nous apporterons notre aide au développement de manière à renforcer notre poids politique et à relancer notre économie ». Were Di voudrait par, dessus tout interdire les syndicats. En attendant, l'organisation voudrait supprimer le contrôle pour les employeurs, dépolitiser les syndicats, réglementer sévèrement le droit de grève et protéger fermement le droit au travail. En exigeant que les syndicats soient astreints à obtenir la personnalité juridique et au contrôle de leurs finances, Were Di nage dans les eaux du patronat. Enfin, Were Di se demande s'il ne serait pas nécessaire d'infiltrer les syndicats en place et d'organiser des cellules « afin de former

localement des noyaux dotés de certains pouvoirs en attendant une réforme plus approfondie ». Were Di a également de nombreux contacts avec d'autres organisations d'extrême droite à l'étranger, bien que la collaboration ne fonctionne pas encore de manière structurée. C'est le cas pour De Schakel en Argentine; la Deutsche Volksunion, le Junges Forum et le NPD en Allemagne; la Nederlandse Volksunie et le Centrum partij aux Pays Bas; le Front National, les organisations de la Nouvelle Droite GRECE et la Nouvelle Ecole en France, et enfin le MSI italien. Were Di publie deux revues, Rebel et Dietsland Europa, participe à des manifestations et organise des soirées éducatives. Were Di participe principalement à de nombreuses manifestations contre les immigrés où elle côtoie alors le VMO et Voorpost. En ce qui concerne les soirées éducatives, Were Di

travaille de concert avec le KVHV, le Vereniging van Vlaams Nationale Auteurs (Union des Ecrivains Nationalistes Flamands), le Vlaams Nationale Debatclub, les Vlaamse Kulturele Producties (Productions Culturelles Flamandes), le Vlaams Blok et le Sint Maartensfonds. Au milieu des années septante, certains membres de Were Di se mirent à penser qu'à côté de la théorie et de l'éducation, il était à présent nécessaire d'agir. Ils considéraient que le VMO ne monopolisait pas suffisamment politiquement les manifestations de rue de l'extrême droite. C'est pourquoi, en 1967, un noyau de militants plus extrémistes (!) quittèrent l'organisation Were Di pour former le mouvement d'action Voorpost. Son nom se référait à l'hebdomadaire Voorpost qui fut publié pour la première fois dans les années vingt par le Vlaams Nationale Partij de Boudewijn Maes. Dans l'entre deux guerres, la première version de

cette organisation tenta vainement de regrouper les nationalistes flamands dans un même parti. En 1979, le groupe d'action devient une association, sous l'égide de Roeland Raes, Francis van den Eynde et Luc Vermeulen. Les autres personnes faisant partie de la direction étaient Lidwina van Onckelen, Liliane Baertsoen et Guido Verbelen. La déclaration de principes du Voorpost présentait pas mal de similitudes avec les principes de base de Were Di. Le groupe se déclarait antibelge, flamingant et solidariste, et voulait avant tout former des « militants éduqués ». Dans la pratique, cela signifiait que Voorpost représentait une concurrence sérieuse pour le VMO, tout en reprenant ses méthodes de combat. C'est ainsi que Voorpost établit ses propres camps d'entraînement dans les Ardennes et

participa également à des camps d'entraînement paramilitaires organisés notamment par des néonazis à Wittgenstein, en Allemagne. Par ailleurs, en 1985, Voorpost créa une « école de sport » dirigée par Rudy Simons où, chaque semaine, les militants avaient l'occasion d'améliorer leurs performances dans les sports de combats. Ces « cours entraînements » avaient lieu dans la salle de gymnastique d'une école catholique de Tamise. Enfin, et de manière à compléter la formation de ses militants, mais dans le domaine théorique cette fois, Voorpost constitua une sorte de service de vente par correspondance qui proposait des livres écrits par Karel Dillen, Robert Verbelen (un criminel de guerre), Robert Faurisson, Bert Peleman et Arthur de Bruyne. Ce service de vente dirigé par Ivo Collier, distribuait également le magazine HARO de Xavier Buisseret. Sur le terrain, Voorpost s'activait surtout et de manière très disciplinée à

exiger l'amnistie, participer aux manifestations pro sud africaines et contre l'immigration, et à perturber les réunions des Conseils communaux francophones des communes de la périphérie bruxelloise. Il n'est pas rare de voir Voorpost se comporter comme une milice privée et arborer alors son uniforme composé d'un pantalon bleu foncé, d'une chemise bleu clair, d'une cravate bleue ou noire et d'un ceinturon noir facultatif. Peu après être devenue une association, l'organisation Voorpost essaya de s'implanter également aux Pays Bas. La section hollandaise, dirigée par Broer Wiersma, ne remporta aucun succès. Le public néerlandais ne se passionnait pas pour les idéaux de Voorpost dont la plupart des activités étaient en outre interdites par les autorités. En 1983, Luc Vermeulen annonça que la section néerlandaise était « clandestine ». Mais la même année, Francis van den Eynde affirma lors d'une

conférence de presse qu'il existait sept sections de Voorpost en Hollande : à Bergen op Zoom, Amsterdam, Rotterdam, La Haye, Maastricht, Tilburg et Breda. Cependant, il semble que les actions de Voorpost aux Pays Bas étaient menées en majorité par les militants flamands et non par les militants néerlandais. Les Hollandais actifs, au Voorpost étaient surtout des membres du Centrum Partij. C'est entre autre le cas d'Ema Bouwman, Willem Jan Beaux et Marcel Ruter, alias Marcel Kruger. On y trouve également B.J. de Vries, membre du comité administratif du Koninkrijks Partij. Enfin, Rost van Tonningen, la « veuve noire » hollandaise entretenait également de bons contacts avec la direction de Voorpost. En 1981, l'organisation introduisit dans ses statuts une clause précisant qu'elle « luttait contre toute forme de racisme » mais il est clair que l'idéologie raciste est inhérente à Voorpost. Dans une interview accordée au journal hollandais Het

Algemeen Dagblad, son président Roeland Raes dit ceci : « En Hollande, le problème des Surinamiens et des travailleurs immigrés passe au premier plan, ce qui est logique puisque le problème est plus important chez vous que chez nous, bien que les Turcs et les Marocains commencent aussi à nous poser un problème. Ils se contentent de travailler pendant six mois pour toucher ensuite des allocations au chômage. Ils constituent des ghettos, les Nords Africains braquent des gens et agressent des femmes... Comme il y a beaucoup moins de Juifs ici qu'en Hollande, nous n'y accordons que très peu d'importance, mais ces derniers ayant leur propre état, Israël, c'est donc là qu'ils devraient se trouver ». Avec KOSMOS - Kring voor Onderzoek naar de Socialistische en Marxistische Ondermijning van onze Samenleving (en français : le Cercle d'Enquête sur l'Affaiblissement de notre Communauté par le Socialisme et le

Marxisme), Voorpost dispose de son propre service de renseignements sur les « dissidents » (un service de renseignements qui a évolué pour devenir ces dernières années une section du Vlaams Blok). KOSMOS est dirigé par Jan Stalmans, un pseudonyme pour Luc Dieudonné, un ancien du VMO qui, à l'époque, s'occupait déjà d'un service de renseignements et de fichiers politiques. Parfois, KOSMOS utilise le pseudonyme « les Ecuries d'Augias et Hérakles ». L’organisation rassemble en particulier des informations sur des personnes et des organisations de gauche. Tous ces renseignements sont surtout utilisés lors des campagnes de dénigrement contre les syndicats, les magasins du monde, le mouvement écologiste, le mouvement pacifiste, la BRT, les Broederlijk Delen, le parti socialiste, Agalev, les cliniques qui pratiquent l'avortement en Flandre, Charta 91... (nous reparlerons de ces services de renseignements particulièrement bien informés un peu plus loin dans ce livre).

En 1976, le Nationalistisch Studentenverbond (NSV, Union des Etudiants Nationalistes) existait déjà sous la forme d'une section d'extrême droite, le Katholiek Vlaams Hoog Studentenverbond (l'Union des Etudiants de l'Enseignement Supérieur Catholique, KVHV). En 1982, le Vlaamse Scholieren Aktiegroep (VSAG, le Groupe d'Action des Etudiants Flamands) se rallia au NVS pour former le Nationalistisch Jong Studenten Verbond (NJVS, Union Des Jeunes Etudiants Nationalistes). Pour former son propre programme, NSV NJSV emprunta la plupart de ses idées à Were Di : les organisations se déclaraient toutes deux solidaristes et nationalistes populaires, défendaient avec ardeur l'unification de la Flandre, des Pays Bas et de la Flandre francophone. Du reste, l'organisation NSV NJSV reprenaient les principes traditionnels de l'extrême droite : la lutte contre le communisme, le socialisme, le syndicalisme, l'immigration et l'avortement, pour l’apartheid, l'idéalisation du nazisme, etc.

Voici un exemple saisissant de l'idéologie de NSV NJSV, illustrée par une chanson de cette organisation Un «amadée», un Marocain (1) un «raller» et un nègre, (1) un communiste, un étranger nous les balançons tous dans leur cercueil un chien rouge avec une grande bouche nous l'envoyons par le fond… Un sale juif, un maoïste, un fransquillon et socialiste, la BRT et le syndicat nous les désossons jusqu'à la moëlle! et l'Unifac, cette salle baraque nous l'aplatissons complètement! (1) Note du traducteur: jeux de mots intraduisibles avec AMADA organisation stalinienne et le RAL: organisation trotskiste.

En matière de violence, la chanson NSV ne fait aucune exception. Quelques exemples

Têtes de rats quelle satisfaction, quelle satisfaction, de taper sur la tête des gauchistes (bis) O cabossée, o cabossée, o cabossée, la tête des gauchistes (sur laquelle nous tapons) A mort

(air: De Blauwvoet) ... on va faire un match (de foot), avec les têtes des gauchistes avec nos bottes et nos bottillons, on va s'amuser comme des fous le sang coule sur les routes, les rats se réfugient dans le caniveau mais ça on ne laissera pas faire tous ceux de gauche doivent mourir!

Il n'est pas étonnant que beaucoup de membres de NSV NJSV, stimulés par de tels chants vindicatifs, soient impliqués dans des manifestations particulièrement violentes. Il leur arrivait de participer également à des bagarres en dehors des villes universitaires. Ce fut le cas en 1981, dans un café d'immigrés à Saint Nicolas. Philippe van der Sande, Robert de Waele, Carl van den Ven et Pieter Huybrechts, tous membres de NSV NJSV, ont participé à cette attaque. Huybrechts était le président culturel de NSV et est également l'auteur de la chanson citée ci dessus. Les membres de NSV NJSV prirent part à d'autres attaques de cafés dits progressistes à Bruges en 1982 et en 1984; à chaque fois, il y eut des blessés. Ils ont envahi les locaux d'un établissement scolaire francophone, Les Abeilles, à Mortsel (en 1979), ils ont attenté à la vie d'un jeune Marocain à Saint Nicolas (en 1984) « parce que les Marocains doivent rentrer chez eux ».

A l'époque en question, Filip Dewinter était le président de NSV. Certains partisans de Dewinter ont fait leurs premières expériences politiques au sein de ce mouvement pour étudiants, notamment Edwin Truyens, Frank Vanhecke, Jürgen Ceder, Hans Carpels, Koen en Marijke Dillen et Jan Creve.

Le Vlaams Blok en chantier A la fin des années septante, Karel Dillen avait réussi à bâtir autour de lui un réseau composé d'individus et d'organisations possédant chacun des caractéristiques plus ignobles les unes que les autres : ils étaient parvenu à donner au nationalisme flamand une tournure militante, ils cultivaient une certaine nostalgie pour un passé bien précis, ils étalaient dans une mesure plus ou moins importante une forme de racisme et ils se situaient tous dans la mouvance d'extrême droite de l'éventail politique belge. A l'initiative du VMO, du TAK (Taal Aktie Komitee, Comité d'Action Linguistique) et de Were Di, dont Karel Dillen est l'inspirateur, les organisations d'extrême droite se regroupèrent dans le Vlaams Nationale Raad (VNR) (Conseil National Flamand) qui avait été fondé le 21

octobre 1973 lors de la première Journée Nationale Flamande (Vlaams Nationale Landdag). Karel Dillen, le président du VNR, avait englobé dans son mouvement un bon nombre d'organisations d'extrême droite et le VNR afficha son intention de contrecarrer la « pragmatisation en cours de la Volksunie ». Voici la composition exacte du VNR : L'ANZ Algemeen Nederlands Zangverbond (Union Générale de la Chanson Flamande) créée en 1948 dans le but de diffuser la chanson populaire flamande en organisant chaque année une fête de la chanson à Anvers. Cette fête donne lieu à un forum important au cours duquel les nationalistes flamands ont l'occasion de formuler leurs revendications. A partir de 1953, c'est Valeer Portier (administrateur du Vlaams Economisch Verbond l'Union Economique Flamande, co fondateur de l'organisation pro apartheid Protea et membre de l'Ordre du Prince) qui devient le dirigeant de l'ANZ. Depuis 1987, l'ANZ est dirigée par Richard Celis, un notaire anversois (ancien administrateur de KVHV, ex-rédacteur en chef de Ons Leven, éditeur du magazine flamingant

Studentenspiegel der Nederlanden, le Miroir des étudiants des Pays Bas, co fondateur de Protea et membre de l'Ordre du Prince). L'AVNJ, Algemeen Vlaams Nationaal Jeugdverbond (Fédération des Jeunes Nationalistes Flamands) : son nom vient d'un mouvement de jeunesse appartenant au VNV. En 1971, elle est réorganisée par Piet Vereecken. UAVNJ ne se défend pas d'avoir eu des liens avec le VMO et d'avoir entrenu des contact avec le Wiking Jugend, un mouvement néonazi en Allemagne. L'AVVS, Algemeen Verbond van Vlaamse Syndicaten (Fédération des Syndicats Flamands). Le BDAC, Borms Documentatie en Actiecentrum (Centre d'Action et de Documentation Borms), créé à Anvers, en l'honneur d'August Borms. Le BDAC est dirigé par Jan van Hoogten (ex-VNV et membre du premier AVNJ), Andries Bogaert (ex-Verdinaso, collaborateur au journal Opstanding) et Hugo Andries. Blauwvoetfederatie : créée en 1957, cette fédération concentra les différents mouvements de jeunesse pro thiois et était dirigée par

Maurits Cailliau, le père Bouquillon et Joris Sleurs. Braunsfonds, créé en 1964 par Arseen Ryckaert et le père Marcel Brauns (un membre important du service de propagande de l'ancienne Volksunie et qui a provoqué l'éviction de certains démocrates de la VU) De Schakel, un magazine fondé en 1954 par les collaborateurs qui avaient fui en Argentine.

Gebroeders Van Raemdonck Kring : une organisation nationaliste flamande ainsi dénommée d'après les frères Edward et Frans van Raemdonck, tous deux morts au combat le 26 mars 1917. Leurs dépouilles reposent dans la crypte de la tour de l'Yser. De jagerskapel : de la musique militaire nationaliste flamande et thioise dont l'origine remonte à la Fédération des Blauwvoetvendels. La jagerskapel avait son quartier général dans le café « De Roeland » à Gand. La KVHV, Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond (Fédération des Etudiants catholiques de l'Enseignement Supérieur Flamand) : la section gantoise uniquement.

Ernest van der Hallen Jeugdgemeenschap: créé en 1960 par Guido van der Meersch (VAKOE, Bormscomité, CAW). Une organisation thioise, traditionnaliste et religieuse qui travaillait de pair avec le VMO et l'Oostpriesterhulp (Aide aux prêtres en Europe de l'Est). TAK, Taalaktiekomitee (Comité d'Action Linguistique) : un groupe d'action nationaliste flamand fondé en 1972 par Piet de Pauw, un avocat gantois. Créé dans le but de s'attaquer à la violation des lois linguistiques à Bruxelles et à la frontière linguistique, le TAK, qui collaborait à bien des égards avec le VMO et Were Di, sombra bientôt dans les eaux troubles de l'extrême droite. Vlaams Kring Kontich. Vlaams Amnestiemilitanten (Militants flamands pour l'amnistie) : créé en 1973 par Kamiel van Damme (un ancien du Front de l'Est qui avait été condamné, membre du VMO). Vlaamse Vriendenkring d'Hoppe (Amicale Flamande d'Hoppe) : un groupe de militants ultra flamingants principalement actifs dans certaines communes à facilités de la frontière linguistique; appelé d'Hoppe à cause du hameau de Vloesberg, une commune wallonne située à la

frontière linguistique (c'est à Hoppe, en mars 1972, que le TAK commença à faire parler de lui). Le VMO, Vlaamse Militanten Orde (voir plus haut). Le VNJ, Vlaams Nationaal Jeugdverbond (Union des Etudiants nationalistes flamands) mouvement de jeunesse d'extrême droite fondé par Jaak van Haerenborgh (ex-AVNJ), qui travaille de concert avec le VMO, Voorpost et Were Di. La Vlaams Nationaal Legioen (Légion Nationale Flamande) : un groupe de radicaux qui, sous la houlette de W.F Haegemans, s'est séparée du VMO en 1970. De Volkskunstgroep Keere Weerom (Groupe Artistique Populaire Keere Weerom). Le Vriendenkring Voerstreek Limburg Overmaas (Amicale FouronsLimbourg Overmaas) : une association dirigée par Karel Dillen et Xavier Buisseret qui voulait compenser le manque de formation d'une « Flandre combattante » et l'absence de « soutien de la part du Mouvement thiois pour les Flamands qui luttaient dans les Fourons ».

Le Vriendenkring Zwartberg Limburg: créé lors d'une grève de mineurs en 1966 par des militants d'extrême droite, Désiré Dylst et Gerard Sleghers. Le Vlaams Volksbeweging Oudenaarde Ronse (Mouvement Populaire Flamand Audenarde Renaix). Le Verbond van Vlaamsnationale Weerstanders en Politieke Gevangenen (Fédération nationale flamande des Résistants et des Prisonniers Politiques) : une mini organisation au nom ronflant et qui est dirigée par le fameux résistant Alois Verbist. Were Di: voir le chapitre Were Di. Wim Maes werkgroep (Groupe d'Action Wim Maes). Une organisation apparemment autonome du VMO. De Groene Kapel.

Le Pacte d'Egmont Avant la signature du Pacte d’Egmont, le Conseil National Flamand était en sommeil. Dans ce milieu politique, plus que dans tout autre même concerné par ce changement politique, le pacte communautaire avait eu l'effet d'une bombe. La presse l'avait appelé le Pacte d’Egmont en référence au château du même nom où les partis de la majorité l'avaient élaboré. Il constitue en fait le début des réformes institutionnelles entreprises de commun accord entre le CVP, le BSP, la Volksunie, le PSC, le PSB et le FDE Cet accord réglait la formation, la constitution et les pouvoirs des Conseils communaux et régionaux de la Belgique, l'organisation financière de ces nouveaux organes, la création de sous régions et l'arrangement de Bruxelles en 19 communes.

Le Pacte fut critiqué parce que son application effective demeurait une entreprise très unitaire. Pratiquement 80 % des pouvoirs restaient du ressort du gouvernement national alors que les Conseils communaux et régionaux devaient se contenter de moyens financiers particulièrement faibles. En outre, cette structure mettait définitivement un terme au « fédéralisme à deux » que prônait depuis des décennies le Mouvement Flamand. A la place, on avait opté pour une réforme communautaire à trois. L'autre sujet de controverse était le fait que Bruxelles n'était plus une ville à régime linguistique double mais devenait dès lors une ville francophone néanmoins régie par une loi qui protégeait la minorité flamande. Statistiquement, les chiffres présentaient un écart et la Flandre se retrouva « désavantagée » dans la redistribution des finances. A côté de l'évaluation de la population et de la manipulation des chiffres, on a également manipulé d'autres critères, et ainsi

désavantagé la Flandre par rapport à la Wallonie. Lorsqu'on a scellé le pacte d'Egmont, on a commis plus que des fautes psychologiques et c'est en raison de ces erreurs que des décisions extra parlementaires furent prises notamment au sein des fonds culturels, du comité antiEgmont et du VNR tandis que les partisans du Pacte d'Egmont rencontraient une opposition dans tous les partis politiques flamands. L’aile droite de la Volksunie et les organisations d'extrême droite en Flandre ne digérèrent pas que la Volksunie soit devenue la complice du Pacte d'Egmont. Dès lors, il devenait clair que nombre des personnalités partageant le même état d'esprit se rassembleraient pour prendre certaines décisions. C'est ainsi que le 19 juin 1977, à l'initiative de Bert van Boghout, secrétaire

de Were Di, le VNR fonda le Vlaams Nationaal Directorium (VND) afin de renforcer et de coordonner l'opposition au sein de la Volksunie. Ce Directoire, où siégeaient entre autres les parlementaires de la Volksunie, Jef Valckeniers et Hector Goemans, était dirigé par les ténors de Were Di : Bert van Boghout, le père Marcel Brauns, Edwin Truyens et Jos Defreine. Le VND reçut également l'appui officiel d'anciens sénateurs Volksunie, Leo van de Weghe et Leo Wouters. La première proposition que fit le VND, et qui lui avait été suggérée une fois encore par Bert van Boghout, le 19 juin 1977, était d'établir une « liste de réhabilitation » pour les prochaines élections parlementaires, dans le but de contrecarrer les listes de la Volksunie sans toutefois former dans l'immédiat un nouveau parti politique. Dans cette optique, ils attendaient une initiative plus claire de la part de Lode Claes. Lode Claes avait déjà quitté la Volksunie en mai et avait commencé à sonder le terrain en vue de

créer un nouveau parti politique, un pas qu'il franchirait en novembre 1977 seulement. A cette époque le Directoire National Flamand publia une déclaration en sept points dont le contenu sera repris en fait dans le programme politique du Vlaams Blok et qui empruntait directement (parfois même littéralement) des paragraphes entiers à la déclaration de principes de Were Di. Celle ci visait à la création d'une Flandre indépendante. Son objectif final était l'unification néerlandaise; le rattachement des régions qui « avaient été volées » à la Flandre; le retour forcé des immigrés dans leurs pays d'origine; une opposition ferme à toute possibilité de légaliser l'avortement; l'aspiration à une politique sociale solidariste et la création d'une Europe des Peuples capable de se défendre. La lutte pour une amnistie générale et inconditionnelle constituait le cheval de bataille du programme.

L'objectif était que Marcel Brauns, en donnant des objectifs et en réunissant des gens au sein du Directoire, se fasse l'écho officiel et nécessaire du pélerinage de l'Yser. Mais ce plan échoua car le VND fut immédiatement court-circuité sur son flanc droit par Karel Dillen qui avait décidé que le moment était venu de former un nouveau parti politique nationaliste flamand « pur et ferme dans ses principes ». Le 1er octobre 1977, dans un café flamingant de Bruxelles, le Comte d'Egmont (!), Dillen créa avec quelques uns de ses alliés, le Vlaams Nationale Partij (VNP). Dès le début, Dillen put compter sur l'appui de partisans appartenant aux différents milieux d'extrême droite, ce qui permit au VNP de créer en très peu de temps une série de sections à Anvers (Mia Dujardin), dans le Brabant (Bert Hendrickx), le Limbourg (Renaat Vanheusden), la Flandre Orientale (Patrick Faveere) et la Flandre Occidentale (Kamiel van Damme).

A ses débuts, le parti était dirigé par une commission d'experts composée de Karel Dillen, Wim Verreycken (ancien membre du TAK et du VMO et co fondateur du Republikeinse Partij), Leo Wouters (ancien sénateur Volksunie) et Gerard Sleghers (ancien sénateur Volksunie du Limbourg et meneur de grèves). Xavier Buisseret fut nommé conseiller. Le 1er octobre 1977, lors de la présentation officielle du VNP à la presse, Dillen déclara que son parti était partisan du « solidarisme » et qu'il s'efforcerait d'obtenir l'autonomie politique complète de la Flandre en détruisant l'Etat belge. Dans les années trente, le solidarisme était la variante flamande néerlandaise des mouvements fascistes d'Italie, d'Allemagne et d'Espagne. Le nouveau parti obtint dès le début le soutien de gens issus du milieu de la collaboration et certaines personnalités, qui se considéraient comme les « victimes de la répression », militèrent activement au sein du VNP.

Dans le mensuel HARO, Dillen expliqua pourquoi selon lui on avait besoin du Vlaams Nationale Partij et attaqua violemment Schiltz et ses partisans : « Il est clair que nous devons en finir avec les défenseurs cupides du Pacte d’Egmont, les condamner et les achever impitoyablement. La Volksunie est en partie de mauvaise foi. Le comportement de ces gens est influencé par leurs propres intérêts, leurs ambitions, leurs envies de pouvoir et leur volonté d'obtenir des mandats, des charges et des postes. Seuls quelques uns d'entre eux pourraient ouvrir les yeux et reconnaître le nationalisme flamand. Quant aux autres, nous les évincerons purement et simplement ». Un mois plus tard, le 20 novembre 1977, l'ex-sénateur Volksunie Lode Claes organisait un congrès annonçant la création du Vlaamse Volkspartij (VVP). Claes s'était retiré de la Volksunie parce que lui aussi était mécontent de la ratification du Pacte

d'Egmont. Claes aurait préféré rejoindre Dillen mais finalement, il avait estimé que l'atmosphère nationaliste qui régnait autour de Dillen était par trop étouffante. Au début, le conseil du parti était composé de nombreux dissidents de la Volksunie. Daniel Deconinck, Els Grootaers, Piet Vrancken, Chris Broeckaert, Luc de Pesseroey, Willy van Mossevelde,... Lode Claes s'intéressait surtout aux cadres moyens et aux intellectuels pour développer son parti. C'est ainsi qu'il s'entoura au sein du VVP de gens comme l'avocat limbourgeois Margaret de Roo, le professeur anversois Detlev Hendrik Schmidt, le très controversé André Mertens (un ingénieur originaire de Flandre Occidentale), la sociologue de la culture Agnès Caers et l'avocat Raf Voordeckers. Différentes personnalités du milieu de la collaboration et du nationalisme flamand dominaient dans le VVP. Il y avait par exemple Frans de Hoon,

de Halle, Paul Hendrik Leenaards de Zoersel (tous deux condamnés pour collaboration), le peintre Marcel Notebaert (de Courtrai, co fondateur du Marnixring et président du comité consultatif du prix André Demedts), l'ancien colonial Karl van Marcke, l'ancien président du Mouvement Populaire Flamand de Flandre Occidentale Jo van Severen, le fédéraliste européen Walter Kunnen et Roeland Raes, ex-membre du VMO et membre de Were Di. Dès que les deux partis furent constitués, le VNP aussi bien que le VVP se mirent aussitôt à courtiser le VMO et Were Di. Néanmoins, le secrétaire de Were Di, Bert van Boghout, désireux de mettre immédiatement les choses au point, déclara au nom de son organisation et du VlaamsNationaal Directorium que les « tentatives menées de pair » par Lode Claes et Karel Dillen pourraient vraisemblablement aboutir à une fusion qui constituerait ainsi une « nouvelle alternative

nationale flamande ». Cependant, comme il n'était pas encore question que les deux partis fusionnent à ce moment là, Were Di et le VND proposèrent de tout mettre en oeuvre pour parvenir à un accord de collaboration. Une première tentative pour rapprocher les deux dirigeants du VNP et de VVP échoua lors d'une rencontre à Ostende. La seconde tentative fut plus heureuse. Le 19 mars 1978, durant un repas organisé par Bert van Boghout, Karel Dillen et Luc Pauwels, au nom du VNP, et Piet Bocken et le père Brauns, au nom du VVP, élaborèrent les bases d'un futur accord de collaboration. A la mi-avril de la même année, les négociateurs parvinrent à un accord de principe. Claes et Dillen sollicitèrent tous deux les faveurs d'Eriksson et s'efforçèrent d'intégrer le service d'ordre et des colleurs d'affiche du VMO dans la structure de leurs partis respectifs. Finalement, en 1978, Bert Eriksson réunit les deux nouveaux

présidents de partis à Anvers afin que ceuxci fassent connaître leurs partis respectifs aux militants du VMO. A première vue, cet arrangement ne rendit pas les choses faciles car Claes et Dillen analysaient et expliquaient chacun de leur côté pourquoi ils avaient besoin des services du VMO. L'opportunité leur fut également offerte de publier leur point de vue dans HARO et Alarm. Il devenait clair que tant Bert Eriksson que Xavier Buisseret, poussaient le VNP et le VVP à fusionner. Et c'est ce qui se produisit. En effet, les élections parlementaires du 17 décembre 1978 n'offraient aux deux partis pris séparément, aucune perspective réjouissante. Le cadre de chaque parti était à peine constitué et le VNP ainsi que le VVP disposaient ensemble d'une dizaine de sections à peine. Claes et Dillen, fortement soutenus par un certain nombre de membres du Vlaams Nationaal Directorium,

décidèrent de former un cartel électoral sous le nom de Vlaams Blok. Ils n'avaient pas choisi par hasard cette appelation. En effet, « Vlaams Blok » faisait directement référence au VNV d'avant guerre qui, en 1936, avait participé aux élections parlementaires sous le nom de Vlaamsch Blok. Aux élections communales de 1938, à Anvers, le VNV avait formé un cartel électoral avec l'Eenheidsfront (le Front Unitaire), une organisation poujadiste, et avait appelé ce cartel le Vlaamsch Volksblok. Toujours à Anvers, en 1939 cette fois, le VNV avait pris part aux élections parlementaires anticipées sous une dénomination choisie pour la circonstance, le Vlaamsch Nationaal Blok. En 1978, l'extrême droite se rallia en bloc au cartel formé par le Vlaams Blok tandis que le VMO, Were Di et Voorpost se chargèrent de faire une publicité en bonne et

due forme pour le Vlaams Blok et contre la Volksunie. De son côté, la Volksunie tenta de limiter les dégâts sur sa droite en plaçant par exemple des mandataires clairement opposés au Pacte d'Egmont, tels Bob Maes, Jef Valckeniers ou Hector Goemans, sur ses listes électorales. En opérant de la sorte, la Volksunie optait à nouveau pour une politique de droite. Dans le journal De Morgen, Nelly Maes déclare à propos de la situation de l'époque : « Nous avons dû faire de nombreux sacrifices pour affaiblir le Vlaams Blok durant la campagne électorale. Ainsi, nous avons été obligés de placer autant que possible les membres appartenant à l'ancien clan nationaliste sur nos listes. En conséquence, nous perdions à nouveau une partie du pouvoir d'attraction que nous étions parvenus à exercer sur les jeunes et les progressistes... Lorsque je suis entrée en politique en 1968, mon discours s'adressait clairement aux jeunes et aux gens de gauche

et nous n'éprouvions aucune difficulté à mettre cette politique en pratique. Mais avec l'arrivée du Vlaams Blok et la menace que ce parti représente, nous avons été forcés d'atténuer cette politique ». Apparemment, Lode Claes et le cadre du VVP disposaient des meilleurs atouts au sein du cartel du Vlaams Blok. Lors des nombreux meetings électoraux organisés par le Vlaams Blok, le VVP put introduire et présenter toute une série de personnalités célèbres dans le milieu nationaliste flamand, comme Lode Claes, Roeland Raes, Marcel Deprins, Luc Winkler, Serge Grysolle, les professeurs Chris van Summere et Detlev Schmidt ainsi que Chris Broeckaert. Par contre, la présentation de l'équipe du VNP se résumait à deux personnes seulement : Karel Dillen et Gerard Sleghers. Mais contre toute attente,

Lode Claes n'obtint aucun siège à Bruxelles alors que Karel Dillen par contre était élu à Anvers. On attribua la défaite électorale de Claes au fait qu'il avait dû affronter les ténors de la Volksunie comme Bob Maes et Jef Valckeniers. Au total, le Vlaams Blok obtint 76 051 voix, ce qui représentait alors deux pour cent des voix en Flandre. La Volksunie perdit six sièges à la Chambre, avec un recul de 3,02 %. Une fois de plus, le parti avait perdu des plumes lors de ces élections. Au total, la Volksunie perdit environ 170 000 voix, dont 64 000 rien que pour la province d'Anvers. A Anvers, berceau traditionnel de l'extrême droite, la Volksunie perdit, entre 1971 et 1978, environ 56 % de ses électeurs. Par contre, la province d'Anvers avec ses 26 000 électeurs, dont 20 000 pour l'arrondissement d'Anvers, représentait la plus grande victoire électorale du Vlaams Blok. Non sans une certaine fierté, José Wilmots écrivit dans Dietsland Europa que le Vlaams Blok avait

prit pied dans les arrondissements où, autrefois, la Vlaamse Concentratie avait été la plus forte : Anvers (3,6 %), Alost (3,1 %), Gand (2,1 %) et Bruxelles (1,9 %) La victoire personnelle de Karel Dillen traça également et définitivement la destinée du VNP et du VVP En juin 1979, Lode Claes participa encore aux élections européennes sur les listes du VVP mais obtint à peine 34 710 voix, ce qui représentait un échec électoral cuisant comparativement aux résultats obtenus l'année précédente par le Vlaams Blok. Après les élections européennes, Lode Claes se retira de la vie politique tandis qu'en juin 1979 Karel Dillen ralliait le VNP à l'aile nationaliste flamande radicale du VVP, dirigée par Roeland Raes et Edwin Truyens, pour constituer le Vlaams Blok en tant que parti. A partir de ce moment, le Vlaams Nationale Directorium n'avait plus

aucune raison d'exister et disparut donc de la scène politique. Au vu de leurs configurations respectives et de l'idéologie que leur avait conféré Were Di, le Vlaams Nationale Raad et le VND représentent obligatoirement et en toute logique les prédécesseurs du Vlaams Blok. De même, considérant que le Vlaams Blok fait office de parti d'agitation et qu'il a regroupe les organisations nationalistes flamandes d'extrême droite, on peut conclure en disant qu'il a véritablement repris le rôle du VNR. Au fur et à mesure que le Vlaams Blok se développa, Were Di perdit de son importance, tant au niveau de ses activités que de ce qu'il représentait. Néanmoins, l'organisation restait le « réservoir d'idées » du parti et conservait son rôle de protecteur de l'idéologie thioise du Vlaams Blok. Entretemps, Karel Dillen reçut un soutien massif de la part de ses nombreux et anciens fidèles de l'époque des catacombes comme Leo van de Weghe, Kamiel van

Damme, Frans van Elsacker, Jef Nagels, Bert Hendrickx et Leo Wouters, pour développer au mieux son parti. Le Vlaams Blok représentait une bénédiction pour Were Di, le TAK, le VMO et Voorpost. En 1980, la direction du VMO l'énonça en ces termes dans la revue Alarm : « Lorsque Karel Dillen se vit octroyer la direction du Vlaams Blok, cela signifia que les choses allaient changer pour les militants flamands. Un parti politique allait à nouveau nous soutenir ! C'est un avantage des plus estimables pour les groupes de militants. Là où chacun voulait devenir le Führer de sa propre petite organisation, Karel Dillen grâce à sa personnalité, a établi les ponts nécessaires. »

Après 1978 La progression électorale A ses débuts, le Vlaams Blok ne réalisa qu'un score assez mitigé aux élections. Cependant, à partir de 1978, le parti rassembla à toutes les élections législatives suffisamment de voix pour que Karel Dillen puisse garder le siège dont il s'était emparé au parlement. En 1978, le cartel électoral du Vlaams Blok formé par le VNP et le VVP avait réussi à rallier 76 000 voix. Il était donc prévisible que sans les partisans de Lode Claes, le Vlaams Blok devenu parti autonome, obtiendrait un score moins élevé lors des élections suivantes, qui représentaient en quelque sorte un test pour le Vlaams Blok. Et en effet, le parti subit une défaite électorale, toutefois limitée. Le Vlaams Blok qui avait obtenu 66 424 voix aux élections parlementaires de 1981, ne parvint à réunir que 28 344 voix lors des élections communales de 1982. Cette

situation peut s'expliquer par le fait qu'aux élections communales de 1982, le Vlaams Blok s'était inscrit dans 26 communes seulement et que la problématique soulevée par les Pactes d'Egmont et du Stuyvenberg n'y entrait pas vraiment en ligne de compte. En outre, on pouvait constater que le Vlaams Blok ayant obtenu 16 528 voix (ce qui représentait 5,2 % de l'électorat) à Anvers, maintenait sa position dans son bastion traditionnel et que deux de ses représentants (Eric Deleu et Piet Mulder) siégeaient dès lors au conseil communal. Le Vlaams Blok était parfaitement capable de consolider sa position et il le prouva lors des élections européennes qui se déroulèrent le 17 juin 1984. La liste du Vlaams Blok, conduite par Karel Dillen, réunit alors 73 222 voix. Ce n'était pas encore suffisant pour siéger au Parlement (il faut environ 220 000 voix pour obtenir un premier siège) mais c'était déjà le double des

voix qu'avait obtenu le VVP quatre ans auparavant. Lors des élections parlementaires du 13 octobre 1985, le Vlaams Blok gagna à nouveau modestement 85 330 voix pour sa liste à la Chambre et même 90 121 voix pour le Sénat. Dans l'arrondissement d'Anvers, le score était respectivement de 30 718 et 30 462 voix, ce qui représentait une augmentation de 1,4 % pour la Chambre et 1 % pour le Sénat. En fait, c'est en 1985 que pour la première fois le Vlaams Blok récolta les fruits de sa campagne contre l'immigration entamée en 1984 (dont on reparlera plus amplement dans la seconde partie du livre). C'est pendant les élections parlementaires du 13 décembre 1987 que le Vlaams Blok réalisa sa première « grande » percée électorale. En effet, il réussit alors le score de 116 594 voix pour la Chambre et

122 925 pour le Sénat. Cela ne représentait qu'une augmentation de respectivement 1,9 % et 2 %, mais dans la pratique, cela signifiait un gain pour le Vlaams Blok de quatre sièges provinciaux, de deux sièges à la Chambre et d'un siège au Sénat. Hugo Heus, Wim Verreycken, Veerle Dillen et Guido Eggermont pour la province, Gerolf Annemans et Filip Dewinter pour la Chambre et Karel Dillen pour le Sénat étaient aussi élus. Une fois de plus, c'est essentiellement à Anvers que le Vlaams Blok connut sa plus grande percée électorale. Non seulement tous les élus étaient des Anversois mais en plus, il s'avéra qu'un électeur sur dix avait voté pour le Vlaams Blok. Dès lors, on pouvait déjà prévoir qu'à court terme, le Vlaams Blok finirait par progresser rapidement en dehors d'Anvers. En 1987, le parti avec Karel Dillen en tête de liste, obtint à Anvers 10, 3 % des voix, à Malines 7,6 %, à Lierre

6,6 %, à Kapellen 6,3 %, à Kontich 5,9 % et à Saint Nicolas 4,9 %. Le résultat des élections communales du 9 octobre 1988 provoqua une vive émotion dans le monde politique en Flandre. En effet, le Vlaams Blok s'empara de 23 sièges communaux, dont 10 riens qu'à Anvers (alors que pour ces élections, le parti ne s'était présenté que dans 57 communes seulement). Au total, le Vlaams Blok réunit 99 432 voix, soit 5,3 % de l'électorat. C'est surtout dans les grandes agglomérations et les villes moyennes que le parti gagna ces élections. En plus des dix sièges acquis à Anvers (sur les 55 sièges), le Vlaams Blok obtint trois sièges à Malines, deux à Gand et Schoten, et un siège à Mortsel, Edegem, Lokeren, Saint Nicolas, Brasschaat et Lierre. Des 23 sièges acquis par le Vlaams Blok, quinze concernaient la province d'Anvers.

Les pourcentages obtenus dépassèrent toutes les prévisions, même celles faites par le Vlaams Blok lui même : 17,61 % à Anvers, 17,23 % à Berchem, 27,37 % à Borgerhout, 18,69 % à Deurne, 13,47 % à Ekeren, 16 % à Hoboken, 15,39 % à Merksem et 12,26 % à Wilrijk. Par rapport aux élections communales précédentes, le Vlaams Blok multipliait par six le nombre des voix obtenues à Anvers, et par cinq le nombre de sièges au Conseil communal. Le Vlaams Blok devint par la même occasion le troisième parti d'Anvers en talonnant de près le CVP qui, pour sa part avait à peine obtenu 500 voix de plus que le Vlaams Blok à Anversville. Dans les villes de l'arrondissement comme Borgerhout et Deurne, le Vlaams Blok avait un score supérieur à ceux du CVP, du PVV, de la Volksunie et d'Agalev. Par ailleurs, à Borgerhout, le Vlaams Blok battait

largement, avec ses 27,37 %, tous les autres partis. Depuis la fusion des communes, les Conseils communaux de la périphérie d'Anvers ont été remplacés par des Conseils consultatifs de la circonscription et les sièges ont été redistribués suivant les résultats électoraux. C'est ainsi que le Vlaams Blok a reçu huit mandats pour la circonscription d'Anvers, quatre pour celle de Merksem, trois pour Hoboken et Ekeren tandis qu'à Borgerhout, le parti détient la majorité des mandats. Depuis les élections communales de 1988, certains politiciens se sont encore appliqués à démontrer qu'il n'existait aucun lien entre la campagne électorale raciste menée par le Vlaams Blok et le score remporté par le parti dans les quartiers à forte densité de population immigrée. Mais quand on analyse plus attentivement les

résultats électoraux d'Anvers, force est de reconnaître qu'il y a bel et bien un rapport entre les deux faits. Dans le quartier d'immigrés de Seefhoek, le Vlaams Blok a remporté 28,5 % des voix, ce qui signifie qu'un électeur sur quatre a voté Vlaams Blok. A Hoboken, le pourcentage du Vlaams Blok est passé de 4 à 16 % et dans le quartier Saint Andries, de 5 à 21,72 %. Dans les autres quartiers à haute concentration immigrée Stuivenberg, Dam et Zuid le Vlaams Blok a respectivement obtenu 24, 22 et 21 % des voix. Par comparaison, le pourcentage moyen du Vlaams Blok était de 17,7 % et de 13,8 % dans le quartier anversois de Linkeroever. Cependant, le Vlaams Blok n'a pas uniquement gagné des voix dans les quartiers à forte densité de population immigrée où se posent des problèmes de cohabitation entre Belges et immigrés. Si l'on fait un bref survol du score obtenu par le Vlaams Blok, on se rend compte que dans

les villes moyennes et les communes comme Lierre, Saint Nicolas et Brasschaat, où vivent peu d'immigrés, le Vlaams Blok a obtenu un score bien plus important que son score moyen. D'autre part, il est vrai que dans le Limbourg, le score réalisé par le Vlaams Blok a un peu augmenté, mais les pourcentages restent marginaux : de 0,9 % à Riemst et Saint Trond, de 2,2 % à Genk et jusqu'à 3,5 % à Heusden Zolder. En Flandre Occidentale, ou vivent considérablement moins d'immigrés, la percée du Vlaams Blok reste également limitée. Les pourcentages vont de 0,9 % à Courtrai et Wevelgem, à 1,7 % à Roulers, jusqu'à 2,5 % à Ostende. C'est à Bruges que le Vlaams Blok a le plus progressé puisqu'il est passé de 0,4 % à 1,6 % c'est à dire 1.278 voix).

On peut comparer les résultats électoraux du Vlaams Blok à Bruxelles, où le parti s'est présenté dans 7 des 19 communes, avec ceux obtenus par les partis d'extrême droite francophones. Au total, dans les communes bruxelloises, le Vlaams Blok a remporté en octobre 1988, 4 150 voix, résultat inimaginable quelques années auparavant. Ce résultat n'est pas dû au hasard. En effet, pour l'électeur raciste, il y a à Bruxelles un choix que l'on ne trouve nulle part ailleurs. Afin de nous rendre compte du comportement électoral raciste dans la capitale, nous devons considérer dans leur ensemble les résultats obtenus par le Vlaams Blok et ceux du Front National, du Parti des Forces Nouvelles, du RN CDAS, de l'URD et de candidats comme Roger Nols et Henri Simonet. On arrive alors à la conclusion claire que dans certaines communes, le vote bruxellois pour les formations d'extrême droite oscille entre 3 et 9 %. C'est évidemment un résultat inférieur à celui obtenu par le Vlaams Blok à Anvers mais supérieur à la moyenne que ce même parti a

réalisé pour toute la Flandre. On peut donc en déduire que l'électeur bruxellois à exprimé un « vote raciste ». Et il est donc absolument faux de prétendre que le racisme n'a aucune chance à Bruxelles quand on examine la manière dont les bourgmestres pratiquent leur politique sociale. Du reste, les résultats du Vlaams Blok à Bruxelles peuvent soutenir la comparaison avec ceux obtenus par le cartel électoral flamand CVP PVVVU. A Molenbeek, ce cartel a totalisé 5,3 % des voix contre 3,3 % pour le Vlaams Blok. On peut ajouter que la participation du Vlaams Blok aux élections à Jette et à Berchem Sainte Agathe a selon toute vraisemblance, coûté un siège à la Volksunie dans chacune de ces deux communes. Enfin, alors que le nombre d'électeurs flamands votant à Bruxelles et dans les dix-neuf communes augmente à chaque élection, ces derniers votent en majorité Vlaams Blok, ce qui ne laisse rien présager de bon pour les partis

traditionnels. Il ne faudrait pas non plus attribuer cette victoire au seul fait de l'éternelle controverse Flamands-Wallons, mais plutôt à la campagne virulente déclenchée contre les immigres. Cette tendance s'est renforcée lors des élections européennes de 1989 où le score du Vlaams Blok a triplé par rapport aux élections européennes de 1984 : le nombre de voix est passé de 73 000 à 209 000, une progression de 2,1 % à 6,3 %. Karel Dillen quitta le Parlement belge pour entrer au Parlement européen. Il fut remplacé au Sénat par Wim Verreycken. En outre, il faut signaler que le parti avait progressé dans tous les arrondissements. Une fois de plus, c'est à Anvers que le Vlaams Blok a le plus progressé en passant de 4,3 % à 15,7 % des voix.

Le 24 novembre 1991 Aux élections parlementaires du 24 novembre 1991, le monde politique belge fut complètement ébranlé. 405.281 électeurs votèrent Vlaams Blok à la Chambre et 414.476 au Sénat. 10,4 % de l'électorat flamand vota Vlaams Blok (la liste du Sénat obtint 10,8 % des voix), ce qui représente une progression de 7,4 %. Le parti tripla son résultat de 1987. Grâce à cette victoire, le Vlaams Blok s'est attribué 18 sièges au Parlement (12 à la Chambre et 6 au Sénat), plus 36 sièges dans les cinq Conseils provinciaux flamands. L'épicentre de ce bouleversement politique se situe une fois de plus à Anvers. Un Anversois sur quatre a voté pour le Vlaams Blok. Avec 25,48 % des voix à la Chambre (25,56 % pour le Sénat et 29 % pour la province), le Vlaams Blok est devenu le parti le plus important du canton

d'Anvers. De plus, dans les arrondissements de Saint Nicolas et de Matines, le Vlaams Blok a réalisé un score bien plus élevé que sa moyenne flamande. Dans l'arrondissement bilingue de Bruxelles Hal Vilvorde, le Vlaams Blok, avec ses 47 542 voix (un gain de 4,4 %), fut également le grand vainqueur des élections et devenait par la même occasion dans cet arrondissement, le troisième parti flamand (après le CVP et le PVV). Au regard des prochaines élections communales de 1994, le résultat du 24 novembre 1991 revêt également une certaine importance pour la politique locale du pays. Dans la revue Casablanca (juillet 1992), Ruud Martens a publié une analyse dans laquelle il imagine le résultat des élections communales de 1994 en transposant le résultat des élections parlementaires à Anvers.

Il a émis deux hypothèses. Dans la première, il imagine que le parti ROSSEM participe aux élections et dans la seconde, il calcule le résultat électoral sans sa participation. Très optimiste, Ruud Martens suppose que le Vlaams Blok n'augmente pas son score en 1994. Les conclusions de son analyse sont peu encourageantes : si l'on transpose le résultat électoral de 1991 dans le Conseil communal anversois, alors la majorité SP CVP descend bien en dessous de la moitié plus 1 sièges (voir tableau 1). Si on ajoute le PVV, on arrive tout juste à la majorité ou juste en dessous. Et Martens de conclure : « Pour empêcher le Vlaams Blok d'avoir le pouvoir, on a donc besoin d'un quatrième partenaire pour former la majorité et l'expérience nous a appris qu'une coalition communale composée d'autant de partis ne fonctionne pas en Belgique ». Les élections communales de 1994 provoqueront très probablement encore un autre bouleversement politique à l'avantage

du Vlaams Blok. Début 1992, le Vlaams Blok a fait savoir que si en 1988, il s'était effectivement contenté de participer aux élections communales dans 57 communes seulement, en 1994, par contre, il comptait bien figurer sur les listes électorales de toutes les communes. En supposant logiquement qu'aux élections communales de 94, le Vlaams Blok parvienne à se faire représenter (probablement largement) dans les cantons où en 1991, il avait emporté plus de 10 % des voix, alors le tableau 2 nous donne une indication alarmante.

La nouvelle collaboration Le Vlaams Blok a progressé au détriment des autres partis politiques. Il faut dire que la plupart des partis ne sont pas encore parvenus à définir leur position et leur stratégie politique. A tel point que le Vlaams Blok est même arrivé à obtenir le soutien de certains partis traditionnels qui lui ont offert un numéro de liste national. Pour obtenir un numéro de liste national, un parti doit rassembler les signatures de cinq députés et cinq sénateurs. Pendant des années, seul Karel Dillen siègea au Parlement et le parti se vit donc contraint de solliciter des signatures auprès des membres d'autres partis. Au début, il n'y parvint pas. Le Vlaams Blok dut attendre les élections législatives de 1985 pour que quelques partis traditionnels s'exécutent enfin. Cette année là, le Vlaams Blok récolta les signatures des députés Jan Verniers (VU), Marcel Heughebaert (PVV), Dieudonné Horlait (PVV), Lucien van de Velde (PVV) et des

sénateurs Jozef Bosmans, Robert van Herck, Paul Vandermeulen, Marcel van Daele et Maurice van Houtte (tous PVV). Une partie de l'opinion publique désapprouva ce « parrainage » du Vlaams Blok par les politiciens traditionnels, qui faisait d'ailleurs en 1985 la une des journaux. C'est pourquoi, les autres partis qui, à leur tour, avaient décidé de soutenir le Vlaams Blok essayèrent d'agir le plus discrètement possible, Malgré les précautions prises, en novembre 1987, on découvrit que les députés CVP Eric van Rompuy et Renaat Peeters avaient donné leurs signatures au Vlaams Blok. Lors des élections législatives du 13 décembre 1987, le Vlaams Blok réalisa (surtout à Anvers) sa première grande progression. Les politiciens anversois des partis traditionnels estimèrent une fois de plus qu'ils devaient tenter quelque chose afin

d'arrêter la progression politique du Vlaams Blok. Une initiative prise par le Centre des Travailleurs Immigrés (CTI) chercha à réunir les représentants du SP, du CVP, du PVV, de la VU et d'Agalev. Le but était que les cinq partis signent un programme en cinq points concernant l'intégration des immigrés par lequel ils promettaient de ne pas mener de campagne injurieuse à leur encontre lors de la campagne électorale d'octobre 1988. Finalement, le projet échoua après le retrait de la Volksunie et du PVV, qui avaient d'abord accepté de ratifier le texte. Pourtant, tout le monde savait pertinemment bien qu'une fois encore le Vlaams Blok allait utiliser le thème de l'immigration pour capter des voix lors des élections communales de 1988 et que par conséquent, les partis traditionnels perdraient des voix à son profit. Début septembre, un sondage d'opinion que quelques uns avait tenu dans le plus grand secret, confirma cette menace. Alarmé par

cette enquête, le parlementaire SP Jos van Elewyck contacta le bourgmestre d'Anvers Bob Cools (SP), Jan Devroe (CVP), Hugo Schiltz Ward Beysen (PVV) et Mieke Vogels (Agalev). Van Elewyck leur proposa de publier le 8 octobre, un jour avant les élections, une annonce d'une page dans les éditions anversoises des journaux De Morgen, Gazet van Antwerpen, De Nieuwe Gazet et De Standaard, dans lequel ils appelleraient la population à ne pas émettre de vote raciste. Les six politiciens tombèrent d'accord et s'attachèrent ensuite à trouver une solution pour couvrir les frais de leur entreprise. Il était prévu de négocier un tarif préférentiel auprès des éditeurs qu'ils connaissaient et pour le reste, les « frais seraient répartis en fonction du nombre de voix que chaque parti récolterait aux élections du 9 octobre ».

Jos van Elewyck qui coordonnait toute l'opération, fit faire le projet de l'annonce et l'envoya ensuite le 21 septembre à ses collègues des autres partis en leur demandant de lui téléphoner leurs remarques éventuelles avant le 26 septembre. Le texte proposé par van Elewyck était rédigé en ces termes : « Le 9 octobre, vous allez décider qui va diriger Anvers. Chaque parti vous a présenté son programme. Vous choisissez c'est cela la démocratie. Mais ensemble nous vous demandons : n'élisez pas des racistes et ne jetez pas votre bulletin de vote ! ». Sur cette annonce devaient figurer en guise de signature les logos et les numéros de liste du CVP, d'Agalev, du PVV, de la Volksunie et du SR En fait, cette annonce ne parut jamais. Gerard Bergers, le dirigeant de la VU qui siégeait au Conseil communal à Anvers (et non Hugo Schiltz qui jusque là avait négocié au nom de son parti) fit savoir

à van Elewyck que son parti n'approuvait pas entièrement cette action, Pratiquement au même moment, le conseiller communal PVV Edward Beysen téléphona à van Elewyck pour lui signifier que les libéraux eux aussi se désistaient. Lorsqu'à l'époque, informés de ce projet avorté, nous avons contacté les politiciens concernés, la plupart d'entre eux réagirent très nerveusement. Ils savaient que le Vlaams Blok allait s'emparer d'au moins cinq sièges au Conseil communal d'Anvers (en réalité, ils en obtinrent dix) et ils ne savaient pas comment riposter. Jos van Elewyck : « Ce n'est pas normal. D'ailleurs, je ne comprends pas comment vous êtes au courant de ce projet et du contenu de ma correspondance. Nous avions convenu que le projet resterait secret et qu'au cas où l'action n'aboutirait pas, personne ne serait ennuyé. Je ne veux rien dire à ce propos. Puisque vous êtes si bien informés, pourquoi n'allez vous pas plutôt interroger ceux qui se sont désistés ».

Gerard Bergers (VU) : « Nous avons discuté de la proposition de van Elewyck à la Volksunie, aussi bien dans la section du parti qu'avec les vingt responsables de notre collège politique. Personne n'était pour le projet. Quant à moi, je n'ai jamais vu ce projet. Van Elewyck l'a probablement confié à Hugo Schiltz qui ne l'a pas transmis. Cet homme est fort occupé, vous savez. D'autre part, ça ne fait aucune différence. Après les élections parlementaires de décembre 1987, et à l'invitation d'Agalev, nous en avons vaguement discuté et échangé nos idées. Nous sommes d'avis qu'il n'est pas bon d'isoler un parti. Plus nous attaquerons le Vlaams Blok, plus ce parti y gagnera. je reconnais que c'est purement machiavélique, mais c'est la réalité. Lorsque van Elewyck a proposé cette campagne publicitaire, les membres du parti et moi même nous nous sommes concertés, et ensuite je lui ai parlé comme je vous parle aujourd'hui ». (Quelques membres de la VU à Anvers que nous avons contactés nous ont déclaré qu'ils n'avaient jamais eu vent de ce projet et qu'on

n'avait jamais soumis la question aux instances du parti.) Selon Bergers : « Si l'on avait ignoré le Vlaams Blok, on n'en serait pas. arrivé là. La presse, la gauche minoritaire, Agalev, Gastvrij Anvers, l'AFF, personne n'a cessé de leur faire une publicité négative, on a même été jusqu'à organiser des manifestations contre le Vlaams Blok. On a polarisé toute l'attention de l'opinion publique sur le Vlaams Blok et donc, inévitablement, celui ci en a tiré profit ». Mieke Vogels (Agalev) : « Notre position a toujours été claire. Nous sommes résolus à nous battre pour les immigrés et contre le racisme. Lorsque Van Elewyck nous a proposé de mener conjointement une campagne de publicité, nous avons accepté. Mais cette action nous posait un problème sur le plan financier. Nos caisses étaient vides et par conséquent, nous n'étions pas en mesure de contribuer financièrement et dans l'immédiat à cette action. Nous avons proposé de payer notre quote part en deux

ou trois fois, Van Elewyck n'y voyait pas d'inconvénient. Je ne comprends pas l'attitude de la Volksunie et des libéraux. je présume qu'ils ont eu peur de leur propre base et qu'ils ont donc décidé de commun accord de ne pas participer à cette action. L’avenir ne leur a pas donné raison ». Edward Beysen (PVV) : « Si van Elewyck dit qu'il y a eu accord, alors c'est un wishful thinking. Nous étions prêts à collaborer dans une campagne d'information au sujet des problèmes rencontrés dans la région d'Anvers. Mais ce que van Elewyck proposait, c'était un pamphlet. En outre, il faut être naïf pour croire qu'une seule annonce va modifier l'attitude électorale des Anversois. D'autre part, le succès du Vlaams Blok constitue en fait un avertissement. Puisque les responsables n'ont pas voulu prêter attention aux problèmes des Anversois, ces derniers ont dit : allez vous faire voir! Cependant, même à Anvers, les gens ont été profondément bouleversés par

le résultat des élections. S'il était possible de refaire les élections, le score du Vlaams Blok serait assurément moins élevé ». (L’histoire donnera tort à Edward Beysen). Début janvier 1989, avant que le nouveau Conseil communal soit installé, les dix membres du Vlaams Blok inclus, les autres partis n'avaient pas encore réussi à accorder leurs violons. Lorsque les journalistes de De Morgen interrogèrent tour à tour les conseillers afin de mieux cerner leur attitude vis à vis des nouveaux membres du Vlaams Blok, ils notèrent des réponses assez diverses comme : « accorder un crédit et attendre » (Agalev) , « dans la mesure du possible, travailler ensemble »(VU), « essayer de les isoler le plus possible »(PVV), ou encore « il faut mettre la balle dans le camp des dix qui ont été choisis »(SP).

Si les autres partis hésitaient tant, c'est qu'ils savaient pertinemment bien qu'ils étaient tous plus ou moins dépendants du Vlaams Blok en ce qui concernait la distribution des mandats administratifs pour les intercommunales et l'Openbaar Centrum voor Maatschappelijk Welzijn (OCMW) le Centre Public d'Aide Sociale (CPAS). Les querelles incessantes concernant les attributions des sièges au CPAS reflétaient exactement l'attitude ambiguë des autres partis par rapport à une éventuelle collaboration avec le Vlaams Blok. Le partage de ces fonctions donne traditionnellement lieu à des tractations extrêmement compliquées. Par exemple : « Donne moi donc ce mandat bien payé dans la société de télédistribution et je te refilerai deux mandats moins lucratifs dans le logement social et alors nous donnerons le mandat de monsieur X, qui prend sa retraite, à quelqu'un d'un parti de l'opposition qui se tiendra ainsi tranquille ».

Quinze membres siègent au conseil du CPAS. Ces personnes sont choisies par les conseillers communaux, qui disposent chacun de 8 voix. Pour être élu, il faut obtenir 28 voix au moins. Le SP disposait donc avec ses 17 membres de 136 voix, autrement dit de quatre sièges et d'un surplus de 24 voix. Les 12 conseillers du CVP disposaient quant à eux de 96 voix, soit trois sièges et 12 voix restantes. Le SP et le CVP avait convenu que le parti de la coalition qui aurait le plus de voix aiderait l'autre de façon à ce que ce dernier obtienne un siège de plus. Dans le cas qui nous intéresse, le CVP accorda 4 voix au SP, ce qui lui permit de s'attribuer un mandat supplémentaire. Mais le CVP disposait encore de 8 voix et il tenait évidemment à en tirer profit. Il consulta donc Agalev et la Volksunie ( qui avaient respectivement 12 et 8 voix restantes) qui posèrent alors certaines conditions. Agalev voulait par exemple que l'avocat anversois Trees Debrock siège les trois premières années au CPAS. Cependant, le CVP voulait terminer son mandat et

proposa alors à Agalev quelques mandats dans les intercommunales. Agalev refusa et le CVP se retrouva donc pratiquement dans l'obligation de marchander avec le Vlaams Blok au risque de voir passer sous son nez le mandat supplémentaire au CPAS. Le CVP choisit donc la première solution. Au CVP à Anvers, personne n'était véritablement enchanté de devoir négocier avec Karel Dillen oui Eric Deleu. Par ailleurs, l'électorat anversois - celui du CVP inclus - n'avait pas la moindre idée de ce qui se tramait. Par conséquent, fin 1988, début 1989, on alla chercher Herman Suykerbuyk, parlementaire et bourgmestre d'Essen. Suykerbuyk n'était pas concerné par la politique communale d'Anvers et ne dépendait absolument pas de l'électorat anversois. Même s'il commettait un impair, il était intouchable. Suykerbuyk contacta le président du Vlaams Blok, Karel Dillen, et tous deux s'accordèrent de la façon suivante : le CVP recevait les voix restantes

du Vlaams Blok si, en retour, les parlementaires du CVP aidaient le Vlaams Blok en signant le numéro de la liste nationale pour les élections européennes de juin 1989. Début janvier, l'accord qui s'était ébruité, fût ouvertement critiqué dans la presse. Le 8 janvier, le CVP s'empressa de réagir en faisant parvenir un communiqué à l'agence Belga dénonçant un « soi-disant accord national avec le Vlaams Blok qui aurait un lien avec le CPAS d'Anvers ou les élections européennes ». Interrogés à ce propos, tant Filip Dewinter que Herman Suykerbuyk, confirmèrent qu'il y avait bien eu des discussions entre Dillen et Suykerbuyk. Tous deux avaient des versions légèrement différentes de l'affaire. D'après Dewinter, un gentleman's agreement (et non un document signé) existait bel et bien, réglant la question du siège au CPAS et du numéro de liste nationale pour le Vlaams Blok. Suykerbuyk, furieux d'avoir été mis en

cause dans cette histoire, affirma qu'il avait effectivement « discuté avec Dillen ». Mais il ne pouvait et ne voulait pas dévoiler le contenu de leurs discussions, Pour savoir si ces discussions avaient abouti à un résultat quelconque, Suykerbuyk renvoyait les curieux à une discussion éventuelle au Conseil communal d'Anvers à propos de l'attribution des mandats au CPAS. Le vote se déroula le 23 janvier : le CVP obtint un siège supplémentaire au CPAS grâce aux voix restantes du Vlaams Blok. Et aux élections européennes, le Vlaams Blok se vit effectivement attribuer un numéro de liste nationale. Deux mois après l'incident du CVP, le ton monta au sein du SP d'Anvers. C'est Lode Hancké, le chef de groupe SP au Conseil Flamand, qui déclencha la bagarre en mars 1989. Il n'admettait pas que le CVP et ses partenaires, le bourgmestre Bob Cools

et le Ministre Colla, veuillent offrir au Vlaams Blok quatre mandats dans les intercommunales d'Anvers et dans la société de logement social. Bob Cools déclara que les assertions de Hancké étaient à proprement parler une « grotesque calomnie », tandis que de son côté, Hancké expliqua que toute l'opération menée par le Vlaams Blok « avait été soigneusement préparée et orchestrée ». Finalement, le président du SP, Frank Vandenbroucke, dut intervenir. Après une entrevue houleuse avec les personnes concernées au quartier général du SP, situé boulevard de l'Empereur à Bruxelles, Vandenbroucke publia un communiqué de presse par lequel il affirmait que les difficultés étaient aplanies et qu'il donnait raison à Hancké. Dès lors, le Vlaams Blok allait être exclu de tout mandat de contrôle n'émanant pas directement de la fonction de conseiller communal. Les divergences d'opinion concernant la collaboration avec le Vlaams Blok ne se limitaient pas à Anvers. A

Lokeren également, il y eut de sérieuses discussions au sujet de la collaboration entre le PVV et le Vlaams Blok. A l'origine de ces conflits, on trouve la demande faite par Herman Magherman, député ACV CVP, à Cyriel de Kerpel, élu du Vlaams Blok, de lui accorder des voix afin d'obtenir un cinquième mandat au CPAS. Cependant, de Kerpel préféra les libéraux et c'est ainsi que grâce à l'appui du Vlaams Blok, le PVV reçut un cinquième siège au Conseil du CPAS. En échange, le sénateur Georges Antheunis, personnalité locale du PVV, promit sa signature au Vlaams Blok pour l'attribution d'un numéro de liste nationale lors des élections européennes, si cela s'avérait nécessaire.

Le cordon sanitaire En 1989, les partis politiques, inquiets de ces accords de collaboration avec le Vlaams Blok, tentèrent pour la première fois de lui opposer un front uni. Le signal de départ fur donné le 4 février 1989 lors du débat qui clôturait le congrès des Jeunes Socialistes (flamands) et qui s'intitulait « La Flandre hospitalière ». A la table des discussions étaient assis Annemie Neyts, présidente du PVV, Frank Vandenbroucke, président du SP, Edgard van den Bossche, député CVP, Herman Lauwers, député VU et Jos Geysels, député Agalev. Quand ils arrivèrent au problème de la collaboration, Jos Geysels évoqua une proposition antérieure du parlementaire SP Jef Sleeckx qui projetait de créer un « cordon sanitaire » autour du Vlaams Blok. Concrètement, Geysels demandait aux autres membres de la réunion s'ils étaient prêts à signer au nom de leur parti, un protocole les engageant à isoler

le Vlaams Blok tant sur le plan national que régional et communal, afin de rendre impossible toute convention comme celles d'Anvers et de Lokeren. Contre toute attente, les autres politiciens promirent de signer ce fameux protocole. Il fallut patienter encore un peu pour que le texte définitif soit rédigé et signé par tous les présidents de parti, mais le 10 mai, c'était chose faite. Le texte précise : « Se basant sur le respect fondamental de la démocratie politique, le rôle et le fonctionnement de tout organe démocratiquement élu, la reconnaissance d'une Flandre multi culturelle, tolérante et accueillante, la nécessité d'une lutte concertée contre toute forme de racisme et de haine envers l'étranger, la solidarité fondamentale envers les minorités les plus faibles et oubliées dans la communauté, les signataires interdisent à leur parti de conclure des accords politiques ou des conventions avec le Vlaams Blok, tant dans

le cadre des Conseils démocratiquement élus au niveau communal, provincial, régional, national et européen, que dans le cadre des élections pour les niveaux mentionnés ci dessus ». Cet accord historique n'a tenu que sept semaines à peine. Le 26 juin, Jaak Gabriëls, président de la VU, dans une interview accordé à la Gazet van Antwerpen, balaya le protocole d'une simple phrase. Gabriëls déclarait : « je trouve absurde de former une alliance de tous contre un ». Aussitôt, Guy Verhofstadt, président du PVV, proclama que si un seul parti révoquait l'accord, le protocole n'existait plus. Suite aux déclarations de Gabriëls, Herman Van Rompuy, président du CVP, annonça que pour les démocrates-chrétiens, le protocole « n'existait plus en tant que document officiel ». Le SP et Agalev, quant à eux, continuèrent à soutenir le protocole. La rapidité avec laquelle Verhofstadt et Van Rompuy ont suivi l'exemple de Gabriëls et

l'accueil chaleureux du rejet du protocole par les politiciens anversois Edward Beysen (PVV), Gerard Bergers (VU) et Bruno Peters (CVP) laissent à penser que la chasse opportuniste aux mandats administratifs pesait plus lourd dans la balance que la morale politique. Bientôt, la situation empira. Lorsque le 21 mars 1991, la Centrale voor Socialistisch Cultuurbeleid (Centrale de la politique culturelle socialiste) démarra une campagne ludique contre le racisme, le président du SP, Vandenbroucke, plaida une fois de plus en faveur d'un accord préélectoral engageant les partis démocratiques à lutter ensemble contre toute forme de surenchère raciste durant la campagne électorale du 24 novembre. Vandenbroucke avait parfaitement compris qu'il était impossible de rééditer le protocole de 1989 et il espérait vraisemblablement qu'un accord se limitant à bannir le racisme serait réalisable (à cette époque, le protocole

était toujours en vigueur au sein du SP). Il formula également le voeu que tous les partis démocratiques acceptent le programme en dix points sur l'immigration établi par Paula D'Hondt, Commissaire Royal à l'Immigration, et qu'ils soient utilisés comme base de la politique d'immigration après les élections du 24 novembre. Cette nouvelle tentative de pacification fut rejetée par les libéraux. Edward Beysen fit savoir depuis Anvers qu'il ne voyait aucun intérêt aux propositions de Franck Vandenbroucke et de Paula D'Hondt : « Dans tous les cas, un de mes thèmes électoraux à Anvers sera l'immigration. Une fois de plus, les immigrés constituent le problème le plus important et nous devons gagner des voix par rapport au Vlaams Blok ». Après un tel coup de semonce, la direction du PVV publia un communiqué de presse précisant : « A l'approche des élections, le président du

SP, Vandenbroucke, n'avait pas à lui imposer le silence sur l'immigration ». Quelques jours après que Vandenbroucke ait lancé son ballon d'essai, une dizaine d'organisations chrétiennes, dont Welziinszorg, la Commissie Rechtvaardigheid en Vrede (Commission Justice et Paix) et le Katholieke jeugdraad (Conseil de la Jeunesse Catholique), reprirent le flambeau. Ces organisations demandèrent aux partis démocratiques de signer une déclaration d'intention par laquelle ils promettaient de ne pas mener de campagne raciste et de veiller à ce que les sections et les candidats locaux s'y conforment. Les réactions ne furent pas unanimes. Le CVP, le SP et Agalev y répondirent positivement. La Volksunie refusa de signer la déclaration mais accepta néanmoins d'en respecter l'esprit. Le PVV refusa de signer et Karel Dillen qui était à Strasbourg, déclara au nom du Vlaams Blok

que le thème de l'immigration constituerait le pivot de sa campagne électorale. Depuis, dans les milieux politiques, persiste la tendance à collaborer avec le Vlaams Blok. Après les élections parlementaires du 24 novembre 1991, la direction du CVP négocia avec le député Vlaams Blok Gerolf Annemans afin d'obtenir l'appui du Vlaams Blok pour que la conseillère provinciale CVP de Flandre Orientale Lyliane Hebbrecht devienne Sénateur coopté. On ébruita ces pourparlers qui cessèrent totalement lorsque Frank Vandenbroucke menaça de s'emparer du problème. D'autre part, dans la province du Limbourg, deux membres du Vlaams Blok ont été acceptés au Conseil provincial et ce, dans la plus grande discrétion et avec l'approbation de tous les autres partis. Rob de Wispelaere (Vlaams Blok de Hasselt) est

secrétaire tandis que Lucien Hermans (Vlaams Blok de Heusden Zolder) est trésorier. Fin 1992, De Wispelaere a démissionné à cause du comportement dictatorial de la direction du Vlaams Blok à Bruxelles. De Wispelaere expliqua également sa démission par l'attitude foncièrement raciste de Dewinter. En mars 1992, dans le journal du CVP Zeg, Herman Van Rompuy affirmait qu'il était hors de question que son parti collabore d'une manière ou d'une autre avec le Vlaams Blok « L'extrême droite doit être clairement et fermement combattue. Leurs (non)valeurs n'ont rien à voir avec la chrétienté et les Démocrates Chrétiens. L'éthique n'existe que si l'autre personne est considérée comme étant la plus importante. La haine est à l'opposé de ce qu'apporte la chrétienté à la civilisation : l'amour du prochain, pour employer un terme ancien. Nous sommes contre la lutte des classes car nous n'y voyons aucun apaisement possible

de la haine envers l'étranger. C'est pourquoi le CVP ne formera aucune coalition politique avec le Blok, ni à Anvers, ni ailleurs ». Entretemps, les tentatives pour isoler politiquement le Vlaams Blok n'ont pas été définitivement abandonnées Le 19 novembre 1992, tous les partis démocratiques flamands ont voté une résolution au Conseil Flamand dénonçant le programme en 70 points du Vlaams Blok sur l'immigration. Grâce à l'approbation de cette résolution, l'organisation Charta 91 est à même de reformer un cordon sanitaire autour du Vlaams Blok. En février 1993, Charta 91 proposa à tous les hommes politiques nationaux et locaux flamands de signer le texte intitulé : « Aucune collaboration avec le Vlaams Blok ». Le 19 novembre 1992, tous les partis à l'exclusion du Vlaams Blok ont approuvé une résolution par laquelle ils désapprouvent entièrement le

programme en 70 points énoncé par le Vlaams Blok et qui concerne l'immigration. Dans cette résolution, on peut lire que ce programme en 70 points est totalement contraire aux options européennes vis à vis des Droits de l'Homme ainsi qu'à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des Nations Unies. Le Conseil Flamand affirma également que « quelques unes de ces propositions ont été empruntées au programme en 50 points établi par le Front National, le 16 novembre 1991, dont l'objectif est d'isoler les immigrés en un groupe d'apartheid et de les exclure peu à peu de la vie sociale, en les traitant de la même manière que les citoyens juifs en 1933 dans l'Allemagne nazie. »

Pour ces mêmes raisons, les signataires s'engagent à ne pas conclure d'accords ou de conventions politiques avec le Vlaams Blok, « ni dans le cadre des conseils élus démocratiquement aux niveaux communal, provincial, régional, national et européen, ni dans le cadre des élections aux niveaux sus mentionnés." Le but de Charta 91 est évidemment de confondre les dissidents éventuels qui, après les élections communales d'octobre 1994, essayeraient quand même de collaborer avec le Vlaams Blok, et de leur rappeler le protocole signé.

Deuxième partie

Le Vidame Blok tel qu'en lui même

« A mort, à mort, tous ceux de gauche dans le caniveau. Pas des mots mais des actes, toits ceux de gauche hors de la rue. Toute cette racaille rouge doit aller à l'abattoir. Abattez la, abattez la tous les gauchistes dans la tombe. »

(Extrait d'un « chant de lutte » du NJSV NSV)

De nombreux observateurs politiques s'obstinent à considérer le Vlaams Blok comme un parti à thème unique, un parti qui s'attache exclusivement à combattre les immigrés. Ils commettent ainsi une belle erreur. Dans la pratique, le Vlaams Blok couvre tous les terrains politiques et sociaux fondamentaux. Dans ce chapitre, nous analyserons les diverses positions adoptées par le Vlaams Blok et les actions qui en découlent. Quiconque veut avoir une vision correcte du Vlaams Blok ne doit pas perdre de vue que le parti fonctionne à deux niveaux. Le premier niveau est clair aux yeux de tous : c'est le Vlaams Blok sous une forme tout à fait respectable. Lors de conférences de presse, pendant les congrès et les réunions au Parlement, le parti énonce ses positions de façon classique. L’intervention de ces messieurs en costume de bonne coupe qui utilisent un jargon politique semblable en tout point à celui de

leurs honorables opposants politiques semble également tout à fait respectable. Cette image change complètement lorsque nous prenons connaissance du deuxième niveau : les textes internes du parti, la formation des cadres et en particulier les réunions du VMO, de Voorpost, de Were Di, de Dietsland Europa, ... car lors de ces assemblées, les mandataires ne mâchent plus leurs mots et ne cachent plus leur jeu. En lisant les publications qui circulent dans ce milieu, on réalise quelle est leur véritable conception de la société. La confrontation entre le premier et le second niveau donne une image déconcertante du Vlaams Blok.

L'amnistie Bien que dans les « Principes de base » du Vlaams Blok, on trouve en deux mots la demande d'amnistie complète et inconditionnelle des collaborateurs politiques et militaires et des criminels de guerre de la Seconde Guerre mondiale, ce thème est toujours resté un des points fondamentaux du programme du parti. En réaction à l'accord gouvernemental de Dehaene I, le Vlaams Blok rédiga le 17 mars 1992 une note en dix points, sous la plume des députés Gerolf Annemans, Filip Dewinter, Karel Dillen, Francis van den Eynde, Joris van Hauthem, Luk van Nieuwenhuyzen et Wim Verreycken, qui aborde le problème de l'amnistie en ces termes : « Le Vlaams Blok constate que le gouvernement actuel n'a pas l'intention de déclarer l'amnistie totale et inconditionnelle en ce qui concerne les condamnations prononcées pendant la procédure de répression d'après guerre, ce n'est pas

étonnant puisque les Francophones comme les socialistes, veulent maintenir les conséquences de cette procédure. Cela démontre une fois de plus que pour certains, 'la fête de la haine', dirigée contre la conscience Flamande, n'a pas encore duré assez longtemps... » Effectivement, les plus fervents opposants à l'amnistie sont les anciens combattants, les anciens résistants et les partis politiques francophones. En premier lieu, parce qu'en l'accordant, cela signifierait qu'ils acceptent de tirer un trait sur le passé. Les opposants ne veulent pas tourner cette page de l'histoire. Au contraire, ils veulent qu'elle reste bien vivante dans la mémoire de tous afin d'empêcher une nouvelle montée du nazisme et un nouvel holocauste. En deuxième lieu, ils savent qu'en accordant l'amnistie générale, celle ci s'appliquerait également aux cas graves en matière de collaboration, tels Léon Degrelle, Robert Verbelen et le bourreau de Breendok, Richard Debodt. Sur ce sujet, le Vlaams Blok proclame inlassablement que la répression de l'après guerre ne constitue pas

seulement à long terme une violation de la justice mais qu'elle représente surtout la vengeance perfide de l'Etat belge à l'égard du Mouvement flamand. A ce propos, le Vlaams Blok emploie les expressions de « justice de nègre » et de « tentative pour baillonner définitivement le Mouvement flamand et donc également l'émancipation de la Flandre » (dixit Gerolf Annemans dans le journal du Vlaams Blok). Ainsi que le démontrent brillamment Luc Huyse et Steven Dhondt dans leur étude Onverwerkt Verleden. Collaboratie en repressie in Belgïe 1942-1952 (Le passé inachevé. La collaboration et la répression en Belgique de 1942 à 1952), publiée en 1991, cette opinion est inexacte. Dès 1946, certaines peines ont été effectivement appliquées comme la première partie du livre l'analyse mais de nombreuses mesures de clémence ont été prononcées ainsi que des réhabilitations et des libérations anticipées. En 1987, il restait encore 400 dossiers en cours contre les collaborateurs condamnés ou leurs proches. Un bon nombre d'entre eux

furent « réglés » cas par cas et en toute discrédition par Hugo Schiltz, alors que ce dernier était Ministre dans le dernier gouvernement Martens. Par conséquent, la situation est pratiquement réglée. La demande d'amnistie du Vlaams Blok revêt plutôt une fonction symbolique importante. Le Vlaams Blok juge cette amnistie à travers le prisme de la Grote Gelijk, la Grande Raison, celle de leaders flamands comme August Borms, Jef van de Wiele, Ward Hermans, Staf de Clercq, Cyriel Verschaeve, René Lagrou, etc... qui auraient seulement tenté de servir les intérêts de la Flandre en collaboratant avec le nazisme. Ainsi, en toute conscience, le Vlaams Blok décide d'opter pour le même scénario musclé et « coloré » adopté par le Mouvement flamand à l'époque de la collaboration durant la Première Guerre mondiale. On ne peut pas juger l'attitude du Vlaams Blok sans tenir compte du fait que le révisionnisme et/ou le négationnisme, qui va

jusqu'à l'éloge de la personne d'Adolf Hitler et du nazisme (chez Bert Eriksson, Jos Rogiers ou André van Hecke par exemple), est particulièrement chéri dans les rangs du Vlaams Blok. Ceci explique le véto des francophones lors de la proposition d'amnistie du Vlaams Blok au Parlement, un véto francophone qui augmente encore la valeur symbolique de la demande d'amnistie exprimée par le Vlaams Blok. Le Vlaams Blok affiche également une politique anticommuniste virulente dans le cadre de sa demande d'amnistie. Karel Dillen écrit dans le journal du parti en janvier 1986 : « Quarante ans après la Seconde Guerre mondiale, il n'y a toujours pas d'amnistie en Belgique. L'Allemagne, l'ennemi pendant la Seconde Guerre mondiale, est depuis des années l'alliée militaire de la Belgique dans l'OTAN. Quelques années après la Deuxième Guerre, la Belgique mobilise des volontaires et les envoie à des milliers de kilomètres en Corée

afin de combattre les communistes. Mais la Belgique refuse d'accorder l'amnistie à ceux qui ont lutté quelques années auparavant contre ce même communisme pendant la Seconde Guerre mondiale ». Ou comme le traduit si bien Leo de Haes dans Humo en 1981 : « ... l'amnistie a été exigée prématurément et pendant trop longtemps par les mauvaises personnes, en fait par celles qui avaient commis des erreurs pendant la Guerre et surtout par celles qui, après la Guerre s'entêtaient à demeurer dans l'erreur. Aujourd'hui encore, ceux qui exigent l'amnistie continuent d'exhiber les symboles malsains du nazisme et d'autres signes cabalistiques du même acabit tandis que certains individus s'obstinent à nier l'existence des chambres à gaz où six millions de juifs ont trouvé la mort. Aucun signe de remords de la part de ceux qui pratiquent cette politique douteuse : Voorpost, VMO, Vlaams Blok, Were Di ». Entretemps, le Vlaams Blok continue,

législature après législature, à introduire ses demandes d'amnistie. Enfin, le Vlaams Blok ne rate pas une occasion d'exploiter politiquement le sujet. Le 12 janvier 1993, lors de la discussion au Sénat du projet de loi relatif à la sanction des crimes de guerre (répression des infractions graves aux conventions internationales de Genève du 12 août 1949 et au protocole du 8 juin 1977 additionnel à ces conventions), Wim Verreycken déclara que le vote du Vlaams Blok dépendrait de l'attitude, favorable ou non, du Sénat à l'égard des demandes d'amnistie du Vlaams Blok.

Les adversaires Par dissident, le Vlaams Blok entend toute personne du camp adverse et que le parti traite comme telle. Afin de se protéger, le Vlaams Blok a donc décidé qu'il était nécessaire de mettre sur pied son propre service de renseignements concernant le camp ennemi : la très nébuleuse organisation KOSMOS, abréviation de ''Kring voor Onderzoek naar de Socialistische en Marxistische Ondermijning van de Samenleving" (Cercle d'Enquête sur la Destruction de la Communauté par le Socialisme et le Marxisme). KOSMOS a été créé dans le giron de Voorpost par Luc Dieudonné au début des années quatre vingt. Dieudonné, dans le milieu néonazi, porte le nom de Jan Stalmans. Il n'a pas choisi par hasard ce pseudonyme. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, Jan Stalmans était l'idéologue de l'hebdomadaire de l'organisation collaboratrice VNV, De Nationaalsocialist (pour un portrait de

Dieudoné/Stalmans, nous vous renvoyons à la troisième partie). KOSMOS fonctionne comme un véritable service d'espionnage et de renseignements, qui se consacre en particulier au fichage politique et qui fournit des informations à toutes les organisations et les personnes de la mouvance d'extrême droite. L'organisation possède une base de données semi clandestine, qui représente sa pierre angulaire, et où sont conservées toutes les données relatives à certaines personnes. D'après le chef de cette organisation, KOSMOS fut fondé suite à la parution du livre Extreem rechts en de Staat (L'extrême droite et l'Etat). Dieudonné, alias Stalmans, écrit dans le magazine Revolte de Voorpost en octobre 1988 « Le livre est composé à 50 % de mensonges et à 50 % de suppositions, écrit conjointement par des fouineurs antifascistes soit disant

professionnels comme Walter de Bock, journaliste au Morgen et fondateur du mouvement estudiantin à l'origine d'AMADA, Jan Cappelle du service d'études du Parti Socialiste et enfin l'avocat (maoïste) Michel Graindorge. C'est l'exemple typique de la pensée simpliste. Après avoir lu ce livre, j'ai décidé de faire un tour d'horizon de la « gauche » mais d'une manière juste et honnête. Mon information est correcte : on ne s'aide pas en énonçant des hypothèses et des suggestions. C'est ainsi que j'ai commencé par dépouiller systématiquement De Rode Vaan, Solidair, Humo, De Morgen, etc. ainsi que les articles et les magazines, en commençant par le journal paroissial pour terminer par diverses revues publicitaires. C'est alors que j'ai pu reconstituer le puzzle ...Très souvent, l'essentiel est une liste ennuyeuse de noms, dates, petites informations... La ‘gauche’ connaît l'existence de KOSMOS mais reste muette comme une carpe. Ils ne savent pas non plus qui nous sommes exactement. »

KOSMOS utilise une méthode de travail peu subtile quant au rassemblement des informations. Dès le début, l'organisation fait paraître des annonces dans pratiquement toutes les publications d'extrême droite, comme le mensuel du Vlaams Blok, Revolte, le journal d'informations de Voorpost, Branding, etc., dans lesquelles elle invite les personnes « à nous envoyer tout ce qui, d'après vous, se rapporte à la gauche, même la ‘petite aile’ gauche ». Dans certaines annonces, cette ‘petite aile gauche’ est spécifiée. Il s'agit du SP, des Magasins du Monde, des syndicats, de De Morgen, Humo, de la BRT, du PVDA, de Broederlijk Delen, de l'hebdomadaire Markant... Ce travail de renseignements ne se limite d'ailleurs pas à la Flandre. Depuis fin 1990, KOSMOS réunit également des informations sur la gauche en Hollande.

Ces annonces paraissent aussi régulièrement sous l'appellation « Ecuries d'Augias » et « Héraclès » et parfois Dieudonné utilise son propre pseudonyme Jan Stalmans. Tous ces alias utilisent les mêmes numéros postaux : BP 45, 2100 Deurne 1 et BP 69 à 2140 Borgerhout et ils partagent le même compte bancaire. Officiellement, la première adresse est celle de l'association Voorpost, la deuxième est employée par Luc Dieudonné. Pendant un certain temps, Jan Stalmans et KOSMOS furent domiciliés au secrétariat du Vlaams Blok à Anvers, 8, rue van Maerlant. Peu de temps après, l'adresse fut à nouveau changée pour celles citées précédemment. Les premières années, KOSMOS distribua également des tracts afin de mieux se présenter. L'organisation y proposait au public de faire appel à son « service d'informations » : « Avez vous quelques questions à poser au sujet d'une organisation spécifique de la gauche ? Est ce que vos

enfants ou vous-même êtes confrontés à l'agitation provoquée par la gauche au sein de l'école, de votre lieu de travail ou dans votre voisinage ? Voulez vous en savoir plus sur les taupes rouges ? Alors, écrivez nous et nous vous fournirons les renseignements nécessaires... » Depuis qu'en 1985, KOSMOS est devenue une filiale à part entière du Vlaams Blok, les renseignements qui ont été rassemblés par ses soins sont surtout utilisés dans le mensuel du Vlaams Blok et dans les publications de Voorpost. Ces notices servent sur tout à discréditer des Flamands progressistes ou à leur causer des ennuis de toutes sortes et de toutes les manières possibles. Dans le même esprit KOSMOS diffuse également des tracts qui attaquent des journalistes de la BRTN pour leur appartenance à de Halt, une organisation antifasciste, ou qui reprochent à quatre journalistes de VTM d'avoir autrefois travaillé pour le journal de gauche De

Morgen. En outre, KOSMOS a collaboré au livre de Filip Dewinter, Eigen Volk eerst (Notre peuple d'abord) publié en 1989, et dont l'organisation a rédigé tout un chapitre (bien détaillé) consacré à ce qu'elle appelle le lobby immigré. KOSMOS a également contribué à la rédaction du Zwartboek progressieve leraars (Le livre noir des enseignants gauchistes), paru en 1989, dans lequel des organisations comme Interschol, Scholen zonder Racisme et l'Actiegroep Kritisch Onderwijs sont dépeintes comme étant des mouvements de complot cryptocommunistes. Bien entendu, Dieudonné est incapable de réaliser seul un tel travail. Il peut d'ailleurs compter sur l'aide de membres de KOSMOS comme Mie et jef Delanghe (Voorpost Gand), Paul Stevenheydens (comité Borms, Voorpost et concierge/gardien du secrétariat du Vlaams

Blok à Anvers), Walter van Menegem (Voorpost), Guy Somers (responsable du service de documentation de Voorpost et militant pro apartheid) et enfin Erik de Jager (Voorpost et Revolte). Il ne faut pas s'étonner que Voorpost soit massivement représenté. En effet, l'organisation s'est totalement intégrée au Vlaams Blok. Lors des élections, le parti laisse toujours une quarantaine de places vacantes sur ses listes à l'intention des membres de Voorpost. Ce n'est évidemment pas une raison pour voir surgir des fantômes. Cependant il est clair que quiconque a la possibilité de coupler des renseignements politiques avec des informations financières et commerciales dispose d'une arme redoutable. En ce qui concerne les renseignements commerciaux et financiers, Dieudonné peut s’adresser à loisir à un spécialiste en la matière : André van Hecke, un ancien membre de la SS. André van Hecke fut jusqu'à sa retraite le directeur de

l'entreprise Eurinform, rachetée par le holding américain Dun & Bradstreet. Le nouveau groupe Dun & Bradstreet Eurinform est spécialisé dans tous types de renseignements d'ordre financier que l'on connait surtout à travers la publication de la revue Dun's 15 000, catalogue qui reprend les 15 000 entreprises les plus importantes de Belgique et du Luxembourg en mentionnant leurs données stratégiques. C'est précisément sous la direction d'André van Hecke que vingt ans auparavant, Eurinform mit au point ce catalogue annuel.

Bruxelles « Le Vlaams Blok revendique les territoires qui, à la création ou au cours de l'histoire de l'Etat belge, étaient flamands et apparentés au pays thiois, et qui reviennent par conséquent à la Flandre et à la Communauté Flamande... Le Vlaams Blok affirme que Bruxelles et sa périphérie appartiennent également à la Flandre. L'objectif final est le suivant : Bruxelles ville flamande, le pays thiois en tant qu'entité linguistique et culturelle. Bien entendu, Bruxelles, capitale du futur Etat flamand indépendant et capitale de l'Europe se voit attribuer un statut spécial. En attendant, la Flandre demande que l'on détermine la nationalité de Bruxelles sur base du critère objectif de filiation ». « On continuera à utiliser les deux langues uniquement dans un souci de réadaptation des Flamands dénationalisés de

Bruxelles et des 19 communes ainsi que des communes concernées à la langue et à la culture néerlandaise afin de les intégrer totalement à la Communauté Flamande. Partout ailleurs, ils seront congédiés ». Voilà en quoi consiste le programme politique du Vlaams Blok concernant Bruxelles, programme que l'on retrouve dans les Principes de base du parti. Dans la liste des exigences qui s'y rattachent, il est ajouté que : « Nous demandons que Bruxelles, en tant que capitale de la Flandre, ne conserve plus son rôle de capitale de l'Europe ». En juin 1992, Filip Dewinter développera la notion de « critère ojectif de filiation » dans la « loi du sang » qui propose que l'on vérifie la « filiation européenne » en effectuant des contrôles sanguins (pour plus de détails, voir le chapitre sur les immigrés).

Bien que le Vlaams Blok ne supporte aucune remise en question de la Déclaration de Principe qui sert aujourd'hui encore de programme de base au parti, il décida, en 1991, de mettre définitivement de côté ses exigences relatives au statut de Bruxelles. Dans son livre paru en 1991, Vlaanderen in Straatsburg (La Flandre à Strasbourg), Karel Dillen rapporte un extrait d'une conférence tenue devant Were Di en 1989 : « ... honnêtement, je dois reconnaître que dans mes déclarations antérieures à propos de Bruxelles, ainsi que durant les années précédentes, je me suis comporté comme un dangereux idiot, d'une part à cause de mon ignorance et d'autre part, parce que je me montrais par trop optimiste quant à la puissance et à la conscience de la Flandre. Je tenais pour une possibilité réaliste, un espoir réaliste de considérer Bruxelles, bien entendu capitale d'une Flandre indépendante, comme étant également la capitale de l'Europe. Cependant, j'insiste : cette thèse est aussi dangereuse qu'incorrecte. Quiconque analyse vraiment

la situation, arrive à la conclusion inattaquable que la sauvegarde du caractère flamand de Bruxelles, de la périphérie ainsi que du Brabant flamand pose comme première condition le dégraissage du Bruxelles européen. En d'autres termes Bruxelles ne peut pas devenir la capitale de l'Europe ». Lors d'une conférence de presse en février 1991 qui, naturellement, se déroula à Bruxelles, la direction du parti fit connaître son nouveau point de vue à l'égard de Bruxelles. A côté des sempiternelles « revendications flamandes » et de son opposition ferme au bradage immobilier de Bruxelles, le Vlaams Blok déclara également qu'il fallait écarter l'idée de Bruxelles capitale de l'Europe : « Les membres flamands du gouvernement et tous ceux qui sont partisans de Bruxelles capitale de l'Europe, ne semblent pas se rendre compte de la portée de leurs actes. Aveuglés par une folie des grandeurs complètement

insensée, ils veulent transformer la Flandre en une région internationale. Ils sont les parfaits réalisateurs du ‘gouden driehoekplan’ (Le triangle d'or), un plan élaboré par les francophones dans les années 60 que les Flamands ont réussi à déjouer grâce à l'action ‘Leuven Vlaams’ (Louvain flamande). La différence, aujourd'hui, est que la zone à urbaniser est bien plus importante qu'à l'époque ». Cette position cadre avec un certain nombre de revendications qui s'opposent à la francisation de Bruxelles et à la présence des étrangers noneuropéens. Dans ce contexte, le parti rejette naturellement le vote communal pour les étrangers européens, fonctionnaires européens inclus. Toujours dans le cadre de son « programme pour Bruxelles », lors de sa campagne de printemps de 1991 et début 1992, le Vlaams Blok se rangea du côté des revendications du comité flamingant « Stop Euro Brussel ». Ce comité dont le siège est situé

à Anvers est présidé par André Monteyne (Vlaams Komitee Brussel Comité Flamand de Bruxelles) et Peter de Roover (Vlaamse Volksbeweging Mouvement Populaire Flamand). Les-vice présidents sont Guido Moons (TAK) et Francis Stroobants (Vlaams Komitee Druivenstree, Comité Flamand de la Région des Vignobles). Ce Comité n'est pas d'accord avec les statistiques officielles qui présentent comme un avantage la présence de la Communauté Européenne à Bruxelles. D'après le Ministre bruxellois Jos Chabert, cette présence dans la capitale rapporte 96 milliards de francs à la Communauté et a créé 46 000 emplois supplémentaires. Chabert se base sur une évaluation faite par le service « Mens en Ruimte ». D'après le Comité, ces chiffres, ont surestimés et les statistiques seraient en réalité de moins de 75 milliards pour le chiffres d'affaires et de 15 000 emplois supplémentaires seulement.

Depuis la création du comité « Stop Euro Brussel », le Vlaams Blok n'a pas cessé d'exprimer dans son hebdomadaire un « refus catégorique et sans compromis de Bruxelles comme capitale politique de la Communauté Européenne » et de s'opposer à « l'arrivée des barbares ». Suite à cette action coordonnée entre le Comité et le Vlaams Blok, la résistance à la dégradation urbaine de Bruxelles et l'augmentation constante des prix de la construction et des loyers à Bruxelles est prise en main par l'extrême droite.

La criminalité Malgré les états de service musclés d'un grand nombre de militants et de cadres du Vlaams Blok et bien que le parti et les organisations qui en dépendent figurent depuis des années dans la liste des organisations subversives du Ministère de la justice, cela n'empêche toutefois pas le Vlaams Blok de brandir très haut l'étendard de la lutte, depuis les élections législatives d'octobre 1985, lutte contre « la hausse de la criminalité » (lors des élections législatives du 24 novembre 1991, la criminalité était un des six thèmes officiels de la campagne électorale du parti). A cet égard, la seule initiative appréciable du Vlaams Blok avant 1985 fut de proposer une loi qui n'avait en tout état de cause aucune chance d'aboutir prévoyant de diviser la gendarmerie nationale en une brigade flamande et une brigade wallonne.

La campagne que le Vlaams Blok mène depuis 1985 se rattache au thème de l'immigration particulièrement payant lors des élections de 1984. En outre, la publication d'une édition spéciale du mensuel du Vlaams Blok en 1985, fut le départ d'une campagne contre la criminalité menée par le parti. Le slogan de cette campagne était « moins de saletés et plus de sécurité ». Lors de la présentation de cette campagne à la presse, il s'avéra en fait que le terme de « saletés » concernait la pédophilie, l'homosexualité et le trafic de drogue. La campagne contre la criminalité menée par le Vlaams Blok était accompagnée d'une série de questions parlementaires posées par Karel Dillen relatives aux différents aspects du trafic de la drogue. Dans une de ses questions (le 4 juin 1985), Dillen tenta de convaincre que c'étaient les « services secrets de certains pays communistes » qui avaient encouragé la consommation de drogue en Europe Occidentale.

Au départ, le thème de la criminalité était rarement utilisé. Dans les Principes de base, quelques lignes sont consacrées au sujet : « Nous revendiquons une politique ferme de sécurité, le soutien à la famille, la lutte contre la dénatalité, la protection de la jeunesse contre toute forme de délinquance, le renforcement de la lutte contre le trafic de drogue et la prévention de toute perversion ». Dans l'édition spéciale du magazine du parti, on trouve une description malsaine, injuste et démagogique du comportement des immigrés dans notre pays et de l'attitude des autorités à leur égard (les Turcs auraient soit disant droit aux allocations de chômage après un jour de travail seulement), dans le but bien précis d'en faire un groupe indésirable puisque délinquant aux yeux de tous. De la même manière, le Vlaams Blok s'empresse de faire le lien entre les allocations familiales perçues par les immigrés, l'argent qu'ils envoient à leurs familles au Maroc et en Turquie et l'insécurité et la taudisation de

certains quartiers, l'oisiveté, le vandalisme et la toxicomanie. Il y a deux ans déjà, nous écrivions que, fin 1985, la bande des tueurs fous du Brabant Wallon (au moins 28 morts à déplorer) et les CCC, les Cellules Communistes Combattantes (une série d'attentats à la bombe) ont semé la terreur dans le pays et déstabilisé l'Etat. Apparemment, c'est une chose qui échappe au Vlaams Blok puisque ce parti ne propose que deux solutions pour combattre la criminalité et l'insécurité : « le renvoi massif des étrangers dans leur pays » et « une approche ferme de la délinquance et de la violence ». Alors que les criminologues et les politiciens ne cessent de démontrer qu'il n'y a pas une nationalité plus délinquante que d'autres, le Vlaams Blok continue néanmoins de taper sur le même clou :

« Ceux qui servent la justice sont trop souvent victimes de l'ingérence politicienne. Dans bien des communes bruxelloises, on provoque un malaise au sein des services de police en ‘relativisant’ ou en tronquant même les statistiques en matière de délinquance, en cachant l'implication des étrangers dans les actes criminels, en pratiquant des nominations politiques pour des fonctions supérieures. Aussi, les interventions régulières du Haut Commissariat Royal à l'immigration contre les ‘agents de police racistes’ constituent également une source d'exaspération ( ... ) Il est évident qu'un Berbère du Sahara, un Turc d'Anatolie ou un nègre du Ghana a peu de chances dans un pays aussi développé que le nôtre. Ces gens ne maîtrisent pas notre langue, ignorent nos lois, possèdent une culture totalement différente de la nôtre. Il y a peu de travail pour eux ici, beaucoup d'entre eux doivent vivre de notre sécurité sociale, d'autres encore tombent complètement du bateau. Il s'agit donc avant tout de frustation, et c'est pourquoi les

jeunes immigrés en particulier finissent par s'adonner à la drogue, volent des autos ou attaquent des personnes sans défense. Par conséquent. on pourrait résoudre en grande partie le problème de la criminalité grâce aux propositions que nous avançons en matière de problématique immigrée : le retour décent de la majorité des non Européens dans leur pays natal, accompagné d'une aide financière. (...) Nous ne supprimerons pas l'insécurité chronique, particulièrement dans les villes, en multipliant les réflexions et la coordination, en recrutant prioritairement des policiers d'origine étrangère ou en exprimant encore et encore de bonnes intentions. Aujourd'hui, nous avons la bouche pleine des Droits de l'Homme; le Vlaams Blok affirme clairement que le droit à la sécurité fait également partie des Droits de l'Homme ». (Quelques mois plus tard, Gerolf Annemans déclarera que nous ne devons pas nous préoccuper des Droits de l'Homme puisqu'ils nous sont imposés par les pays en voie de développement.) Afin d'étayer sa thèse, le

Vlaams Blok manipule à volonté les chiffres et les statistiques en matière de criminalité. Quelques exemples. En février 1992, lors d'une conférence de presse, Filip Dewinter voulut démontrer que la criminalité était quatre fois plus élevée chez les immigrés que chez les Belges. A cet effet, il reprit les statistiques de la police d'Anvers. D'après ces statistiques, couvrant une période d'un an, 1 040 petits vols avaient été dénombrés, dont 66 résolus, ce qui représente 6 %. Sur ces 6 %, 53 étrangers étaient impliqués. Donc 81% des voleurs sont des étrangers, proclama Dewinter. Le député Vlaams Blok ne s'était pas rendu compte que d'après les mêmes statistiques, tous les vols de mobylettes par exemple avaient été commis uniquement par des Belges. En effet, en 1990 à Anvers, on a recensé 48 vols de mobylettes. Et lorsqu'on a retrouvé les 3 auteurs d'un de ces vols, il s'agissait de Belges... Le sénateur Vlaams Blok Roeland van Walleghem affectionne lui aussi tout particulièrement les thèmes comme la sécurité et la criminalité. Rappelons

également que van Walleghem a fait un court séjour en prison en 1970 parce qu'il avait été directement impliqué dans l'attaque du VMO contre une équipe de colleurs d'affiches du FDF, attaque qui s'était soldée par la mort d'un militant du FDF (les membres du VMO l'avaient roué de coups au moyen de pieds de table). Une des premières tâches accomplies par Roeland van Walleghem, après avoir été élu sénateur aux élection du 24 novembre 1991, fut de rendre une petite visite à la prison de Forest. Car, comme il l'avait écrit lui même dans le journal du parti en mars 1992 : « Etant donné que l'on ne veut pas nous fournir les chiffres concernant la criminalité chez les immigrés, nous sommes bien obligés de les chercher la où ils se trouvent ». Et voici ce que conclut van Walleghem : « Aussi bien dans la section des femmes que dans la section des hommes, nos suppositions se confirment. La majorité de la population carcérale est constituée d'étrangers. Il s'agit surtout de Nord Africains et de nègres. Ils représentent environ 65 % des prisonniers.

Malheureusement pour nos amis de gauche, nous n'avons pas trouvé de Finnois, de Danois ou encore d'lslandais. Il y avait également une section spéciale composée de 31 personnes, dont 17 Maghrébins, 8 nègres, 3 Yougoslaves et 3 Belges. Faut il le préciser ? Il s'agit de grands criminels, car tous les détenus de Forest sont des cas de préventive. Les voleurs de sacs à main n'atterrissent pas dans cette prison ». Il semblerait que Van Walleghem n'ait pas compris que tous ces gens en détention préventive attendaient leur procès et qu'un bon nombre d'entre eux étaient donc innocents. En outre, la direction ne communique jamais les chiffres des différentes nationalités des établissements pénitentiaires. Comment Van Walleghem a-t-il fait pour déterminer qui était Maghrébin et qui ne l'était pas ? La lutte contre la toxicomanie et le trafic de drogue constitue également une des priorités du Vlaams Blok, lutte que

le parti ne dissocie pas de la délinquance immigrée. Certains projets de loi, qui ont été rejetés, prévoyaient l'autorisation de vendre ou d'acheter de la drogue. D'autres autorisaient l'usage d'écoutes téléphoniques sans l'accord préalable des instances judiciaires. Le Vlaams Blokjongeren (VBJ, Les jeunes du Vlaams Blok) les ont reprises dans l'intention de manipuler l'opinion publique. Le but visé n'était pas la prévention mais bien l'accroissement du sentiment d'insécurité des citoyens. D'ailleurs, le tract anti-drogue du VBJ le démontre parfaitement avec son slogan : « Drogues douces une affaire de la gauche » qui prouve également le peu de sens des réalités du parti. D'autre part, que doit on penser de la citation suivante ? « Un seul joint, pour essayer une fois ou pour faire le dur, peut être le début d'une lente déchéance physique et spirituelle. La drogue détruit votre cerveau, votre foie et d'autres organes. Généralement, on ne parvient pas à s'arrêter. Votre corps dépérit; vos facultés diminuent alors que la mort vous guette

déjà! » Naturellement, sur ce terrain, le Vlaams Blok a décidé d'employer la manière forte. Son programme concernant la drogue ne fait à ce propos aucun doute : « La loi devrait prévoir les peines les plus lourdes pour les vendeurs de drogue. Cette loi doit être adaptée en conséquence. Les étrangers impliqués dans le trafic de drogue devraient être immédiatement expulsés après le prononcé de leur peine. Pour combattre efficacement le trafic de drogue, il faudrait engager plus de policiers et de gendarmes qui disposeraient de plus de pouvoirs légaux lors des saisies. Il faudrait contrôler systématiquement tous les véhicules en provenance des plus grands pays producteurs de drogue. Il est indispensable et urgent de coordonner les actions en matière de trafic de drogue à l'échelle internationale. Ce n'est que lorsque nous serons parvenus à nous mettre d'accord sur la manière de lutter contre le trafic de la drogue et que les trafiquants seront sévèrement punis, que le moment sera venu de dépenser du temps, de l'énergie et de

l'argent à l'élaboration d'un programme d'aide efficace pour les toxicomanes. A ce moment là seulement, le travail de la prévention portera véritablement ses fruits ». Le trafic de drogue représente un alibi rêvé pour le Vlaams Blok afin d'aborder à nouveau politiquement le problème de la peine de mort. Dans un projet de loi de 1987, qui, depuis, a été à maintes fois redéposé, le député du Vlaams Blok Gerolf Annemans propose que la vente d'une dose mortelle de drogue soit légalement considérée comme « meurtre avec préméditation » et donc passible de la peine de mort.. En 1988, dans un entretien avec des criminologues, Karel Dillen expliqua que cela ne signifiait pas l'éxécution effective de la peine de mort. A la même époque, Gerolf Annemans déposa un projet de loi prévoyant la suppression de la loi relative à la

libération conditionnelle, c'est à dire la loi Lejeune qui célébrait justement en 1988 son centième anniversaire. Cette loi prévoit qu'un condamné ayant purgé un tiers de sa peine est placé, sous certaines conditions, en liberté conditionnelle. Les récidivistes doivent purger deux tiers de leur peine tandis que les condamnés à perpétuité doivent purger au minimum dix ans de prison et quinze ans en cas de récidive. C'est le Ministre de la justice qui décide d'accorder la libération conditionnelle et ce, sur base de conseils du parquet, de la direction pénitentiaire et du service d'aide social (le prisonnier n'est pas entendu, il n'intervient pas dans la procédure et ne peut interjeter appel après la décision du Ministre). Le Vlaams Blok veut abolir cette loi afin que les détenus purgent entièrement les peines qui ont été prononcées.

Depuis qu'Annemans a déposé son projet, la loi Lejeune est devenue un des chevaux de bataille des parlementaires du Vlaams Blok. Ils ne cessent de poser des questions au Parlement ou de prononcer des discours enflammés dans lesquels ils essayent de prouver que les condamnés ne purgent jamais entièrement leurs peines de prison et qu'ils sont libérés après un séjour ridiculement court (en réalité, seuls vingt pour cent des détenus bénéficient de la loi Lejeune).

La culture Les cadres du Vlaams Blok ont dû faire une drôle de tête lorsqu'ils ont pris connaissance, dans le journal interne du parti, des pronostics de Gerolf Annemans sur les élections européenne, de 1989 : « Pour le Vlaams Blok, l'enjeu des élections n'est pas les quotas laitiers ou les prix agricoles mais la défense de la culture et de l'éducation dans les pays occidentaux. » Comment? La culture et le Vlaams Blok ? Les cadres du parti savaient que la relation n'était pas évidente. Dans les Principes de base du Vlaams Blok, aucune allusion n'est faite à ce sujet et lorsqu'en mai 1987, le journal interne des cadres du parti publia la liste des dossiers disponibles, le sujet culture n'y figurait même pas. Et quand l'année suivante, le service d'études du Vlaams Blok fut divisé en neuf sections différentes ayant chacune un

« responsable de service », là encore, le journal interne d'avril 1988 informa ses membres qu'on n'avait pas encore trouvé de responsable de service pour la section « culture » et que, par conséquent, ce département n'existait pas vraiment. Toutefois, le Vlaams Blok intervient plus que d'autres partis dans la culture. Probablement contre la volonté d'un mandataire au moins. « La politique doit laisser la culture en paix », tonna le sénateur Vlaams Blok Roeland van Walleghem, le 26 février 1992 dans l'hebdomadaire Deze week in Brussel. Beaucoup de gens seront d'accord avec lui. Mais certains mandataires du Vlaams Blok ne l'entendait pas de cette oreille. On ne compte plus les heurts entre les artistes et le Vlaams Blok. En lisant avec attention les textes rédigés par le parti ayant un rapport

quelconque avec la culture, on arrive inévitablement à la conclusion que le Vlaams Blok entretient une attitude de haine à l'égard de tout ce qui concerne de près ou de loin la culture contemporaine. Quelques exemples. Dans un pamphlet électoral pour les élections communales de 1988 (et dont l'éditeur responsable est Paul Stevenheydens), le candidat du Vlaams Blok à Anvers, Johan van Brusselen, dit ceci : « Supprimons tous les subsides idiots et partiaux qui, chaque année, absorbent des dizaines de millions d'impôts. Cessons d'acheter des oeuvres ‘d'art’ moderne pour la ville... Débarrassons le Grand Anvers de tout ce bazar ridicule présenté aux citoyens comme étant de ‘l'art’! (sic) ». Van Brusselen a été élu. Il n'y a pas que Van Brusselen qui éprouve des difficultés à composer avec la

vie culturelle anversoise. Le 8 octobre 1990, le député Filip Dewinter ainsi que Marijke Dillen (chef de groupe Vlaams Blok au Conseil communal d'Anvers) envoient une lettre de protestation à l'échevin de l'Education d'Anvers, dans laquelle ils demandent que ce dernier fasse rayer du programme la pièce de théâtre antiraciste Mohammed, interprétée par le Jeune Théâtre Royal et présentée dans différentes écoles de la ville. La pièce narre l'histoire d'un couple de réfugiés politiques iraniens qui racontent leur histoire aux élèves. A la fin de la représentation, le couple demande aux élèves s'il sont d'accord pour que leur fils Mohammed participe aux leçons données dans leur classe, celui-ci ne pouvant pas rester dans l'école qu'il fréquente à cause du climat raciste qui y règne. Après les sept représentations données dans des écoles différentes, le Vlaams Blok déclare : « Le Vlaams Blok s'insurge avec force contre cette énième tentative d'endoctrinement ‘antiraciste’. C'est faire preuve d'irresponsabilité pédagogique et

émotionnelle que d'imposer à des enfants de douze ans non avertis, ce genre de pièce de théâtre pleine de sentiments et de compassion feinte pour le pauvre petit Mohammed. On suscite alors des sentiments totalement artificiels, on détourne le problème du racisme (par des brochures et des commentaires) en le présentant d'un point de vue très partial. Finalement, le but est de réveiller la sympathie chez ce ‘groupe cible’ d'enfants de douze ans, pour les réfugiés politiques en particulier et les étrangers en général, ceci d'une manière très subjective, une attitude qui dans l'enseignement, ne devrait pas trouver sa place. La tromperie et la tentative d'endoctrinement des élèves d'une manière grossière est un nouvel aperçu de la duperie populaire. Que le ‘groupe cible’ soit des enfants de douze ans ne fait que rendre la chose plus grave encore ». Deux ans plus tard, le Jeune Théâtre fut l'objet d'une autre attaque. Hilde Vienne, conseillère communale Vlaams Blok à Anvers protesta contre le fait que dans la pièce The Breakfast

Club de John Hughes, on voyait des jeunes fumer un joint. D'après Vienne, la pièce incitait les jeunes à se droguer et elle exigea que les jeunes spectateurs reçoivent à l'entrée une brochure explicative sur la drogue. Son intervention relevant plus de la censure qu'autre chose, les autres groupes politiques décidèrent à l'unanimité de ne pas intervenir. En février 1992, Isidoor Buelens, sénateur Vlaams Blok, entama une campagne de diffamation contre l'écrivain Tom Lanoye qui avait à la demande du conseil des enseignants, commencé le 21 février le try out de son show littéraire portant le même nom que son roman : Kartonnen Dozen, au collège Sainte Rita, à Kontich. Deux jours avant la présentation, Buelens, probablement informé par son fils qui fréquentait le collège, téléphona au directeur de l'établissement. En ce qui concerne le déroulement de cette conversation téléphonique, nous laissons la

parole au directeur Duden qui a envoyé à ce propos, une lettre au Morgen : « En tant que ‘père inquiet’, il exigea que le directeur du collège, c'est à dire moi, interdise la représentation de la pièce parce que Lanoye est un homosexuel. Lorsqu'il m'a demandé si j'avais lu le livre de Lanoye, Kartonnen Dozen, je lui ai répondu qu'évidemment je l'avais lu. Lorsque je lui ai demandé si lui avait lu cet ouvrage ou d'autres livres de Lanoye, il put seulement me répondre qu'il connaissait Lanoye via le magazine t'Pallieterke... je lui expliquai que la soirée littéraire en question s’adressait uniquement aux élèves des classes supérieures (16-17 ans), qui avaient d'ailleurs reçu une introduction au cours de néerlandais. J'insistai sur le fait que j’avais choisi Lanoye parce qu'il était un jeune écrivain prometteur dans le paysage littéraire flamand et qu'en outre, grâce à Kartonnen Dozen, Lanoye était devenu ces derniers mois, un des écrivains les plus vendus en Flandre. Lanoye est un homosexuel, soit, je fis alors remarquer que dans ses ouvrages, il décrit

d'une manière très subtile les sentiments humains, dont l'amour, et lorsqu'il parle de ses sentiments homosexuels, il le fait d'une manière tendre et émouvante. A la question de savoir si en tant que directeur d'une école catholique, j'approuvais l'homosexualité, j'ai répondu au sénateur Buelens que parmi les valeurs fondamentales défendues par tout chrétien, il y avait la tolérance. La dernière question que Buelens me posa, c'était de savoir si j'acceptais que Lanoye ridiculise la foi. A cela j'ai répondu que Lanoye se payait la tête de ceux qui se disaient chrétiens sans l'être réellement. Le sénateur Buelens a terminé l'entretien en disant qu'il ‘entreprendrait d'autres démarches’. » Les « autres démarches » d'Isidoor Buelens se résumèrent à l'envoi d'une lettre au courrier des lecteurs du magazine d'extrême droite t'Pallieterke dans laquelle il fit de la situation un récit haut en couleur et subjectif. Si un mandataire du Vlaams Blok a réagi si violemment aux prestations de

Lanoye dans les écoles, ce n'est évidemment pas à cause du contenu de Kartonnen Dozen (Buelens reconnaît d'ailleurs lui même qu'il n'a pas lu le livre) mais bien parce que Lanoye, comme d'autres écrivains et intellectuels, a pris la parole lors de la première réunion publique de Charta 91. Dans le journal du parti de mars 1992, Jan Stalmans, alias Luc Dieudonné, décrit de la façon suivante les opposants au Vlaams Blok : « Même l'homosexuel et violeur littéraire Tom Lanoye, qui se trouve si amusant, a eu l'occasion de jeter en pâture l'extrait d'un vaudeville autosatisfait. Quelqu'un de plus sérieux, autant dire dramatique, le professeur Jaap Kruithof, n'a pas pu s'empêcher de ressortir du placard le cadavre poussiérieux de Marx. Lo’deur de moisi qui s'en échappait a atteint de plein fouet notre précieux organe olfactif. Le présomptueux Hugo Claus, quant à lui, n'a rien trouvé de mieux que d'ânonner un vieux poème... »

Charta 91 a entre autre contribué au succès de la manifestation du 22 mars 1992, « Pour la Tolérance », considérée par beaucoup comme étant une manifestation anti-Vlaams Blok. D'ailleurs, la conférence de presse donnée par les jeunes du Vlaams Blok, et qui était dirigée contre la manifestation, en est la preuve flagrante puisqu'elle présentait également une contre manifestation : « Un barrage contre les élucubrations multiculturelles ». Dans le numéro d'avril 1992 du journal du parti. le député Joris van Hauthem a donné un aperçu des armes principales utilisée par le Vlaams Blok contre « cette terreur intellectuelle »: « La libre pensée nationale flamande, ennemie des enquiquineurs pédants qui se prennent pour le centre de l'univers, ennemie des héritiers de mai 68 qui actuellement, détiennent les rênes du pouvoir, ennemie de tous ces nombrilistes malpropre, sclérosés, totalitaires, oisifs qui sont persuadés d'avoir découvert l’eau chaude et qui prennent les

citoyens pour des nigauds incapables de s'assumer ». Il est clair que le Vlaams Blok avait aussi son mot à dire en ce qui concerne l'action Anvers, capitale culturelle Européenne 1993. Le 6 février 1992, des pourparlers pour l'accord de gestion se déroulèrent au sein du (nouveau) Conseil provincial d'Anvers. Peu avant la réunion de celui-ci, le Vlaams Blok organisa une conférence de presse au cours de laquelle il fit part de son point de vue en matière de politique provinciale. Le ton est donné dans le second chapitre de la note adressée à la presse et qui s'intitule Culture : « La principale tâche du Conseil provincial consiste à promouvoir et à développer notre culture néerlandaise, autrement dit à défendre notre individualité (culturelle). Deuxièmement, l'administration culturelle de la province doit accorder son l'attention aux cultures populaires européennes, ceci en vue d'une future Europe des peuples. Ce

qu'on appelle la société multiculturelle a conduit notre peuple à vivre sur une véritable poudrière ethnique. Elle doit donc être fermement combattue. Une population qui veut survivre doit posséder son propre territoire où, de toute évidence, sa culture existe et domine ». Sous le slogan « Anvers, capitale culturelle 93 », on peut lire : « Anvers '93 se doit d'être une fête de et pour la culture néerlandaise. Le discours multiculturel est vain et inadmissible, d'autant plus qu'il constitua à l'origine (1985) le fondement des fêtes culturelles de la ville... Nous affirmons que la province ne doit plus verser un franc tant que subsitera le slogan « Antwerpen, where culture is capital ». Le Vlaams Blok opte pour le slogan : “Antwerpen, hier spreekt men Nederlands!” (nvers, ici on parle le néerlandais !)... Nous nous opposons à l'emploi de l'anglais, qui est une initiative prise par le secteur du diamant en collaboration avec l'administration

provinciale et qui représente un véritable blâme pour la députation. » Lors d'une séance au Conseil provincial, Ignace Lowie, chef de groupe Vlaams Blok, ne mâcha pas ses mots : « Nous accueillerons avec enthousiasme toutes les initiatives qui seront prises en vue de créer un meilleur contact avec les cultures populaires européennes. Nous boycotterons toute tentative de création d'une communauté multiculturelle ou d'intégration. Nous n'avons d'ailleurs pas l'intention d'empêcher tout ce qui peut provoquer la soi disant intolérance. On ne peut bâtir une société multiculturelle à moins de supprimer quelques libertés démocratiques fondamentales et en premier lieu la liberté de pensée (sic) et la liberté d'association. Il s'agit à présent de favoriser notre propre peuple. Et certainement le quart monde. »

Les artistes flamands qui évoquent dans leurs chansons l'existence de gens d'une autre couleur de peau ou des réfugiés politiques, qui, proclament qu'ils conçoivent parfaitement une société multiculturelle ou qui par malheur, n'ont pas la peau blanche, ont toujours produit le même effet sur le Vlaams Blok, celui de la couleur rouge sur le taureau. Lorsque, quelques années auparavant, Walter Grootaers et les Kreuners ont participé à la réalisation du disque « Couscouskreten », avec quelques personnalités de partis politiques de tous bords, le Vlaams Blok s'est empressé de reprendre l'expression « couscouskreten » pour critiquer et désigner les gens qui défendent une société multiculturelle. Cet exemple est bien anodin à côté de ce qui arriva à Alida Neslo en 1987 lors de la fête du 11 juillet qui se déroule chaque année sur la Grand-place de Bruxelles (le 11 juillet est la date officielle de la fête culturelle de la Communauté Flamande).

Alida Neslo est une actrice hollandaise originaire du Surinam qui a vécu et travaillé pendant de nombreuses années à Anvers. Pour la fête de la Grand-place, les organisateurs lui avaient demandé de bien vouloir déclamer quelques textes de Multatuli, dont Saïdjah et Adinda (1987 était l'année Multatuli). Quelques jours avant le 11 juillet, une lettre anonyme de mécontement arriva au courrier des lecteurs de la Gazet van Antwerpen annonçant que l'extrême droite n'était pas d'accord avec la présence d'Alida Neslo. Le soir prévu, l'apparition de l'actrice sur le podium fut le prétexte à tous les excès. Un groupe de militants du Vlaams Blok ainsi que quelques membres du VMO, dirigés par Werner van Steen, commencèrent à jeter des pavés et voulant couvrir la voix d'Alida Neslo hurlèrent des slogans racistes : « Pute noire », « White Power », « Singe, retourne à ton arbre »,... pour ne citer que quelques injures parmi les

moins obscènes de leur répertoire. Cependant, Neslo ne se découragea pas pour autant; elle fut d'ailleurs longuement et vivement applaudie par la majorité du public. La presse et les milieux politiques critiquèrent à l'unanimité l'émeute provoquée par les militants du Vlaams Blok lors des festivités du 11 juillet. Le parti, pour sa part, estimait que cette violence était légitime. Et le 22 novembre 1987, lors du congrès électoral, Gerolf Annemans défendit les agissements des militants du Vlaams Blok en ces termes : « Borms n'est pas mort pour qu'Alida Neslo soit autorisée à monter sur un podium sur la Grand place de Bruxelles ». Le 5 septembre 1991, à Lint, la jeune chanteuse Isabelle A. eut droit au même sort. Ce jour là, la BRTN ditfusait en direct de Lint son émission « Panorama » réalisée

suite à la polémique soulevée par l'accueil probable dans cette commune de 150 réfugiés politiques. La Croix Rouge voulait héberger les demandeurs d'asile dans un couvent inoccupé. Le but de l'émission était donc de confronter les partisans et les opposants à cette décision. Il était prévu qu'Isabelle A. se produise plusieurs, fois durant l'émission. Malgré les mesures de sécurité prévues, une dizaine de militants du Vlaams Blok réussirent à pénétrer dans la salle et à se mêler au public. Lorsque la chanteuse entonna une chanson qui parlait d'un homme noir, les militants du Vlaams Blok se mirent aussitôt à déclencher la pagaille. Ils déployèrent des banderoles, hurlèrent des slogans comme « Eigen Volk eerst » (Notre peuple d'abord) pour empêcher Isabelle A. de continuer à chanter. Aux fêtes du 11 juillet en 1992, le Vlaams Blok alla encore plus loin. Dès le début de festivités qui se déroulaient sur la Grand-place de Bruxelles, les militants du

Vlaams Blok et du Taal Aktie Komitee provoquèrent des accrochages avec les gens de la Volksunie qui vendaient des autocollants avec le slogan « La Flandre contre le racisme ». Un peu plus tard, quand Willem Vermandere commença son spectacle, ce fut la débandade générale, une débandade vraisemblablement orchestrée par le Vlaams Blok. Les militants du Vlaams Blok essayèrent d'empêcher Vermandere de chanter en scandant des slogans comme « Notre peuple d’abord », « La Belgique, qu'elle crève! », « Les rats rouges, foutez le camps! », etc. D'après le journal De Morgen, les parlementaires du Vlaams Blok Filip Dewinter, Wim Verreycken, Xavier Buisseret, Gerolf Annemans et Francis van den Eynde étaient également de la partie. Comme les slogans n'empêchaient pas Vermandere de poursuivre, il y eu un concert de sifflets et on jeta des pavés. Mais Vermandere, encouragé par de chaleureux applaudissements, parvint à

terminer son programme qu'il conclut par un bref commentaire : « Hier contre les immigrés, aujourd'hui contre les personnes qui pensent différemment, demain contre... » et lorsqu'il entama la chanson finale « Bange blankeman » (ce qui signifie « blanc peureux ») des militants du Vlaams Blok se précipitèrent en hurlant vers le podium. Quelques mètres avant le podium, ils furent arrêtés par une partie du public formant une barrière humaine. Même les parlementaires de la Volksunie, Vie Anciaux et Willy Kuypers, qui assistaient à la fête, tentèrent d'arrêter les militants du Vlaams Blok complètement déchaînés. Finalement, la police intervint pour les faire reculer; l'incident se termina en véritable bataille rangée entre les policiers et les militants du Vlaams Blok qui lançaient des chaises et se servaient de bâtons et d'aérosols. Deux policiers furent blessés et un spectateur fut complètement couvert de produit mordant. Six militants du Vlaams Blok qui avaient été arrêtés, durent répondre de leurs actes devant la justice.

Ce raid organisé par le Vlaams Blok suscita l'effervescence dans la presse et rue de la Loi. Aussitôt, Vic Anciaux annonça qu'il avait la ferme intention d'intenter un procès contre le Vlaams Blok tandis que le Ministre de la Justice, Melchior Wathelet, déclara que s'il le fallait, il utiliserait son droit de poursuite ministériel afin de les traduire en justice. Le vice-président du Vlaams Blok, Roeland Raes, fit savoir au nom du Vlaams Blok que la prestation de Willern Vermandere constituait une véritable provocation et qu'il s'en lavait les mains. Entretemps, le journaliste Dirk Achten, du Standaard, publia un article commentant le comportement du Vlaams Blok en ces termes : « Ce n'est pas le premier incident. Auparavant, Alida Neslo a été huée un 11 juillet lors de sa prestation sur le podium de la Grand-place de Bruxelles, uniquement à cause de sa couleur

de peau. Mais jamais encore, les troupes de choc formées par les extrémistes du Vlaams Blok n'avaient osé pousser la violence aussi loin, et d'une façon aussi bien organisée. Evidemment, ce raid a été parfaitement préparé. Provoquer l'angoisse, voilà le but réel de l'opération. On veut créer une atmosphère de terreur de telle manière que le chanteur n'ose plus chanter, de telle manière aussi que même un esprit critique se soumette à la violence. Une atmosphère intimidante et menaçante. Ce n'est pas possible, c'est inadmissible. Nous ne sommes plus dans une Flandre où il fait bon vivre et où les esprits sont libres... Le Vlaams Blok attribue ces incidents à la défaillance de l'organisation. On aurait suscité les actes de violence et on pouvait donc s'attendre à ce que quelques jeunes pleins d'enthousiasme répondent à la provocation. Voilà à quoi cela se résumerait. Provoqués ? Par une chanson ? Le Vlaams Blok présente les faits comme si Vermandere s'était heurté à l'indignation d'un groupe minoritaire alors qu'il s'agissait

d'une action minutieusement préparée et dont le message implicite est le suivant : ‘Les organisateurs, de préférence tous les organisateurs, feraient bien de s'adapter aux désirs du parti, car dans le cas contraire, d'autres jeunes enthousiastes sont prêts à tout casser’. La technique n'est pas nouvelle. Par le passé, elle a été maintes fois utilisée et perfectionnée. Avec succès. » Une bonne partie de l'opinion publique et des milieux politiques fut à juste titre profondément choquée par ce raid sur les fêtes de Bruxelles du 11 juillet 1992. Malheureusement, beaucoup moins de personnes se sont inquiétées des attentats perpétrés par des extrémistes de droite contre des cibles culturelles et qui ont parfois pris une tournure bien plus dramatique. C'est ainsi que le 2 février 1980, un commando du VMO attaqua la librairie progressiste « De Rode Mol », située à Malines. L'intérieur de la librairie et les locaux du premier étage furent entièrement

détruits et deux personnes présentes lors de l'attaque furent rouées de coups. Parmi les assaillants, il y avait un certain Luc Dieudonné, mentor de KOSMOS, service de renseignements du Vlaams Blok, chargé au sein du parti de la formation des cadres sur « la gauche et l'extrême gauche ». Lors du procès des personnes inculpées pour cette attaque, Dieudonné chercha à se protéger en déclarant que « les inculpés avaient fait ce que les pouvoirs publics auraient dû faire depuis longtemps, c'est à dire s'insurger contre ce genre de littérature vendue dans les librairies de gauche ». Dans la nuit du 8 au 9 juillet 1982. un grave incendie éclata dans les locaux du centre culturel progressiste « King, Kong », situé rue de l'Empereur à Anvers. Toute la partie supérieure du bâtiment ainsi que les bureaux et la salle de réunion disparurent dans l'incendie. La salle du rez-de-chaussée échappa en partie aux flammes mais il fallait la rénover pratiquement entièrement pour

pouvoir la réutiliser. Pour la police et les pompiers, il était clair qu'on avait affaire à un incendie criminel, motivé par des raisons politiques. En effet, quelques années auparavant, une nuit, des inconnus avaient déjà tenté de détruire par le feu ce même centre culturel en jetant de l'essence dans la boîte aux lettres et en mettant le feu à la porte d'entrée. Par chance, le feu s'était éteint de lui même. A ce moment, il y avait des personnes présentes mais elles ne s'étaient pas rendu compte du danger. L’enquête relative à ces deux incendies et qui a duré des années n'a jamais donné de résultat concluant. C'est vers le milieu des années quatre-vingt que les événements prirent une tournure inattendue. Le 30 novembre 1985, suite au refus essuyé par le Voorpost, qui voulait organiser une manifestation pro apartheid, le centre culturel « King Kong » entretemps rebaptisé « De Ruimte », fut à nouveau victime d'un incendie criminel.

Cette fois, les locaux du rez-de-chaussée qui venaient d'être restaurés, étaient visés. Grâce à l'intervention rapide des forces de police d'Anvers, les dégats furent limités et deux des trois personnes qui avaient jeté les cocktails molotov furent arrêtées le soir même. La troisième put s'échapper mais se présenta spontanément à la police une semaine plus tard. Les auteurs étaient Rudi Brogniet (le fils de Juul Brogniet, le chef du VMO pour la région de la Campine), Werner de Vos (un sympathisant du VMO et d'ODAL) et Eddy Versluys (membre du groupe ODAL et candidat du Vlaams Blok pour le canton Boom Kontich). Durant leur procès en 1989, leurs trois avocats, Bart vander Moeren, Fred van Raemdonck et Marijke Dillen, ne firent volontairement aucune allusion aux éventuelles motivations politiques de leurs clients. Mais lorsque les enquêteurs interrogèrent Eddy Versluys qui avoua compter à son actif une demi douzaine d'autres incendies criminels, ils apprirent de sa bouche même que ces incendies avaient été perpétrés pour des

raisons politiques. En comparant le modus operandi de différents incendies, les enquêteurs par, vinrent à la conclusion qu'effectivement, Versluys était bel et bien l'auteur de l'incendie qui avait ravagé le centre culturel « King Kong » en 1982. Versluys fut arrêté mais, relâché cinq jours plus tard, il disparut dans la nature. Malgré des années de recherche, personne n'a jamais retrouvé sa trace. D'après les enquêteurs, il vivrait quelque part en Allemagne et travaillerait dans le secteur des transports. Entretemps, il s'est avéré qu'à l'époque de l'incendie du « King Kong », il faisait son service militaire et que son cas relevait donc de la juridiction militaire. Début 1991, le dossier fut transféré au tribunal militaire et c'est le substitut du procureur militaire Van Brusselen qui prit l'affaire en main. Dans la nuit du 21 au 22 septembre 1985, les locaux de la librairie PVDA « De Geus », située Kleine Laan à Saint Nicolas, ont à leur tour subi un incendie criminel. Les

auteurs, Luc Onbekent et Ronald van den Brande (tous deux membres du groupe ODAL et fervents partisans du Vlaams Blok), avaient fait preuve de tant de maladresse qu'ils furent arrêtés le soir même de l'attentat. Pendant que Ronald van den Brande mettait le feu à la librairie, Luc Onbekent montait la garde au dehors. Il devait être très nerveux car lorsqu'un noctambule croisa son chemin, il lui asséna un coup de poing en plein visage « au nom du VMO ». Le malheureux témoin déguerpit et, croyant qu'on était en train de voler dans la librairie, téléphona au 906. La police se rendit donc rapidement sur les lieux et on maîtrisa rapidement le feu avant qu'il n'atteigne les habitations voisines. Comme la police disposait d'un signalement très précis et que Luc Onbekent avait été assez stupide pour se rendre sur les lieux de son héroïque méfait quelques heures à peine après l'incident pour constater les dégats qu'il avait causés, il fut arrêté le

soir même, Quand on amena l'affaire devant le tribunal, le 24 octobre 1985, le président et le procureur accordèrent davantage d'attention aux motivations politiques de l'attentat. Tant Onbekent que Van den Brande purent se vanter d'avoir à leur actif un palmarès important d'actes de violence à caractère politique. Un an auparavant, Luc Onbekent avait été reconnu coupable de tentative de meurtre sur la personne d'un jeune marocain et condamné (pendant son procès, il déclarera : « parce que les Marocains doivent retourner chez eux »). Le groupe ODAL le considéra dès lors comme « prisonnier politique ». Il fut relâché anticipativement en juillet 1985. Van den Brande semble aussi avoir fait partie du groupe ODAL. En octobre 1982, il fut accusé d'avoir troublé l'ordre public durant les fêtes du premier mai à Saint Nicolas et d'avoir attaqué un café d'immigrés. Selon l'enquête judiciaire, il s'avéra que l'incendie avait été perpétré après un

souper aux moules organisé par le groupe ODAL dans le café de Bert Eriksson. Quelques heures avant le souper, « l'événement » avait été rehaussé par « l'inauguration de l'année politique du groupe ODAL ». Après le discours politique de jef Eggermont, chef du groupe ODAL, Onbekent et Van den Brande s'étaient mis à boire plus que de raison et prirent plus tard dans la soirée un train à destination de Saint Nicolas. Là, ils se sont retrouvés devant la porte d'entrée de « De Geus », qu'ils ont forcée pour pénétrer dans le local et mettre le feu à trois endroits différents. Lors de son arrestation, Onbekent était en possession de deux briquets et du discours stencilé de Jef Eggermont. En parcourant le texte en question, on pouvait lire que l'on « avait formé un groupe de jeunes au sein d'ODAL pour une période d'essai de six mois" ». A l'époque de l'incendie, Onbekent et Van den Brande avaient respectivement 22 et 23 ans.

Dans la nuit du 9 au 10 novembre 1985, à quatre heures du matin, un inconnu tira plusieurs coups de feu en direction de la cafétaria de l'association brugeoise « Volkshogeschool », « De Koele Kikker ». Une balle de 9 mm traversa la vitre et fit voler une petite poutre en éclats, pour finalement atteindre une consommatrice dans le dos. 15 personnes environ étaient présentes dans la cafétaria et depuis la rue on pouvait parfaitement voir l'intérieur de l'établissement, encore éclairé à cette heure là. Par conséquent, le tireur, qui était muni d'une arme de gros calibre, savait pertinemment bien qu'il tirait sur des gens. Une demi heure plus tard, ce fut le tour du Fonds Masereel, dont les locaux sont situés non loin de la cafétaria, de subir le même sort. A nouveau, une balle traversa la vitre de l'étalage, détruisant partiellement le matériel exposé.

Au début, l'enquête judiciaire n'avançait pas, jusqu'à ce que l'affaire connaisse un rebondissement inattendu. Différents témoins qui ne se connaissaient pas entre eux, déclarèrent à la BSR et au parquet que le tireur était probablement un certain Alex van 0., ancien para et ami de la famille Spinnewyn. L’auteur de l'attentat s'était montré bien imprudent puisque quelques semaines après les faits, il avait rempli le sondage d'un journal communal de Bruges en le signant de son nom entier. A la question « Quel est le meilleur bistrot de Bruges ? », il répondit : « De Koele Kikker, même si on y sert des cocktails de plomb ». Son film préféré : « Schutters op pad » (Les tireurs en vadrouille) et la secte la plus chouette : « Le Ku Klux Klan section Bruges ». Enfin, il déclara que Roger Spinnewyn était « le Brugeois du siècle »et termina en répondant que la meilleure manifestation sportive de l'année était « Le match de boxe à la Villa Djava ». Les divers éléments violence, paras, extrême droite, Spinnewyn, les balles 9 mm et la Villa

Djava attirèrent l'attention des enquêteurs : l'attaque du café progressiste « Villa Djava », le 1er décembre 1984 perpétrée par trois membres du NJSV se solda par un séjour à l'hôpital pour trois personnes. Le commandu du NJSV était parvenu à s'échapper mais avait été appréhendé un peu plus tard dans la soirée alors qu'il était dans les environs de la maison des jeunes de Bruges « De Zille ». Patrick Spinnewyn, Gino de Moor et Alex van Oeteren furent arrêtés. Au moment de leur arrestation, ils étaient en possession de chaînes et de balles 9 mm. Un an auparavant, Patrick Spinnewyn, qui avait fait son service militaire chez les paras, avait été démobilisé. Guy de Moor, le meneur du groupe, avait fait son service militaire dans la même unité paracommando que Spinnewyn et Van Oeteren. Alex van Oeteren était membre du NJSV et militant actif au Vlaams Blok avant, ou pendant son service militaire. Il

avait tiré sur le Fonds Masereel et la cafétaria de l'asbl « Volkshogeschool » de Bruges « parce qu'il en avait marre des gauchistes ». Quiconque veut connaître le genre de culture qui remporte les suffrages du Vlaams Blok doit se contenter de maigres indications. Fin 1991, Karel Dillen publia un livre intitulé Europese Gedichten (Poèmes européens). Comme son titre l'indique, il s'agit d'un recueil des poèmes européens préférés de Dillen. Il passe en revue des « célébrités » comme Gerrit Achterberg et Paul van Vliet, une série impressionnante de poètes patriotiques, de collaborateurs actifs, d'auteurs de prose fasciste : Wies Moens, Robert Poulet, René de Clercq, Jos Vinks, Ferdinand Vercnocke, Raymond Tollenaere et Bert Peleman. Pour ceux qui ne connaissent pas les « œuvres » de ces messieurs, nous vous livrons un court extrait du Chant de combat de la milice thioise écrit par Bert Peleman :

« Le peuple réclame des soldats Le peuple réclame un héros Pas de scrupules, pas de discussions Pour le Pays Thiois : à nouveau oui Le peuple règnera Pour le bien être et par besoin Fièrement, nous marchons Pour le travail et pour le pain! » Enfin, le Vlaams Blok met à la disposition des membres et des sympathisants un service de vente de livres par correspondance, dont le parti fait la publicité chaque mois dans son journal. Parmi ces livres, on trouve : Joris van Severen, Ma collaboration, Un homme du Front de l'Est raconte, Cyriel Verschaeve, La fuite et la répression, Als runnen rond het zonnerad (La course autour de la roue solaire), Récits d'exil, Le miracle Borms. Il y a également quelques bandes dessinées : Le Lion des Flandres, Les Hommes de la Flandre, Berten Rodenbach, Tijl

Uilenspiegel, Sterke Jan (Jean le Fort),... La progression électorale du Vlaams Blok semble aider aujourd'hui encore le kultuurkampf du parti. Lorsque nous avons présenté l'édition flamande de ce livre le 3 octobre 1992 à la foire du livre alternatif d'Anvers, un commando du Vlaams Blok a envahi la salle et deux visiteurs ont été tabassés et ont eu une commotion cérébrale.

La politique de défense En ce qui concerne la défense, le Vlaams Blok a adopté depuis le début une attitude ambiguë. D'une part, il est partisan d'une armée européenne forte (avec de préférence et de surcroit une armée flamande) et d'autre part, il soutient le point de vue de l'OTAN. Par conséquent, le Vlaams Blok est fermement opposé au désarmement unilatéral et ne laisse jamais passer une occasion de critiquer le mouvement pacifiste (qu'il taxe néanmoins « d'idiots utiles »). Le slogan « Il vaut mieux un missile dans son jardin qu'un Russe dans sa cuisine » largement diffusé par le parti est le slogan le plus frappant de sa politique en matière de défense. Dans ses Principes de base, le parti présente son idée d'une Europe forte : « ...tant que l'Europe ne sera pas unifiée et qu'elle ne disposera pas de sa propre défense

pour pouvoir pratiquer sa politique, il est clair que les désa, gréments causés par le maintien de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord sont un moindre mal » D'après le Vlaams Blok, l’Europe unifiée doit être puissante, capable de se défendre, mais aussi armée de façon à pouvoir protéger sa liberté de manière indépendante. Le Vlaams Blok rejette l'idée d'une « Europe unifiée, capable de se défendre certes, mais coincée entre des blocs armés jusqu'aux dents parce que c'est une position dangereuse, insensée et mortelle ». Par ailleurs, le Vlaams Blok surprit autant ses partisans (surtout ses alliés du Mouvement Flamand) que ses détracteurs lorsqu'en 1988, sa direction critiqua violemment le gouvernement qui avait décidé de débarrasser le territoire national des armes chimiques de l'OTAN. Ces armes chimiques font partie de la stratégie de l'OTAN « Air Land Battle 2000 », qui autorise l'utilisation de gaz chimiques

comme armes stratégiques en cas de guerre. Alors que le Conseil flamand était sur le point d'adopter la résolution du député Volksunie, Vic Anciaux, qui prévoyait l'interdiction d'installer des armes chimiques sur le territoire flamand, Filip Dewinter plaida longuement en faveur de l'installation de ces armes sur le territoire. Il faut croire qu'aux yeux de la direction du parti, la répulsion qu'éprouve la population à l'égard des gaz chimiques, qui a gardé en mémoire les conséquences dramatiques de leur utilisation pendant la Première Guerre mondiale au Front de l'Yser, n'est pas vraiment à prendre en considération. Lors du débat au Conseil flamand, Dewinter alla même jusqu'à mentionner le nom d'Adolf Hitler afin de démontrer que la stratégie d'attaque flexible de l'OTAN était la seule envisageable : « Si la ‘théorie d'attaque flexible’ défendue depuis plus de quarante ans par l'OTAN fonctionne réellement, cela prouve que pendant la

Deuxième Guerre mondiale, on n'a jamais utilisé de gaz de combat. Du reste, Hitler savait qu'en attaquant avec de telles armes, la riposte serait immédiate et se traduirait par un ‘second strike’, où l'on utiliserait précisément ces terribles armes. Hitler savait que les alliés disposaient de ces armes chimiques et apparemment, cela suffisait à l'effrayer. Les Allemands, comme les Alliés, étaient terrifiés à l'idée que cette tactique puisse se retourner contre eux. C'est grâce à la ‘théorie de la riposte flexible’ que l’Europe a pu bâtir son avenir, sur base d'une paix qui dure depuis plus de quarante ans. » Avec les événements récents dans les pays de l'Est, le Vlaams Blok a dû rectifier le tir en matière de politique de défense. En février 90, l'idéologue du parti, Willy Smout, définit la nouvelle optique du Vlaams Blok dans le journal interne du parti : « En tant que nationalistes qui tendons vers la liberté des peuples, il est de

notre devoir de nous interroger sans plus tarder sur le futur rôle de l’OTAN et du Pacte de Varsovie. Le fait est que Gorbatchev défend le maintien de l’OTAN. Car sans OTAN, il n'y a plus de Pacte de Varsovie, et celui ci constitue la dernière arme de Gorbatchev dans un empire communiste au bord de l'asphyxie. D'autre part, les Américains veulent conserver l'OTAN comme porte d'accès à l'Europe des Douze. De cette manière, ils ont même la possibilité de devenir le l3e membre de la CEE, et de plus le membre dominant. En d'autres termes, une fois que le ‘monstre communiste’ sera définitivement vaincu, le moment sera venu pour les peuples d'Europe de ‘donner corps une puissance de combat proprement européenne au nom des peuples libres’. Nous reléguerons alors l'OTAN et le pacte de Varsovie dans une chambre sombre d'un musée d'histoire. » Pour justifier la puissance de combat de l'Europe, le Vlaams Blok est reparti en quête d'un nouvel ennemi et, se souvenant de la guerre du Golfe, l'a trouvé sous la forme des Etats arabes et de

l'intégrisme musulman : « Nous estimons que l'Europe n'est encore nulle part, maintenant moins que jamais, alors que nous continuons à nous montrer redevables vis à vis des Etats Unis, que nous sommes encore hésitants face à une Union Soviétique toujours menaçante et que la menace de l'Islam en provenance des pays méridionaux, pourrait s'avérer désastreuse pour l'Europe. » (Le président de Vlaams Blok, Karel Dillen, le 23 janvier 1991, au Parlement européen). Dans le plan de défense du Vlaams Blok pour l'Europe, il n'y a pas place pour les objecteurs de conscience. Les Principes de base du Vlaams Blok sont très explicites à ce sujet et prévoient l'instauration d'un service militaire effectif ou d'un devoir de travail pour les jeunes hommes et les jeunes femmes. Les objecteurs de conscience qui effectuent leur service civil dans les organismes socio-culturels sont considérés par le Vlaams Blok comme étant des infiltrés au service de la gauche, ou comme

des communistes. Dans une note en 10 points rédigée par le parti en 1988, on peut lire : « On (le gouvernement Martens VIII) veut réformer le statut d'objecteur de conscience dans le but de rétablir la ‘plus grande équité possible’. Le Vlaams Blok est persuadé qu'en réalité, il s'agit d'une intervention de la part du CVP et du SP visant à l'assouplissement de ce statut... Dans le passé, le statut d'objecteur de conscience a trop souvent servi à l'approvisionnement en personnel de confréries louches (particulièrement les organisations de gauche et celles qui s'occupent de déstabiliser la société). De cette manière, le statut a conduit à une discrimination entre les différents services nationaux obligatoires ». Manifestement, le Vlaams Blok fait grand cas de cette problématique. Le tout premier discours de Karel Dillen devant le Parlement européen, le 12 octobre 1989, et qui était intitulé « Le service militaire est un devoir du citoyen », reflète parfaitement le point de vue négatif du parti et de son président à l'égard du

statut d'objecteur de conscience : « Quelle est la vérité ? Depuis la Seconde Guerre mondiale, la paix et la liberté de l'Europe ont été préservées grâce à ceux qui ont accompli leur service militaire, devoir normal du citoyen d'un pays. Dans le cadre de leur service militaire et de l'OTAN, ils ont donc empêché la guerre. Du reste, il ne faut pas perdre de vue que l'objection de conscience et toute l'atmosphère créée autour d'elle affaiblit la protection de l'Europe et augmente ainsi le risque de guerre pour notre continent. C'est pourquoi, il faut veiller à ce que le soldat effectue son service militaire dans les meilleures conditions possibles. Le vrai objecteur de conscience a compris qu'il n'a droit à aucun privilège et qu'il doit accomplir un service civil d'une durée plus longue. Enfin l'Europe et ses nations ne tirent aucun avantage à favoriser la reproduction en chaîne ‘d'objecteurs de conscience’ qui sont protégés comme s'ils formaient une catégorie privilégiée et sont comme des animaux de compagnie de la faune progressiste se reproduisant à une

vitesse affolante. Ils ne servent ni l'Europe ni ceux qui les protègent! Le service militaire est le service pour la paix. Que ce Parlement vote plutôt une motion dans ce sens et il reste à espérer que beaucoup de ces soi disant objecteurs de conscience réfléchissent au fait qu'ils sont vraisemblablement plus motivés par la paresse que par une quelconque conscience embarrassée. » On retrouve cette même optique dans l'attitude du Vlaams Blok à l'égard du réseau Gladio. Lorsque fin 1990, le Sénat dut voter l'éventuelle formation d'une commission d’enquête parlementaire sur les agissements d'un réseau secret stay behind, seul Wim Verreycken, sénateur Vlaams Blok, vota contre. Et le 22 avril 1992, lorsque le Sénat établit le compte-rendu du rapport final présenté à la commission Gladio, Verreycken déclara que les responsables du réseau ayant refusé de donner les noms des agents du Gladio à la commission

(transgressant ainsi la loi) « méritaient d'être félicités ». Son intervention fut accueillie par des éclats de rire lorsqu'il essaya de prouver que le cabinet de la Défense, sous la direction du Ministre PS Guy Coëme, était infiltré par une « taupe rouge », dans laquelle chaque auditeur reconnut le collaborateur Rik Coolsaet, et que la commission aurait mieux fait de s'occuper de cette affaire : « Même les commentaires dans la presse, à l'époque où la commission entamait ses travaux d'enquête, qui faisaient état de la présence d'une ‘taupe rouge’ opérant dans le Ministère de la Défense précédent, n'ont pas fait l'objet d'une enquête. D'autre part, cette même taupe rouge a organisé des manifestations pour le désarmement unilatéral du bloc de l'Ouest, a mené une lutte active en faveur de la résistance de l'Ouest et quant à son amitié manifeste pour l'extrême gauche en général, n'importe quel observateur sérieux estimerait qu'il s'agit là d'indications d'activités subversives. Visiblement ce n'est pas le cas des membres de la commission. »

A la fin de son intervention, il était évident que Verreycken penchait pour la thèse d'un complot organisé par le KGB : « La nouvelle commission d'enquête qui vient d'être créée et qui a été du reste demandée par un des rapporteurs, pourrait peut être porter ses recherches vers un lien possible entre les agents du KGB effectivement démasqués et les mouvements pacifistes actuels dont les actes ne semblent avoir aucun objectif réel. Ce sont d'ailleurs ces mêmes mouvements pacifistes ‘sans corps’ qui cherchent un but à leur existence et tentent de trouver des appuis financiers en combattant le parti que je représente. » Et lorsque le 14 mai 1992, le Sénat dut voter la poursuite des enquêtes menées par la commission Gladio, Verreycken revint une nouvelle fois à la charge : « Cette motion criant victoire, cet autisme sournois, cet aveuglement à l'égard des réseaux de gauche qui nivellent la société, ne pourra pas compter sur la voix du Vlaams Blok. » (La

motion fut approuvée, seul le Vlaams Blok la rejeta).

Les dissidents La haine virulente à l'égard des immigrés est le ciment qui consolide les liens entre les différentes factions du Vlaams Blok (le Voorpost, le VMO, Were Di, Protea, Pro Vita, les anciens du Front de l'Est, les révisionnistes, etc.). Bon nombre de membres du Vlaams Blok, qui considèrent avant tout le parti comme un lieu de lutte pour le nationalisme flamand, acceptent difficilement qu'une partie de la direction du Vlaams Blok suive inconditionnellement la trace politique de Jean Marie Le Pen, dont elle emprunte la politique raciste arbitraire. Le noeud du problème se situe au niveau de l'opposition insoluble entre le nationalisme populaire défendu par Karel Dillen et ses partisans et le nationalisme d'Etat prôné par les partisans révolutionnaires de droite de Le Pen.

Cette dualité provoque régulièrement au sein du parti des tensions mais aussi des divisions, dont la plus importante, connue à ce jour se situe au début 1989. En 1988, un groupe de dissidents essentiellement composé de cadres moyens se réunit dans le but de trouver une solution qui permettrait de rectifier la ligne du parti en matière d'immigration. A la mi-août 1988, ce groupe de mécontents adressa une requête confidentielle à Karel Dillen, dans laquelle il expliquait que la situation actuelle ne pouvait plus durer. Le grief principal qu'ils exprimèrent était le fait que « le parti a de façon exagérée et arbitraire soulevé la question de l'immigration (pour des considérations électorales à court terme) ». En outre, les dissidents considéraient que l'attitude du parti à l'égard des immigrés était un « non-sens économique et témoignait d'une attitude absolument asociale ». D'après les signataires de la requête, cet attitude avait fini par rendre le parti

incapable de réagir correctement à la réforme de l'État (en cours de discussion) et, en outre, le parti avait complètement perdu de vue la pensée thioise. Ils attribuaient tous ces manquements à l'incompétence du parti. Afin de présenter clairement la situation, la lettre se terminait par cinq requêtes : « Il faut mettre un terme a l'accent mis depuis trop longtemps et exagérément sur la problématique immigrée et abandonner la politique consciemment provocatrice qui d'un point de vue électoral s'adresse aux classes socialement inférieures et qui est donc minée à la base ». « Deuxièmement, il faut absolument abandonner une politique qui raisonne uniquement en termes de pouvoir et de pourcentage; il faut également que le parti soit en harmonie avec le nationalisme dont l'idéologie défend la notion de nation d'élite. En clair, cela signifie qu'à partir de cet instant, bien plus que ce n'était le cas auparavant, les gens dont l'intégrité laisse visiblement à désirer doivent être catégoriquement exclus des listes électorales et des organes du parti. Le

conseil du parti doit à nouveau représenter l'organe suprême du parti, ainsi les membres permanents et les mandataires les plus importants ne peuvent plus décider seuls de la politique. Enfin, il faut réorienter le comportement et le fonctionnement du Vlaams Blokjongeren (VBJ) et tendre vers une formation nationaliste de la jeunesse; il faut également mettre fin au sectarisme de l'organisation envers les jeunes ainsi qu'aux brutalités et au comportement entêté de certains de ses responsables ». Il est intéressant de savoir que Filip Dewinter, un adepte de Le Pen, était à l'époque le président du VBJ et qu'il est donc directement concerné par cette remarque. Le document était signé par une centaine de Flamands de droite et surtout d'extrême droite, dont Bert van Boghout, Gui van Gorp et Marcel Geets (à la direction de Were Di et de Dietsland Europa), Jan Cauberghs (élu entretemps à Hasselt comme député du Vlaams Blok), Marc Verrept

(secrétaire du Vlaams Blok pour l'arrondissement de Malines), Geert Wouters (membre du comité central du parti), Edwin Truyens (cofondateur du Vlaams Blok et idéologue du parti), Gerard Vandamme (président du Vlaams Blok de l'arrondissement d'Ostende), Renaat Vanheusden, Gerard Sleghers et Jan Wenmeekers (membres du comité pour le Limbourg), Mark Grammens (ex-rédacteur en chef de De Nieuwe et actuel rédacteur en chef du Politiek Journaal, et qui approuva les deux premiers paragraphes de la requête)... Les signataires du document considéraient cette requête comme étant un problème exclusivement interne au parti, ce qui n'empêcha pas le rédacteur en chef de 't Pallieterke, Jan Nuyts, d'être informé de l'action « à cause de son influence prépondérante sur Karel Dillen ». En publiant dans son journal du 25 août 1988 un article virulent composé de quelques extraits du document, Nuyts donna un véritable coup de semonce à Dillen. Depuis le véritable premier succès électoral

remporté par le Vlaams Blok en décembre 1987, Karel Dillen estime que le parti doit conserver la même ligne raciste et considère qu'il n'a pas à recevoir de leçon de qui que ce soit. Pendant ses vacances, Karel Dillen rédigea une lettre en réponse à la requête des contestataires, qu'il leur envoya le 31 août. D'après lui, si on a trop développé le thème de l'immigration, il faut incontestablement en imputer la faute à la presse : « je démens formellement que le problème des immigrés ait reçu un ‘écho exagéré’ au sein du parti. je tiens à insister sur le fait que la prose de De Morgen, Humo, etc. est un honneur pour notre parti. Personnellement, j'ai en horreur les tapes amicales venant de ce côté. Ce serait commettre une faute impardonnable que de confondre dans un moment de panique, par ignorance, inconscience ou pire encore, l'image du Vlaams Blok donnée par les médias avec la réalité du Vlaams Blok ». La grande percée électorale aux élections communales d'octobre 1988 (23 élus) conforta encore un peu plus la direction du Vlaams Blok dans sa conviction que la

stratégie politique raciste, adoptée jusque là par le parti, était la bonne. Le racisme, ajouté au « flirt politique » ouvert avec Le Pen, étaient devenus insupportables aux yeux des dissidents. Lors des deux ultimes réunions de réconciliation, qui se sont déroulées le 29 décembre 1988 et le 9 janvier 1989, ils comprirent que ni Karel Dillen ni ses partisans ne voulaient modifier leur stratégie. Le 27 janvier, la séparation fut définitive et un bon nombre de dissidents quittèrent le parti. Le 15 février, ils fondèrent le Nationalistisch Verbond Nederlandse Volksbeweging (Le Mouvement populaire d'Union thioise). Dans une dernière lettre adressée à Dillen, ils mirent une fois encore le doigt sur leur désaccord : « Une lacune excessive dans la formation peut conduire à des aventures politiques dangereuses. Il semblerait que le parti n'en soit pas conscient. En outre, la formation des cadres dans le parti n'est pas suffisamment développée et cette mentalité se traduit par la prise en main de la direction du parti par de jeunes plaisantins qui, non

contents de ne pas maîtriser leur propre langue et leur culture, ignorent en outre les principes élémentaires de l'idéologie nationaliste ». L'expression « aventures politiques dangereuses » se réfère à la campagne de délation entamée dans les écoles par les jeunes du Vlaams Blok à l'époque où ils étaient dirigés par Filip Dewinter. Pour plus de détails, voir la partie consacrée à l'enseignement. Dès sa création, le mouvement établit un programme politique en 10 points, qui était en fait le résumé de la Déclaration de Principes originale du Vlaams Blok, à l'exception bien entendu de la prise de position à l'égard des immigrés : « Un certain nombre d'immigrés installés sur notre territoire représentent une menace éventuelle pour la personnalité de notre peuple, c'est pourquoi il est capital d'adopter enfin une politique adaptée de l'immigration, de l'émigration et de la naturalisation... »

A l'origine, on aurait pu croire que ce départ du Vlaams Blok provoquerait une saignée électorale sérieuse pour le parti. En effet, parmi les dissidents, il y avait pas mal de gens qui, les années précédentes, avaient figuré sur les listes électorales du Vlaams Blok ou avaient rempli une fonction importante au sein du parti : Nico Michielsen (conseiller provincial à Anvers), Jaak Peeters (secrétaire national), Christine Peeters (qui, bien que figurant en troisième position sur la liste électorale, avait remporté plus de voix que Gerolf Annemans lors des élections européennes de 1988), Geert Wouters (président du conseil du parti et tête de liste pour la Chambre à Gand en 1987), Jan Arnou (ex-président du NSV), etc. Cependant, l'existence et les activités du Nationalistisch Verbond n'eurent aucune incidence sur la progression politique du Vlaams Blok. Le Nationalistisch Verbond prit également part aux élections du 24 novembre 1991 à Gand, mais dut se contenter d'un maigre score.

L'économie La pensée économique du Vlaams Blok est amplement détaillée dans trois publications différentes : les Principes généraux de Were Di, les Principes de base du Vlaams Blok et le programme économique du parti élaboré en 1980 par Edwin Truyens dans la brochure « Economie nationale flamande. Les perspectives financières pour une Flandre indépendante ». Ce texte est la version remaniée du discours de Gui van Gorp prononcé lors du Congrès du Vlaams Blok à Louvain, les 22 et 23 mars 1980. Marijke Dillen, Ludo Gerits, Fred van Raemdonck, Leo Wouters, le père Marcel Brauns et Geert Wouters ont d'ailleurs collaboré à la mise à jour du texte rédigé par Truyens. Dans ce texte, l'économie est elle aussi adaptée aux besoins humains à travers le solidarisme, appelé également le

solidarisme national. En élaborant cette idéologie, le Vlaams Blok est pleinement d'accord avec le VNV d'avant guerre et le Verdinaso, deux courants politiques autoritaires qui, pendant les années 30, ne pouvaient pas se supporter. Après la Seconde Guerre mondiale, le Solidaristische Beweging (Mouvement Solidariste) de 1947, dirigé par Frans van Mechelen, récupéra la théorie du solidarisme. Cette organisation, qui connut une existence éphémère, milita principalement pour la pensée thioise, l'amnistie et la solidarité avec l'Afrique du Sud. Plus tard, des organisations comme Were Di et Voorpost reprirent le flambeau solidariste. Comme nous l'avons expliqué dans Lin chapitre précédent, ce sont surtout les textes de l'encyclique papale Quadragesimo anno (1931) de Pie XI, et des penseurs fascistes comme La Tour du Pin, Sorel et le dictateur italien Mussolini, qui sont à la base du solidarisme. Cette doctrine rejette toute

forme de lutte et d'opposition des classes ainsi que le syndicalisme et prévoit une organisation corporatiste de la société. Ainsi que te traduit le Vlaams Blok dans ses Principes de base : « Pour le Vlaams Blok, le solidarisme représente l'expérience réelle et naturelle de la solidarité populaire. L'Etat se doit de reconnaître cette solidarité populaire comme fondement de la société. (...) En tant que parti solidariste, le Vlaams Blok revendique le rétablissement d'un Etat de droit afin de lutter contre la dictature des partis, des groupes de pression et des personnes. En tant que parti solidariste, le Vlaams Blok s'oppose à l'exploitation par le capitalisme libéral ainsi qu'aux systèmes de contrainte marxiste et communiste. Dans le but de combattre le marxisme et le communisme, le Vlaams Blok rejette toute forme de lutte et d'exploitation des classes. Pour que la société et l'individu puissent s'améliorer, il faut la collaboration active de tous, jeunes et vieux, de toutes les catégories professionnelles et de toutes les couches

sociales, tant au niveau de la vie sociale que professionnelle ». Les déclarations du Vlaams Blok sont à la fois ronflantes et terriblement vagues, il semble donc impossible de développer une telle politique économique (toutefois, en ce qui concerne l'antisyndicalisme, la stratégie fonctionne; nous en reparlerons plus loin). Dans la pratique politique quotidienne, le Vlaams Blok se borne à marquer son opposition aux « adjudications politisées » et au développement actuel des entreprises publiques. Le Vlaams Blok propose également « dans l'optique d'un marché européen le plus libre possible, une diminution rapide des subsides qui sont accordés aux entreprises publiques et qui encouragent leur privatisation ». Début 1992, dans la campagne que le Vlaams Blok vient d'entamer pour les élections européennes et communales de 1994, aucun thème économique ne figure au programme.

Mais bien entendu, le parti donne son avis sur certains dossiers indépendants comme l'ajustement des capitaux d'Agfa Gevaert ou la fusion Sabena-Air France. Chaque fois, le Vlaams Blok agit au nom de l'exigence morale que l'on appelle le « Vlaamse Verankering » (L'ancrage flamand).

L'Europe Dans le programme politique de base du Vlaams Blok, on trouve sous le titre « La Flandre et l'Europe » le texte suivant : « En tant que parti nationaliste, le Vlaams Blok reconnaît l'Acte Unique européen, exclusivement sur base d'une coopération entre communautés nationales. Les Etats actuels ne peuvent servir de fondement à la construction d'une Europe unifiée, au risque d'agraver la situation de la Belgique. C'est pourquoi l'unification de l'Europe doit être précédée d'une coupure nette avec l'unitarisme et le jacobinisme. Le Vlaams Blok affirme que la future politique européenne doit se fixer pour objectif l'obtention et le maintien de l'autonomie et de l'indépendance de l'Europe. L'Europe se doit de rejeter aussi bien l'impérialisme soviétique que la politique de pouvoir des Etats Unis. »

Ces dernières années, le Vlaams Blok s'est distancié de plus en plus de la future Europe unifiée. En mai 1988, Gerolf Annemans écrivit dans le journal interne des cadres du parti : « Le Vlaams Blok intègre la Flandre dans la nouvelle Europe, non pas avec des mots mais avec des conceptions claires de la forme et du destin de la civilisation de l'Europe Occidentale du 21e siècle. Allons nous laisser envahir cette civilisation par une culture en forme de plante grimpante devenue décadente et menaçante ? Est-ce que l'Europe deviendra une semi culture pseudo islamiste ? Est ce que le giron de l'Europe Occidentale restera l'endroit le plus dangereux de la terre ? Estce que l'Europe continuera à se laisser séduire par l’URSS ? Le Vlaams Blok cherche une réponse à toutes ces questions. » Les questions soulevées par Gerolf Annemans et qui figurent dans le tract électoral du Vlaams Blok pour les élections

européennes de 1989, se retrouvent dans certains slogans électoraux : « L'Europe ne doit pas être un cloaque de dégradations et de perversités. L'Europe ne représente pas seulement le triomphe de l'économie et de la technologie mais aussi celui de la civilisation et de la culture. Il faut s'attaquer fermement à la criminalité et au trafic de la drogue. Il faut protéger la cellule familiale et la famille nombreuse. Pas de meurtre sur des enfants à naître. Un enseignement de qualité pour nos enfants. Une tolérance réelle au lieu d'un pluralisme mensonger. » Dans la note en dix points de mars 1992, cela se traduit comme suit : « Il faut tendre vers une Europe confédérale avec un pouvoir central limité et un budget déterminé. » Le Vlaams Blok s'oppose également à la ratification des traités européens en matière d'union politique et monétaire (les accords de Maastricht). Le parti s'oppose au « mélange unitaire qui ne peut conduire qu'au centralisme européen,

au jacobinisme et à un attentat contre les peuples », d'après Marijke Dillen dans une tribune libre de la Gazet van Antwerpen. Dans le numéro de mai 92 du journal du parti, Filip de Man et Frank Vanhecke publient un condensé des motifs pour lesquels le Vlaams Blok est contre le Traité de Maastricht. En résumé, la principale pierre d'achoppement est l'instauration du droit de vote au niveau communal pour les ressortissants de la Communauté européenne qui résident dans les Etats membres de la Communauté européenne. Le Vlaams Blok craint en particulier que les ressortissants européens résidant dans le Brabant émettent un vote préférentiel pour les partis francophones et que, par conséquent, les partis flamands soient rayés de la carte politique.

Afin de pouvoir répondre aux futures normes européennes à partir de 1999, il faut que le pays ramène sa dette nationale à 60 % du PNB et son déficit budgétaire à 3 %. Le Vlaams Blok craint que le gouvernement belge soit incapable de venir à bout d'une telle tâche. Il craint également que le Système Monétaire Européen n'accepte pas la « séparation des biens en Belgique ». Le Vlaams Blok est scandalisé par le soi disant « déficit démocratique » (sic) de la CEE. Cela ne signifie aucunement qu'il manque un volet social au Traité de Maastricht mais bien que la Commission européenne détient trop de pouvoirs non contrôlés par le Parlement européen. Par conséquent, le parti craint également que le « principe de subsidiarité » auquel il tient particulièrement ne soit pas respecté. « En tant que nationalistes populaires nous déclarons unanimement que

la culture, les médias, la langue, l'éducation, (...) doivent rester entre les mains de nôtre propre peuple. Que les nations européennes travaillent de concert pour se protéger en ce qui concerne l'armée ou la monnaie, mais pour tout ce qui touche notre identité, les Eurocrates ne doivent pas intervenir ». Pour terminer, le Vlaams Blok éprouve également des difficultés avec la solidarité européenne : « On veut développer une solidarité économique au sein de l'Europe. Les régions les plus riches doivent aider financièrement les régions les moins développées économiquement. Il ressort des déclarations récentes de la clique des mendiants wallons. C'est-à-dire le PS, que les Wallons risquent le tout pour le tout pour profiter le plus possible de ces fonds. Bien que nous ne soyions pas en possession des chiffres, on peut supposer que les Wallons utiliseront 2/3 des différents fonds structurels, au détriment de la Flandre. » (Filip Dewinter essayait sans doute

d'introduire un nouveau vocabulaire : lors du débat sur le budget de 1992 à la Chambre, il taxa le Ministre Philippe Moureaux de « membre de la clique des mendiants wallons, c'est à dire le PS »). Cependant, le Vlaams Blok apprécie dans une certaine mesure le Parlement européen. Il en fait d'ailleurs partie, ce qui ne constitue pas vraiment un inconvénient pour lui, bien au contraire. Depuis sa nomination en 1989, Karel Dillen fait partie, avec 10 membres du Front National français et six membres des Republikaner allemands, du groupe technique des droites européennes. Au départ, quatre membres du MSI, le parti fasciste italien, désiraient également faire partie du groupe mais à cause de leurs divergences avec les Republikaner au sujet du Tyrol du Sud, ils finirent par en sortir. L'affiliation à un groupe constitué est un avantage sérieux tant pour les partis concernés que pour les parlementaires européens qui en sont

membres. En effet, lorsqu'un groupe est reconnu à l'échelle européenne, il reçoit une dotation européenne de 20 millions de francs qui couvrent les frais de fonctionnement, 16 de ses membres sont rétribués par le Parlement européen, il bénéficie de voyages gratuits, dispose de locaux de réunions dans tous les Etats membres de la CEE et son président (Le Pen) reçoit une voiture (une Citroën CX Turbo 2 blindée) avec chauffeur. En outre, il est clair que le Vlaams Blok joue un rôle plus important dans le groupe des droites que son poids numérique ne le laisse supposer. Filip Dewinter, qui n'a jamais caché ses ambitions pour une Internationale de Droite, peut poursuivre son chemin politique dans le contexte européen. C'est ainsi qu'il participa à la réconciliation entre les Republikaner et le Front National et qu'il tenta d'introduire le MSI dans le groupe.

Dewinter est également l'instigateur de la tentative de réconciliation entre les différents partis néonazis allemands, le NPD et les Republikaner, et entre le Centrumpartij et le Centrum democraten hollandais. Un rapprochement avec la Lega Lombarda (Ligue Lombarde) italienne fut également activement recherché.

Le fédéralisme Le fédéralisme ou confédéralisme, ainsi qu'on appelle la nouvelle structure de l'Etat en Belgique, ne trouve pas grâce aux yeux du Vlaams Blok. Le Vlaams Blok veut une indépendance totale de la Flandre, le premier pas vers la formation d'une fédération thioise (Groot dietse ou Grootnederlandse federatie), regroupant la Flandre, les Pays Bas et une partie du Nord de la France. Ici aussi, on puise totalement dans l'idéologie défendue par le VNV d'avant guerre et le Verdinaso. Les Principes de base du Vlaams Blok comportent à ce sujet quelques paragraphes qu'il faut bien interpréter : « Ceci dit, il est clair qu'on ne peut pas envisager la forme finale de l'autonomie de la Flandre, en terme de fédéralisme belge, comme un fédéralisme en rapport avec la Belgique. L’indépendance de la Flandre et l'autonomie de la Flandre signifient que la politique nationaliste flamande ne peut en aucun cas déboucher

sur des considérations ou des normes de type belge. Une politique nationaliste flamande ne peut jamais être pratiquée de façon à sauver l'Etat belge, le garder en vie, bien au contraire. » « L'indépendance et l'autonomie signifient que la Communauté flamande dispose des pleins pouvoirs de l'Etat et qu'elle peut ratifier des traités, déléguer des pouvoirs, attribuer des subsides et non l'inverse. En clair, cela signifie la réalisation d'un Etat indépendant flamand, la Flandre. Dans une Europe unifiée des nations, la seule forme possible de fédéralisme acceptable est un fédéralisme dans le cadre des Pays Bas unifiés. Vingt millions de Néerlandais du Nord et de Flamands doivent vivre à nouveau dans la future Europe unifiée en tant que peuple avec sa propre langue et sa propre culture, qui trouvera sa place, indépendante, dans l'Europe et préservera aussi son identité. »

« Nous ne voulons pas que la Wallonie constitue un frein à notre progression: nous n'avons pas oublié les leçons de 1815-1830! Nous ne voulons pas maintenir en vie l'embryon de la discorde et de la division, ni d'un bilinguisme central ! Dans la future Europe des nations, le Vlaams Blok se soucie aussi des Flamands qui vivent dans la Flandre du Sud, dans le contexte de l'Etat français actuel. Un pouvoir flamand, thiois, doit faire le nécessaire afin que ces Flamands puissent vivre sur leur propre terre. Pour terminer, le Vlaams Blok exige, aussi longtemps que l'Etat belge existera, le désancrage de la Communauté germanophone de la Wallonie, et ceci avec un droit à l'autodétermination pour cette Communauté ». Il ressort en outre d'une lettre rédigée par Gerolf Annemans, publiée dans l'hebdomadaire Solidair le 24 juin 1992, que le Vlaams Blok est très sérieux en ce qui concerne l'indépendance de la Flandre. La

lettre datée du 5 mai 1992, est adressée à l'ambassade d'une des Républiques devenues indépendantes de l'ex-Union Soviétique. Gerolf Annemans y entreprend une requête au sujet de la reconnaissance rapide d'un Etat flamand indépendant qui reste à ériger. Pour plus de clarté, nous traduisons le texte intégral de la lettre : « Excellence, en tant que le chef de groupe d'un parti qui a connu aux dernières élections belges un succès démocratique important, je me permets de m'adresser à vous. Bien avant l'effondrement de l'URSS, nous nous sommes toujours attachés à défendre, et nous étions quasiment les seuls, l'indépendance de (barré). Nous vous félicitons pour votre récente indépendance. Nous nous réjouissons de la chute de l'URSS et de la formation des Républiques indépendantes, qui ont été bâties sur ses ruines. Heureusement, nous avons été épargnés par les atrocités que votre peuple a dû endurer. Mais nous aussi, nous menons

depuis 150 ans déjà un combat acharné pour l'indépendance de la Flandre. C'est pourquoi nous nous permettons de nous adresser à vous. Dans une situation politique instable, l'indépendance à peine acquise par une nation dépend bien souvent d'une reconnaissance extérieure rapide. Dans ce cas, pourrions nous compter sur votre appui ? Ce serait un grand honneur pour nous si vous acceptiez de nous recevoir afin que nous puissions procéder à un échange de nos idées. La reconnaissance à terme d'une Flandre indépendante, de la part de votre pays constituerait un poids moral considérable. Cette rencontre, qui nous permettrait d'apporter quelques rectifications à une série d'informations contradictoires dans la presse au sujet de mon parti, non seulement nous donnerait l'opportunité de faire plus ample connaissance mais pourrait également être le départ d'une collaboration intéressante ».

L'idéologie thioise du Vlaams Blok se manifeste sur d'autres terrains également. C'est ainsi que le 2 juin 1992, devant le Conseil Flamand, les parlementaires du Vlaams Blok, Marijke Dillen et Roeland Raes, proposèrent un décret prévoyant ce qu'ils nommèrent le « Zannekinfonds ». Ce fonds, constitué à partir du budget flamand, aurait un double objectif : « Le renforcement des conseils adressés à l'Exécutif Flamand concernant la politique stratégique à suivre en matière de reconstruction dans la Flandre du Sud et l'attribution d'une aide matérielle, logistique et financière aux personnes ou associations dont les activités s'orientent directement ou indirectement vers la renaissance linguistique ou culturelle de la culture néerlandaise ou qui stimulent de manière générale la conscience néerlandaise en Flandre du Sud. »

Si jamais la Flandre décide de se mêler des affaires politiques d'une partie de la population française, il est certain que le tout Paris s'esclaffera. D'après les explications du texte, il semblerait que la Flandre du Sud désigne la Flandre française. Et dans le même texte, on peut lire : « Avec la volonté affirmée de voir un jour les Pays Bas réunis, en ayant conscience que les Pays Bas doivent obligatoirement exprimer leur solidarité en posant des actes politiques, il n'y a pas d'autre solution, ou alors le Conseil Flamand doit cesser pour de bon de se bercer de douces illusions et oser poser des actes politiques conscients ». Dillen et Raes ont appelé le fonds « Zannekinfonds » en référence à l'ancien Zannekin Arbeidsgemeenschap (« Communauté des travailleurs Zannekin ») qui avait été créé en 1942 par August Borms pour encourager les actions flamandes en Flandre française. Après la Libération,

l'organisation fut dissoute et la plupart des membres, condamnés pour collaboration.

La famille Pour le Vlaams Blok, la notion de famille est moins un objectif qu'un moyen. C'est un moyen pour aider l'économie en lui fournissant suffisamment de main d'oeuvre, un moyen pour rendre les immigrés inutiles, un moyen pour entretenir une croissance démographique, et pour protéger certaines valeurs traditionnelles. La ligne de direction générale de la politique familiale du Vlaams Blok figure dans les Principes de base du parti (1977) : « Une société honorable n'existe pas, ne peut pas exister, à partir d'individus uniquement animés par leurs propres intérêts personnels; de même, à côté de la tradition, à côté de l'individu et des autorités, il y a la famille, la, famille indispensable et irremplaçable pour tout peuple et pour l'humanité entière. C'est pourquoi, nous nous érigeons contre la débauche et la décadence actuelles, contre tous les signes du déclin humain et social et contre la manipulation des moyens de

communication par lesquels on propage cette dépravation. Au vu de l'expérience humaine, la famille et la cellule familiale représentent quelque chose d'autre qu'une cohabitation temporaire décidée par hasard entre deux personnes qui se supportent momentanément. La cellule familiale n'est pas au service de sentiments instables qu'éprouvent certaines personnes qui ne songent qu'à elles mêmes. La famille, c'est vivre avec une perspective d'avenir, en veillant à fonder une famille nombreuse. Du reste, c'est cela croire en l'avenir : c'est penser qu'il vaut la peine d'assurer sa descendance, sa propre famille afin de préserver la survie indépendante de sa propre communauté nationale. » Dans la liste des revendications qui s'y rattachent, cette prise de position est traduite en ces termes : « Nous revendiquons une politique courageuse de protection de et pour la famille, une lutte active contre la dénatalité, la protection de la jeunesse contre

toutes les formes de délinquance, le renforcement de la lutte contre le trafic de la drogue et contre l'incitation à toutes les perversités. » Le 12 mai 1991, le Vlaams Blok organisa un Congrès entièrement consacré à la famille, au cours duquel on approfondit la discussion au sujet de la position du parti émanant des Principes de base. Quatre groupes de travail, supervisés par Gerolf Annemans, Filip de Man, Marijke Dillen et Willy Smout, traitèrent respectivement de quatre thèmes : les principes d'une politique familiale, la bombe à retardement démographique, les problèmes inhérents à la construction de la famille et l'économie familiale. Les textes du Congrès étaient répartis selon les mêmes thèmes. Dans le premier groupe de travail axé sur « Les fondements pour une politique de la famille », on entama immédiatement la

discussion en disant que la famille était « menacée » et que la famille, en Europe Occidentale connaît une forme de relation qualitativement supérieure à celles pratiquées dans les autres cultures : « (...) En plus d'une éthique sexuelle (entre autre spécifiée par la monogamie, le mariage, l'égalité entre l'homme et la femme, et le respect de l'intégrité physique), nous pratiquons une forme hautement développée de la fonction sociale de la famille. Dans d'autres cultures et d'autres civilisations, ces critères sont différents ou absents. Le rôle de la femme dans les pays musulmans, la polygamie chez les Arabes, la promiscuité extrême chez les Pygmées ou la mutilation sexuelle de la femme (excision du clitoris) parmi certaines peuplades africaines, sont des exemples frappants des différences énormes avec les critères européens. On peut considérer de la même manière la circoncision. Et on peut légitimement se poser les questions suivante : Encouragentils de la même manière le bien être de la personne ? Ces coutumes auxquels l'individu

se soumet, stimulent elles la communauté nationale ? » « Le Vlaams Blok choisit, pour son propre peuple, son propre modèle familial européen qui lui été transmis par la tradition.(...) Il est certain que nous n'adoptons pas sans réfléchir certaines volontés exprimées. La naïveté malveillante de madame D'Hondt et du lobby immigré qui prétend que les autres cultures (mélangées à la nôtre à cause de l'immigration) constituent une forme enrichissante de notre propre culture est tout à fait inacceptable. » Après avoir rejeté toute forme de cohabitation avec les autres cultures, le Vlaams Blok s'attaque également aux autres « formes de relation » existant dans notre propre culture. Les couples non mariés constituent pour le Vlaams Blok une forme de relation méprisable tandis que

l'instauration de relations entre minorités sexuelles est totalement taboue. D'après le Vlaams Blok, l'un et l'autre font d'ailleurs partie du « complot de la gauche » : « La destruction (révolutionnaire) de toutes les structures sur lesquelles s'étayent les différences entre les cultures et les populations, figure en première page de l'agenda des philosophes gauchistes de l'égalité. La famille représente la plus forte et la plus importante de ces structures de base. Il ne faut donc pas s'étonner que la gauche ait déjà tenté de se débarrasser de la famille. (....) Parallèlement, il convient également de prendre position dans le débat soidisant social sur la question de l'homosexualité. Qu'il s'agisse d'un « débat social » constitue déjà en soi un thème de la gauche. C'est une méthode extraordinaire permettant de relativiser le concept et la signification de la famille et de prétendre que l'hétérophilie n'est qu'une expérience sexuelle parmi d'autres.

Ce ‘faire comme si’ se déroule le plus souvent possible et de manière tapageuse lorsqu'on laisse la parole aux homosexuels. Les médias se prêtent volontiers à ce jeu, avec leur curiosité habituelle, toujours stimulée par tout ce qui est anormal. » D'après les résolutions du Congrès, le Vlaams Blok veut effectivement bannir toute forme de relation en dehors de la famille traditionnelle : « Le Vlaams Blok refuse d'homologuer la cohabitation entre deux ou plusieurs hommes, entre deux ou plusieurs femmes, ou d'autres combinaisons qui sont la manifestation d'une attitude sociale marginale. La loi doit réprimer le fait d'éduquer des enfants dans un contexte social de ce type. » Lors de son Congrès consacré à la famille, le Vlaams Blok plaida également en faveur de la famille nombreuse (« La forme la plus éminente de responsabilité sociale »). Pour le Vlaams Blok, la famille nombreuse représente également un foyer propice à l'endoctrinement politique : « Il est possible de sensibiliser au sein d'une famille les gens

de manière à ce qu'ils acquièrent une conscience nationaliste indispensable. Du reste, l'enfant y est initié aux éléments culturels essentiels tels que la langue. Joris van Severen avait en partie raison lorsqu'il définissait la famille comme étant ‘la source de toute vie populaire’ ». D'après le Vlaams Blok, il faut récompenser politiquement la famille nombreuse, en adaptant le système électoral. C'est ainsi que le parti veut « une représentation démocratique des enfants en attribuant à la famille une voix supplémentaire par enfant. La mère vote pour le premier enfant, le père pour le deuxième, etc. » Dans le même contexte, le Vlaams Blok veut revaloriser le parent au foyer. Le thème, apparemment neutre, de « La femme » qui émerge des textes du Congrès se transforme après quelques lignes (pour plus de clarté ?) en notion de « Mère au foyer ».

Dans le groupe de travail intitulé « La bombe à retardement démographique », le député Filip de Man pouvait dire n'importe quoi. D'après les textes du Congrès, le Vlaams Blok part du principe que « c'est un complot général qui est responsable de ‘l'implosion démographique en Europe’. » On jette en pâture un assortiment étrange de concitoyens dont on fait des boucs émissaires : des gens embarrassés de « considérations progressistes ou empreintes d'écologie » qui déclarent qu'il faut faire quelque chose pour freiner l'explosion démographique; ceux qui sont gênés par une « série de complexes de culpabilité » imposés par « le pessimiste Club de Rome, encouragé par une série d'alternatifs comme Hare Krishna, les Témoins de Jéhovah, les Ecologistes, Provo's et autres ‘Kabouters’. » Le Vlaams Blok fait l'inventaire d'autres maux sous la rubrique « l'aliénation progressiste » : « les formes de cohabitation

alternatives (relations homosexuelles inclues), la liberté sexuelle, l'insémination artificielle de lesbiennes, la libéralisation totale de l'avortement, les familles monoparentales, les communautés, ainsi que d'autres évolutions récentes. Cela remet progressivement en cause le mariage et le pouvoir des parents et est une propagande en faveur du divorce ». Quelques pages plus loin, on dit que la Belgique pratique une « politique de destruction de la famille » : « Pour couronner le tout, les familles donnent des millions via les subsides, attribués à toutes sortes d'organisations gauchistes rouges qui détruisent le concept de la famille et à certains organes de presse. » D'après le Vlaams Blok, la courbe décroissante de la natalité est due à la pillule contraceptive: « Nous pouvons résumer en quelques mots les conséquences de l'introduction des moyens contraceptifs : depuis le milieu des années 60, de plus en plus de femmes utilisent des moyens de

contraception (c'est à dire la pilule), permettant aux familles d'espacer les grossesses plus facilement qu'auparavant mais aussi de limiter ainsi le nombre d'enfants. » Le Vlaams Blok craint que la dénatalité, chez les Flamands ait comme conséquence que dans une ou deux générations, les Flamands soient envahis par les descendants des immigrés : « C'est pourquoi, toutes les dispositions en faveur des familles doivent exclusivement s'adresser à notre propre peuple, notre devise étant: ‘Notre peuple d'abord!’ » Les auteurs des textes du Congrès prévoient également l'apocalypse à court terme. Pour la période 2010-2020, ils s'attendent à un manque de renouvellement de la main d'oeuvre, de l'ordre de plus de 200 000 personnes. D'après le Vlaams Blok, le système du régime des pensions va s'effondrer tandis que l'économie, la cellule

familiale, et le peuple dans son entièreté, se désorganisera complètement. (Lors du débat budgétaire de 1992, le député Vlaams Blok, Joris van Hauthem, parlera même de « dépérissement de la nation »). Le remède à cette catastrophe générale est simple : avant l'an 2000, les femmes flamandes doivent procréer environ 50 % en plus. D'après le parti, le gouvernement doit rendre plus attrayant le rôle de la mère au foyer en édictant de nouvelles mesures fiscales et autres. Le Vlaams Blok rejette l'embauche croissante des immigrés. Et comme cela a été dit, les mesures à prendre en faveur de la famille s'adressent exclusivement à « notre propre peuple ».

L'homosexualité Comme le montre le chapitre précédent, le Vlaams Blok considère les relations homosexuelles comme étant « l'expression d'un comportement social marginal ». Le Vlaams Blok déteste profondément les homosexuels et les autres minorités sexuelles. Cependant, le parti a rédigé peu de textes officiels excepté la prose haineuse du journal du parti qui expliquent réellement le comment et le pourquoi de cette aversion. Dans les textes du Congrès du 12 mai 1991, un petit coin du voile est levé. « Les formes de comportements homosexuels émanent d'une série complexe de facteurs que l'on doit considérer avec certaines nuances. Toutefois, il est clair que l'homosexualité, simplement du fait qu'elle ne figure pas dans l'ordre naturel (la différence entre l'homme et la femme), n'est aucunement bénéfique à la société. Par conséquent, l'homosexualité ne peut en aucun cas entrer en ligne de

compte dans l'ordre social ni être institutionnalisée (par exemple par des mariages entre homosexuels, etc.) On ne peut continuer à envisager l'homosexualité comme mode de vie, d'un point de vue qualitatif. En adoptant une attitude discrète, les homosexuels inspireront plus de respect qu'en s'exhibant et en attirant exagérément l'attention des médias et de la gauche... » Prenant la parole au Parlement européen, le 16 janvier 1990, le président Karel Dillen déclara que : « Dans une Europe libre, forte, unifiée, il faut mettre fin à tous les signes de décadence comme les mariages entre homosexuels et les élevages (!) transsexuels... » Même si les textes officiels et les interventions du parti n'ont pas l'air de faire avancer les choses (étant donné qu'ils reposent entièrement sur la démagogie), la pratique quotidienne de la politique du

Vlaams Blok ne laisse planer aucun doute sur les intentions du parti. Depuis le début, le Vlaams Blok s'est battu sur tous les fronts (et de préférence physiquement) contre les homosexuels. En décembre 1979, un groupe de membres du Vlaams Blok tenta par la force d'empêcher la représentation à Gand d'une comédie musicale traitant de la pédophilie. En 1985, le Vlaams Blok fit pression sur les évêques, le cardinal Daneels et le Pape pour supprimer « le groupe de travail oecuménique sur la pédophilie », organe de réflexion composé de catholiques et de protestants : « Notre objectif est de forcer les évêques à crever les abcès de ce type... » Le champion de la haine à l'égard des homosexuels est sans conteste Xavier Buisseret, député Vlaams Blok. Dans le journal du parti, il s'attaque régulièrement aux mouvements homosexuels. Voici une

citation tirée du journal du parti de juin 1990 : « Ces dernières années, j'ai été confronté à tellement de choses sales et dégoûtantes qu'il me faut cracher mon venin sinon je vais devoir me faire opérer. Samedi 5 mai, une magnifique journée d'été. A Anvers, c'était le ‘samedi rose’. Pour ceux d'entre vous qui ne comprendraient pas, pendant toute la journée, les homosexuels, les lesbiennes et d'autres individus de la même espèce, ont pris librement possession d'Anvers. Répugnant. Ils ont entamé les festivités par une messe. Oui, une messe. Et d'après leurs propres dires, cette messe (?) fut donnée par des prêtres homosexuels. En signe de solidarité et de sympathie, ces prêtres homosexuels n'ont pas trouvé mieux que de déclarer dans leur sermon que ces petits dégoûtants roses étaient les nouveaux prophètes. On jurerait pour moins que ça. Après la ‘messe’, partant du parc de la ville, ils ont défilé main dans la main jusqu'à la maison communale située sur la Grand place... Le cortège n'était qu'un entassement de cochonneries et de saletés d'égoût.

OVAM a du pain sur la planche! Il faut dire que la tête du cortège était composée de Hollandais. Mes amis, quel spectacle répugnant... » Par la suite, Xavier Buisseret fut condamné, le 5 octobre 1989, par la Cour d'Appel d'Anvers, à une amende de 3 000 fr ou à une peine d'emprisonnement équivalente pour « destruction et saccage de biens immobiliers d'autrui accompagnés de violences et de menaces ». Ces termes ne donnent qu'une faible idée des faits réels : Buisseret et quelques uns de ses acolytes s'en étaient pris à des homosexuels qui distribuaient des tracts au collège Notre Dame de Lourdes à Edegem. Ils les brutalisèrent et emportèrent les tracts.

Le Pélerinage de l'Yser Le Vlaams Blok considère le Pélerinage de l'Yser, célébré chaque année, comme la fête la plus importante. Le dernier week end du mois d'août, toutes les composantes du Mouvement Flamand se réunissent autour du monument de l'Yser, une tour de 84 mètres de haut, et commémorent, en principe, les Flamands morts au combats durant la Première Guerre mondiale. En réalité, le Pélerinage de l'Yser sert principalement les intérêts et les revendications du Vlaams Blok. Depuis décembre 1986, la tour de l'Yser s'appelle officiellement le « Memoriaal van de Vlaamse Ontvoogding » (Mémorial de l'Emancipation de la Flandre). A l'époque, le Conseil Flamand décida à la majorité, composée du CVP, de la VU et du Vlaams Blok, soit 85 voix contre 62 pour la minorité (composée du SP, du PVV et d'Agalev) de faire de la Tour de l'Yser un monument (l'unique monument d'ailleurs) pour tous les

Flamands. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le choix de la Tour de l’Yser est critiquable. En 1987, l'historien Hugo de Schampheleire émit d'ailleurs des réserves à ce propos : « (...) S'il existe effectivement en Flandre un monument au caractère politique indéniable et avec un passé qui est tout sauf irréprochabe, c'est bien la Tour de l'Yser. Avant la Seconde Guerre mondiale déjà, les pélerinages annuels de l'Yser évoluèrent ouvertement vers une manifestation des mouvements autoritaires prônant l'ordre nouveau. Pendant l'occupation nazie, c'était depuis la Tour de l'Yser que l'on faisait de nombreux appels à la collaboration avec l'occupant. Progressivement, à partir de 1955 environ, les criminels politiques, culturels et militaires de la période de l'occupation ont mis la main sur la Tour de l'Yser. » (Si le lecteur désire un historique détaillé des pélerinages de l'Yser, nous lui conseillons vivement de lire l'excellent ouvrage rédigé par Hugo de Schampheleire, Les Pélerinages de l'Yser, publié dans les

Vlaamssche Kronijken, (les Chroniques Flamandes, aux éditions EPO, 1987). Le dernier dimanche d'août est donc une date importante pour le Vlaams Blok. Non seulement parce que le Pélerinage de l'Yser (ainsi que la Fête de la Chanson à Anvers) représente une occasion unique pour les Flamands de formuler leurs revendications nationalistes, mais surtout parce que durant tout le week-end du Pélerinage, il est possible d'entrer en contact avec les organisations d'extrême droite et néonazies de tous les coins du monde. Toutefois, aux yeux du Vlaams Blok, la grand messe du Pélerinage de l'Yser n'a plus la même signification. En effet, depuis 1987, l'Hymne national sud africain La Voix de l'Afrique du Sud, n'est plus chanté pour des raisons purement scéniques, à la fin du pélerinage en même temps que le Wilhelmus et le Vlaams Leeuw, mais bien quelque part au milieu du Pélerinage, ce que n'apprécie pas le VIaams Blok. D'après le Vlaams

Blok, cette modification apportée à la mise en scène est due à la voie gauchisante que prend le comité du Pélerinage de l'Yser. En s'opposant aux organisateurs, le Vlaams Blok a cherché à obtenir plus d'influence sur la manifestation. Sous l'impulsion du parti, on instaura un (soi-disant) comité des pélerins de l'Yser (à ne pas confondre avec le comité du Pélerinage de l'Yser), composé d'affiliés à différentes organisations dépendantes du Vlaams Blok : Voorpost, Were Di, NSV, Grensland, les étudiants PROTEA, VNJ et le Wies Moens Vormingsinstituut. Le coordinateur était Luc Vermeulen (Voorpost) et le président d'honneur était Ward Hermans (ex-VNV, ex-Verdinaso, exDe Vlag, cofondateur du mouvement SS Vlaanderen, rédacteur en chef de SS Man et, à partir du milieu des années 30, propagandiste particulièrement virulent pour l'extermination des Juifs).

Le comité des pélerins de l'Yser s'attaqua en particulier à Paul Daels, le président du comité du Pélerinage de l'Yser. Dans le mensuel interne du parti, d'avril mai 1987, Karel Dillen alla même jusqu'à faire publier une photo, prise pendant l'occupation, de Paul Daels en uniforme de collaborateur. Une légende accompagnait la photo « Manque de courage civique », ainsi qu'un sermon rédigé par Karel Dillen : « Les destructeurs roses et rouges de la Flandre et des pays occidentaux n'ont pas leur place à Dixmude. Tous ceux qui appartiennent au centre gauche et à l'extrême gauche doivent donner libre cours à leur appétit sexuel pour Winnie Mandela ailleurs.(...) Paul Daels peut, s'il le veut, sceller un pacte de sang avec Nelson Mandela et Oliver Tambo, mais alors dans son bureau de notaire à Malines et non à Dixmude. La présence de Paul Daels est néfaste au Pélerinage et au Mouvement Flamand. Il doit donner sa démission de la présidence du comité du Pélerinage de l'Yser. »

Parallèlement, Karel Dillen rédigea le livre Wij, Marginalen (Nous, les marginaux), relatant l'affaire de la mise en scène de la grand messe du Pélerinage de l'Yser et dans lequel il passe en revue les nombreux conflits l'opposant, lui et ses partisans, aux organisateurs du Pélerinage de l'Yser et à certaines personnalités du Mouvement Flamand de ces quarante dernières années. Dans le numéro de septembre 1987 du journal des cadres du parti, l'annonce du livre s'accompagnait de cette phrase percutante : « Ouvrage traitant du Pélerinage de l'Yser, de la Honte et du coassement hypocrite des grenouilles flamandes. » Le Mouvement Flamand n'en fut pas ému pour autant. A part quelques actions symboliques durant ou relatives au Pélerinage de l'Yser et le déploiement de quelques calicots lors du Pélerinage de 1987, les positions du comité des pélerins de l'Yser n'eurent pas vraiment d'écho.

Les contacts internationaux Bien avant la formation du Vlaams Blok, les dirigeants actuels du parti entretenaient déjà de nombreux contacts internationaux. Les chefs de file du VMO (dont Bert Eriksson, la famille Spinnewyn et Xavier Buisseret) avaient des contacts avec le Ku Klux Klan aux Etats Unis et avec le National Front en Grande Bretagne. En Grande Bretagne toujours, ils échangèrent leurs expériences militaires avec Column 88 (deux fois la huitième lettre de l'alphabet, ce qui donne HH pour Heil Hitler). Dans les années septante, on signale leur présence dans les camps d'entraînement paramilitaires illégaux organisés par le Wehrsportgruppe Hoffmann allemand, le FANE français, ainsi que les mouvements qui étaient déjà très violents à l'époque, comme les Groupes Nationalistes Révolutionnaires français et l'Ulster Volunteer Force irlandais.

Les cadres de Voorpost plus discrets sur le terrain perfectionnaient leur formation dans les camps d'entraînement paramilitaires allemands du Junge Nationaldemokraten, la section jeunes du NPD néonazi. Were Di, l'organisation la plus pondérée, entretenait des contacts avec plusieurs organisations révisionnistes et des clubs étrangers traitant de théories comme celle de la Nouvelle Ecole en France. Parallèlement à la montée électorale de l'extrême droite dans d'autres pays d'Europe, le Vlaams Blok renforça en particulier ses liens avec les partis et les organisations avec lesquels il pouvait forger des alliances politiques. Les contacts qui frappent le plus l'opinion sont ceux entretenus par le Vlaams Blok avec le Front National de Jean Marie Le Pen en France. Et pas seulement parce que le Vlaams Blok et le Front National siègent tous deux dans le goupe des droites européennes. Le regard fixé sur l'unification de l'Europe, la fraction

lepéniste, créée par Filip Dewinter au sein du Vlaams Blok, vise la formation d'un mouvement d'extrême droite européen unifié qui, à terme, développerait une stratégie politique commune (comme il existe des organisations européennes démocrates chrétiennes, socialistes et libérales). En prenant l'initiative sur ce terrain, Filip Dewinter espère ainsi jouer un rôle clé dans le futur mouvement européen d'extrême droite. Parallèlement, le Vlaams Blok tient plus que toute autre chose à obtenir les garanties nécessaires pour demeurer le seul interlocuteur en Flandre des grandes formations d'extrême droite internationales. On peut d'ailleurs constater que des partis comme le Vlaams Blok ont régulièrement maille à partir avec leurs propres dissidents extrémistes qui essayent de les déborder sur leur flanc droit. Vers la fin des années quatre vingt, ce fut le cas de Werner van Steen, ancien membre du VMO qui, en organisant

annuellement un congrès international fasciste (les Euro Ring Congressen de 1987 à Aartselaar, de 1988 à Courtrai et de 1989 à Alveringen) et plus tard, en créant son Nationaal Front (Front National), essaya de gagner les faveurs de Le Pen. Alors que Werner van Steen était sur le point de réussir, le Vlaams Blok joua le tout pour le tout et tenta par tous les moyens de convaincre la direction du Front National qu'il était le seul interlocuteur valable pour la Flandre. Il existe donc suffisamment de raisons qui poussent le Vlaams Blok à garder de bons contacts avec l'étranger. Du reste, aussi bien les organisations d'extrême droite francophones que néerlandophones entretiennent depuis quelques dizaines d'années de bons contacts avec Jean Marie Le Pen et les organisations dans lesquelles il joue ou a joué un rôle clé. Le point central de ces contacts se situant chez les extrémistes français, le Vlaams Blok est devenu ces dernières années

l'interlocuteur belge le plus important de Le Pen. Dès le début des années soixante, pendant la guerre d'indépendance en Algérie, le Front National de l'Algérie Française (FNAF), dirigé alors par Le Pen, travaillait en étroite collaboration avec les colonialistes belges qui s'étaient regroupés au sein du Comité d'Action et de Défense des Belges en Afrique (CADBA). Le FNAF était la branche politique de l'organisation terroriste française OAS. Le CADBA, qui menait un combat d'arrière-garde acharné contre la future indépendance du Congo, trouva en Le Pen et le FNAF un allié naturel. Le Pen collabora d'ailleurs régulièrement à la rédaction du magazine du CADBA. Il apposait comme en tête à ses articles quatre croix celtiques. Fin 1960, Le Pen publia des messages codés à l'intention des terroristes en Algérie. A l'époque, Le Pen se trouvait à Madrid, où le général Salan, chef de l'OAS et son équipe avaient établi leur état major (début 1985,

l'hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné publia la copie d'un rapport officiel de la police dans lequel Le Pen était reconnu coupable d'avoir torturé des citoyens algériens à l'époque où il s'était engagé comme volontaire dans la guerre d'Algérie. La publication du rapport en question provoqua pas mal de remous en France). A partir de 1962, le groupe qui gravitait autour de Belgique-Afrique installa un réseau de bases clandestines à Namur, Tournai, Mons et Profondeville qui allaient travailler pour l'OAS. On installa même une imprimerie clandestine pour l'OAS à Tournai. En 1963, Le Pen créa avec Léon Gaultier, un ancien SS, le SERP (Société d'Etudes et de Relations Publiques), une maison de distribution d'extrême droite. Jusqu’à présent, on n'a pas connaissance

d'une seule étude qui aurait été entreprise par le SERP. Par contre, très rapidement, l'entreprise se transforma en service de distribution de disques, de films et de livres nazis et d'extrême droite. Elle distribua par exemple les enregistrements sur disque des conversations « historiques » entre Pétain et Hitler. Le SERP chercha également à se rapprocher de la maison de distribution néonazie belge « 3 A Diffusion » établie dans la région de Huy. Pratiquement tous les produits proposés dans le catalogue de vente de « 3 A Diffusion » provenaient du SERP : De Rex au Front de l'Est, de Léon Degrelle, Discours Politiques, de Le Pen... En France, Le Pen fut condamné à une amende et à une peine de prison avec sursis pour avoir diffusé de tels disques. Via « 3 A Diffusion », on peut suivre sa trace jusqu'au Vlaams Blok et les organisations qu'il couvre. La marchandise de « 3 A Diffusion » et du SERP fut vendue dans le magasin de journaux du chef de

Were Di, Bert van Boghout, quai Jordaen à Anvers. Van Boghout est considéré comme le parrain idéologique du Vlaams Blok. Il exerce une influence considérable sur Karel Dillen. Ces dernières années, il se présente également comme le gardien de l'idéologie du Vlaams Blok. A côté de cela, « 3 A Diffusion » et le SERP ont également soutenu le rassemblement des anciens combattants du Front de l'Est du Sint Maartensfonds (SMF) et le VMO au moyen de grandes annonces parues dans les magazines de ces organisations (Berkenkruis et Alarm). Dans la série des livres mis en dépôt par le Front National, on trouve à nouveau des publications comme Le Mensonge d'Auschwitz et Six millions de Juifs morts... le sont ils réellement ? Ces livres ont été diffusés récemment en Belgique par « 3 A Diffusion » en version française et par le Voorpost en version néerlandaise (comme nous l'avons déjà dit, Roeland Raes et

Francis van den Eynde, tous deux parlementaires Vlaams Blok, jouent un rôle clé au sein de Voorpost). Les organisations révisionnistes qui s'appuient sur le Vlaams Blok font également la promotion de ces livres. En 1984, Le Pen tenta clairement de fonder en Belgique un parti frère du Front National. En septembre 1984, Le Pen prononça un discours à Schaerbeek, qui se termina par des affrontements entre la police et les contre manifestants. Quelques jours auparavant, le Pen et d'autres figures de l'extrême droite francophone s'étaient réunis à l'hôtel Bedford, à Bruxelles. A l'ordre du jour : la création d'un parti frère en Belgique. Le 5 octobre 1984, la chose était entendue. George Mayné présenta à la presse son Front National belge fraîchement émoulu, présentation qu'il fit en avouant son adoration pour Le Pen et le Front français.

Très rapidement, il fut clair aux yeux de tous que Le Pen, au vu des succès électoraux rencontrés par Dillen et Cie, considérait le Vlaams Blok comme l'interlocuteur privilégié. Nous reviendrons, plus loin, sur les contacts entre le Front National et le Vlaams Blok. Un bon nombre de cadres importants du parti entretiennent des contacts avec le Voorpost en Hollande et avec le mouvement nazi « Consortium De Levensboom » dirigé par la veuve Florie Rost van Tonningen Heubel. Vers la fin des années quatre vingt, on découvrit chez Rost van Tonningen une série de listes d'envois et de membres parmi lesquelles figurent les noms d'un bon nombre de Belges et surtout de personnalités de premier plan du Vlaams Blok. Outre le nom de Karel Dillen, on trouve les noms de pas moins de huit parlementaires du Vlaams Blok : Filip Dewinter, John Spinnewyn, Frans Wymeersch, Xavier Buisseret, Isidoor Buelens, Karim van Overmeire, Roeland

Raes ainsi que Francis van den Eynde (dans cette petite assemblée, figurent également les noms de trois cadres du parti : Werner Marginet, Frank Vanhecke et Patricia Vatlet). Toutefois, officiellement, le parti n'a que quelques contacts avec le Centrumdemocraten (CD) dirigé par Hans Janmaat et le Centrumpartij '86 (CP) de Willem Jan Beaux. Le fait qu'il y ait deux partis d'extrême droite en Hollande entraîne l'éparpillement du vote de l'électorat d'extrême droite. Aucun des deux partis ne connaît donc véritablement de percée électorale. En outre, ces deux partis sont en concurrence directe avec de plus petites organisations comme Democratisch Alternatief et Realisten Nederland. Le député Filip Dewinter et le vice président Roeland Raes éprouvèrent de nombreuses difficultés à réunir les deux

partis en question. Dewinter, en particulier, chercha à fusionner le Centrumdemocraten et le Centrumpartij. Un tel parti unitaire d'extrême droite hollandais pourrait ultérieurement adhérer à la Droite Européenne. En août 1990, dans le journal Vrij Nederland, Filip Dewinter déclarait qu'il apporterait sa contribution (« coopération au développement », dixit Dewinter) à ses proches idéologiques hollandais. Dans cette optique, le Vlaams Blok mit un point d'honneur à inviter les deux partis lors des congrès et des fêtes organisées par lui. En outre, des contacts mensuels furent établis au cours desquels les directions du Vlaams Blok, du CP et du CD se réunissaient. Willem Jan Beaux, Stewart Mordaunt et Egbert Perée prenaient part aux entrevues au nom du CP tandis que pour le CD, ce sont Hans Janmaat, le secrétaire W. Schuurman et le trésorier Wim Elshout qui participaient aux débats.

Il est clair que le Vlaams Blok prend tout à fait au sérieux ces réunions puisqu'en février 1991, on organisa un repas auquel assistaient Jean Marie Le Pen, Filip Dewinter mais aussi Janmaat et Mordaunt. Les interventions du Vlaams Blok n'ont cependant pas donné de résultats probants. Dans les milieux d'extrême droite, on en attribue la faute à Janmaat qui apparemment ne fait preuve d'aucune diplomatie, veut être reconnu comme souverain absolu et sabote ou rejette purement et simplement presque tous les projets de collaboration avec les autres organisations. Cependant, le 28 septembre 1992, Filip Dewinter organisa dans les locaux du siège du Vlaams Blok à Anvers une conférence de presse au cours de laquelle un accord de coopération entre les quatre partis néerlandais fut présenté. Cet accord (par ailleurs limité) était le résultat de longues et difficiles tentatives de Dewinter pour parvenir à un semblant de solidarité avec ses

partenaires idéologiques néerlandais. En fait, l'accord prévoit uniquement que pour les élections européennes de 1994, les quatre partis formeront un cartel électoral à la condition expresse de conserver chacun leur identité politique. Le contrat fut signé par Janmaat du Centrumdemocraten, Wijngaarden du Centrumpartij, Vierling du Vlaams Blok hollandais et Geurs du Democratisch Alternatief Nederland. En Allemagne, le Vlaams Blok essaye également de jouer le rôle de médiateur entre les différents partis d'extrême droite et néonazis. Parmi ceux ci, on citera en premier lieu le parti Republikaner de Franz Schönhuber et le Deutsche Volksunion (DVU) de Gerhard Frey et en second lieu, car de moindre importance, la Deutsche Liga d'Harald Neubauer et le Nationaldemokratische Partei Deutschland (NPD) dirigé par Günther Deckert. Auparavant, le parti Republikaner, le DVU et le NPD étaient dirigés par

d'anciens nazis. C'est moins sûr en ce qui concerne la Deutsche Liga, fondée en 1991. Ce parti fut fondé par Harald Neubauer, un parlementaire européen, ancien bras droit de Schönhuber. L'objectif de ce parti est de rassembler les militants et les organisations d'extrême droite. Etant donné que la Deutsche Liga et le NPD n'ont plus grand chose à proposer, électoralement parlant, le Vlaams Blok s'attache plus à une collaboration avec le DVU et les Republikaner en vue des élections européennes et de celles du Bundestag en 1994. Les traditionalistes du Vlaams Blok, disons plutôt les nationalistes populaires convaincus, ont quelques problèmes à composer avec les nationalistes d'Etat comme le Front National en France et ses homologues en Allemagne. Ce sont eux qui poussent le parti à maintenir des contacts avec des partis régionaux moins importants, ailleurs en Europe, et ce sont eux qui

rappellent l'existence de ces petits partis aux membres du Vlaams Blok via le journal du parti. D'autre part, étant donné que le Vlaams Blok veut provoquer des ouvertures vers les pays de l'Est, cette attitude n'est pas à négliger. C'est ainsi que dans le numéro de mai 1992, Koen Dillen et Roeland Raes ont publié une série d'articles relatant l'existence de partis comme celui des régionalistes italiens (Lega Lombarda) et les nationalistes populaires français : l'Union du peuple alsacien, Elzassische Volksunion, l'Union Démocratique bretonne, l’Emgann, le Parti pour l'organisation d'une Bretagne libre, le Mouvement Corse pour l'autodétermination et l'Union du peuple Corse. De même, le Vlaams Blok accorde une certaine importance à l'Europe de l'Est. Il dispose à présent d'une authentique association : « Vereniging voor een Vrij Rusland » (VVR) (l'Union pour une Russie Libre), concrétisant ainsi sa solidarité envers les nouvelles républiques indépendantes de

l'ex-U.R.S.S. Le VVR est dirigé par de vieux routiers, Femand Dhondt et Hugo Noé. Dans la seconde moitié des années septante, Dhondt était le président d'une organisation ultra conservatrice, Vlaams Aktiekomitee Oost Europa (Comité d'action Flamande pour l'Europe de l'Est) et rédacteur au magazine d'extrême droite Alternatief. Le discours qu'il prononça lors de la cérémonie commémorative en l'honneur d'August Borms, en avril 1984, marque de toute évidence ses préférences politiques. Lors des élections communales de 1988, Hugo Noé figurait sur une liste du Vlaams Blok pour Scherpenheuvel Ziechem. Le VVR organise des actions dans les écoles en prenant soin de ne pas préciser la position politique du comité et rassemble du matériel (comme de la nourriture, des vêtements et des médicaments) qu'il envoie

par camions dans les régions de l'Oural. Il ne manque pas non plus d'y ajouter des bibles et des icônes russes. Le VVR travaille conjointement avec l'organisation russe EKOMIL (l'abréviation russe pour Ecologie et Charité), dont le siège est situé à Iekaterinbourg, l'ancienne ville de Sverdlovsk, qui est aussi le port d'attache politique de Boris Eltsine. Bizarrement, l'organisation EKOMIL ne figure pas dans le registre officiel des organisations des Républiques de la CEI (ce registre reprend entre autres les noms de tous les organismes humanitaires). Les témoignages de solidarité à l'égard des Républiques indépendantes de la CEI ne se limitent pas à l'aide humanitaire. En juillet 1992, le parti organisa à l'intention de ses membres un voyage de groupe en Ukraine (les inscriptions se faisaient chez Ivo Collier, un membre du Voorpost et dans le café de triste réputation « Le Lion des Flandres » à Anvers). Le Vlaams Blok

s'intéresse particulièrement à la Croatie dont le passé ultra nazi semble avoir toutes ses préférences. Par ailleurs, il semble que le passé sanglant du croate nazi Ante Pavelitch et de ses Oustachis ne soit pas totalement révolu. Pour la petite histoire, les Oustachis étaient des Croates séparatistes qui scellèrent en 1934 un pacte avec Hitler, Mussolini et le régent hongrois Horthy. Ils organisèrent ensuite des attentats dans le but de renverser le régime du roi Alexandre depuis l'Allemagne, l’Italie et la Hongrie, Les Oustachis avaient leur propre fürher, celui qu'on appelait le « poglavnik », Ante Pavelitch. Après l'occupation allemande de la Yougoslavie, la plupart des unités d'Oustachis s'enrôlèrent dans la police SS. En retour, les puissances de l’Axe accordèrent à la « république croate » une

pseudo indépendance. La terreur sanglante exercée par les Oustachis sur la population et particulièrement sur les autres minorités yougoslaves, dépasse de loin celle exercée par les Allemands. Après la guerre, Pavelitch fuit la Yougoslavie et obtint l'asile politique en Argentine. Plus tard, il s'installa en Espagne, à l'époque de Franco, où il mourut en 1959. Les séparatistes croates n'ont pas oublié Pavelitch. Les anciens symboles des Oustachis et les croix celtiques ornent aujourd'hui les rues de Zagreb et dans certains bâtiments militaires, le portrait de Pavelitch figure à nouveau en bonne place. Et puis, ce n'est un secret pour personne que l'autoritaire président croate Tudjman ne fait pas la moindre difficulté aux milices nationalistes, bien au contraire. Par conséquent, on ne s'étonnera pas de savoir que le gouvernement de Franjo Tudjman à Zagreb accueille à bras ouverts les délégations officielles et officieuses du Vlaams Blok. Le 19 mars 1992,

l'hebdomadaire allemand Stern publia un dossier consacré aux mercenaires d'extrême droite engagés dans le corps volontaire croate « La Légion Noire ». Une photo illustrait l'article et sur celle-ci, on pouvait voir certains parlementaires du Vlaams Blok, dont Filip Dewinter, Wim Verreycken et Francis van den Eynde, qui posaient fièrement devant un char à Zagreb. Les témoignages d'adhésion à la cause ultra nationaliste croate ne se limitent pas à des échanges de visites amicales. Le Vlaams Blok a également lancé une vaste campagne d'information, organisée notamment par Jan Huybrechts et Luc Vermeulen qui parcourent le pays avec des films et des conférences sur la Croatie, parfois en compagnie d'orateurs étrangers. En outre, les mandataires du Vlaams Blok ne ratent pas une occasion de défendre la cause des nationalistes populaires croates et de plaider ouvertement en faveur d'un soutien militaire à l'égard des Croates (ce

qu'ils ne manquent pas de faire dans le journal du parti non plus). Le Vlaams Blok veut activement soutenir la Croatie. Pour cela, le parti invita le Néerlandais Douwe van der Bos à faire une « conférence » dans son quartier général à Anvers, le 10 avril 1992. Le programme prévoyait la projection d'une vidéo concernant les activités des mercenaires hollandais en Croatie; ensuite des représentants du gouvernement croate, le parlementaire Filip Dewinter et le sénateur Wim Verreycken devaient prendre la parole. Douwe van der Bos n'est pas un inconnu aux Pays Bas (ni pour le Vlaams Blok). C'est lui qui rédige le supplément du magazine Revolte, une publication de Voorpost. Van der Bos, ancien membre du conseil du Centrumpartij qui a émigré vers le Centrumdemocraten, est une des trois figures phares du Nederlands Kroatische

Werkgemeenschap (NKW) (Groupe de Travail croato-néerlandais). En novembre 1991, cette organisation déclencha un véritable tollé en publiant dans la presse une « offre d'emploi » proposant aux gens de s'engager comme volontaires pour combattre aux côtés des nationalistes en Croatie : « On demande des volontaires pour s'acquitter de tâches militaires en Croatie. Expérience militaire souhaitée ». Le NKW emploie la procédure habituelle des organisations de ce type, c'est à dire qu'il ne donne pas d'adresse officielle, juste un numéro postal et deux numéros de téléphone où joindre l'organisation. Lorsque le Nederlandse Fascisme Onderzoekskollektief (FOK) (Collectif d'Enquête sur le fascisme Néerlandais) vérifia ces données, il découvrit que le numéro de boîte postal était celui de Douwe van der Bos et qu'il avait auparavant servi au parti Centrumdemocraten. Un des deux numéros de téléphone était également au

nom de van der Bos tandis que le second était au nom de Broer Wiersma. Lequel a été président de la section hollandaise de Voorpost (dont il est actuellement simple membre), affilié au Sint Maartensfonds et membre du parti Centrumdemocraten. Il entretient de bons contacts avec Were Di et le Consortium de Levensboom (le Consortium de l'Arbre de Vie) dirigé par la veuve Rost van Tonningen. Le troisième membre de la troïka qui dirige le NKW est le colonel H.C. de Roode, officier à la retraite de la marine hollandaise et franc tireur politique. Au début des années quatre vingt, de Roode était le « spécialiste de la défense » du Centrumpartij. En 1985, il devint membre du conseil mais un an plus tard il démissionna pour collaborer à la création du Conservatieve Volkspartij (CVP) (le parti Populaire Conservateur), un parti dont les membres dirigeants étaient d'anciens nazis ou néonazis, parti au moins aussi extrémiste que le Centrumpartij. En

1989, de Roode fut cofondateur du parti également ultra extrémiste de droite, le Politieke Partii Realisten Nederland (le Parti Politique des Réalistes des Pays Bas). D'après le rapport annuel établi par le FOK, de Roode, comme Wiersma et van der Bos, sont membres du conseil de Voorpost en Hollande. Ce « conseil », fondé en 1990, est l'organe de concertation chargé de rapprocher Voorpost (l'organisation dirigée en Belgique) de ses affiliés hollandais. Le conseil de Voorpost se réunit quatre fois par an sous l'égide de la direction belge (comme nous l'avons expliqué précédemment, la direction de Voorpost est aux mains de Roeland Raes et Francis van den Eynde, tous deux parlementaires Vlaams Blok.) Voorpost NKW se charge donc de recruter des mercenaires qui vont combattre aux côtés des Croates et explique la teneur de ses activités (illégales en Belgique) en Flandre. Lorsque le journal Het Nieuwsblad fut informé, le président des jeunes Vlaams

Blok, Jan Huybrechts, s'empressa d'expliquer au journaliste, Mon Vanderostyne, qu'il n'était absolument pas question de recruter des soldats flamands pour aller combattre au Front. Huybrechts lui même, connaisseur de la question croate, ajouta que cent quarante personnes intéressées par cette action avaient répondu à l'appel lancé à l'époque par le NKW mais que finalement « moins de vingt Hollandais » avaient été envoyés en Croatie. D'après Huybrechts, deux Belges seulement allaient rejoindre une unité croate. Ce pourrait être simplement des réfugiés yougoslaves d'origine croate. Il est difficile d'évaluer le bien fondé de ces déclarations. En tout cas, le fait est que deux jours auparavant (le 8 avril 1992), De Morgen avait publié un article dans lequel Huybrechts déclarait que huit Flamands auraient pris part aux combats depuis le début de la guerre civile en ex-Yougoslavie. Dans le même article jamais contesté par le Vlaams Blok, le journaliste Jörgen. Oosterwaal écrivait : « Le Vlaams Blok n'a

pas peur d'envoyer en Hollande les candidats volontaires pour rallier la cause croate, dit le président des jeunes Vlaams Blok. Chez nos voisins du nord, le Nederlandse Kroatische Werkgemeenschap de Douwe van der Bos, une ancienne tête de liste du Centrumdemocraten, fait carrément appel aux mercenaires par la voie du Telegraaf. A Zagreb, Huybrechts servait entre autre de contact à Douwe van der Bos. Le chef des mercenaires ainsi que deux ‘fighters’ (combattants) sont d'ailleurs attendus ce week end en Belgique afin de s'adresser à leurs confrères idéologiques belges. » Afin d'aider la Croatie, le Vlaams Blok dispose de son propre organe : le « Hulpkomitee Kroatië : Volk in Nood » (le comité d'aide à la Croatie : un Peuple en détresse). Ce comité a envoyé du matériel de secours vers la capitale croate, Zagreb. Luc Vermeulen est la personne qui anime le comité depuis Deurne (il est membre du

Vlaams Blok, Co fondateur de Voorpost et dirigeant du « groupe d'action » de Voorpost) tandis que John Spinnewyn député Vlaams Blok, coordonne les activités du comité à Turnhout. De temps à autre, le soutien du Vlaams Blok à la Croatie prend une tournure loufoque, comme en témoigne l'intervention du 19 mai 1992 de Karim van Overmeire, député Vlaams Blok, devant la Commission parlementaire pour la défense nationale qui a interpelé le Ministre concerné à propos de la collaboration entre cinq cent casques bleus belges et des homologues russes en Croatie dans le cadre de la Force de Protection des Nations Unies : « (...) Est ce un hasard si les troupes belges travaillent de concert avec les troupes russes ? Ou alors les Russes ‘orthodoxes’, donc pro Serbes, constituent le contre poids des Belges ‘catholiques’, donc ‘pro Croates’(...) »

Que faut il penser de l'attitude du député Vlaams Blok, Gerolf Annemans, lorsqu'il interpelle le Ministre de la défense nationale le 15 juin 1992 : « De sources sûres, rapportées par au moins un journal international, j'ai appris que les militaires belges (les casques bleus belges, H.G.) avaient disputé un match de football avec l'armée serbe dans l'ex-Yougoslavie ? Il s'agit probablement d'un détail mais les autorités croates sont néanmoins inquiètes du fait que les militaires belges témoignent autant de confiance à l'égard de l'armée serbe. Ces faits sont-ils corrects ? Si oui, dans quelles circonstances ces faits se sontils déroulés ? » Le 29 juin, le Ministre donna une réponse laconique : « Ces affirmations sont sans fondement ».

L'islam Parmi les ennemis du Vlaams Blok, l'Islam occupe une place prépondérante, Islam que les immigrés sont quasiment les seuls à pratiquer. Lorsque le Vlaams Blok entame une discussion au sujet de l'islam, à tout moment reviennent les adjectifs « arriéré », « agressif », « intégriste », « fanatique » et « inflexible ». Dans un commentaire anonyme du livre La Menace de l'Islam écrit par John Laffin, et qui est paru dans le journal du parti de février 1990, on peut lire une citation très représentative de l'état d'esprit du Vlaams Blok à l'égard de l'Islam : « Non seulement, les Musulmans se sentent le devoir d'avoir la conscience irréprochable mais en plus ils veulent que leur voisin le soit aussi. Le devoir de l'Islam à l'égard des autres religions est d'élaguer, de purifier, de corriger et de compléter. Les cinq millions de travailleurs immigrés que compte l'Europe forment en quelque sorte une cinquième colonne. La révolution

islamique en Europe Occidentale ne s'accomplira pas par ‘le feu et l'épée’. Le pouvoir du nombre, l'acharnement, le fanatisme et la haine vis à vis de l'Occident offrent une réelle chance de victoire à la cinquième colonne composée par l'Islam. Face à cette réalité, l'Occident demeure cependant aveugle. Les soi-disant antiracistes et les partisans du mondialisme veulent nous jeter de la poudre aux yeux. Ils essayent de nous faire croire que l'avenir de l'Europe Occidentale réside dans une société multiraciale et pluriculturelle. Ce fameux melting pot nous conduira seulement à la grande égalisation d'un monde dans lequel nos enfants et nos petis enfants, au lieu de maîtriser les ordinateurs seront condamnés à piler le manioc importé du Tiers Monde dans de vieux récipients. » La politique pratiquée quotidiennement par le Vlaams Blok traduit, elle aussi, clairement la vision qu'il a de l'Islam. C'est ainsi qu'en mars 1986, le

Vlaams Blok lança une campagne de calomnies contre l'action arabe au sein de l'ACV (la CSC flamande). Le Vlaams Blok s'insurgeait en particulier contre l'association « Ibn Khaldoen » que l'ACV venait de créer. La direction du Vlaams Blok réagit mal à la parution, dans le Moniteur Belge du 3 janvier 1986, des statuts de cette organisation. Statutairement, l'association a comme objectif de « rassembler les travailleurs arabes de Belgique et leurs familles, indépendamment de leurs origines, afin d'établir un contact avec leur culture d'origine et d'encourager à tous les niveaux les échanges entre les différentes nationalités et les communautés représentées en Belgique. » Parmi les fondateurs de l'association qui, dès sa création obtint l'appui de la Communauté flamande, on trouve des personnalités de l'ACV comme Willy Peirens et Luc Delanghe. Pour marquer son opposition à cette initiative, le Vlaams Blok

adressa de nombreuses lettres de protestation à certaines personnalités comme le cardinal Danneels, le président du CVP Frank Swaelen, le président de l'ACV Jef Houthuys, le président de l'ACW Willy D'Havé, le président du Davidsfonds Clem de Ridder, mais aussi à des institutions comme le Vatican, les mutualités chrétiennes, le Verbond van Christelijke Werkgevers (Union Syndicale des Patrons Chrétiens), le Bond van Grote en Jonge Gezinnen (Union des Jeunes Familles Nombreuses),... Lors d'une conférence de presse consacrée à cette action, Gerolf Annemans déclara qu'une organisation catholique ne pouvait pas collaborer au renforcement de la religion musulmane en Flandre. D'après le porte parole du Vlaams Blok, « les Pays Bas ne peuvent pas servir de terre nourricière aux cultures étrangères, et certainement pas à l'Islam. » Annemans déclara que l'on pouvait considérer la décision de créer cette association comme une initiative intégriste contre laquelle

l'Occident devait promptement réagir afin de se protéger. Début 1989, Filip Dewinter envoya au Ministère de l'Education flamande un questionnaire relatif au nombre d'élèves qui suivaient le cours de religion islamique en Flandre. Triomphant, il s'empressa de transmettre les réponses à la presse. En effet, les données envoyées par le Ministre apportaient de l'eau au moulin des opposants à l'Islam : le nombre d'élèves ayant choisi cette option augmentait légèrement chaque année et atteignait le chiffre de 12 895 pour l'année scolaire 1987-1988. Il était à prévoir que le Vlaams Blok passerait à l'étape suivante dans le but de supprimer (légalement) la reconnaissance officielle du culte islamique. En avril 1989, Filip Dewinter présenta un projet de loi visant l'abrogation de cette reconnaissance. Dewinter expliqua pourquoi il avait soumis

cette proposition : « Il faut être naïf et inconscient pour reconnaître la religion islamique alors qu'il y a trois cent ans à peine que l'Europe a enfin réussi à se libérer de l'asservissement de l'Islam. L'argument généralement avancé pour la reconnaissance de la religion islamique est que la tolérance est une caractéristique propre à notre société occidentale. Hélas, derrière cette tolérance se cache une naïveté excessive qui la plupart du temps, est la conséquence d'une méconnaissance totale de l'islam, de ses fondements et de son passé. » Ayant pris en considération la proposition de Dewinter, tous les autres groupes politiques présents à la Chambre firent savoir qu'ils refusaient d'y adhérer et votèrent contre. Certains firent même observer que le comportement du Vlaams Blok à l'égard de l'islam et des immigrés montrait des parallèles flagrants avec la stratégie politique appliquée par les nazis, avant et pendant la Seconde Guerre

mondiale lorsque ceux-ci pratiquaient le démantèlement progressif de la communauté juive qui aboutit au dénouement dramatique que l'on sait. Quelques mois plus tard, le Vlaams Blok fit toute une série de propositions dans lesquelles il limitait et réformait l'enseignement de l'islam. D'après le Vlaams Blok, l'enseignement des immigrés doit être entièrement placé sous le signe du retour soi-disant accompagné (lise: plutôt « forcé ») des immigrés dans leurs pays d'origine. Dans ce but, le Vlaams Blok souhaite créer une sorte de ghetto au sein de l'enseignement, sur le modèle de l'apartheid en Afrique du Sud et développer un système de coopération au développement. Les enfants des familles marocaines, turques, tunisiennes et algériennes seraient ensuite renvoyés dans leur pays d'origine : « La réintégration ne peut s'accomplir à moins de développer un enseignement adapté et autonome pour les enfants des travailleurs

immigrés. Il faut non seulement créer un programme éducatif proche du monde culturel et social du pays natal de ces enfants, mais prévoir que la phase d'accueil réponde également aux besoins et aux nécessités des différents pays d'origine. Il faut veiller à ce que les accords signés avec les pays d'origine appliquent rigoureusement le programme d'éducation et que l'accueil des immigrés qui retournent dans leur pays se déroule correctement. Les fonds pour la coopération au développement et les pays de retour des travailleurs immigrés partageront équitablement les frais de fonctionnement du réseau d'enseignement consacré aux enfants des travailleurs immigrés. » Entretemps, la vague de propositions, de témoignages de haine et de provocations ne fit que s'amplifier, comme en témoignent les campagnes contre les mosquées à Anvers et dans le Limbourg, les projets de loi visant à interdire l'abattage rituel des animaux, le refus d'une mission

diplomatique iranienne en Belgique et l'opposition à la création d'une école islamique à Bruxelles,... Après les émeutes de mai 1991 à Bruxelles, la campagne de dénigrement à l'encontre des immigrés attint son point culminant. Dans une lettre adressée au premier Ministre et au Ministre de la justice, Dewinter déclara qu'il fallait à tout prix « stopper l'invasion islamiste » et exigea la démission immédiate de Paula D'Hondt, Commissaire Royal à l'Immigration, ainsi que « la création d'une commission d'enquête parlementaire et la promulgation d'un arrêté interdisant tout rassemblement dans les communes dont la population immigrée non européenne est supérieure à 10 %. » Pour couronner le tout, le Vlaams Blok distribua dans pratiquement chaque boîte aux lettres de la commune bruxelloise de Molenbeek (dont un peu moins de 40 % de la population se compose d'immigrés) un tract à caractère raciste frappé du slogan « Arrêtez l'Islam » rédigé en arabe et une invitation, en néerlandais cette fois, à un meeting à Molenbeek ayant

pour thème « Bruxelles aux Bruxellois ». Sur ce tract figuraient également des textes et des bandes dessinées injurieux à l'égard des immigrés dans lesquels on suggérait que les ceux ci étaient responsables de toutes les formes de criminalité rencontrées à Molenbeek. L'éditeur responsable de ce tract était Roeland van Walleghem. Les autorités supérieures et le bourgmestre de Bruxelles jugèrent que c'était de la pure provocation et un manque total de responsabilité d'organiser un tel meeting quelques jours seulement après les émeutes de Bruxelles et l'interdirent purement et simplement. Cette attitude de rejet virulent à l'égard de l'Islam a aussi joué quelques tours au Vlaams Blok. Par exemple, le 18 mai 1992, le Vlaams Blok envoya au Ministre de l'Intérieur une lettre de protestation contre la création du « Moslim Volkspartij van Brussel en Vlaanderen » (MPV) (Parti Populaire Musulman de Bruxelles et de Flandre). Alors que Dewinter voyait surgir

tous les fantômes fondamentalistes, l'objectif de ce parti est, en réalité, de « promouvoir et de protéger les intérêts des musulmans belges ». La situation devint carrément loufoque lorsque le trésorier du MPV, Günther van Campenhout, originaire d'Hoboken, fit une déclaration d'adhésion au Vlaams Blok dans le cadre de l'émission radio « Actueel » de la BRTN. Van Campenhout expliqua que son père (un ancien du Front de l'Est et membre du Sint Maartensfonds) et lui même participaient régulièrement à des réunions dans les locaux du Vlaams Blok et qu'ils acceptaient de discuter des éventuels malentendus. En outre, il déclara que son parti voulait le renvoi des immigrés et qu'il s'opposait à leur droit de vote.

La communauté juive Même si dans le passé, et récemment encore, certains mandataires du Vlaams Blok se sont montrés plus ou moins injurieux vis à vis de la communauté juive ou ont émis des propos antisémites, le Vlaams Blok veille soigneusement à ce que ses personnalités et lui même ne soient pas taxés d'antisémitisme. Dans ce pays on a toujours considéré, à tort, que l'antisémitisme était plus grave que la discrimination à l'égard des gens d'une autre couleur de peau comme les Marocains ou les Turcs. Le souvenir collectif de la Seconde Guerre mondiale et de l'holocauste est indubitablement un facteur qui explique cette attitude. Le Vlaams Blok, qui a son bastion à Anvers où vit un groupe important de Juifs, veille à prévenir toute action et toute prise de position antijuive. Il y réussit en partie seulement. Si certaines personnalités du Vlaams Blok ont en effet complètement renié leur passé antisémite,

d'autres, par contre, ont réussi à rendre la chose complètement impossible. Jusqu'à la fin, Karel Dillen traînera le fait qu'à une époque, il traduisit le livre de Maurice Bardèche qui prétend que les camps de concentration ont été construits par les juifs après la guerre avec des décors de cinéma d'Hollywood. Lorsque le dirigeant du VMO, Bert Eriksson, le membre le plus tristement célèbre du Vlaams Blok et l'ami intime de Dillen, déclara dans une interview accordée à la télévision qu'Adolf Hitler avait commis une seule faute, perdre la guerre, il ne fut pas exclu du parti mais au contraire protégé par la direction du Vlaams Blok. Et que doit on penser de la vénération du Vlaams Blok pour Watd Hermans ? Karel Dillen le surnomme le « surhomme » et la centrale d'achat du service de propagande du Vlaams Blok vend l'ouvrage Brieven aan Ward Hermans (Lettres adressées à Ward Hermans). Hermans qui, dans les années trente et pendant l'occupation, s'avéra un

nazi convaincu et un antisémite virulent, publia de nombreux livres attaquant les Juifs (Jodendom, marxisme en wereldheerschappij L'Empire Juif, le marxisme et l'hégémonie mondiale; Het boek der stoute waarheden, Le livre des vérités courageuses; Jodendom en communisme zonder masker, L'Empire juif et le communisme sans masque; Deutsch flämisch, Vlaams Duitse Harmonie Entente germano-flamande, ...). Le vice président Roeland Raes ne peut pas faire oublier l'interview qu'il accorda en octobre 1979 à Henk Ruigkok, du journal Het Algemeen Dagblad, dans laquelle il déclare : « Les Juifs constituent un moindre problème pour nous parce qu'ils sont moins nombreux qu'en Hollande par exemple. Mais les Juifs ont leur propre Etat, par conséquent ils devraient se trouver en Israël. » L’événement qui a amené cette interview est sans équivoque. Une semaine avant l'interview en question, l'Algemeen

Dagblad avait découvert que le Voorpost était présent aux festivités organisées dans les bois de Soestduin à l'occasion de la première année d'existence du Nationaal Jeugd Front (NJF) (Front National de la jeunesse), l'organisation de jeunesse de la Nederlandse Volks Unie (NVU) (Union Populaire Néerlandaise). Une dizaine de journalistes présents à cette fête anniversaire notèrent quelques réflexions du genre : « Les Créoles doivent retourner à leurs ruisseaux puants, ces vantards de Juifs qui ennuient les combattants du Front de l'Est et les Surinamiens qui ne foutent rien de leurs dix doigts noirs ». Pendant les festivités, le NJF/NVU distribua un pamphlet dans lequel l'organisation invitait à une action musclée : « Nous allons durcir notre position. L'élite de la jeunesse néerlandaise est en train de se regrouper en formations spéciales. Bientôt, ces commandos NJF deviendront offensifs. Nos opposants seront rappelés à leur juste

devoir de manière appropriée. Les peines à l'encontre des gangsters rouges, des profiteurs non-aryens et des membres ‘courageux’ de la Ligue de Défense Juive seront sévères. Il est temps de nettoyer les rues de Hollande de la vermine ennemie de l'Etat. » On pourrait également remplir un livre avec le palmarès antisémite du député Vlaams Blok Xavier Buisseret : production et vente d'autocollants antisémites, distribution d'un nombre impressionnant de livres antisémites, d'un numéro spécial du magazine HARO niant l'holocauste et publication d'articles anti-Juifs dans Alarm et HARO,... Peu après les élections communales de 1988, le magazine Halt publia dans son courrier des lecteurs la lettre d'un dessinateur qui critiquait ouvertement le message (à peine) caché du tract pour les

élections nationales distribué par le Vlaams Blok. L'éditeur responsable de ce tract était Gerolf Annemans. Sur la page de couverture on voit le dessin d'un groupe de gens, quelques Marocains, une femme voilée, un Sikh, un Asiatique, un noir et un homme portant une moustache. En tête figure le slogan : « Eigen Volk eerst! »(Notre peuple d'abord). Parmi ces gens, une personne se détache du lot; il s'agit d'un « Juif capitaliste » portant un chapeau haut de forme, avec un cigare en bouche et un nez crochu, comme les nazis aimaient à les dépeindre avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. A l'arrière-plan, on découvre une famille de race blanche dont l'homme fait un « signe étrange » de son bras droit. En redessinant quelques doigts, le signe devient le salut d'Hitler. Sa coupe de cheveux ressemble étrangement à la coiffure du dictateur allemand, seule la moustache manque.

En juin 1992, le Vlaams Blok publia un rapport percutant consacré aux immigrés et dont le titre était Immigratie : de kostprijs Sociaal economische aspecten van het vreemdelingenprobleem (Immigration : le prix à payer les aspects socio-économiques du problème des étrangers). Ce rapport étayait une fois de plus les propositions émises par le Vlaams Blok au sujet du renvoi des immigrés. En page 7, le rapport du Vlaams Blok indique que dans certains quartiers urbains, la population immigrée atteint plus de 30 %. Dans le cas du centre d'Anvers (dans le premier quartier, celui entourant la maison communale), on compte un pourcentage de 33,7 %. Apparemment et d'après la note en bas de page, le Vlaams Blok avait utilisé les pourcentages repris dans les statistiques du rapport annuel de 1990 de la commune d'Anvers. En y regardant de plus près, on contaste que le Vlaams Blok a attribué le pourcentage du sixième quartier au quartier

du centre d'Anvers. Le sixième quartier est le quartier juif, autrement dit le quartier diamantaire. Le Vlaams Blok voudrait-il par hasard également expulser les Juifs ? Nous nous attarderons sur d'autres aspects de ce rapport rédigé par le Vlaams Blok dans le chapitre consacré aux immigrés. Dans un chapitre ultérieur, nous analyserons la démarche des révisionnistes, ces gens qui se prétendent historiens et qui voudraient réécrire l'histoire relative à la Seconde Guerre mondiale, tout en évitant l'antisémitisme ! Parmi eux, on trouve André van Hecke, Jeanine Colson, Siegfried Verbeke, Jos Rogiers, personnes qui ont joué un rôle au sein du Vlaams Blok et/ou dont les noms figurent sur les listes électorales du parti. Un des champion de l'antisémitisme est sans conteste Jos Rogiers qui avait notamment été tête de liste du Vlaams Blok à Asse lors les élections communales de 1988. Aussi bien dans le journal local du parti, Den Blokduvel, que

dans ses livres révisionnistes, publiés à des fins de propagande électorale personnelle, Rogiers invective les Juifs. Dans l'édition spéciale de son mensuel De Blokduivelsverzen (Les versets sataniques du Vlaams Blok) de mars 1989, rogiers écrit ceci : « Le cauchemar du ‘déclin de l'Occident’ (l'Europe) est en train de s'accomplir réellement ... Chaque fois qu'un parti anti-immigration qui a la confiance du peuple, comme le Vlaams Blok, voit augmenter le nombre de ses voix, une vague de protestations indignées émerge des rangs de l'establishment (ou seraient ce plutôt des couscous kreten (des cris couscous). L'élite commet là un d'élit incommensurable en s'alliant avec les étrangers contre son propre peuple... » D'après Rogiers, il s'agit d'un complot à l'échelle internationale concocté entre autres par les Juifs et les francsmaçons.

Dans une lettre adressée (mais non publiée) à la rédaction du magazine Humo (en janvier 1990), Rogiers fulmine véritablement : « je pense sincèrement que le national socialisme, vu ses caractéristiques que ce soit ce que l'on nomme l'humanisme, le communisme, la franc-maçonnerie et d'autres absurdités est le produit de la doctrine des adorateurs du dieu barbare oriental ‘Jahweh’ : donc du judéo-christianisme (...) La théorie du ‘Peuple Elu’ illustre de la façon la plus évidente la parenté entre le nazisme et l'idéologie judéo-chrétienne. Je n'ai jamais retrouvé cette façon de penser dans les textes ou les pratiques de la Grèce Antique ou de l'Ancienne Germanie. Cependant, je l'ai rencontrée dans la bible judéochrétienne, dans laquelle il est mentionné que les Juifs forment le ‘Peuple Prédestiné’ de Jahweh : bref, on peut dire le ‘Herrenvolk’. »

Début 1991, la tête de liste du Vlaams Blok pour Asse perd complètement les pédales. Dans un petit livre intitulé Het uitverkoren probleemvolk De joden als vaders van het nazisme, aanstichters van W. D.II, racistische massamoordenaars en bedreiging van de wereld (La problématique du peuple élu Les Juifs en tant que pères du nazisme, instigateurs de la Seconde Guerre mondiale, coupables de massacres racistes et menace sur le monde), Rogiers tente de démontrer en 129 pages que l'humanité doit attribuer toute la misère provoquée par le national-socialisme et la Seconde Guerre mondiale au fait que pratiquement tous les chefs nazis étaient en réalité des Juifs: Adolf Hitler, Rudolf Hess, Hermann Göring, Joseph Goebels, Heinrich Himmler, Adolf Eichmann... Il y a quelques années de cela, les publications de Jos Rogiers soulevèrent un tollé dans la presse et Rogiers entra en conflit direct avec la direction du Vlaams

Blok. Rogiers démissionna du parti et peu de temps après, De Blokduvel disparut également de la circulation. En juin 1992, le journal du Vlaams Blok annonça néanmoins le démarrage de la publication du journal local de la section d'Asse : De Blokduvel.

L'Eglise Même si le Vlaams Blok ouvre parfois ses Congrès par une ‘Prière à la Mère Patrie’ et qu'il partage de temps à autre les opinions de l'Eglise catholique en matière d'éthique (l'avortement et l'euthanasie par exemple), officiellement, le Vlaams Blok se veut néanmoins un parti pluraliste. Dans les Principes de base, on ne donne aucun avis sur la conviction religieuse ou philosophique ou sur l'Eglise. Le solidarisme, qui est la base par excellence de la Déclaration de Principes du Vlaams Blok trouve cependant ses racines dans le catholicisme du dix-neuvième siècle et plus encore dans le fascisme catholique de l'Italie des années trente. Dans la pratique politique, il semblerait que le Vlaams Blok s'appuie surtout sur l'intégrisme religieux de Monseigneur Marcel Lefèbvre, dirigeant ultra conservateur de l'Eglise catholique, ainsi que sur certaines fractions conservatrices du Vatican même.

Au cours des premières années qui ont suivi sa création, le Vlaams Blok s'est d'ailleurs maintenu dans cette mouvance. En juillet 1984 par exemple, le Vlaams Blok provoqua un débat public relatif à la venue du Pape en Belgique. En effet, le parti était en colère parce que le programme du voyage du Pape ne prévoyait pas une visite à la Tour de l'Yser. Dans une lettre ouverte à l'attention des évêques belges, le Vlaams Blok insista pour que l'on apporte cette modification au programme du voyage afin que le Pape puisse visiter le monument de l'Yser. Bien évidemment, cette demande fut rejetée. A l'époque, pas mal de gens protestèrent à cause de la venue du Pape en Belgique, de façon ludique certes, et le Vlaams Blok estima que les témoignages de protestations dépassaient les bornes. Dans un communiqué de presse, le bureau politique du parti fit observer que les

affiches, visibles un peu partout, revêtaient « un caractère gravement offensant et obscène envers le Pape ». Le Vlaams Blok se référait ainsi à l'affiche où l'on voit le Pape embrasser le sol et dont la photo s'accompagne de la légende. « Hij kan ze kussen » (Il peut les baiser). D'après le Vlaams Blok, c'était de la « pornographie idéologique » et le parquet devait donc se saisir de l'affaire. Selon le Vlaams Blok, « Il ne s'agit pas seulement d'une insulte proférée à l'égard d'un chef d'Etat étranger, de telles affiches froissent également le sentiment de respectabilité de toute la Communauté Flamande et ridiculisent la conviction religieuse de la majorité de cette Communauté ». Quelques mois auparavant, le Vlaams Blok était pour la première fois entré (délibérément) en conflit avec le clergé flamand. La cause était la position antiraciste des évêques belges et des organisations religieuses Broederlijk Delen

et WeIzijnszorg qui, dès 1973, partaient du principe que les immigrés entre autres ont droit au respect de leur identité et qu'ils doivent obtenir le droit de vote. Au fil des années, ces prises de position se sont affinées, complétées et furent régulièrement soumises à l'opinion publique, au grand dam du Vlaams Blok. Le 25 mars 1984, le Vlaams Blok organisa son fameux Congrès sur l'immigration et attaqua de front les opinions défendues par l'Eglise catholique en la matière. C'est Eric de Lobel, dirigeant du Vlaams Blok pour le Brabant, qui déclencha les hostilités : « Le Christianisme se soucie du bien-être matériel mais surtout spirituel de l'être humain, mais le CVP ne mesure absolument pas les conséquences du déracinement culturel des travailleurs, qui se traduit non seulement par un retard scolaire navrant chez leurs enfants mais également par la perte des valeurs intrinsèques qui forgent leur personnalité. C'est ainsi que peu

à peu, une population voit sa propre éthique se dégrader et finalement disparaître, sans avoir nécessairement la possibité de la remplacer. Verschaeve avait raison lorsqu'il disait : « La dégradation commence par le haut, et la dégénérescence commence dans la tête. Ce sont aussi les conséquences dramatiques d'une politique d'intégration coûteuse, mais de nature coloniale, qui ne peut par conséquent en aucun cas avoir un but chrétien sincère. » Pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris, le vice président Roeland Raes présenta les choses avec plus de virulence : « La gauche, avec toute sa smala de pasteurs progressistes, part d'un principe d'égalité que nous jugeons inacceptable. En revanche, et en nous référant à Nietzsche, nous déclarons que l'injustice réside précisément dans le fait de revendiquer des droits égaux en tout et pour tout le monde. »

Les choses ne s'arrangeront plus jamais entre l'Eglise et le Vlaams Blok. Systématiquement, la direction du Vlaams Blok, les jeunes du Vlaams Blok, Filip Dewinter, Joris van Hauthem et Roeland van Walleghem enverront des lettres de protestation aux évêques, au Cardinal et aux curés de paroisses en réaction aux actions de l'Eglise en faveur des immigrés ou des projets de coopération au développement dans le Tiers Monde. Le niveau de leur argumentation ne devait pas être suffisamment élevé puisqu'ils n'ont pas réussi à convaincre les personnes interpellées. Preuve en est la lettre de protestation écrite par Joris van Hauthem et Roeland van Walleghern début 1991 et envoyée au nom du Vlaams Blok aux curés des paroisses de l'arrondissement de Bruxelles. Le Vlaams Blok critiquait cette fois le plaidoyer en faveur du droit de vote pour les immigrés soutenu par une plate forme d'organisations chrétiennes (dont Pax

Christi, Chiro, VVKSM, Welzijnszorg, Broederlijk Delen, l'ACV,...) : « Cette missive fait suite aux nombreuses réactions qui affluent chez nous, suscitées chez les croyants ordinaires qui se demandent si ces organisations qui se déclarent catholiques ne sont pas en train de perdre leurs facultés intellectuelles. Nous insistons sur le fait que le Vlaams Blok est un parti non confessionnel et qui ne s'occupe donc pas des questions religieuses, quelles qu'elles soient. Toutefois, cela n'empêche pas le Vlaams Blok qui est un ‘parti de valeurs’ de représenter un grand nombre de convictions religieuses. En outre, il est à noter que ces organisations qui se prétendent encore d'obédience catholique sont vraisemblablement dirigées par des personnes qui ne tiennent plus compte de leur ‘base’ mais veulent au contraire imposer à cette base leur vision déformée des prétendus bienfaits de la société multiculturelle, pluriculturelle, en gros d'une multi société. Nous sommes habitués à de telles pratiques de la part des anciens

gauchistes qui se sont familiarisés avec les institutions en place - et donc catholiques afin de les apprivoiser et qui, dans certains cas, confondent le Christ avec Marx. Ils peaufinent leurs modèles dans leurs tours d'ivoire sans tenir compte de la réalité, en l'occurence celle du problème des immigrés qui, à Bruxelles, est plus aigu que jamais ». Mais le Vlaams Blok ne se contente pas de rédiger des lettres. Dans le journal du parti de mai 1992, le député du Vlaams Blok Francis van den Eynde exhorta les gens à réagir contre les prêtres qui ne seraient pas d'accord avec son parti : « Même dans l'Eglise on réagit régulièrement contre le Vlaams Blok. Si vous êtes le témoin de tels actes, vous avez le droit de déclarer ouvertement au prêtre concerné qu'on n'attend pas de lui qu'il émette ses opinions politiques. On peut également écrire à ce sujet au diocèse. Si vous préférez ne pas le faire vous même, vous pouvez toujours faire appel à un mandataire local ».

Le nationalisme Le Vlaams Blok est avant tout un parti nationaliste. D'ailleurs, le sous-titre des « Principes de base » du parti est « Manifest van het rechtse Vlaamsnationalisme » (Manifeste du nationalisme flamand de droite). Dans son manifeste, le parti décrit vaguement ce que représente pour lui le nationalisme : « Le nationalisme s'appuie sur la communauté populaire en tant que donnée naturelle développée et gère les intérêts matériels, moraux, culturels et spirituels de la communauté. Naturellement, les intérêts moraux, culturels et spirituels priment sur les intérêts matériels. En tant que parti nationaliste, le Vlaams Blok défend l'autonomie complète de la Flandre. Le droit à l'autodétermination signifie également le devoir d'autodétermination. La communauté prime sur l'Etat. L'Etat sert les intérêts de la nation et non l'inverse. »

A partir d'une telle définition, on peut, il est vrai, prendre toutes sortes d'options différentes, mais on ne peut pas développer une politique. En janvier 1988, Gerolf Annemans traduisit son nationalisme dans Vrij Nederland en ces termes : « Mustapha qui égorge ses moutons dans sa baignoire n'est pas mon pire ennemi. Mon pire ennemi, c'est l'Etat belge. » En fait, Annemans voulait dire qu'il était avant tout un nationaliste flamand, un nationaliste populaire flamand. Mais même lorsque vous êtes parvenu à définir clairement qui est votre ennemi, il vous reste encore à énoncer votre politique et celle-ci ne peut certainement pas se fonder sur le nationalisme populaire. Le plus grand défaut de toutes les formes de nationalisme est le manque de définition maniable. Qu'il s'agisse du nationalisme d'Etat pratiqué par les fervants nationalistes belges (l'idée nationale), du nationalisme d'Etat extrémiste défendu par le Front National en France ou du nationalisme flamand démocratique prôné par la Volksunie, chaque fois il

s'avère que la définition du nationalisme reconnu et par conséquent l'interprétation de sa propre identité ressemble plutôt à un paquet mal ficelé. Dans L'Encyclopédie du Mouvement Flamand, les auteurs Eric Defoort et Frans van der Elst, illustrent ce phénomène de manière tout à fait frappante. Defoort puise des éléments souvent vagues et indépendants les uns des autres et les combine pour finalement aboutir à une esquisse du nationalisme belge, l'ennemi premier du Vlaams Blok, qui s'appuie sur des notions comme l'âme populaire belge, le sentiment national belge (« Le patriotisme est un sentiment, le nationalisme est une doctrine »). D'après van der Elst, « l'idée à la base de la communauté nationale est une forme donnée par la nature, une forme de cohabitation précieuse et irremplaçable. Ce n'est pas l'Etat, ni la communauté étatique, mais bien le peuple, la communauté nationale, qui est considéré comme étant

fondamentalement le plus précieux. C'est l'expression d'une pensée s'appuyant sur des critères nationaux par opposition à la pensée étatique. » Et van der Elst d'ajouter que la définition la plus appropriée du nationalisme flamand est celle formulée par C.J.H. Hayes : « It directs the supreme loyalty of its adherents to a community of language, customs and historic tradition. » Même si dans la pratique politique, le nationalisme populaire et le nationalisme d'Etat ont toujours été ennemis, ils ont en commun quelques caractéristiques qui dans le passé comme dans le présent, ont mené à commettre certains excès catastrophiques (l'exemple le plus récent est la guerre civile en ex-Yougoslavie). L'absence totale de structure idéologique (voir plus haut) est bien souvent compensée par le traditionalisme et le romantisme, deux notions qui, dans un contexte politique, s'appuient surtout sur le conservatisme et le fanatisme irrationnel, et tendent vers un

sentiment ultime du « nous » qui est le but explicitement recherché par le Vlaams Blok. La devise « Eigen volk eerst » (Notre peuple d'abord) en est l'exemple funeste. En ce qui concerne le nationalisme d'Etat belge, nous serons plus bref. En 1975, Eric Defoort l'a déjà enterré : « Pour le moment, le nationalisme belge survit encore grâce à quelques groupuscules, dont le point de chute principal est Bruxelles. Leurs porte paroles sont des périodiques comme Belgique Europe et La Nation Belge. On retrouve dans le nationalisme belge contemporain les mêmes éléments que dans celui d'avant 1940, parmi lesquels un antidémocratisme toujours latent. On continue, par exemple, à entretenir une admiration pour Charles Maurras et l'Action Française. Un mouvement de jeunesse du nom de Jeunesses Nationales, comme le mouvement de jeunesse d'avant guerre, dirigé alors par Nothomb, gravite autour de ces magazines. Leur dévouement idéaliste et

désintéressé ne modifie en rien le fait que le nationalisme belge d'aujourd'hui n'influence absolument pas la vie politique en Belgique. L'évolution politique de notre pays provoque chez eux de grandes frustations et rend à tout jamais impossible la découverte de points d'ancrage avec la réalité politique belge. La dernière réforme constitutionnelle constitua sans doute le coup de grâce. ‘La Belgique unitaire seule viable a été assassinée par une démocratie décadente’, déclara un rédacteur de La Nation Belge. » En France, le Front National maintient en vie l'héritage politique de l'Action Française. Toutefois, il semblerait que les contradictions apparemment insurmontables entre le nationalisme d'Etat, prôné par Le Pen, et le nationalisme populaire, défendu par Dillen, ne gênent absolument pas la bonne marche de leur travail commun sur le terrain, à travers le Vlaams Blok et le Front National.

Si le nationalisme d'Etat en Belgique appartient (définitivement?) à l'histoire, alors tout ce qui concerne le Vlaams Blok est moins simple qu'il n'y paraît. En effet, à l'origine, le Mouvement Flamand est une émanation historique du nationalisme. On ne connait que trop bien les différents courants qui se cachent derrière le Mouvement Flamand : le séparatisme, le fédéralisme, le mouvement thiois,... En soi, la plupart de ces courants et de ces sous-tendances sont tout à fait respectables. Cependant, dans les années trente et quarante, ils ont conduit tout droit aux eaux troubles du nazisme. L'absence d'une idéologie développée a mené à l'absorption des idées et des symboles de la révolution de droite qui, partout en Europe, se référaient au nationalisme. En parcourant les ouvrages de différents auteurs nationalistes flamands (Elias, Van der Elst, Willemsen), on peut mieux se rendre compte comment le Mouvement Flamand a dévié vers la

collaboration, lui qui, au départ, était un mouvement pour l'émancipation, pacifiste et de gauche. Ce revirement idéologique, pour lequel de nombreuses explications ont été données (par le camp nationaliste flamand), a fini par contaminer une grande partie du Mouvement Flamand contemporain d'un virus antidémocratique apparemment incurable. L'apologie de la collaboration, un racisme à peine voilé, des exhibitions paramilitaires, le soutien de l'apartheid en Afrique du Sud, les mouvements de jeunesses en uniforme et imbus de discipline, l'anti-féminisme, en sont les symptômes extérieurs. On est frappé de les rencontrer à nouveau lors du Pélerinage de l'Yser et de la Fête de la Chanson. Ce qui ne signifie pas qu'il faille en imputer la responsabilité aux organisateurs. Tant la Volksunie que le Vlaams Blok s'érigent en gardiens du nationalisme. Au début des années quatre vingt, on envisagea un mariage de raison. Avec les

élections d'octobre 1981 en ligne de mire, les dirigeants des deux partis cherchèrent à rapprocher leurs partis. C'est ainsi que le 6 décembre 1980, Vic Anciaux et Wim Jorissen au nom de la Volksunie, Karel Dillen et Leo Wouters au nom du Vlaams Blok, se réunirent pour la première fois. Le but de cette concertation était de former un parti unitaire sur base d'un programme nationaliste commun. Après une réunion qui avait duré 6 heures, ils décidèrent de se revoir le 20 janvier 1981. La suite de cette fameuse réunion de la Saint Nicolas n'a jamais eu lieu car l'esprit Schiltz de tendance « progressiste » qui régnait au sein du bureau politique de la Volksunie, ne voyait pas d'un bon oeil un rapprochement avec les extrémistes du Vlaams Blok. La Volksunie, Mouvement Flamand, prémunie contre antidémocratiques de ce rejeté peu à peu les

fille aînée du s'est toujours les tendances Mouvement et a extrémistes. Au

contraire, la stratégie politique du Vlaams Blok, le dernier rejeton politique du mouvement, a été toujours empreinte d'un extrémisme virulent qui s'accentue de jour en jour. Dans une mesure telle que même le nationalisme ne représente plus qu'une étiquette dissimulant une politique raciste. Le Vlaams Blok incarne littéralement et figurativement la petite définition du nationalisme donnée par le dictionnaire Van Dale : « La tendance à stimuler et à accentuer tout ce que l'on considère comme étant national, doublée d'un certain rejet de l'étranger »En consultant le Petit Robert, nous constatons que cette définition se rapproche fortement de la notion de nationalisme définie par les Français : « Exaltation du sentiment national; attachement passionné à la nation à laquelle on appartient; accompagné parfois de xénophobie et d'une volonté d'isolement. »

L'enseignement A propos de l'enseignement, le Vlaams Blok ne prend pas vraiment position dans ses Principes de base : « Le Vlaams Blok revendique une revalorisation fondamentale et profonde de l'enseignement. Il faut également empêcher toute manipulation politique. La liberté dans l'enseignement doit être protégée grâce à l'équivalence des réseaux scolaires. Il (le Vlaams Blok, H.G.) exige également une revalorisation fondamentale et profonde de l'enseignement sur le plan de son contenu. Il faudrait à nouveau introduire des normes de compétence sévères en matière de formation de personnel. Il faut mettre un terme au nivellement par le bas devenu monnaie courante. Dans la pratique, le Vlaams Blok estime que l'enseignement est devenu la victime d'un coup d'Etat larvé et public fomenté par la gauche ».

D'après le Vlaams Blok, il est temps de prendre les mesures nécessaires « Par exemple, le Vlaams Blok demande que l'enseignement porte son attention sur la formation de la personnalité en conciliant la performance et une saine concurrence. Il faudrait éduquer au sens de l'ordre et de la hiérarchie et se débarrasser de toute permissivité. Enfin, le Vlaams Blok exige un traitement équivalent pour les deux grands réseaux scolaires ainsi que la garantie du maintien des valeurs traditionnelles dans l'enseignement secondaire ». Ces propos anonymes figurent dans le journal du parti de décembre 1989. L'ordre, la hiérarchie, les valeurs traditionnelles tels sont les critères de base auxquels doit répondre tout type d'enseignement. Dans un tel cadre de pensée, il n'y a évidemment pas de place pour l'enseignement secondaire rénové, et certainement pas pour un enseignement multiculturel et islamique.

C'est pourquoi le Vlaams Blok se range du côté du comité interprovincial des parents d'élèves (IPOC). L'IPOC est composé de quelques directeurs d'établissement scolaire et de comités de parents d'élèves réactionnaires qui défendent le maintien des valeurs les plus traditionnelles pratiquées dans l'enseignement catholique. Il s'insurge contre la mise en place d'un pouvoir de coordination qui, à partir de 1987, a introduit dans l'enseignement catholique une nouvelle structure unitaire. D'après le Vlaams Blok, c'est la gauche qui a inspiré cette réforme. En mars 1989, Filip Dewinter, président des Jeunes du Vlaams Blok (VBJ), mena un combat frontal contre tout ce qui, selon lui avait une tournure progressiste dans l'enseignement. Dans un communiqué, il annonça que le VBJ allait distribuer cent mille tracts dans 150 écoles flamandes :

« Par cette campagne, le VBJ veut dénoncer l'endoctrinement et la manipulation de l'enseignement par la gauche. Il faut en finir avec la désinformation consciente des étudiants. Pas mal d'enseignants profitent de leur position pour faire admettre leurs idées progressistes. A présent, le VBJ dispose de suffisamment d'informations pour affirmer qu'actuellement, une campagne de désinformation dirigée et planifiée se déroule dans l'enseignement. L'objectif final de cette campagne de désinformation est de porter le discrédit sur le Vlaams Blok et sur son programme politique. Le VBJ veut rassembler le plus de renseignements possibles sur ces pratiques inadmissibles. A partir de l'information récoltée, le VBJ fera un livre blanc qu'il transmettra au Ministre communautaire de l'Education. Nous présenterons ce livre blanc à la presse dans le courant du mois d'avril. » La campagne de délation pouvait commencer. Les 150 000 tracts que

Dewinter fit distribuer dans les écoles étaient composés en partie d'un synopsis reprenant les positions les plus connues du Vlaams Blok (contre la présence des immigrés, contre le monde politique et les syndicats et pour le séparatisme) et d'une bande dessinée d'un niveau douteux. Dans ce tract et après la phrase : « Avez vous rencontré des problèmes avec des professeurs progressistes ? » Filip Dewinter lançait également un appel à la délation contre les enseignants progressistes : « La plupart du temps, vous ne devez pas compter sur la sympathie du corps enseignant lorsque dans une dissertation ou une discussion menée en classe vous défendez le principe ‘eigen volk eerst’. Celui qui ne partage pas l'opinion du professeur de religion ou de morale sur la question des étrangers ramasse généralement un savon. Beaucoup de professeurs profitent de leur position pour faire adopter leurs idées progressistes. La terreur intellectuelle commence à l'école. Ce qui est permis et ce qui ne l'est pas, ce qui est antidémocratique et ce qui est raciste,

tout cela est décidé par un petit club fermé d'enseignants. Heureusement, il reste encore quelques exceptions qui font leur travail en toute objectivité. Les Jeunes du Vlaams Blok entament leur campagne par la distribution de ces tracts afin de dénoncer la manipulation et l'endoctrinement dans l'enseignement par la gauche. Le VBJ veut rassembler le plus d'informations possibles au sujet de ces pratiques douteuses. D'où cet appel aux parents et aux élèves : envoyez nous des faits et des données (au besoin anonymement) quant aux enseignants qui outrepassent leurs droits. Toutes ces informations seront rassemblées dans un livre blanc ». Signé : Filip Dewinter. La Flandre fut absolument scandalisée par l'initiative de Dewinter. La presse et les milieux politiques, choqués, réagirent aussitôt. Au sein même du Vlaams Blok, la campagne fut également très mal accueillie par certains (voir le chapitre « Les dissidents »). Cependant, l'agitation qu'elle

avait provoquée enthousiasma les extrémistes purs et durs du parti qui avaient l'expérience de ce type d'opération. Dewinter n'était pas le seul à avoir cloué les enseignants au pilori du nationalisme populaire au moyen de campagnes de délation. Un groupuscule de la première heure (Désiré Dylst, José Wilmots, Leo van de Weghe, entre autres) composé de personnalités appartenant à l'organisation Voorpost, au VMO, au VNJ et à Pro Vita avait, en 1980, organisé une importante campagne de dénonciation. Rassemblés dans le Comité Algemeen Welzijn (CAW) (Comité pour le Bien être Général), ils s'en étaient alors pris aux mouvements de jeunesse, au secteur de la santé et surtout à l'enseignement catholique. D'après le président du CAW de l'époque, Arthur Raman, (ancien président du mouvement de jeunesse du Verdinaso d'avant guerre), aujourd'hui décédé, la jeunesse était devenue complètement

esclave du sexe, de la drogue et du rock'n'roll parce que la vie de leurs parents se limitaient « à la chasse aux trois grands V : Vrouw, Villa, Voiture (Femme, Villa, Voiture) ». Florent Peeters, à l'époque idéologue du CAW, était déjà sur la même longueur d'onde que Filip Dewinter : « Il existe une collaboration diabolique entre le capitalisme et les médias qui cherchent à obtenir ou à garder le pouvoir afin de nous vendre ce qu'ils veulent. (...) Il y a une conspiration internationale du mal qui s'active à tous les niveaux : la mode, l'art et la littérature, les finances publiques et l'éthique. La désorganisation s'opère par le biais des mouvements de jeunesse, de l'enseignement et du catéchisme. Ils ont parfaitement étudié le tout. Les professeurs de religion vont même jusqu'à reconnaître ouvertement qu'ils font partie d'organisations anti-religieuses. »

A l'époque, le CAW estimait que les pouvoirs organisateurs de l'enseignement catholique ne réagissaient pas suffisamment. En 1980, des changements se produisirent donc. Et ceci, sous l'impulsion du mentor spirituel du CAW, le jésuite Joris Noë, originaire de Louvain, qui avait conçu une tactique pour faire réagir d'emblée la Deontologische Kamer van het Katholiek Onderwijs (Chambre Déontologique de l'Enseignement Catholique). Noë savait comment s'y prendre. Pendant des années, il avait été inspecteur dans l'enseignement catholique et avait également fait partie de la commission du Ministère de l'enseignement. Afin de freiner la progression de « la conspiration diabolique », Nowa Huta Rooms Katholiek Réveil, organisation dirigée par Noë de concert avec le CAW, exhorta les parents, les enseignants et les élèves à constituer des dossiers sur des enseignants dont les cours traitaient parfois de Marx, de l'homosexualité, de la masturbation et de l'avortement; qui cohabitaient sans être marié, ou qui étaient

en instance de divorce. Ensuite, le CAW transmit ces dossiers à la Chambre Déontologique de l'Enseignement Catholique. Heureusement pour les personnes concernées, on n'entendit plus parler du CAW après le décès du Président Raman en 1984. Fin 1984, le Nationalistisch Jongstudentenverbond (NJSV, Union des Jeunes Etudiants Nationalistes), organisation soeur du NSV, en réalité le mouvement de jeunesse du Vlaams Blok, reprit le flambeau. Par ailleurs, Filip Dewinter fut, à partir de 1983, le président du NJSV dont le secrétariat était domicilié à l'adresse privée de Dewinter. A partir de septembre 1984, des tracts appelant à la dénonciation de « la racaille enseignante » étaient distribués aux entrées des écoles, tracts dans lesquels on pouvait lire : « Chaque jour, les droits des

élèves sont bradés. Les professeurs profitent de leur position pour vous imposer leurs chimères ! Osez seulement clouer au pilori cette racaille et c'est vous qui portez le chapeau.(…) Les écoles laissent pratiquement faire la racaille enseignante marxiste. Mais ce phénomène s'étend également aux établissements catholiques où en outre, certains professeurs donnent des cours empreints de propagande rouge : des rouges, des verts, des militants syndicaux (…) pour ne citer que ceux là. Il est grand temps de nettoyer en profondeur ces poubelles ! Vous avez des obligations mais vous avez également des droits; un de ceuxci est le droit de recevoir des leçons d'un professeur qui laisse de côté ses convictions politiques. En attendant, nous devons lutter avec tous les moyens possibles contre l'invasion des militants syndicaux ou des partis politiques au sein du corps enseignant et nous devons couper court à leur travail de sape. »

L'appel du NJSV était signé par Jan Creve de Tamise. Creve, membre du VMO, avait été inculpé dans le procès de l'organisation et condamné pour l'attaque d'un café d'immigrés de Saint Nicolas. Il a travaillé comme « historien » sur le Verdinaso. La campagne de Jan Creve ne dura que quelques mois mais fut reprise quelques années plus tard par Filip Dewinter. L'appel à la dénonciation lancé par Filip Dewinter connut une suite retentissante. Pas mal d'écoles mirent sur pied l'action Ecole sans Racisme et certains établissements scolaires organisèrent alors des cours traitant du racisme. Suite à un petit article sarcastique de Tom Lanoye publié dans Humo, la campagne fut même complètement déstabilisée. Lanoye exhortait tout le monde à « collaborer » en envoyant massivement des réclamations au VBJ concernant des écoles qui existaient et des professeurs imaginaires. Comme d'habitude,

il terminait son article par la phrase : « ...Et n'oubliez pas d'écrire ! Faites-le ! » Le papier de Lanoye fit mouche : quelques centaines de lecteurs envoyèrent des rapports et des réclamations complètement faux au Vlaams Blok. Dewinter et sa brigade de dénonciation ne savaient plus quoi faire. Au total, le Vlaams Blok avait reçu 784 réclamations écrites et il était absolument impossible de détecter les authentiques des fausses. On ne comptait plus les épîtres signées Mephisto Facisto ou Achiel van den Boeynants. On ne pouvait pas faire la distinction entre les lettres sérieuses et le reste du courrier. Par conséquent, 774 des 784 lettres ne furent PAS reprises dans le livre blanc et on renonça définitivement à publier l'ensemble des plaintes. La campagne de délation du Vlaams Blok fut annoncée le 10 mars 1989 par Filip Dewinter. Dans la même circulaire, il annonçait également qu'il allait envoyer le livre blanc au Ministre flamand de

l'Education et le présenter à la presse au mois d'avril de la même année. Le livre parut six mois plus tard que prévu, fin novembre 1989. La brochure, une vingtaine de pages environ, comprenait à peine vingt citations extraites des lettres de réclamations et dans la plupart des cas, celles-ci émanaient de sympathisants ou de membres du Vlaams Blok. En fin de compte seulement sept des vingt pages de la brochure étaient constituées des lettres de réclamation. Les autres pages étaient consacrées aux coupures de presse et aux commentaires évoquant la campagne de délation et comprenaient en outre le récit confus d'un prétendu complot communiste dans l'enseignement écrit par l'incontournable Luc Dieudonné, alias Jan Stalmans, alias KOSMOS. Ce fameux livre blanc fut complètement tourné en riducule par la presse et dans les milieux enseignants. En outre, la campagne de délation qui

accompagnait sa publication fut unanimement critiquée par les milieux concernés. Depuis, il n'a plus jamais été question du livre blanc. Même les élus du Vlaams Blok ont sagement renoncé à en parler lors de leurs innombrables interventions au Parlement ainsi que dans leurs propositions de loi. Pour conclure ce chapitre, ajoutons enfin que les mandataires du Vlaams Blok ont la mémoire courte. Dans le mensuel du parti, du mois de mai 1992, Francis van den Eynde écrit ceci à propos des conséquences des élections du 24 novembre 1991 : « (…) quelques jours après les élections, une institutrice d'un établissement catholique demanda à ses élèves s'ils savaient si leur papa ou leur maman avait voté pour le Vlaams Blok. Faire dénoncer les parents par les enfants, n'est ce pas là une démarche totalitaire ? »

La coopération au développement Le Vlaams Blok n'a jamais été partisan de la coopération au développement. Dans les Principes de base du parti on peut lire ceci : « Le Vlaams Blok dénonce tout sentiment d'infériorité ou de culpabilité européen comme étant néfaste pour le futur. Comme tout peuple qui fait preuve de fierté, l'Europe doit faire preuve de fierté dans ses relations avec les puissances et les pays extra-européens. Le Vlaams Blok demande que l'on réforme toute forme de coopération au développement qui ne sert ni les intérêts de l'Europe ni ceux des pays qui sont aidés. Le Vlaams Blok s'oppose également aux livraisons d'armes ainsi qu'à l'envoi d'argent dans les pays en voie de développement car, dans la plupart des cas, ce sont en fin de compte les dirigeants corrompus en place dans ces pays qui en profitent. A la place, il faudrait fournir des moyens techniques et

des compétences européennes pour les projets mis en place; c'est notre seule matière première dans la lutte contre la concurrence de la production bon marché et des bas revenus hors Europe. » Ce point de vue, non dépourvu d'ethnocentrisme, a évolué au fil des années vers un rejet farouche de toute forme de coopération au développement. A ce rejet, le Vlaams Blok ajoute comme exigence que l'aide s'adresse exclusivement aux pays de retour des immigrés (le Maroc et la Turquie), son objectif final étant de favoriser le renvoi des immigrés non européens résidant en Belgique. Ce point de vue a été développé en 1989 dans deux publications du Vlaams Blok : la brochure Over de desinformatie van 11.11.11 en de alternatieve ontwikkelingshulppolitiek van de VBJ (A propos de la désinformation de l'opération 11.11.11 et de la politique de coopération au développement alternative proposée par le VBJ), écrite par Filip

Dewinter et Jan Penris (à ce moment là, respectivement président et secrétaire du VBJ), et le livre écrit par Filip Dewinter Eigen volk eerst Antwoord op het vreerndelingenprobleem (Notre peuple d'abord Réponse au problème de l'immigration), auquel Jan Penris collabora également. La brochure éditée par le VBJ s'attaque en particulier à la coopération au développement en général et au Centre National de Coopération au Développement (CNCD) en particulier. Selon le raisonnement de Dewinter et Penris, l'aide au développement, par le biais « d’un curé ou d'une soeur de la famille en poste dans la brousse »(dixit Dewinter et Penris), était acceptable jusqu'à ce que des organisations comme Broederlijk Delen ou 11.11.11 « aient dévié vers la gauche ». Il fallait à nouveau en imputer la responsabilité à l'agitation provoquée par la gauche, qui a débuté en 1962 avec le University Clearing

Office for Development Countries (UCOD) (Bureau Universitaire pour les Pays en voie de développement) créé à l'université de Louvain : « Ce qui avait commencé comme une initiative de charité tranquille (Broederlijk Delen et 11.11.11) ayant comme but de répondre aux besoins matériels et spirituels de la population de nos colonies et de nos anciennnes colonies, se transforma peu à peu en un instrument des marxistes d'ici pour aider les révolutions de là bas. Pendant vingt ans, les personnes qui se sont infiltrées sont parvenues à conserver leur image de respectabilité. L'année dernière la Gazet van Antwerpen a dévoilé quelques pratiques louches de Broederlijk Delen. Cette année, les Jeunes du Vlaams Blok publient un livre sur l'opération 11.11.11 ». Dewinter et Penris misent sur les éventuels trous de mémoire des lecteurs. Les soi-disant révélations sur Broederlijk Delen fournissant une aide financière à une guérilla

communiste aux Philippines étaient en réalité dénuées de tout fondement et furent démenties. Le petit livre rédigé ensuite par le VBJ est tout autant mensonger. En tentant de démontrer que le CNCD se trouve entre les mains d’« agitateurs professionnels », le VBJ « analyse brièvement le fonctionnement du Conseil de Direction de l'organisation » et déclare en substance que ce Conseil est formé de « personnalités d'extrême gauche » comme Pierre Vermeylen (socialiste et ancien Ministre de la justice et Ministre d'Etat), Baziel Maes (professeur de philosophie, docteur en théologie, administrateur du Conseil Pastoral Interdiocésin, directeur de Broederlijk Delen), Marc Deneer (Solidarité Socialiste) et Pierre Galand (secrétaire général d'Oxfam Belgique et force vive dans le mouvement pacifiste francophone). Qu'une des éminences grises du nationalisme flamand, le sénateur à titre

honorifique Maurits Coppieters, fut jusqu'en 1989 président du Conseil de Direction du CNCD, n'avait aucune espèce d'importance aux yeux de Dewinter et Penris (Coppieters fut remplacé par Rika Steyaert, un ancien Ministre CVP). Bien entendu, toutes les organisations pour la coopération au développement qui sont subsidiées par le CNCD sont également vivement critiquées. A part le Broederlijk Delen, il y a tout d'abord Oxfam, que Dewinter et Penris accusent d'entretenir des liens avec l'extrême gauche parce que : « Le personnage central de cette organisation est Paul Janssens, une personnalité douteuse, qui a fondé en 1971 le premier ‘Magasin du Monde’ avec Hugo Gijsels (journaliste au magazine progressiste Humo)". Visiblement, KOSMOS, le service de renseignements du Vlaams Blok est bien informé.

Ils ne font pas confiance non plus aux organisations FOS et HOOS. FOS est l'abréviation de Fonds voor Ontwikkelingssamenwerking (Fonds pour la Coopération au Développement) et HOOS celle de Humanistische Organisatie voor Ontwikkelingssamenwerking (Organisation Humaniste pour la Coopération au Développement). Pour le duo Dewinter Penris, FOS et HOOS demeurent des « organisations innocentes ». Cependant « la question est de savoir combien de paroissiens bien intentionnés et qui ont rempli les boîtes de collecte du 11 novembre savent qu'une grande partie de l'argent donné est transférée aux organisations idéologiques d'entraide qui bien souvent se moquent des convictions religieuses. » D'après Dewinter et Penris, « l'escroquerie s'aggrave avec le fait que Bevrijde Wereld peut en profiter également. Quand on sait que cette institution est officiellement domiciliée à Info Jeugd, à

Saint Nicolas (une organisation qui renseigne volontiers les jeunes sur l'avortement, la drogue et les aberrations sexuelles), on n’a pas besoin de faire un dessin ». Aux yeux des membres du Vlaams Blok, le soutien apporté à AKZA (Actiecomité Zuidelijk Afrika) (Comité d'Action Afrique du Sud) est également condamnable : « AKZA ne cache pas sa sympathie envers certains mouvements de libération d'extrême gauche. En outre, cette organisation soutient la campagne de dénigrement anti-apartheid en faveur du mouvement terroriste de l'ANC. Petit détail piquant : les dons de plus de 1 000 fr en faveur d'AKZA (fiscalement déductibles) sont versés au compte de, vous l'avez deviné, Oxfam ! Est il nécessaire d'en dire plus ? »

Filip Dewinter et Jan Penris tirent d'autres conclusions : « Il semblerait que des organisations comme 11.11.11. veuillent susciter un sentiment de culpabilité afin que nous acceptions sans hésiter de les aider. Elles insistent sur notre soi-disant responsabilité en tant qu'anciens coloniaux; elles agissent comme si toute mauvaise récolte, toute catastrophe naturelle, tout détérioration des infrastructures locales étaient la conséquence directe de notre comportement dans le passé. » En effet, le Vlaams Blok ne se soucie guère du fait acquis que les problèmes rencontrés aujourd'hui par le Sud sont la conséquence directe de l'échange inéquitable de matières premières dont le Nord tire largement profit. « De cette manière, nous masquons habilement les causes réelles de la misère que connaît actuellement le Tiers Monde : les expériences totalitaires des régimes marxistes, la corruption des dictateurs en place, l'expansion de l'aide au

développement dirigée depuis les pays du bloc de l'Est... Voilà la signification d'organisations comme 11.11.11. (...) Par ailleurs, leurs sympathies progressistes vont de préférence aux régimes de ce type. Elles tirent avantageusement parti de la situation lorsqu'en plus, elles parviennent à susciter chez nous un sentiment de culpabilité. L'alternative proposée par le VBJ est claire. La coopération au développement doit partir d'une action spontanée et non s'inspirer d'un quelconque sentiment de culpabilité. » Spontané et sans complexe de culpabilité, voilà en effet comment on pourrait définir le genre d'aide au développement proposé par le Vlaams Blok : le renvoi dans leur pays d'origine (et pourquoi pas par avion cargo militaire) des immigrés vivant en Belgique et qui seraient capables de jouer un rôle clé à l'échelle économique de leur pays natal grâce à l'enseignement suivi lors de leur séjour en Belgique et l'expérience acquise par eux et

les membres de leur famille. Ce ‘retour organisé au pays d'origine’ constitue la pierre angulaire du programme en 70 points présenté par Filip Dewinter lors d'un colloque en juin 1992 et qui a fait l'objet de contestations de toute part (pour plus de détails, voir le chapitre « racisme »).

La presse « La censure est le seul moyen valable pour garantir la diffusion de la vérité. (...) La vérité doit cependant demeurer neutre, débarrassée de toute opinion, c’est pourquoi la censure constitue un instrument indispensable de notre société. Une communauté vit selon certaines règles bien déterminées. Une société reconnaît un certain nombre de normes. Ces normes doivent être respectées par les personnes qui forment cette société. Nous n'envisageons pas un état totalitaire mais bien autoritaire : un Etat dans lequel priment l'ordre et la justice... »(Hans Carpels, beau fils de Karel Dillen, ancien président du NSV et figure montante du Vlaams Blok, extrait de Branding (en français, Ressac), février 1982) « Nous avons acquis une grande expérience en matière de fanatisme,

d'intolérance maladive et de haine furieuse que tous les ‘faiseurs’ d'opinions d'Ollande sans H déclenchent contre tous les opposants qui rejettent, ne fût ce que partiellement, la ligne prescrite par ces ‘faiseurs’ d'opinion. Finalement, nous avons tiré une seule leçon de cette histoire (pour plus de détails, voir le curriculum de Gerolf Annemans, H.G.). En fin de compte, la seule possibilité qui s'offre encore à nous pour garantir la tolérance dans le Nord est d'envoyer une armée de libération flamande. » (Karel Dillen, s'adressant à la presse le 18 janvier 1989) « Dans plusieurs pays prédomine un certain nombre de lois votées au nom d'une soidisant lutte contre un soi-disant racisme, contre une soi-disant haine à l'égard des étrangers et contre un soi-disant antisémitisme, et qui procèdent ainsi à un plus grand bâillonnement de la liberté de la presse que la concentration des pouvoirs financiers... » (Préambule aux propositions de Karel Dillen présentées au Parlement européen, en1990, dans le but de « protéger la presse »). Le Vlaams Blok a toujours

connu des relations difficiles avec le reste du monde en général et avec la presse en particulier. Depuis des années, le sentiment du « nous » quelque peu crispé qui émane du parti, et défini, par lui, comme étant le nationalisme, a conduit le Vlaams Blok à considérer la société comme un territoire ennemi. Etant donné que c'est la presse qui est le reflet de la société, les membres du Vlaams Blok ont tendance à entrer en conflit avec les médias. Lors de la campagne électorale précédant les élections parlementaires du 24 novembre 1991, le président Karel Dillen proposa d'envoyer tous les journalistes au peloton d'exécution. Lui même était prêt à donner l'ordre de tirer. Mais le père fondateur ajouta subtilement qu'alors, on le condamnerait probablement pour génocide. Habituellement, le Vlaams Blok se contente de qualifier les journalistes de « hoernalisten » (jeu de mot : « hoer » signifie « prostituée », N.L.), de cloportes et

de gauchistes. Avec la déclaration de Dillen, le parti va nettement plus loin dans sa démarche. Mais par la suite, la « mise en joue » de Karel Dillen s'avérera à bien des égards très difficile. Vers le milieu de l'année 1991, la direction du parti décidait qu'il fallait entamer une action contre les médias manifestant de l'antipathie pour le Vlaams Blok. L'escalade commença dès les élections du 24 novembre lorsque la presse tout entière (à l'exception évidemment du journal t'Pallieterke) manifesta son mécontentement suite au communiqué du Vlaams Blok. Francis van den Eynde et Filip de Man, cadres du Vlaams Blok, prirent note de tout. La BRTN constitue évidemment la pierre d'achoppement (« Benoîtement Rouge et Tendancieuse »). D'après Van den Eynde, Paula D'Hondt aurait beaucoup trop à dire à la BRTN et depuis les élections du 24 novembre, « les remarques et les programmes anti-Vlaams Blok ont pris dans bien des cas une ampleur exagérée. » Ce n'est pas pour rien si pendant tout un temps le Vlaams Blok a taxé la BRTN de BRT

Nul. Par ailleurs, dans le numéro de mai 1992 du journal du parti, Jan Stalmans (alias Luc Dieudonné) qualifia la télévision flamande de « maison d’intolérance ». Le Vlaams Blok a gardé une cicatrice toujours sensible dont l'a marqué la BRTN. Dans les Principes de base du parti, on peut lire : « Nous accusons la gauche de miner la vie publique; tout d'abord nous revendiquons le droit d'obtenir des informations objectives concernant la radio et la télévision, ce qui brisera au besoin le monopole exercé par la BRTN ». La haine que nourrit le Vlaams Blok à l'encontre de l'audiovisuel public fut amplement illustrée par l'attitude de Gerolf Annemans lors du débat au Conseil Flamand sur l'audiovisuel commercial (le 20 avril 1988). Après avoir traité la BRTN d’« épave agonisante » et de « victime inerte », Annemans déclara : « Les instances de la BRTN sont minées et pourries par la politique et la bureaucratie. Les relations familiales, les nominations

politiques, les relations extraconjugales et la soumission à la politique d'un parti ont fait de la BRTN un nid qui a fini par dégager une odeur malsaine... Il est manifestement évident que la politique a tenté à plusieurs reprises de mettre la main sur la BRTN. L'élection d'Els Witte en est encore une preuve éclatante. C'est une politique de parti soigneusement planifiée. La politique veut également intervenir aux échelons inférieurs. Les politiciens des partis ont régulièrement gravi les marches de cette tribune afin de pouvoir se plaindre des discriminations encourues par l'un ou l'autre parti ou individu. A la demande de Humo ou de De Morgen, certaines personnes ont même pris la parole pour régler publiquement des comptes personnels. Le système du parapluie, les niveaux, les sousniveaux et les petits postes pour y reléguer des gens, les équilibres entre partis et d'innombrables autres caractéristiques d'une bureaucratie kafkaïenne ont à ce point compartimenté l'Institut qu'il n'est plus et ne pourrait plus être dirigé par personne. Cette

inertie, ce vide, ce refus de toute autorité, a fini par donner le champ libre à la génération de mai 68. En quelques années à peine, cette situation a donné un aspect funeste à toute la machine audiovisuelle. La BRT est devenue la propagatrice d'un seul courant politique ce qui est un comble pour une chaîne publique, d'une vision unique de la vie, la propagatrice d'un esprit d'époque unilatéral. Un esprit d'époque que l'on peut, même si ce n'est pas complet, qualifier d'esprit de gauche. » Malgré la nomination de Jef Elbers, qui travaillait autrefois à la BRT et qui est un ancien membre du VMO, en tant que représentant du Vlaams Blok au Conseil d'administration de la BRTN, il est fort peu probable que l'atmosphère se détende entre le parti et la chaîne. En effet, depuis la désignation de Jef Elbers, la prose de combat contre la BRTN publiée dans le journal du parti n'a en rien diminué ni en volume ni en fréquence.

Dans le numéro de mai 1992 du journal du parti, la presse écrite, dont Humo, De Morgen, Het Nieuwsblad, De Standaard, Panorama, Knack et Le Soir, fait l'objet d'accusations mensongères de la part de Filip Dewinter, député Vlaams Blok. Une brochure éditée par l'ACOD ACV BRTN provoque la colère du parti. Le parti se montre menaçant. Le Vlaams Blok ne cesse d'interpeller le Conseil Flamand au sujet des mesquineries qu'il attribue à la BRTN. En outre, le Vlaams Blok a engagé des poursuites contre le service d'actualités afin de lui extorquer un droit de réponse. Le parti a également entamé des poursuites judiciaires contre le magazine Humo parce qu'un journaliste avait écrit que Roeland van Walleghem, sénateur Vlaams Blok, « a autrefois été condamné à trois ans de prison ». (En fait, Van Walleghem avait fait trois mois de préventive et avait été condamné à quatre mois d'emprisonnement pour sa participation à l'attaque du VMO contre des membres du FDF au cours de

laquelle un militant FDF, Georgin, fut tabassé (à coups de pieds de table) et succomba à un infarctus). Pendant la première moitié de 1992, l'hebdomadaire Panorama recevait systématiquement après chaque parution d'article traitant du Vlaams Blok, un droit de réponse du parti. Les journalistes qui veulent rédiger des articles de fond sur le Vlaams Blok ou faire du journalisme d'investigation, sont prévenus : « prenez garde aux wolfsangels (groupuscule fasciste flamand) et aux fusils ! » Evidemment, on ne peut pas éviter le droit de réponse. Toute personne dont le nom est mentionné dans un article peut y avoir accès, que l'information publiée soit correcte ou non. Par contre, si l'information est erronée, le journaliste risque un procès. Ne doutons pas que dans un avenir proche nous serons amenés à affronter une belle

campagne d'intimidation engagée par le Vlaams Blok. En outre, le parti a installé une cellule média dans son quartier général de Bruxelles, qui doit rassembler toutes les informations dirigées contre le Vlaarns Blok. La direction de cette cellule a été confiée à Jürgen Ceder, qui fut président de NSV Louvain au milieu des années quatre vingt, tête de liste pour le Vlaams Blok à Alost, et d'après différents témoignages, un militant particulièrement violent. Début décembre 1991, l'hebdomadaire étudiant Veto publia ceci : « Le NSV, avec en tête Ceder, a procédé à une occupation spectaculaire des locaux du Stuc. La bagarre qui s'ensuivit, se solda, pour Bert Germeys, un étudiant, par une fracture ouverte de la jambe. D'après de nombreux témoins, Jürgen Ceder l'attaqua et lui fit une prise de karaté. Cependant, le tribunal correctionnel de Louvain relâcha Ceder ‘pour manque de preuves’ ». Sur la même page, Veto avait

imprimé deux photos, l'une montrant Jürgen Ceder armé d'un grand bâton, l'autre Filip Dewinter, masqué. « Les propos que l'on tient dans la presse à notre égard sont subjectifs. (...) Nous ne prônons. pas la haine. (...) La classe ‘hoernalististique’ de ce pays écrit que nous sommes des néonazis, des facistes et des racistes », déclara Filip Dewinter le 3 avril 1992 lors d'un meeting du Vlaams Blok à Halle. « Je vous en conjure, ne croyez PAS ce que racontent les journaux à notre sujet ! Ne croyez pas ces calomnies mais seulement ce que nous écrivons dans nos magazines ! » Le 24 novembre 1992 (un an après le succès électoral du parti), le Vlaams Blok organisa à Borgerhout un « Congrès de la victoire ». Dans son discours, Filip Dewinter déclara une fois de plus la guerre à la presse. Il annonça entre autre qu'il allait présenter la

facture aux journalistes qui les gênaient, lui et son parti. Deux jours plus tard, lors d'une soirée débat à Geel, Dewinter précisa sa menace : « Nous visons en particulier quatre journalistes : Guido Fonteyn de De Standaard, Hugo Gijsels de Humo, Bert Verhoye de De Nieuwe Gazet et Paul Goossens, ex-rédacteur en chef à De Morgen. » Un journaliste du Standaard qui était présent à cette soirée débat à Geel, publia dans son journal ceci : « Avec un sourire confiant, Dewinter ajouta que les journalistes en question ‘ne peuvent gêner plus longtemps le Blok (et que) bientôt d'ailleurs, ils ne le feront plus.’ Dewinter resta évasif quant à la manière dont la ‘facture’ allait être réglée. »

Le racisme « Bikul, multikul, plurikul : allemaal kul » (kul = foutaises), déclara Karel Dillen le 17 octobre 1988 alors qu'il assistait au programme de la BRTN, « De Zevende Dag ». Cette citation traduit à peu de choses près la position du Vlaams Blok à l'égard des immigrés, des réfugiés et de la société multiculturelle (et donc multiraciale) : un rejet total et sans compromis. C'est sans conteste le ciment d'un racisme virulent à l'égard des immigrés et des réfugiés politiques qui consolide le Vlaams Blok et lui a conféré un élan électoral prodigieux. On ne peut pas dire que la situation actuelle est comparable à celle des premières années d'existence du parti. Même si dès le départ, il était déjà clair que le Vlaams Blok servirait de

couverture aux organisations d'extrême droite, néonazies qui sont dans bien des cas des mouvements racistes, les premières années, les thèmes se rapportant aux immigrés ou aux réfugiés politiques ne faisaient pas encore partie de la stratégie de combat essentielle du parti. Dans les Principes de base du Vlaams Blok, on trouve un seul, mais éloquent, paragraphe consacré à l'immigration et aux réfugiés politiques : « Nous réclamons, dans un laps de temps raisonnable, le retour au pays natal des travailleurs non européens, le retour immédiat de tous les chômeurs, des clandestins et des immigrés non européens qui ont été condamnés à des peines correctionnelles ou criminelles. Nous exigeons également la révision du statut de réfugié politique. »

On retrouve également dans les Principes de base du Vlaams Blok une phrase obscure dont on peut considérer qu'elle préfigure la « loi du sang » formulée quinze ans plus tard par Filip Dewinter, en mai 1992 (dont nous reparlerons plus amplement) : « Le Vlaams Blok exige comme mesures transitoires la détermination de la nationalité à Bruxelles sur base de critères objectifs de filiation. » Dans le premier programme électoral présenté par le Vlaams Blok, le point de vue du parti en matière d'immigration se borne à quelques considérations relatives au « travail dans sa propre région ». Ce qui n'a pas empêché le Vlaams Blok de brandir, aux élections de 1981, le slogan « 400 000 chômeurs, et pourquoi pas les travailleurs immigrés » qui est directement emprunté au slogan électoral lancé par les nazis au début des années trente « 500 000 chômeurs, 400 000 Juifs ».

La problématique immigrée ainsi que le Vlaams Blok se plait à la définir, ne figurait pas au programme de ses cinq premiers Congrès. La seule action menée en la matière se limitait à un projet de loi déposé par Karel Dillen (en décembre 1983) qui proposait une prime de retour pour les immigrés. C'est seulement après que Jean Marie Le Pen, ayant mené tambour battant une campagne raciste lors des élections municipales de 1983 en France, eut dépassé le seuil psychologique des dix pour cent et qu'un sondage d'opinion ait révélé qu'environ trente pour cent des Français soutenaient le point de vue de Le Pen en matière d'immigration, que la stratégie du Vlaams Blok connut une revirement important. Le procès du vice président Roeland Raes suite à la diffusion d'un pamphlet raciste, témoigna des lacunes de la toute nouvelle loi en matière de racisme et de xénophobie. En effet, cette loi ne réprimant

pas la diffusion de la propagande raciste, elle l'autorise indirectement. Ce fameux procès donna le feu vert au sixième Congrès du parti. Ce Congrès se déroula le 25 mars 1984 qui était, est ce un hasard ?, la date de « La journée Internationale contre le Racisme ». Au cours de ce Congrès, la direction du Vlaams Blok établit les bases de ce que l'on appelle « le programme immigration » du Vlaams Blok. Eric Deleu, conseiller communal d'Anvers, jongla avec les statistiques dans le but de démontrer qu'il y a plus de chômeurs, et également de chômeurs de longue durée, parmi les étrangers et que ceux ci reçoivent plus d'allocations sociales que les Belges (Deleu, dont les grands parents sont originaires de Turquie, quitta par ailleurs la politique début 1984 et par la même occasion se distança de la politique raciste du Vlaams Blok). Eric de Lobel, représentant du Vlaams Blok dans le Brabant, n'hésita pas à ressortir Nietzsche et

Schiller pour démontrer qu'il est bien et normal de considérer qu'il existe des inégalités entre les gens et les races. Dirk Jacobs, auparavant président des Jeunes du Vlaams Blok, clama haut et fort son aversion pour une Flandre future dans laquelle six millions d'Arabes parleraient le flamand. Le même eut l'idée d'un projet de loi (écarté) qui proposait de remplacer le terme « immigration » par « politique esclavagiste importatrice de main d'œuvre ». Le vice président Roeland Raes fit une grande plaidoirie en faveur d'une « Europe forte et organisée naturellement ». D'après Raes, une telle Europe était menacée par « l'impérialisme soviétique dégradant, l'impéralisme américain nivelant la société par le dollar et une immigration extra européenne massive et incontrôlée ».

Le Congrès était lancé. Raes y clôtura les débats : « La gauche, et toute sa meute d'ouailles pas gênée d'appartenir à la mouvance progressiste, prône une idéologie égalitaire que nous jugeons inacceptable. Nous nous opposons à cet idéal dont l'injustice réside précisément, ainsi que le démontrait Nietzsche, dans la revendication de droits égaux pour tout et tout le monde. » Sur base de ce genre de considérations, le Congrès établit un programme en 12 points concernant l'immigration, fondé principalement sur le renvoi dans leur pays des immigrés au chômage, des assistés et des délinquants. En 1989, Filip Dewinter transcrivit ce discours dans son livre intitulé Eigen volk eerst (Notre peuple d'abord), considéré comme la bible du racisme en Flandre jusqu'en mai 1992. En mai 1992, Eigen volk eerst fut remplacé par le programme en 70 points élaboré par Filip Dewinter et que Paula

D'Hondt rebaptisa De Griezelroman (Le livre des horreurs). Depuis le Congrès sur l'immigration, le Vlaams Blok a acquis une triste réputation de parti raciste à l'échelle nationale, mais aussi internationale, ce qui n'est pas pour plaire à tous les membres de la direction du parti. Depuis la seconde moitié des années 80, le parti connaît un succès électoral grandissant. Parallèlement, la troïka Dillen Annemans Dewinter accorde de plus en plus d'interviews dans lesquelles le trio se fait fort de souligner que le Vlaams Blok n'est pas un parti raciste. « On nous attribue des opinions racistes, je démens catégoriquement ce fait », expliqua Karel Dillen dans le journal De Standaard du 19 septembre 1988 et la même année, il dit ceci dans Le Vif/L'Express : « On nous traite de racistes. C'est un terme qui ne signifie plus grand chose à partir du moment où il est considéré comme une injure. » A la lecture d'un tel propos, on peut se demander ce qu'il

entend par le mot raciste. Dans le dictionnaire Van Dale on trouve la définition suivante du racisme : « La notion de race supérieure à une autre, entraînant par conséquent le fait qu'une race peut prendre des dispositions à l'égard d'une autre race », ou encore : « Discrimination sur base de la notion de race » une définition qui sans conteste se réfère au racisme exercé par le régime nazi d'antan. Par ailleurs, on retrouve également dans les textes rédigés par Karel Dillen l'une et l'autre définition qui se rapproche très fort de la théorie du racisme et de la notion de races. En mai 197 1, dans Dietsland Europa, Karel Dillen proposa de faire un « inventaire » de la filiation chez la population belge : « Au prochain recensement, il faudra demander à chaque Belge : où sont nés vos père et mère ? Quelles sont les origines de vos grands parents ? » La même année, Dillen rédigea un recueil sur « la mission aristocratique du

nationalisme ». Nos linguistes auront déjà compris de quoi il s'agissait : le nationalisme est relié à « l'aristocratie », c'est donc le « règne des meilleurs » ou « l'élite » fasciste. Ce genre de nationalisme est diamétralement opposé à la notion de démocratie où tous ont des droits égaux. Ou pour utiliser les propres termes de Dillen : « Actuellement, on refuse de reconnaître que la notion d'égalité est fausse et dépourvue de substance. Elle conduit à l'humiliation, à la démystification générale, au nivellement par le bas, à la catastrophe et à l'esclavage moderne. Nous ne tolérons pas que dans nos villes en particulier, des petites sous-colonies maghrébines, africaines et asiatiques se développent et nous menacent. »

Parfois, l'argumentation est plus subtile. Le 14 juin 1992, le parlementaire Filip Dewinter déclara lors d'une émission à la BRTN, « De zevende dag », qu'en ce qui le concernait, il estimait que la Déclaration

des Droits de l'Homme se subordonnait au principe de « Eigen Volk Eerst ». « (...) Le reste n'est que sornettes et balivernes ». Le lendemain, son collègue Gerolf Annemans confirma au journal De Morgen que « effectivement, le Vlaams Blok ne se sent pas lié à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Cette déclaration de l'ONU a été mise au point avec l'aide de gens du Sénégal et de la Côte d'Ivoire. C'est pourquoi nous ne devons pas en tenir compte ici à Borgerhout. » C'est une remarque assez stupide de la part d'un avocat qui devrait savoir que le Sénégal et la Côte d'Ivoire ne sont même pas concernés par la rédaction de la Déclaration. Ces deux pays n'ont adhéré aux Nations Unies qu'en 1960 alors que la Déclaration des Droits de l'Homme a été rédigée par l'ONU en 1948. Néanmoins, quand cela fait son affaire, le Vlaams Blok se retranche derrière les Droits de l'Homme. C'est ainsi que lors du fameux Congrès de 1984 sur

l'immigration, on a pu noter la disposition suivante qui figure au « programme sur l'immigration » : « Il faut s'efforcer de supprimer le principe de travailleur immigré à l'échelle internationale, parce que c'est contraire aux Droits de l’Homme. » Pendant des années, Dillen fut le leader incontesté de Were Di. Les Principes de base établis en 1973 par ce think tank ont de nombreux points communs avec la déclaration de Principe du Vlaams Blok. D'après le Were Di, face au problème de l'immigration non européenne, il faut mettre sur pied une série de solutions européennes auxquelles il faut ajouter la notion « d'impossibilité d'intégration pour ces non Blancs ». Lorsqu'en 1978, l'hebdomadaire Knack, fit remarquer qu'il existait de troublantes similitudes entre Were Di et le Vlaams Blok, Dillen déclara : « Il est clair qu'il y a une analogie entre les deux. A présent, les nationalistes flamands sont rassemblés dans une même idéologie. »

« L'impossibilité d'intégration pour les non Blancs », comme on appelle cette conception chez les nationalistes flamands, le SS Bert van Boghout, le chef de Were Di et compagnon de Dillen, l'avait auparavant formulée d'une autre manière. Le 31 mars 1956, dans Opstanding, une revue à laquelle Dillen collabora également, il écrivait ceci : « L'essentiel de notre existence en tant que peuple est due à la préservation quantitative et qualitative de notre substance biologique. Il est vrai que lEurope est menacée de l'extérieur (la Russie, l'Asie, l'Afrique), mais le premier danger qui la guette est son déclin biologique, provoqué par un mélange sanguin croissant avec des éléments non européens ». La plus ancienne de ces citations remonte à cinq décennies. Et cependant, la concordance avec les textes plus récents du Vlaams Blok est saisissante. Lors du fameux Congrès sur l'immigration organisé par le

Vlaams Blok, Roeland Raes formula le point de vue de son parti en ces termes (son texte, d'ailleurs considéré comme le document officiel du Congrès, fut remis aux journalistes présents) : « (...) et il est encore moins vrai que nous avons le devoir envers les pays du Tiers Monde, d'offrir éternellement l'hospitalité à leur surplus de naissances, d'autant moins qu'en agissant ainsi, nous compromettons la sécurité, l’emploi, l'identité culturelle et ethnique de notre communauté... » Le Nationalistisch Studenten Verbond (NSV) (Union des Etudiants Nationalistes) est une autre organisation apparemment autonome du Vlaams Blok. Lorsqu'il était étudiant, Filip Dewinter en avait d'ailleurs été le président et visiblement, il a gardé un petit faible pour le mouvement. Filip Dewinter déclarait dans Knack, en 1988 : « NSV, NJSV et le Vlaams Blok forment une famille. » C'est exact. Koen Dillen, Karim van Overmeire, Jürgen

Ceder, Joris van Hauthem et Marijke Dillen, tous membres du NSV à l'époque où ils étaient étudiants, se sont ensuite retrouvés au sein du Vlaams Blok. Van Overmeire, Van Hauthem et Marijke Dillen peuvent aujourd'hui mettre en pratique, au Parlement, les leçons politiques apprises au sein du NSV. Lorsqu'il faisait partie du NSV, Koen Dillen pouvait donner libre cours à son enthousiasme pour des nazis comme Goering et Eichman, tandis que les membres du NSV avaient l'occasion de se familiariser avec la doctrine de la race allemande grâce au journal du mouvement, Signaal : « Afin d'assurer la continuation de notre culture et de notre peuple en tant qu'individualité organique, nous devons garder la race pure (...). C'est dans un peuple germanique pur et sûr de lui que renaîtra la paix, la foi et l'honneur, car une fois l'influence décadente de l'Est disparue, ce peuple retournera de lui même à ses propres racines. (...) Voilà

pourquoi nous menons un combat contre les influences étrangères (...) qui ne peut en aucun cas se montrer misécordieux, parce que c'est un combat sans merci. » Le chant de combat du NSV invective également sans autre forme de procès, les Marocains et les « sales juifs ». Les porte-paroles du Vlaams Blok aiment dire qu'en accomplissant leur programme d'immigration, ils combattent en réalité le racisme. Mais si le Vlaams Blok veut vraiment combattre le racisme, pourquoi donc soutient il l'apartheid en Afrique du Sud ? A l'époque, Karel Dillen avait traduit le livre de J.E. Holloway, L'apartheid, un défi et en 1977, il participa à la création de Protea, un lobby pro-apartheid qui voulait diffuser une « information objective » au sujet de l'Afrique du Sud. L'Afrique du Sud se trouve de l'autre côté de la terre et il est

donc peu peu probable que l'ANC intente un procès pour racisme. C'est pourquoi Gerolf Annemans ne se gêne absolument pas lors du Congrès de l985. Réagissant à une blague de la BRTN à propos du Pape, Annemans dit (nous transcrivons ici le texte littéral du Congrès) : « Afin de tester si notre chaîne publique, oserait dire la même chose dans toutes les circonstances, je propose un scénario dans lequel la jeune mère (de) Desmond Tutu, vêtue d'un paréo de négresse, prépare de la soupe cannibale avec comme ingrédient un Afrikaner blanc. A présent qu'elle est devenue un peu plus vieille, elle propose à l'éminent évêque le même plat, tout en faisant remarquer en riant : « Notre Desmond n'a pas oublié le goût. Il demande seulement qu'on le prépare à présent avec de l'eau bénite ! » Maintenant que l'Afrique du Sud blanche et noire sont en train de mettre fin à l'apartheid, le Vlaams Blok veut introduire en Flandre une séparation entre les races : en

effet, le parti plaide pour un « réseau d'enseignement séparé pour les immigrés ». Depuis des années, le Vlaams Blok fulmine contre la campagne « Ecoles sans Racisme » et voudrait interdire « l'éducation multiraciale et mondialiste dans les écoles ». Cette dernière remarque nous amène au « Livre des horreurs », titre donné par Paula D'Hondt aux « 70 propositions pour résoudre le problème des immigrés » que Filip Dewinter présenta devant le colloque de Pentecôte à Anvers le 6 juin 1992. Dewinter intitula le document L'immigration : les solutions mais personne n'utilise cette formulation. Il faut dire que son « Livre des horreurs », grâce auquel Dewinter veut, selon ses propres termes, « mettre fin à la folie multiraciale du lobby pro-immigration », relègue les autres publications du Vlaams Blok aux rayons de la littérature enfantine.

Pendant les jours qui suivirent le colloque, on put noter dans la presse et rue de la Loi deux réactions de rejet différentes : l'une assimilant les propositions de Dewinter aux écrits de Le Pen; l'autre, faisant le rapprochement avec les mesures prises à l'encontre des Juifs par Hitler, avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Ces deux rapprochements ne sont pas incompatibles, bien au contraire. Peu de temps après le colloque, Jaak Gabriëls , à l'époque président de la Volksunie, fit circuler une note dans laquelle il démontrait, paragraphe par paragraphe, les similitudes entre les propositions sur l'immigration de Dewinter et celles du Front National de Jean Marie Le Pen. La note de Gabriëls dit en substance ceci : « Il est tout à fait intéressant d'aligner les propositions des deux partis. Elles constituent véritablement une copie des unes sur les autres. A présent, il est indéniable que le Vlaams Blok est un parti d'extrême droite anti-immigrés : la petite robe nationale flamande est son pagne. »

C'est une déclaration qui semble tout à fait correspondre à la réalité. Le Front National et le Vlaams Blok ont chacun un objectif et un projet où l'on distingue déjà des similitudes. Le 16 novembre 1991 se déroula à Marseille un colloque organisé par le Front National. Bruno Mégret, le numéro deux du parti d'extrême droite français, y présentait une cinquantaine de dispositions « contribuant à régler le problème des immigrés ». Par ces propositions, regroupées en 7 directives, le Front National voulait prouver qu'il était capable de traduire en mesures concrètes son programme sur l'immigration. Le samedi 6 juin 1992, le Vlaams Blok organisa un colloque à Anvers. Filip Dewinter y présenta 70 mesures supposées donner « une analyse approfondie de la position du parti concernant la problématique immigrée ». Avec ces

propositions, formant dix chapitres, le Vlaams Blok voulait régler ses comptes à ceux qui prétendent que le retour organisé des étrangers dans leur pays d'origine est irréalisable. Il y a correspondance dans la division de la thématique et les dénominations que le Front et le Blok ont donné aux différents chapitres de leurs textes respectifs. Le Front National veut « protéger l'identité nationale »; le Vlaams Blok veut, quant à lui, « protéger l'individualité de notre peuple ». « Réformer la loi sur la nationalité » devient, avec Dewinter, « Renforcer la loi sur la nationalité ». Le Pen veut « stopper toute nouvelle immigration », Dewinter traduit cela par « stopper le flux de l'immigration ». Le Front veut « organiser le retour des immigrés dans leur pays d'origine »; le Blok parle d' « accélérer le retour ». Le Front va « appliquer les mesures nécessaires pour les expulsions » tandis que le Vlaams Blok va

« organiser le retour ». Et si nous nous penchons sur les propositions concrètes, nous constatons que les similitudes sont encore plus saisissantes : Créer un secrétariat d'Etat pour les questions d'immigration (Vlaams Blok). Créer un ministère de la population (Front National). Organiser un contrôle strict des organisations d'immigrés. Contrôler les associations étrangères. Pas de subsides accordés aux organisations étrangères et interdictions de la propagande politique étrangère. Limiter les financements publics aux associations étrangères. Interdire l'enseignement multiracial cosmopolite dans les écoles. Bannir cosmopolitisme de l'éducation nationale.

et le

Limiter le droit de propriété des immigrés. Réglementer la propriété immigrée. Priorité d'accès aux logements sociaux pour les Flamands. La priorité d'accès aux avantages sociaux pour les français.

Augmenter la taxe sur l'emploi d'étrangers non Européens. Taxer le travail étranger. Attribution de la nationalité sous réserve. Instaurer l'obligation de réserve (pour les naturalisés pendant une période probatoire). Reconsidérer les naturalisations accordées depuis 1974. Remettre en cause les naturalisations accordées depuis 1974. Rétablir le « ius sanguinis » (la loi de filiation par le sang) pour l'obtention de la nationalité. Rétablir le « ius sanguinis »'. L’attribution d'une carte de séjour renouvelable (mais non automatique) tous les deux ans. Supprimer la carte de séjour de dix ans tacitement reconductible (carte de deux ans non renouvelable automatiquement) Mobiliser des C 130 pour le retour des illégaux. Affréter des bateaux et des charters pour le retour. Limiter les acquis sociaux et créer un système indépendant de sécurité sociale pour les immigrés. Créer des caisses de sécurité sociale séparées.

Renvoyer les étrangers qui sont au chômage depuis trois mois. Rapatriement des chômeurs en fin de droit de séjour.

Il ressort de cette énumération que les propositions du Vlaams Blok sont presque identiques à celles du Front National. Cependant, chaque parti a également conçu d'autres propositions originales. Par exemple, le Front National propose qu'en cas de nécessité, on licencie d'abord les immigrés et que l'on introduise un label « Produit France avec des Français ». Le Vlaams Blok quant à lui plaide en faveur du cloisonnement intersectoriel des travailleurs étrangers (par exemple un travailleur du secteur de la métallurgie ne pourra pas passer dans le secteur de la construction), la supression du regroupement familial avec un pouvoir rétroactif jusqu'en 1974 et l'instauration d'un réseau éducatif séparé pour les immigrés. Enfin, dernier point commun entre les deux partis : en guise de conclusion aux débats du colloque organisé par le Front National, Jean

Marie Le Pen déclara ceci : « Nous ne considérons pas les immigrés comme nos ennemis. » Lors du colloque du Vlaams Blok, Karel Dillen déclara quant à lui : « Les propositions émises par notre parti ne sont pas dictées par une haine quelconque à l'égard des immigrés. » Lors du l'immigration du président Roeland prouvé également Congrès.

fameux Congrès sur Vlaams Blok, le vice Raes reconnut le fait, par un des textes du

Cependant, il existe une autre similitude entre les déclarations des deux partis. Les différentes dispositions proposées par le Vlaams Blok et le Front National semblent avoir été empruntées aux mesures édictées par Adolf Hitler. Ces textes traitant du problème immigré, rédigés par le Vlaams Blok dans les années 80 et 90 (dont, en particulier, le programme en 70 points)

présentent des simulitudes avec le programme nazi comme l'a d'ailleurs déclaré le propre mentor du Vlaams Blok, Edgar Delvo. Pendant l'occupation, Delvo membre du VNV, fut nommé par les nazis au poste de président de l'Unie voor Hand en Geestearbeiders (UHGA) (Union des Travailleurs manuels et intellectuels). UHGA était une organisation corporatiste à la manière allemande qui proposait de remplacer les syndicats et qui, sous la houlette de Delvo, prit résolument un virage nazi. A la Libération, Delvo s'enfuit en Allemagne où il fit partie d'un « gouvernement de collaboration en exil ». En 1945, il fut condamné à mort par contumace. Après trente ans d'exil, Delvo revint en Belgique. En 1983, il écrivit un livre dans lequel il reproche aux démocraties occidentales d'avoir pris la décision de combattre Hitler. En tant que président de UHGA, Delvo prêta main forte au Amt für

Arbeitseinsatz, service qui était chargé de la question immigrée en Allemagne nazie. Dès 1939, l'Allemagne commença à embaucher des millions de travailleurs immigrés pour remplacer les Allemands partis au combat. Naturellement, cette situation représentait un problème e idéologique pour le III Reich. Les nazis étant hostiles aux étrangers, il fallut rédiger des textes politiques justifiant la situation. En 1977, Delvo publia un texte dans Dietsland Europa, qui fournit quelques explications à ce sujet : « (...) Les forces ouvrières qui travaillent dans la même entreprise ne font pas toutes partie d'une même collectivité. Seuls les travailleurs appartenant à la communauté nationale en font partie, jamais les étrangers (...). Il va de soi que les travailleurs immigrés peuvent constituer une force de travail courageuse et exemplaire; on ne peut cependant pas s'attendre, de leur part, à un sentiment d'appartenance à la communauté nationale,

étant donné les objectifs de l'entreprise et le souci, qu'il faut garder, du bien être général de toute la communauté. (...) En clair, cela signifie que les dispositions politiques se limitent aux personnes appartenant à une même entité nationale. » « Il serait donc totalement erroné de conclure que les travaileurs étrangers peuvent bénéficier, au même titre que les travailleurs appartenant à la communauté nationale, des dispositions sociales de l'entreprise. Le fait qu'on fasse appel à la main d'oeuvre étrangère démontre en soi que l'Etat populaire désire faire profiter la communauté nationale de leur travail. (...) Au regard de la justice, le point de vue suivant est tout à fait défendable : lorsque les devoirs des membres de la communauté nationale sont différents et plus conséquents que ceux des étrangers, il est vrai que le salaire et les conditions générales des nationaux et des immigrés doivent être égaux en cas de prestation identique mais il

ne doit pas en résulter pour autant une égalité de droits. » Les slogans anti-immigrés du Vlaams Blok démontrent une similitude étonnante avec les campagnes de haine déclenchées avant guerre contre les juifs par le Verdinaso et le VNV. Par exemple, le 5 janvier 1935, dans sa revue Hier Dinaso, le Verdinaso lance à ses lecteurs l'avertissement suivant : « Personne ne peut considérer avec indifférence le principe de la race et la question de la race. C'est la clef de l'histoire mondiale, elle semble incohérente uniquement parce qu'elle a été écrite par des personnes qui ne maîtrisaient pas la question raciale et qui en mesuraient encore moins le poids. » Deux ans plus tard, Hier Dinaso ne laissait plus planer aucun doute sur la portée que devait avoir « la question raciale ». Le 23 janvier 1937, le journal publia un poème (si l'on peut dire) de Toon Maes où la solution (finale) est évoquée:

Nous monterons la garde Autour des camps de concentration Et nous nous marrerons bien. Le soleil brûlera votre peau Il y aura un vent gris et glacial Vous connaîtrez les souffrances de la soif Et la faim vous rongera lentement Qui sévit pour l'amour de milliers de cadavres Vous devrez comprendre pourquoi la haine Se trouve sur notre bannière. Aux élections communales de 1938, le VNV mena sa campagne sous le slogan « Antwerpen aan de Sinjoren! Weg met de joden! » (Anvers aux Anversois! Les Juifs dehors!), un slogan qui, sur ordre du bourgmestre Camille Huysmans, a été nettoyé des murs de la ville par le service des pompiers d'Anvers. Le VNV participa aux élections sur la liste du cartel du Vlaams Volksblok qui soutenait également le slogan « Het eigen volk eerst ». « Nous, les Flamands voulons rester maîtres dans notre

pays », pouvait on lire dans le journal du VNV, Volk en Staat. Alors que les membres mandatés du VNV tentaient de camoufler leur racisme par des arguments économiques et nationalistes, les affiches qu'ils placardaient sur les panneaux électoraux traitaient les Juifs de « profiteurs » et de « parasites étrangers ». « Notre attitude est uniquement dictée par l'urgence de protéger l'économie et le caractère national de notre communauté de l'invasion massive des immigrés », déclara Gérard Romsée, représentant du VNV. « Cette invasion représente une menace non seulement pour notre économie mais surtout pour notre identité nationale populaire. » En décembre 1938, dans un article intitulé « Het vreemdelingen vraagstuk » (La question immigrée) publié dans le journal Volk en Staat, Romsée se livra à une spéculation qui préfigure parfaitement le programme électoral récent du Vlaams Blok

« (…) mais où pourrait il y avoir de la place disponible pour les étrangers sur notre marché du travail ? Actuellement, il y a officiellement 280 000 chômeurs. Chaque étranger à qui l'on propose du travail prend ou prive un travailleur de notre propre communauté d'une opportunité d'emploi. (...) Dans les entreprises moyennes, surtout ces dernières semaines, on peut constater les effets de la politique gouvernementale laxiste en matière d'immigration et le développement d'une pénétration étrangère qui a abouti à une véritable attaque des juifs par surprise. Le ressentiment augmente dans les grandes villes et ailleurs : l'assaut juif progresse jusque dans les régions minières du Limbourg (...) » En passant, Romsée reprend également la conception d'autodéfense introduite par Adolf Hitler dans Mein Kampf : « Si l'on ne met pas très rapidement un frein à l'attaque juive, la réaction

‘d'autodéfense’ dont on décèle déjà les prémices s'amplifiera et se transformera en une véritable politique antisémite. » « Uit zelfverdediging » (Par l'autodéfense) sera le slogan électoral du Vlaams Blok lors des élections législatives du 24 novembre 1991. Pendant l'occupation, Romsée était secrétaire général du Ministère de la justice et de la Santé. Après la Libération, il fut condamné à une peine exemplaire de vingt ans de prison et à verser à l'Etat belge une amende de 10 millions de francs pour collaboration politique. Il fut libéré en 1951. Dans nombre de milieux différents, on a fait remarquer qu'il existe également une certaine similitude entre les propositions du Vlaams Blok et les lois anti-juives décrétées par Hitler. Fred Erdman, sénateur SP et Eric Gryp, ancien sénateur Agalev, ont publié conjointement une note passant en revue les ressemblances les plus frappantes. Ces données, conjuguées aux résultats de

nos propres recherches, confirment pratiquement les soupçons selon lesquels tant Jean-Marie Le Pen que Filip Dewinter se sont référés au nazisme : Le point 4 du programme du parti hitlérien NSDAP, déjà énoncé en 1920, limite exclusivement sur base du ‘ius sanguinis’ l'obtention de la nationalité allemande : « Seuls les membres de la communauté nationale sont des citoyens et ce, indépendamment de leur religion. C'est pourquoi un juif ne pourrait faire partie de la communauté. » Le principe de la filiation consanguine fut repris en 1935 dans les fameuses « lois de Nuremberg ». Le Vlaams Blok veut « réviser » les dossiers de tous les étrangers qui ont été naturalisés après 1973. Le 14 juillet 1933, Hitler reconsidère tous les dossiers des Juifs naturalisés.

Le Vlaams Blok veut exclure les étrangers de tous les services publics. Le 7 avril 1933, les nazis édictèrent une nouvelle loi relative à la fonction publique dont l'article 3 comprenait un « paragraphe aryen » selon lequel les fonctionnaires d'origine non aryenne étaient exclus de la fonction publique (de plus, tous ceux qui avaient moins de dix ans de service n'avaient pas droit à une pension, exception faite pour les Juifs ayant combattu lors de la Première Guerre mondiale. Cette exception fut supprimée en 1935). Le Vlaams Blok refuse le droit de vote aux immigrés et aux résidents de la Communauté européenne. En 1935, les « lois de Nuremberg » privèrent les Juifs de leur droit de vote. Le Vlaams Blok refuse explicitement l'intégration des immigrés. Le parti souhaite également que les mariages

entre Belges et non Belges n'entraînent pas d'obtention automatique de la nationalité belge. En 1925, Hitler proclama que les Juifs étaient l'ennemi absolu de la nation allemande. Dix ans plus tard, en 1935, les mariages et les relations sexuelles hors mariage, entre Juifs et aryens, étaient interdits. Le Vlaams Blok veut un contrôle strict des organisations étrangères. Dans l'Allemagne nazie (à partir de 1938) et dans les régions occupées, les Juifs avaient uniquement le droit de s'affilier aux « associations juives » contrôlées par les nazis. Le Vlaams Blok veut supprimer la reconnaissance du culte islamique et réduire considérablement le nombre de mosquées. A partir de 1933, Hitler interdit d'abord les abattages rituels, ensuite les fêtes juives et finalement la religion juive.

Lors de la « Kristallnacht » (Nuit de cristal) du 9 au 10 novembre 1938, organisée par Goebbels, beaucoup de synagogues furent incendiées et détruites. Le Vlaams Blok veut la création d'un réseau d'enseignement séparé pour les enfants d'immigrés non européens. En 1933, dans l'enseignement supérieur et à l'université, on introduisit le numerus clausus pour les Juifs, suivi en 1935 par la séparation des races dans l'enseignement. En 1941, on regroupa les écoles juives dans les grandes villes et en 1942, on interdit purement et simplement aux Juifs l'accès à l'enseignement. Le Vlaams Blok veut imposer aux employeurs qui embauchent des étrangers une taxe supplémentaire. A partir de 1935, une loi interdit aux juifs de pratiquer la médecine, la pharmacologie, la magistrature,

le commerce, etc... En 1939, les Juifs ne pouvaient travailler que comme ouvriers en usine. Le Vlaams Blok ne veut plus qu'on attribue des logements sociaux aux immigrés et veut supprimer également leurs indemnités de chômage et leurs allocations familiales. A partir de 1937, on supprima progressivement aux Juifs le droit à la sécurité sociale et, en 1939, on instaura un impôt spécial sur les revenus des Juifs. Le Vlaams Blok veut limiter le droit de propriété des étrangers non européens. En novembre 1938, Hitler ordonna la saisie de toutes les propriétés appartenant aux juifs. Afin de ne pas susciter davantage de réactions dans la presse et dans les milieux politiques, sur son programme en 70 points, le Vlaams Blok organisa, le 24 juillet 1992, une conférence de presse au cours de laquelle Filip Dewinter tenta de démontrer le

caractère non raciste de son parti, puisque le mot « race » n'apparaît pas une seule fois dans les textes tant critiqués. C'est exact. Cependant, il oublia la phrase : « les races et les peuples ne sont pas égaux » que l'on trouve dans les textes du Congrès du Vlaams Blok de 1984, textes qui, aujourd'hui encore, font figure d'évangile.

Le révisionnisme « Les révisionnistes sont éjectés manu militari de notre parti », déclara Filip Dewinter le 8 août 1990 au journal De Morgen. Voyons ce qu'il en est. Le ler avril 1992, Francis van den Eynde, député du Vlaams Blok, demanda à Luc van den Brande, Ministre flamand de l'Enseignement, quelques explications au sujet d'un article paru dans le magazine Pik et dans lequel l'auteur fait un lien entre le Vlaams Blok et les camps de concentration. Pik est un magazine que de nombreux de professeurs de morale distribuent à leurs élèves. Voici la question exacte posée par Van den Eynde, qui figure dans le « compte rendu du Conseil Flamand » : « Dans le numéro double de janvier/février 1992, on trouve un article intitulé ‘Zusammen Marschieren’ qui parle des camps de concentration national-socialistes de la Deuxième Guerre mondiale. Le dossier, dont le texte présente un caractère odieux,

est illustré de photos tout aussi abominables. Nous avons découvert avec stupeur et indignation qu'un passage précis du texte renvoie au Vlaams Blok. Le texte indique également que les personnes de droite aspirent à un retour vers le passé. Ces deux remarques sont imprimées en caractères gras... Selon nous, ce que l'on communique dans ce texte aux élèves est parfaitement mensonger et diffamatoire. Notre parti n'est en rien concerné par la nostalgie que certains éprouvent à l'égard d'un passé totalitaire... L'article paru dans Pik est en fait une manifestation typique de la campagne de diffamation déclenchée contre le Vlaams Blok. Malgré l'absence d'arguments, on prétend que le Vlaams Blok n'est pas un parti démocratique. Sans aucune preuve à l'appui, on établit un rapport entre le Vlaams Blok et les camps de concentration. » Etant donné que Francis van den Eynde joue régulièrement un rôle de premier plan lors de cérémonies commémoratives SS

qui se déroulent dans différents cimetières de Lommel, Stekene et Ijsselstein, en Hollande, l'intervention de ce député du Vlaams Blok illustre parfaitement la manière dont le parti tente de nier les liens possibles entre lui, le nazisme et le révisionnisme. S'il est de notoriété publique que les révisionnistes sont généralement aussi des néonazis, il ne faut cependant pas confondre révisionnisme et nazisme, même si tous deux poursuivent volontairement ou non le même objectif : rendre le nationalsocialisme acceptable et enjoliver l'image d'Adolf Hitler. Les révisionnistes (ou « négationnistes », comme on les appelle dans les milieux scientifiques) s'attachent principalement à nier l'holocauste, à travestir la vérité historique sur l'existence des camps de concentration et à réhabiliter le nazisme. De ces pseudo historiens, il en existe de tous acabits. Comme ils ne peuvent se référer à d'éventuels « penseurs » révisionnistes

flamands ou belges notoires, ils sont obligés de faire appel à des étrangers : Richard Harwood, Maurice Bardèche, Robert Faurisson, Arthur Butz, Fred Leuchter,... Les révisionnistes se font fort de traduire et de vendre la plupart de leurs textes. Nous rencontrerons inévitablement leurs noms tout au long de ce chapitre. Depuis 1985, la plupart des révisionnistes flamands se sont regroupés dans le »Werkgroep Vrij Historisch Onderzoek » (VHO, Groupe de Recherche Historique Libre). Auparavant, ces révisionnistes concentraient leurs forces dans le groupe de travail « Taboe » qui édite en quatre langues le magazine du même nom, dirigé par l'Anversois Peter Hendrickx. « Etnika », une autre maison d'édition active, encore plus empreinte de nostalgie, est dirigée par Jan Vincx et Bert de Prijcker (pour plus de détails, voir plus loin).

Lorsque « Taboe » passa au VHO, il réalisa un gros coup publicitaire. Au printemps 1985, l'organisation envoya à l'agence de presse Belga un communiqué habilement rédigé disant que le VHO était un « club scientifique », dont le but était de « fournir plus de renseignements sur les camps de concentration allemands et sur la chasse aux Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale ». En Belgique, l'expression « recherche libre » est généralement associée à l'Université Libre de Bruxelles, et représente donc, pour la plupart des gens, une sorte de garantie scientifique. C'est ainsi que le communiqué de presse atterrit dans la majorité des journaux flamands sans provoquer d'émotion. Ce n'est que quelques mois plus tard, lorsque le VHO commença à faire de la publicité pour la traduction nérlandaise du livre Het dagboek van Anne Franck : een vervalsing (Le Journal d'Anne Frank : une falsification), ouvrage rédigé par le négationniste Robert Faurisson, que la presse comprit le jeu révisionniste du VHO.

Depuis longtemps déjà, les initiés connaissaient les liens du VHO avec le Vlaams Blok. L'éditrice responsable de Het dagboek van Anne Franck : een vervalsing est Jeanine Colson. Aux élections du 24 novembre 1991, celle ci figurait sur la liste du Vlaams Blok pour la Chambre à Bruxelles. Son époux, André van Hecke (tète de liste en 1981 et en 1985 du Vlaams Blok à Bruxelles) publia un numéro spécial, traduit en quatre langues, du magazine Periodiek Contact qui rendait un vibrant hommage à Adolf Hitler. On remarqua également la présence de cet ancien SS à la cérémonie commémorative consacrée à la mémoire d'Hitler et qui se déroula, en privé, à Anvers, le 18 avril 1992. A la fin des années 80, la position du VHO se renforça grâce à la présence de Jos Rogiers, coordonnateur rédactionnel au groupe de presse De Standaard/Het Nieuwsblad et tête de liste du Vlaams Blok à Asse. Très rapidement, le VHO organisa la

promotion du livre de Rogiers intitulé Het Holocaustbedrog (L'holocauste, une tromperie) dont il était également l'éditeur. Dans ce livre, Rogiers expose pêle mêle tous les arguments connus qui nient l'holocauste en les parsemant d'arguments pseudo scientifiques dans l'espoir de conférer une certaine valeur à la tristement célèbre thèse révisionniste. D'autre part, tout le monde, le groupe De Standaard y compris, connaissait les idées particulières de Rogiers. En juin 1985 déjà, il avait, de façon inquiétante, éveillé certains soupçons en faisant imprimer dans les journaux de son employeur une annonce pour son livre : Bokrijk ? Ja Bedankt De revolutie van gezond 'boere rechts (Bokrijk? Oui, merci La révolution des paysans de droite « sains »). A la lecture de ce livre de 65 pages, on se rend compte que Rogiers nourrit une adoration sans bornes pour Hitler et sa Waffen SS : « Dans le passé, on avait déjà tenté de renouveler la culture

européenne. Par ailleurs, Hitler n'est pas parvenu au pouvoir, ainsi que les livres scolaires voudraient nous le faire croire, en rendant les gens complètement fous en mettant des haut parleurs dans les bureaux de vote pour que ô surprise ils votent tous pour lui. Les prestations des nombreuses unités de la Waffen SS et de la FaIlschirm.jâger marqueront à jamais l'histoire militaire. Leur secret : des soldats qui allaient au combat par conviction et non parce qu'ils y étaient contraints... Il est impossible qu'un tel esprit de confiance, de camaraderie, de bravoure, d'esprit de sacrifice, de chevalerie et de générosité, qui brillait de tous ses feux il y a quelques décennies à peine, ait mis si peu de temps à disparaître complètement de la surface de la terre. Non, la semence est toujours présente. Un beau jour, elle germera à nouveau. » Au début, Rogiers écrivait des livres qui exaltaient le personnage d'Adolf Hitler et la Waffen SS et qui niaient le génocide de

six millions de Juifs. Au début des années 90, Rogiers révisa sa position dans un petit livre intitulé Het uitverkoren probleemvolk. De joden als vaders van het nazisme, aanstichters van W.O.II, racistische massamoordenaars en bedreiging van de wereld (Le problème du Peuple Elu. Les Juifs pères du nazisme, instigateurs de la Seconde guerre mondiale, coupables de massacres racistes et menace pour le monde). L'optique essentielle du livre consiste à démontrer que tous les problèmes de la Seconde Guerre mondiale sont dus à l'origine juive des chefs allemands nazis, Adolf Hitler, Rudolf Hess et Adolf Eichman en tête. Fin 1991, Rogiers démissionna de la rédaction du groupe De Standaard parce que comme il le proclama lui même, il en avait assez que De Standaard malgré les demandes répétées du VHO, persiste à refuser les contributions des révisionnistes. Depuis, Rogiers se consacre totalement à la

publication d'un mensuel qu'il dirige seul, Achtergrond Dossier dont l'objectif est de démontrer que « le génocide du peuple juif n'a jamais existé ». D'autre part, début février 1993, Jos Rogiers a été assigné par l'organisation juive B'Nai B'Rith et le Comité de coordination des organisations juives de Belgique. D'après ces organisations, Rogiers abuse du droit de liberté de presse. L'affaire est en cours. Il ne faut pas s'étonner du fait que beaucoup de révisionnistes fassent partie ou gravitent autour du Vlaams Blok. D'ailleurs, Karel Dillen, président du Vlaams Blok, puise ses racines politiques dans le révisionnisme. Deux ans à peine après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Maurice Bardèche, un auteur français, écrivit un des tout premiers livres qui nie l'holocauste. Sa publication provoqua un véritable tollé en

France. Bardèche fut condamné à l'emprisonnement et son livre interdit. On doit la traduction néerlandaise de cette bible du révisionnisme à Karel Dillen. Aujourd'hui encore, le service de vente du VHO propose le livre avec la recommandation suivante : « Le premier livre d'après guerre qui analyse de manière caustique la falsification hypocrite de l'histoire d'après guerre ». Aux Pays Bas, c'est le parti Centrumdemocraten, un des deux interlocuteurs privilégiés du Vlaams Blok, qui s'occupe de la publicité des publications du VHO. Le journal CD Actueel du parti CD, présente comme suit les ouvrages révisionnistes du VHO : « Nous subissons la dictature du dollar dans chaque pays où le dollar se combine à la devise nationale. N'est-il pas vrai que ce sont les (Juifs) Américains qui détiennent le pouvoir ? »

Le groupe de travail VHO cache ses activités derrière des numéros postaux anonymes : PB 483, 2000 Anvers 1 et PB 5, 2000 Anvers 7. L'éditeur responsable est un certain L. van den Bossche, un vieux monsieur de Termonde, dont le nom a été évidemment utilisé à son insu. En réalité, le groupe VHO est domicilié au 50 Keizerstraat, à Anvers, adresse privée de Peter Hendrickx. Entretemps, le Koopjeskrant publia des annonces proposant « la publication d'une nouvelle revue de contact à l'intention des personnes tolérantes » et dont le titre serait Sexclusief. L'adresse de Sexclusief est le 50, Keizerstraat, à Anvers. Dans ce même circuit on trouve également d'autres productions intéressantes. Début 1992, l'action de VHO se vit renforcée grâce à une intervention inopinée. Après quelques années d'accalmie, le clan Verbeke, qui n'est pas inconnu à Anvers, est à nouveau sur pied de guerre.

Quelques jours après la parution d'un article sur le Musée de l'Holocauste aux Etats-Unis dans le magazine hollandais Vrij Nederland du 9 mai 1992, la rédaction du magazine reçut une lettre émanant de Siegfried Verbeke : « Ce musée est la preuve d'une mentalité morbide. Les Juifs feraient mieux de tirer les leçons de leur expérience récente au lieu d'ériger un musée par auto-compassion et auto-glorification alors qu'au même moment, leur peuple et leurs coreligionnaires exterminent quotidiennement un peuple innocent, les Palestiniens. En annexe, deux dépliants qui sans doute vous irriteront mais qui sont largement diffusés en Belgique. ‘En la queue et en la fin, gît de coutume le venin’. » Le premier dépliant est une sorte de catéchisme malinois composé de 48 questions révisionnistes et d'autant de réponses. Une fois de plus, l'éditeur

responsable est un certain monsieur L. van den Bossche, de Termonde. Pour plus d'informations, l'adresse de contact est 58, Sint Aldegondiskaai, à Anvers. Le second dépliant fait reculer clairement les frontières du révisionnisme. Au recto, figure l'argument révisionniste traditionnel qui consiste à diminuer fortement le nombre de Juifs exterminés. Au verso du folder, il y a une publicité pour la vente d'une série de films vidéo intitulée : Holocaust revisionism for beginners (L'holocauste, le révisionnisme à l'intention des débutants). Cette « vision alternative » des camps d'extermination d'Auschwitz, dont le prix de vente s'élève à 1 400 francs, peut être commandée à l'adresse suivante : BP 483, 2000 Anvers 1 ou BP 5, 2000 Anvers 7. L'offre pour la vidéo est illustrée par huit affiches de films d'horreur sadiques nazis, comme Angel face killer of the death camps, Ilsa the wolf of the SS, Filles pour le bourrea’ et Vrouwenlager 5... een hel. Une

notice accompagne le dernier film cité : « Les mutilations les plus horribles sur les plus belles femmes. Les SS se dégradant moralement et physiquement. Un enfer insupportable... Des expériences monstrueuses. Hommes et femmes réunis dans un seul but : faire souffrir! Le film le plus osé. Des orgies bestiales. » Difficile de comprendre comment la croisade morale entamée par Karel Dillen et le Vlaams Blok peut s'accomoder de tout cela. En décembre 1984 déjà, Karel Dillen avait présenté à la Chambre une proposition de loi prévoyant d'augmenter de manière drastique les taxes sur la production, la distribution et la projection des films d'horreur. Le bénéfice de cet impôt était sensé financer des « programmes éducatifs pour les jeunes ». Dans un commentaire accompagnant sa proposition, Dillen fulminait contre les films dont le seul sujet était, soit de montrer des blessures physiques ou des mutilations, soit la

souffrance physique endurée par des personnes ou des animaux. Dillen juge « répréhensible » la pratique de la torture, des supplices, des souffrances et des exécutions que l'on montre dans ces films. Selon ses propres dires, Dillen voulait préserver la société de telles productions décadentes. Début 1992, Regine Beer publia aux éditions EPO le récit de sa propre expérience du camp de concentration d'Auschwitz. Quelques semaines après la présentation du livre à la presse, l'éditeur de Regine Beer trouva dans sa boîte une enveloppe contenant des photos horribles de la répression israélienne exercée sur les Palestiniens. Le texte de la lettre qui accompagnait l'envoi disait ceci : « Ne réalisez vous pas qu'en faisant une propagande de ce genre, vous faites le jeu du Sionisme, étant donné que jusqu'à présent le soi-disant holocauste a uniquement servi d'alibi à l'expulsion et à l'extermination

sournoise du peuple palestinien ? » La lettre était signée Siegfried Verbeke. La manoeuvre est claire : en insistant sur les exactions commises par Israël contre le peuple palestinien, on tente de diminuer le poids et le sens de l'holocauste. Comme si l'on pouvait justifier un crime contre l'Humanité par un autre. Ces dernières années, un courrier du même genre fit son apparition à Amsterdam et à La Haye, cette fois sans être nécessairement accompagné d'une lettre rédigée par Siegfried Verbeke. Début juin 1992, le Centre d'Information et de Documentation d'Israël, la Fondation Anne Frank, le Bureau National de lutte contre le racisme et l'organisation juive B'Nai B'Rith déposèrent une plainte chez le procureur de La Haye. En intentant une action en justice, les organisations espéraient découvrir l'identité de ceux qui répandaient de tels propos et arrêter la diffusion de ces documents en Hollande.

En tous cas, le procureur de La Haye devait renoncer à une éventuelle sanction à l'égard de l'éditeur responsable : L. van den Bossche est un pauvre excentrique qui vit dans un taudis sans chauffage ni électricité et qui en sait autant sur le révisionnisme qu'une vache sur les trains. Il est évident que le VHO a utilisé le nom et l'adresse de ce vieux monsieur pour brouiller les pistes. Les différentes adresses de contact et les boîtes postales du VHO constituent un point de départ intéressant. Quiconque passe au peigne fin ces données s'apercevra que la plupart des pistes se croisent au 58, Sint Aldegondiskaai, à Anvers. Cet immeuble, situé dans le sombre quartier de l'Eilandje (la Petite Ile), est en fait un taudis abandonné dont seule la porte d'entrée, placardée d'autocollants racistes et néonazis, renvoie à une activité d'extrême droite quelconque. En outre, les fenêtres et les portes sont condamnées. Une seconde enquête révélera qu'en outre, l'imprimerie INKA y a établi son siège le 1er juin 1979.

INKA en liquidation est la propriété des frères Herbert et Siegfried Verbeke. Siegfried n'est pas un révisionniste qui s’amuse à rédiger occasionnellement quelques lettres. Dans un entretien avec Rinke van den Brink de Vrij Nederland, Siegfried Verbeke se déclare être LE médiateur du VHO et prétend détenir les droits d'auteur du rapport Leuchter. Leuchter est un Américain qui se veut expert des chambres à gaz et qui a déclaré que « l'holocauste est une grand escroquerie ». Depuis 1989, le rapport Leuchter est devenu le document de référence de l'argumentation révisionniste du VHO. Quiconque veut publier un extrait de ce rapport doit d'abord payer de droits à Verbeke. Une fois de plus, via la famille Verbeke, nous nous retrouvons dans les eaux du Vlaams Blok. A la fin des années septante, Siegfried et Herbert Verbeke

étaient membres du Vlaams Volkspartij (le Parti populaire Flamand) dirigé par Lode Claes et ont, par conséquent, assisté à la naissance du Vlaams Blok. Christine Verbeke, l'épouse de Siegfried, dont elle s'est séparée après 1989, s'est depuis présentée à Anvers sur la liste électorale du Vlaams Blok, mais n'a pas été élue. Depuis son affiliation dans les années septante au Vlaamse Militanten Orde (d'après les coupures de presse de l'époque, il était selon ses propres dires le secrétaire du VMO), Siegfried Verbeke est devenu un ami de Xavier Buisseret, député Vlaams Blok. C'est à cette époque qu'il a bâti sa réputation d'extrémiste incorrigible. En juin 1977, Siegfried Verbeke publia dans Alarm, la revue du VMO dont Xavier Buisseret était alors le rédacteur en chef, le tristement célèbre « éditorial » dans lequel il lançait un appel public à la guérilla générale contre les francophones résidant en Flandre.

L'action menée par cet impétueux précurseur du slogan du Vlaams Blok « Eigen volk eerst », finit par aboutir à une enquête judiciaire et le rédacteur en chef, Xavier Buisseret, sur l'insistance de son avocat, décida de publier un rectificatif. La publication de ce rectificatif stoppa net l'enquête judiciaire en cours. Peu après ce tour de force, Siegfried Verbeke et Xavier Buisseret quittèrent le VMO et fondèrent en 1977 avec Roeland Raes, actuel sénateur du Vlaams Blok, le magazine HARO, un « mensuel pour la révolution conservatrice ». Siegfried Verbeke devint rédacteur en chef. Xavier Buisseret, éditeur responsable, s'occupa également du travail de secrétariat, Herbert Verbeke, reprenant à son compte la composition finale du magazine tandis que Roeland Raes mettait sa plume au service de cette nouvelle revue. Karel Dillen, pour sa part, collabora occasionnellement à HARO.

Dès le début, HARO cibla également les lecteurs hollandais. Un bon nombre de collaborateurs réguliers et occasionnels entretenaient de bons contacts avec leurs homologues hollandais du « Consortium De Levensboom », dirigé par Florie Rost van Tonningen tandis que F. Zoetmulder jouait le rôle de correspondant d'HARO en Hollande. Afin de constituer un bagage politique et historique à l'intention des militants néonazis du VMO et de Voorpost, HARO diffusa des enregistrements des discours d'Hitler, Goebbels et Göring et des livres comme, par exemple, Stierven er werkelijk zes mi1joen ? (Six millions de Juifs morts... le sont-ils réellement ?), Erfgoed en de Germaanse voorgeschiedenis ('L'héritage et l'histoire germanique), Moeder vertel eens wat van Adolf Hitler (Maman, raconte-nous une histoire sur Adolf Hitler) et naturellement le Nuremberg ou la terre promise de Maurice Bardèche, traduit en flamand par Karel Dillen.

Dès la parution du premier numéro, la rédaction étala un antisémitisme et une xénophobie obscènes. Pour couronner le tout, la revue publia, en collaboration avec la rédaction du magazine hollandais De Wende (de Florie Rost van Tonningen) un numéro spécial dont le thème absolument répugnant s'intitulait Holocaust, hoe lang nog (L'Holocauste, combien de temps encore). Dans ce « numéro spécial », on déclare que l'extermination par les nazis de six millions de Juifs est « une manipulation de la réalité historique entretenue par la censure des démocrates ». Quand, peu de temps après, HARO disparut de la circulation, pratiquement la totalité de la rédaction s'affilia au Vlaams Blok. Aussitôt, Buisseret fut propulsé à la tête du service de propagande et proclamé chef de Jongeren Aktief, le prédécesseur du Vlaams Blokjongeren (jeunes du Vlaams Blok). Roeland Raes, quant à lui, devint le vice président du parti et poursuivit sa

propagande révisionniste dans le magazine Dietsland Europa. En octobre 1989, il publia un article tout à fait élogieux sur Robert Faurisson, figure de proue du révisionnisme. De son côté, Siegfried Verbeke se retrancha dans son imprimerie INKA où il continua d'imprimer le magazine du VMO, Alarm, des reproductions de HARO et d'autres publications d'extrême droite. Apparemment, le fait que la BSR d'Anvers ait, de temps à autre, perquisitionné dans son imprimerie et emporté une quantité incroyable d'ouvrages de littérature nazie et des autocollants antisémites n'émeut pas vraiment Siegfried Verbeke. Par ailleurs, il confirma dans un article rédigé par Rinke van den Brink, dans Vrij Nederland du 11 juillet 1992, que les révisionnistes du Vrij Historisch Onderzoek peuvent totalement compter sur la sympathie de personnes dans les milieux du Vlaams Blok : « Absolument. Beaucoup de ces personnes ont un passé

dans la collaboration. Toute la génération d'Européens de l'époque a choisi le national socialisme. A cause de cela, on leur a attribué une série de méfaits. A tort ou a raison. Le révisionnisme démontre l'injustice de la majorité de ces révélations. » Dans une lettre datant de mi 1992, Verbeke affine ses arguments : « Le révisionnisme, que je soutiens, a amplement démontré qu'il n'y a jamais eu d'utilisation de chambres à gaz à des fins d'extermination, que le génocide planifié des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale n'a jamais existé(...). Le livre Moeder vertel ons wat van Adolf Hitler, très bien illustré par le Hollandais Haarer, est non seulement exceptionnel mais en outre, il est intéressant, facile à lire, c'est donc une raison (suffisante) pour le réimprimer. Aucune loi belge ne l'interdit. »

Ce qu'il dit pour conclure est exact mais pourrait très bientôt changer. Durant l'été 1992, des parlementaires flamands et francophones ont présenté un projet de loi qui prévoit une peine pour « ceux qui banalisent ou nient les crimes contre l'Humanité ». A la mi août, le VHO fit savoir par un communiqué de presse (anonyme) que malgré la ratification probable « il ne pensait absolument pas mettre un terme à ses activités, ni même les limiter ». Le 4 novembre 1992, le tribunal de l'arrondissement de La Haye interdit la diffusion en Hollande des pamphlets révisionnistes de Siegfried Verbeke. Le président du tribunal estima que les pamphlets de Verbeke constituaient un outrage aux Juifs et aux proches parents des victimes de l'holocauste. Si dans le futur, il prend à Verbeke l'envie d'émettre des propos offensants ou blessants à l'égard des Juifs, il risque de devoir payer en Hollande une

amende de 185 000 francs par infraction commise. Apparemment, Verbekene semble pas très affecté par ce jugement. Quelques jours après le prononcé du jugement par le tribunal hollandais, il proclama son intention d'aller en appel. Les choses n'en restèrent pas là. Début février 1993, le VHO entama une campagne contre l'exposition « Le monde d'Anne Frank » que l'on peut voir toute l'année dans presque chaque ville de Flandre. Les écoles flamandes manifestent un grand intérêt pour cette exposition. Dans un communiqué de presse, Verbeke déclara une nouvelle fois que « le sort d'Anne Frank a été utilisé à des fins politiques ( ... ) » et que « il est répugnant de constater qu'Anne Frank sert à détourner l'attention de ce qui se passe en Palestine. » Dans le même communiqué, le VHO prétendit que « le journal d'Anne Frank est une fraude littéraire ». Enfin, l'organisation annonça que la traduction néerlandaise de Le journal

d'Anne Frank est il authentique?, écrit par Robert Faurisson, allait être distribuée dans toutes les bibliothèques flamandes. Le VHO, en outre, avait l'intention de diffuser un tract du même genre dans toutes les écoles. Depuis lors, il semble que les publications du VHO réapparaissent à nouveau en Hollande. Le jour même (est ce un hasard ?) où le VHO publia son communiqué de presse, le Vlaams Blok faxa à son tour un communiqué concernant l'exposition. Frank Vanhecke fit savoir, au nom du parti, que pas moins de trois procès étaient intentés contre Fred Erdman (chef de groupe SP au Sénat). Fred Erdman est l'éditeur responsable de Een dagboek voor de toekomst (Un journal pour le futur), brochure offerte à chaque visiteur de l'exposition Anne Frank. Dans cette publication, on fait le lien entre l'antisémitisme répandu dans les années 1932-1945 et le racisme actuellement étalé par le Vlaams Blok.

D'après le communiqué de presse du Vlaams Blok, Roeland Raes était scandalisé par l'accusation d'être un auteur de prose raciste tandis que Filip Dewinter refusait la responsabilité d'actes de violence (pour plus d'informations, voir la troisième partie). Les deux parlementaires annoncèrent qu'ils allaient déposer plainte pour diffamation et exigèrent en outre que les brochures soient saisies le plus rapidement possible. Le second diffuseur de l'histoire « révisée » est la maison d'édition Etnika, fille spirituelle de l'association Sint Maartensfonds, dirigée par Jan Vincx et Bert de Prijcker. Etnika ne s'attache pas à nier l'holocauste et l'existence des camps de concentration, elle préféré ignorer cette période récente de l'histoire. Dans la revue Berkenkruis d'avril 1989, Etnika déclara ceci : « Nous avons

l'air d'être des personnes sans défense et tatillonnes qui se battent contre tes mensonges et les insultes proférés à notre égard. Notre seul moyen de défense, ce sont nos livres dans lesquels nous faisons savoir au monde entier qui nous sommes réellement, pourquoi nous avons lutté, pourquoi beaucoup d'entre nous sont morts. Nos livres sont aux antipodes de l'étiquette que les médias internationaux nous collent. Nous n'avons pas été des criminels, nous n'avons pas pillé ni violé, nous combattions en fiers soldats animés par une même vision du monde qui était sincère et grandiose, réprouvant toute vilenie. Nos enfants et nos descendants apprendront, grâce à nos livres, la véritable histoire non falsifiée. Ils n'auront pas honte de nous, de leur père, de leur grand père, de leur arrière grand père, etc... mais proclameront fièrement au monde que leurs aïeux font partie d'une des plus grandes lignées, des hommes de Flandre, qui voulaient une Europe saine et sûre. Nos livres doivent être le reflet de notre passé mouvementé et glorieux... »

Le joyau de la collection d'Etnika est la série d'ouvrages intitulée Vlaanderen in uniforme une hagiographie de la collaboration militaire écrite par Jan Vincx qui, en tant qu'ancien combattant du Front de l'Est, sait de quoi il parle. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Vincx atterrit en 1943 chez les Waffen SS via la Vlaamse Wacht (Garde Flamande). Après sa formation d'officier à Bad Tölz, en Allemagne, il s'engagea dans la Division Wiking pour aller combattre au Front de l'Est. Vincx fait partie de la direction du Sint Maartensfonds. Bart de Prijcker est, lui, l'ancien président de la section malinoise du Sint Maartensfonds. Etnika publia des ouvrages comme Op verloren posten (de Rik van den Abeele), Kolonne 403 NSKK (de Frans Vermander), Mijn Verblijf in Russische strafkampen (de Willy Helsen). Les magazines de la collaboration comme Berkenkruis et Periodiek Contact,

ainsi que le mensuel du Vlaams Blok, font la promotion de ces publications. Les ouvrages précités furent présentés dans le mensuel du parti de la manière suivante : « Les Nationalistes flamands qui ont osé poser un regard fier sur leur passé, doivent être en possession de tous nos livres. Nos livres doivent figurer dans les bibliothèques et sur les tables de chevet de tous les Flamands qui ont une conscience nationale populaire. Ces documents constituent des moyens de défense contre le mensonge et la calomnie. » Les éditions Etnika ne limitent pas leur intérêt à la Flandre. En 1988, l'association commença à publier une série luxueuse intitulée Nederlandse vrijwilligers in Europese krijasdienst 1940-45 (Les volontaires hollandais du service militaire européen de 1940-45), une série sur les collaborateur hollandais qui ressemble furieusement à la série Vlaanderen in uniform. Les auteurs sont Jan Vincx et un certain Viktor Schotanius, pseudonyme d'un

Hollandais résidant dans le Limbourg belge. Dans l'introduction au premier ouvrage (De Landstorm), les auteurs font clairement savoir qu'ils considèrent la collaboration comme un point d'honneur et qu'ils ne tiennent absolument pas compte de l'holocauste et des autres horreurs nazies : « Ils ont été obligés de renoncer à leurs études et ont subi de nombreuses privations afin de donner vie à leur idéal. C'est ainsi que beaucoup d'entre eux qui émanaient de toutes les couches sociales ont recouvert le champ de bataille de leur sang pour le principe auquel ils avaient consacré leur vie. Presque tous ceux qui sont revenus portent des blessures psychologiques ou physiques. A quelques exceptions près, ces soldats s'appuyèrent sur leurs convictions religieuses et politiques afin de sauver du désastre leur prochain, leur peuple, leur Mère Patrie, leur Nouvelle et Future Europe telle qu'ils l'imaginaient. »

D'après une annonce parue en avril 1988 dans Berkenkruis, le magazine de l'association Sint Maartensfonds, il s'avère qu'Etnika s'était chargée d'éditer Nederlandse vrijwilligers... faute d'avoir trouvé un éditeur hollandais prêt à cautionner ce type de publication. Etnika se chargeant de l'édition, Scheerders Van Kerckhove s.a, de Saint Nicolas était, dès lors, prêt à s'occuper de l'impression. Lorsque la presse provoqua un véritable tollé autour de l'affaire, Freddy Willockx, bourgmestre de Saint Nicolas, intervint auprès de la direction de l'imprimerie qui arrêta la production du livre en avril 1990. Apparemment, il y avait à ce moment là trois tirages du livre Nederlandse vrijwilligers... pratiquement terminés. Du reste, certaines librairies 'spécialisées' de Flandre, de Hollande et même de Wallonie disposaient déjà de ces livres. En Hollande, c'est la maison d'édition Ars Scribendi du grossiste (en

livres) Robert Richter de Harmelen qui se chargeait de la distribution. Mais après l'émoi provoqué par la parution du livre d'Etnika en Hollande, Richter cessa la distribution et la vente se fit ensuite par correspondance via une boîte postale d'Etnika à Axel, en Hollande. Depuis, il semble que les anciens combattants faisant partie de l'assemblée d'Etnika aient été rejoints par un jeune militant flamand. En mai 1992, Koen Dillen (le fils de Karel) publia dans le journal du Vlaams Blok un article sur un livre intitulé Rouwprentjesalbum. van Vlaamse Oostfronters, deel 1 (Album d'images de deuil des combattants du Front de l'Est, tome 1), écrit par un certain Luc Ervinck. Ici aussi, on suggère l'idée que les flamingants qui ont péri au Front de l'Est étaient des Flamands qui croyaient servir la cause flamande en allant combattre dans la région de Stalingrad.

Les syndicats Les syndicats, tout comme les partis politiques, appartiennent au groupe des ennemis naturels du Vlaams Blok, qu'il surnomme familièrement « la mafia politique » et la « Bande des Quatre ». A ce propos, les Principes de base du parti ne laissent planer aucun doute : « Afin de combattre le marxisme et le communisme oppresseur et persécuteur, afin de combattre le libéralisme individualiste et égoïste, le Vlaams Blok rejette toute lutte et exploitation des classes. Seule la collaboration active de tous, tant dans la vie sociale que professionnelle, peut bénéficier à la société et aux individus. En tant que parti solidariste, le Vlaams Blok rejette les syndicats (nationaux) qui ne sont pas contrôlés... » Le rejet d'une représentation syndicale organisée des travailleurs est

totalement conforme aux idées solidaristes auxquelles les organisations comme le VNV et le Verdinaso ont donné corps dans les années trente en Flandre. A l'époque, le Verdinaso tenta même de se substituer aux syndicats en fondant ce que l'on appelle les « corporations Dinaso ». Il considérait également que les syndicats faisaient partie du processus de développement démocratique de la société tant décrié à cette époque. Le Vlaams Blok reproduit très clairement la même logique politique. Lors du Congrès du parti en 1985, les visées antidémocratiques du Vlaams Blok furent soigneusement masquées par la lutte contre le « démocratisme », (un terme qui d'après le dictionnaire Van Dale n'existe pas) chère à Eric de Lobel. On se rend également compte que le totalitarisme n'est pas rejeté par principe mais bien pour des motifs stratégiques et pragmatiques. Grâce à ce bel emballage d'idées tortueuse, de Lobel trace

la voie à un plaidoyer en faveur du droit du plus fort (« participer au pouvoir suivant ses compétences »). Pour de Lobel : « la sécurité (...) est la condition première pour accéder à la civilisation. C'est une sécurité qui repose sur un système de garantie réciproque. Dans cette optique, il est par conséquent hypocrite de taire le danger encouru à cause du démocratisme actuel. Le solidarisme que nous défendons n'est pas antidémocratique. Nous ne souscrivons pas à un système d'état totalitaire. L'expérience nous a justement appris que c'est une des situations les plus insécurisantes pour un peuple. Mais nous refusons de choisir entre le totalitarisme et le démocratisme. Notre choix est celui de la vraie démocratie. Une démocratie dans laquelle chacun, selon ses capacités, a la possibilité de prendre part au pouvoir. La participation contrairement à la manière stupide dont on a cherché à faire participer jusqu'à aujourd'hui doit être proportionnelle aux compétences. De cette manière, la participation ne constitue pas un danger pour le bien être général ni la porte

ouverte à la démagogie politique et à la manipulation des masses, dont nous sommes si souvent les témoins actuellement. La participation des écoliers et des étudiants représente un facteur subversif rencontré plus d'une fois dans l'enseignement et qui a renforcé la crise du pouvoir et a même compromis l'avenir de la jeunesse. Avec leurs revendications syndicales exagérées, les travailleurs minent leurs possibilités d'embauche. C'est par ignorance que les électeurs menacent de mettre en jeu leur propre sécurité... » A propos des « revendications syndicales extravagantes » des employés, le Vlaams Blok plaide en faveur d'une soumission digne du dix-neuvième siècle, que l'idéologue du parti Edwin Truyens rebaptise pour la circonstance « l'esprit de travail positif ». Selon le Vlaams Blok, cet « esprit positif » devrait remplacer la « mentalité négative » des travailleurs. Dans De Vlaams Nationalist (1981), une

publication du parti, Truyens explique ce qu'il entend par là : « Le travailleur belge (de même que son collègue européen) s'en tient strictement à l'horaire de travail et n'est pratiquement jamais prêt à faire des heures supplémentaires. Et même lors des heures de prestation ordinaires, on ressent bien souvent le manque d'intérêt pour le travail. Beaucoup de travailleurs prennent des congés de maladie alors qu'ils ne sont pas vraiment malades. Sous la pression des syndicats, les 40 heures de travail par semaine sont systématiquement ramenées à 39 ou 38 heures. » D'après Truyens, afin de remédier à tout cela, les travailleurs devraient prendre exemple sur leurs collègues japonais : « Le travailleur japonais témoigne d'un grand intérêt à l'égard de son entreprise, travaille 40 heures par semaine, ne trouve pas que le travail à la chaîne soit abrutissant, est prêt à faire des heures supplémentaires sans

recevoir de prime, et il faut pratiquement l'obliger à prendre ses congés légaux. » L'hostilité du Vlaams Blok envers les revendications syndicales des travailleurs (« les plaisirs de la plèbe ») et envers les travailleurs eux mêmes (« des insectes ») transparaît dans la formulation de Gerolf Annemans qui traduit un mépris inouï. Annemans déclara lors du Congrès du parti en 1985 : « N'est-il pas dangereux de ne plus trouver de leaders de masse dans nos démocraties en sursis mais seulement des orateurs, des porte paroles de la masse ? Ils sont personnifiés par les bonzes syndicaux qui dominent totalement la vie politique et la parsèment de démagogie à bon marché (...) Un peuple peut supporter pendant cent ans une dictature et en ressortir intact alors que vingt années de démagogie le pourrissent très facilement jusqu'au fond du coeur et de l'âme. Car si on écrase difficilement un peuple, par contre, on le pourrit très facilement. C'est comme chez les insectes :

leur carapace résiste à tous les chocs, mais il suffit d'une goutte de poison pour les tuer. » Transposés dans le programme électoral du parti, ces propos deviennent « Notre peuple d'abord ! Et non (...) les syndicats (...) d'abord, mais bien toute la communauté qu'ils doivent servir au lieu d'en profiter. » (Extrait du dépliant électoral du Vlaams Blok pour les législatives du 13 décembre 1987). Le tract associe, dans la même citation, les syndicats, « les privautés et la violence des fauteurs de troubles, des fainéants, des criminels, des trafiquants de drogue, des pédophiles, et des autres anormaux » tandis que, selon le Vlaams Blok, la décence exige que l'on mette « fin à la dictature syndicale ». Lors du Congrès de 1985, Annemans ne put cacher plus longtemps son aspiration

à un Etat fort. Alors que tous les autres partis politiques s'accordent à dire qu'il faudrait réformer les services de police et que la démilitarisation de la gendarmerie est une des priorités, le Vlaams Blok répond qu'il s'agit d'un complot fomenté par l'un des syndicats. Selon Annemans : « On constate que les attaques des rouges contre la gendarmerie portent la signature de l'ABVV (la FGTB), et qu'elles se dissimulent derrière le prétendu service d'enquête du journal De Morgen. Tout le monde connaît les tentatives pour remplacer ce corps d'élite indépendant par des corps où séviraient les nominations partisanes des rouges et les manoeuvres au sommet. Les critiques systématiques à l'encontre de la nécessité d'un effectif suffisamment large, avec tout ce que cela implique, ont conduit à la surcharge des services d'ordre et au découragement du personnel. Lorsque celuici finit fatalement par être débordé - je pense

à la tragédie du Heysel - ces mêmes tacticiens hypocrites montent au créneau et pointent un doigt accusateur. Ils brandissent d'une main le fouet, et de l'autre la corde du pendu. » Bien que le Vlaams Blok fasse le procès des syndicats, il se contente, sur le plan juridique, d'énoncer quelques propositions de loi obligeant les organisations syndicales à avoir une personnalité juridique et proposant de considérer les piquets de grève comme des milices privées. Toutes les propositions sont conçues pour supprimer les piquets de grève organisés par les syndicats. En obligeant les syndicats à prendre une personnalité juridique, ils les soumettraient également à certaines règles financières comme, par exemple, l'obligation de communiquer publiquement le montant des caisses de solidarité. De cette manière, les conflits sociaux et les grèves dans les différents

secteurs et entreprises tourneraient l'avantage des employeurs.

à

Une autre stratégie anti-syndicale, inspirée par l'ultra-libéralisme et certaines organisations patronales, consiste à lutter contre les coalitions gouvernementales considérées comme trop proches des organisations syndicales, et à accuser certaines entreprises publiques (particulièrement les déficitaires) d'être des bastions syndicaux. Le Vlaams Blok essaye en outre de discréditer les syndicats en les englobant dans les slogans politiques sur « la Bande des Quatre » et « la Mafia politique ». C'est ainsi que le 17 mars 1992, le Vlaams Blok rédigea une note concernant l'installation du gouvernement Dehaene I : « Les pouvoirs classiques privilégiés de ce pays (c'est à dire les mutualités, les syndicats et les francophones) sont à

nouveau tombés dans les bras l'un et l'autre et peuvent continuer à préserver leurs intérêts. La direction des pouvoirs publics reste entre leurs mains et c'est évidemment un avantage pour eux. Dans les années quatre-vingt, ils ont modifié temporairement cette alliance pour un gouvernement avec les libéraux, sans pour autant que le contrôle strict et sévère ne soit plus exercé depuis Poupehan... Que ce gouvernement soit la continuation des privilèges (accordés par le pouvoir), la satisfaction visible dans les deux blocs le prouve bien. (...) Les réactions de PACV dans la presse à la désignation de Guy Verhofstadt comme formateur, la nomination de personnalités membres de l'ACV (Dehaene et Van den Brande) à la tête du gouvernement prouvent qu'à l'intérieur du CVP, l'aile syndicale procède à la mobilisation générale. En matière de politique internationale, tous les départements sont occupés par des socialistes (Coopération au Développement, Affaires Extérieures, Commerce Extérieur). Tous ces éléments prouvent que ce

gouvernement est avant tout un groupe d'intérêts(...). En matière de confiance politique, nous ne pouvons pas compter sur lui. Du moins, c'est ce qui ressort de la déclaration gouvernementale du cabinet ACV ABVV composé d'élus perdants. » Le Vlaams Blok a également tenté de jeter le discrédit sur les deux principaux syndicats en les taxant de plaque tournante du « migrantenlobby » (lobby immigré). Dans son livre Eigen volk eerst (1989), Filip Dewinter essaye d'expliquer ce qu'il entend par là : « Les syndicats ont également constaté qu'en attribuant des droits politiques aux travailleurs immigrés, ils renforceraient automatiquement leur mouvement. L’ACV (MOC) a fondé des organisations séparées pour les travailleurs immigrés. (...) Depuis 1984, il existe au sein de l'ABVV (la FGTB flamande) une commission nationale des travailleurs immigrés qui est active (...).

Par ailleurs, on assiste à une lutte acharnée pour obtenir les faveurs de la grande communauté des travailleurs immigrés. Que l'ABVV dispose de son propre potentiel de main d'oeuvre étrangère n'étonnera personne. Pour l'ACV également, la communauté des travailleurs immigrés représente un tout nouveau groupe cible. Début 1986, à la date anniversaire de Rerum Novarum, le mouvement des travailleurs catholiques flamands a fondé l'association Ibn Khaldoen (...). Les syndicats ont découvert une nouvelle source de revenus : les travailleurs immigrés. L'antiracisme virulent propagé par les syndicats amène beaucoup d'immigrés à rejoindre le front syndical. Finalement, on parvient à convaincre les grands groupes d'étrangers non européens qu'ils sont soumis, discriminés et haïs. Un seul petit pas reste à franchir pour qu'ils ‘prennent conscience’ du bien fondé du syndicat et du parti. »

« Werken baat, staken schaadt ! » (Le travail profite, les grèves nuisent !), tel est le slogan anti-grève du Vlaams Blok. Entre temps, ce qu'il ne dit pas, c'est que la nouvelle stratégie du Vlaams Blok (par analogie au Verdinaso des années trente) consiste à vouloir prendre la place des syndicats lorsque des conflits sociaux surgissent. Fin 1989, la grève et l'occupation de l'entreprise de réparation de bateaux Beliard Shiprepairs constitua pour le Vlaams Blok un test des plus intéressants. Alors qu'ils occupaient les bâtiments de l'entreprise, les travailleurs reçurent la visite d'une délégation du Vlaams Blok, constituée de Filip Dewinter, Johan van Brusselen, Hilde de Lobel, Wim Verreycken, Piet Mulder, Carl Truyen et Guy Eggermont, qui venaient leur remettre un chèque de 20 000 francs en mains propres. Les manifestants laissèrent passer la délégation du Vlaams Blok qui fut en outre autorisée à faire un speech politique dans la cafétaria.

Après cette visite au Beliard, Van Brusselen et Dewinter s'attachèrent bien évidemment à donner une suite politique au dossier en interpellant le conseil communal d'Anvers et le Parlement au sujet de l'entreprise de réparation de bateaux. Le journal du parti accorda à plusieurs reprises une attention particulière à l'historique du conflit social chez Beliard. Enfin, le Vlaams Blok déclara dans un communiqué de presse largement diffusé qu'il soutenait activement les militants de Beliard. Bien entendu, l'intervention du Vlaams Blok n'avait pas été sans conséquence. Quelques semaines avant les élections du 24 novembre 1991, Filip Dewinter et Willy Corten (un travailleur de l'entreprise Beliard qui figure sur la liste provinciale du Vlaams Blok, et dont nous reparlerons plus amplement dans la troisième partie) envoyèrent au domicile de chaque travailleur de Beliard une lettre leur rappelant comment le parti avait soutenu leur action, comment il s'était attaqué à l'ACV et à l'ABVV et les enjoignant de voter pour le Vlaams Blok.

Les femmes Le 13 février 1937, Hier Dinaso !, le magazine du Verdinaso dirigé par Joris van Severen, publia un article couvrant une page entière du journal et qui était intitulée « Les droits de la femme ». L'article n'était en fait qu'une attaque en règle du « prétendu mouvement des femmes » et comprenait quelques passages qui, pour certains, sont encore d'actualité : « Stefan Zweig parle de la femme au foyer comme de ‘l'animal domestique qui n'a de cesse d'allaiter les enfants, de repasser, de nettoyer, de cuisiner, de brosser, de raconter des histoires et de satisfaire les besoins de son tyran et de ses enfants’. Il prédit que cette espèce est en voie de disparition. Entre temps, on a pu constater qu'il se trompait et qu'au contraire, en Italie et en Allemagne, par exemple, et, espérons le chez nos femmes thioises, la tendance évolue de plus en plus vers une correspondance à ce type de femmes. » « L'image de la femme au foyer donnée par

Zweig ne peut être correcte que si on ne tient pas compte du lien entre son travail au sein de la cellule familiale et celui de la grande communauté nationale. Les femmes qui se sont rassemblées pour conquérir leurs ‘droits’ n'ont eu devant les yeux que cette image et ont perdu de vue le rapport familial. (...) Nous n'allons pas perdre notre temps à tergiverser sur ces droits fictifs revendiqués par les femmes et qui servent uniquement à conférer une certaine notoriété à quelques ambitieuses. Ces droits se perdent et se regagnent en fonction du régime libéral démocratique qui nous gouverne. Quand notre peuple sera gouverné par un régime d'ordre et d'équité, les droits réels de la femme seront reconquis d'eux mêmes. (...) Cependant, la grande majorité des femmes sont destinées à enfanter; elles doivent prendre conscience qu'elles portent la responsabilité de l'avenir de leur peuple vu qu'elles mettront au monde la future génération... »

C'est probablement un hasard si, en 1991, lors du Congrès sur la famille et dans les documents qui s'y rattachent, le Vlaams Blok se réfère ouvertement à Joris van Severen afin de pousser la femme à réintégrer son rôle de femme au foyer, de mère et d'éducatrice (voir le chapitre « La famille »), en lançant l'avertissement suivant : « Si la femme flamande ne se dépêche pas de procréer davantage, la dénatalité en Flandre sera catastrophique ». Ces positions du Vlaams Blok ne sont pas nouvelles. La nouveauté ici, c'est que le Vlaams Blok les a quelque peu retravaillées de manière à pouvoir les présenter à un Congrès. Auparavant déjà, d'après certains documents de membres du Vlaams Blok, mais surtout d'après les déclarations individuelles de certains mandataires du parti, il ressort que les membres du Vlaams Blok ont des problèmes avec les femmes,

surtout avec les femmes émancipées en général et avec les féministes en particulier. Recueil de citations choisies : dans le « Vlaams Nationalist » du 6 juin 1980, Edwin Truyens, l'idéologue du Vlaams Blok, fait entrer en scène la chômeuse profiteuse du système : « Trouvez-vous logique que madame travaille juste assez longtemps pour obtenir des allocations de chômage et se fasse ensuite renvoyer afin d'en profiter pendant des années aux frais de la société ? » Un mois plus tard, il ajoute : « Le refus de travailler est un fait que l'on retrouve de plus en plus dans les statistiques du chômage. On n'est d'ailleurs pas étonné de constater que proportionnellement, c'est précisément dans le groupe des femmes que l'on compte le plus grand nombre de chômeurs. Parce qu'on les renvoie plus facilement ? Non, parce que ce sont elles qui veulent plus facilement faire partie de la race des profiteurs. »

Vraisemblablement, cette prose inspira les personnes qui rédigèrent le programme électoral du parti dans lequel on peut lire qu'il faut revaloriser le travail à la maison, au sein de la famille, et où l'on revendique « des mesures de protection des revenus familiaux, l'adoption d'un projet de loi proposé par Dillen qui veut donner la priorité à l'emploi aux chefs de famille et prévenir de cette manière le licenciement collectif » (extrait du programme électoral de 1985). Le Vlaams Blok considère que les célibataires, hommes et femmes, et évidemment les femmes mariées, sont les dernières personnes à engager et les premières qu'il faudra éventuellement licencier. D'après le Vlaams Blok, la famille est déconsidérée, surtout aux yeux des femmes. Gerolf Annemans déclara lors du Congrès du parti en 1985 : « Aussi étonnant que cela puisse paraître, ce sont les féministes, et donc en l'occurrence les

femmes, qui veulent l'émancipation, qui attaquent perfidement la famille, alors que ce sont les femmes qui, au sein de la famille, ont la possibilité de s'occuper prioritairement de tâches tout à fait rationnelles et donc extrêmement intéressantes. Car qu’y a-t-il de plus noble et de plus rationnel que de donner la vie aux gens pour ensuite les accompagner, jour près jour, dans leurs peines et leurs joies jusqu'à l'âge adulte ? » En 1988, dans la rubrique « vocabulaire politique » du journal interne du parti, Eric de Lobel, chef du service d'études du Vlaams Blok, explique ce que nous sommes sensés entendre par « discrimination positive » : « Le privilège de groupes déterminés, que nous considérons comme étant désavantagés, avec comme but de leur faire rattraper leur supposé retard. (...) On peut parler de ‘discrimination positive’ dans le cas de recrutement de femmes dans le service

public où la préférence va obligatoirement au beau sexe en cas de résultats d'examens équivalents (...). Les organisations de gauche qui tendent vers une discrimination positive oublient quelque peu leur axiome absurde qui déclare que nous sommes tous égaux. La discrimination positive à l'égard de l'un est, d'une façon ou d'une autre, de la discrimination négative à l'égard de l'autre, qui ne peut profiter de ces avantages. » Dans la même rubrique, de Lobel donne quelques explications au sujet du « schéma de comportement dicté par le rôle social » : « Dans bien des cas, la rupture avec ce schéma social est considérée comme étant le monopole du mouvement féministe. C'est surtout à cause du fait que les femmes, qui probablement en ont assez de leur féminité ou en ont honte, vont se mettre à copier autant que possible les hommes, persuadées qu'en agissant de cette manière, elles auront acquis autant de dignité. Psychologiquement, il s'agit d'un complexe

d'infériorité qu'historiquement on peut comprendre, mais qui menace parfois de prendre des formes maladives. » Toutes les figures de proue du Vlaams Blok ne se donnent pas la peine d'accorder une telle compréhension historique au féminisme. Dans le magazine Revolte de janvier 1982 (la rédaction finale étant dirigée par le vice-président du Vlaams Blok, Roeland Raes) du Voorpost (dirigé par le député Vlaams Blok Francis van den Eynde), on peut lire ceci : « Il y a vingt ans, nous avons émancipé les nègres, il y a dix ans, c'était au tour des jeunes. Certains signes avant-coureurs (voir les articles dans certains magazines et des films du genre La planète des singes) nous avertissent que, d'ici dix ans, nous aurons émancipé les singes. Entre les deux, après les nègres et juste avant les singes, nous émanciperons la femme ». En mai 1989, le Conseil communal de Gand cherchait un candidat à la fonction

d'échevin à l'émancipation de la femme. Ce faisant, on s'aperçut qu'il y avait peu de femmes qui occupaient des postes élevés à la fonction communale. Francis van den Eynde à l'époque membre du conseil communal ne trouva rien de mieux que de conclure « que le sexe pourrait jouer un rôle clé dans la compétence ». Même le mensuel HARO, sous la direction de Xavier Buisseret et en collaboration avec Roeland Raes, a consacré des articles traitant du féminisme. C'est ainsi qu'en juin 1978, HARO publia un articlé rédigé par Alain de Benoist et Joël Lecrozet dans lequel ceux ci déclaraient que le féminisme en Europe était complètement dans l'erreur : « L'avilissement et la discrimination dont elle (la femme, H.G.) est devenue la victime au fil du temps, sont étrangers à l'esprit européen. Le mépris à l'égard de la femme trouve en effet son origine dans l'idéologie du Proche Orient

introduite en Europe Christianisme. »

par

le

Judéo

Suit un long exposé par lequel les auteurs tentent de démontrer que ce sont les Juifs qui sont à l'origine de la soumission de la femme, pour conclure que « le néoféminisme parvient à la même conclusion puisque le processus idéologique également actif sur d'autres terrains est conçu de manière à mettre fin à ‘l'ère européenne’et à revenir au niveau du pré néolithique. » Toujours en 1978, HARO publia une bande dessinée spéciale avec une histoire tout à fait malsaine intitulée « le traumatisme de l’intégration ». Voici en quelques mots le résumé de l'histoire : une féministe se « laisse » violer par un « Marocain » et un « Noir ». Comme elle finit tout de même par en avoir marre, elle part et met le feu à la maison d'un immigré,

et lorsqu'elle rentre chez elle, elle se défoule sur son chat noir, le massacrant à coups de pied. Quelques mois plus tard, lors d'une formation de cadres, Jan Stalmans alias Dieudonné évoque la grande menace de la gauche qui met en danger notre société : « Les mouvements sociaux dans notre société et Agalev. Ils sont le venin insidieux, la vieille potion marxiste dans un nouveau flacon. Ce sont eux qui menacent le plus d'écraser notre culture occidentale et de provoquer le déclin de notre civilisation. (...) Parmi eux, il y a beaucoup de femmes : des femmes qui sont contre tout et n'importe quoi. Et ce sont dans ces ‘Maisons des femmes’ que l'on rencontre également exclusivement des connes de lesbiennes. » Pour conclure, une dernière citation, de Jef Elbers, représentant du Vlaams Blok au Conseil de direction de la BRTN. Dans

une interview accordé à De Zwijger (12 janvier 1983), il explique pourquoi il est allergique aux féministes : « je suis un antiféministe. Les féministes sont des femmes qui veulent ressembler aux hommes, à tous les niveaux. (...) Déjà, elles ont une espérance de vie supérieure et en plus, elles voudraient voler aux hommes le peu de pouvoirs qu'ils ont l'illusion d'encore posséder. Je m'élève contre cela (...). Ces féministes, ce sont des missionnaires, des catholiques frustrées, d'anciennes nonnes qui, avant, convertissaient les nègres. Maintenant, elles n'arrivent plus à se débarrasser de leurs frustations. Tout ça, c'est la faute de la décolonisation. On aurait dû garder le Congo, elles auraient eu de quoi s'occuper avec les petits nègres au lieu de venir m'embêter. »

L'interruption volontaire de grossesse Depuis 1990, le Vlaams Blok n'a toujours pas digéré la dépénalisation de l'avortement en Belgique. Au moment de la fondation du parti, dans les Principes de base, un paragraphe était consacré à l'interruption volontaire de grossesse : « Nous rejetons toute forme de libéralisation de l'interruption de grossesse et exigeons que l'on crée des organismes sociaux qui s'occuperont de protéger les enfants à naître, ainsi que de supprimer les subsides accordés aux organisations qui pratiquent ou défendent l'avortement. » C'était une formulation bien générale et qui ménageait en fait tout le monde. Plus le temps passait et plus il devenait certain que la loi allait être ratifiée tôt ou tard, plus le ton monta. « L'avortement est un meurtre »,

« L'avortement : des meurtres pour la révolution », « Pas de bébé légalement assassiné », « Assassins de la vie en gestation », etc. Qu'une interruption de grossesse même aux yeux des partisans de la légalisation représente l'ultime solution et ne signifie absolument pas pour autant que la personne qui la subit ou qui la pratique le fasse par plaisir, ne vient même pas à l'esprit des gens du Vlaams Blok. Une discussion nuancée, ou n'importe quelle discussion d'ailleurs, autour de ce sujet s'est toujours avérée impossible avec le parti. L'alliance avec le mouvement Pro Vita demeure intacte et la lutte contre l'avortement reste l'un des sujets de polémique fondamental que le Vlaams Blok partage avec d'autres formations d'extrême droite en Europe. Sanctionner l'avortement reste donc politiquement à l'ordre du jour du Vlaams

Blok. Lors des élections législatives du 24 novembre 1991, il figurait parmi l'un des six thèmes nationaux de la campagne du Vlaams Blok. En 1988, Gerolf Annemans présenta un projet de loi prévoyant la reconnaissance de la personnalité juridique d'un enfant à naître. En 1990, après l'adoption de la loi légalisant partiellement l'avortement, il revint à la charge en proposant de « rétablir la pénalisation de l'avortement ». Annemans présenta à nouveau cette proposition le 12 mars 1992. Le Vlaams Blok déclare que la « loi sur l'avortement » est une « loi socialiste wallonne » et argumente sa position en ces termes : « En Flandre, il n'existe pas de majorité politique qui soutienne l'avortement libre. Cette majorité est due à la Wallonie socialiste. Nous, les Flamands, nous devons nous opposer avec force à la légalisation du meurtre dans le ventre de la mère. Au nom de qui et au nom de quoi nous laissons nous imposer ce que nous ne désirons pas ? »

Dans son combat contre l'avortement, le Vlaams Blok reprend une fois de plus les incontournables opinions du père Brauns qui, en 1987, exposa un argument particulièrement « convaincant » contre l'avortement : « On ne peut pas accuser Hitler d'avoir tué un enfant encore dans le ventre de sa mère. Le régime d'Hitler nous montre qu'il est possible d'organiser l'accueil des mères célibataires. Ceux qui pleurent aujourd'hui les meurtres des Juifs sont les mêmes qui mettent au point le génocide d'un peuple dans le giron maternel. »

Troisième partie

Qui est qui dans le Vlaams Blok ?

« Lorsque, comme moi, on a atteint l'âge de la retraite, on a affronté toutes les injures. On peut bien y ajouter le racisme et le fascisme. A mes yeux, du reste, ce sont des titres honorifiques. »

(Karel Dillen, au Congrès du Vlaams Blok du 25 mars 1984)

Il y a l'histoire et la position d'un parti, mais il y a également les gens qui le composent. Le comportement général des politiciens du Vlaams Blok d'aujourd'hui et d'hier nous donne une image claire et précise de ce que le parti est en réalité. Après les élections du 24 novembre 1991 et depuis le mois de janvier 1992, 18 membres du Vlaams Blok siègent au Parlement belge (12 à la Chambre et 6 au Sénat) En outre, le Vlaams Blok a un représentant au Parlement européen, 36 élus dans les Conseils provinciaux et 23 conseillers communaux en Flandre, plus quelques délégués occupant des postes administratifs à la BRTN, à ARGO, à la Vaste Commissie voor Taaltoezicht, etc. Qui sont ces élus, d'où viennent-ils, et surtout que défendent-ils ? En publiant la biographie politique de la plupart des mandataires du Vlaams Blok, nous nous efforçons de répondre à quelques unes de ces questions. Dans la première partie de ce

chapitre, nous évoquerons les parlementaires, dans la deuxième, nous parlerons des personnages « secondaires ». Afin de respecter le bon ordre, nous commencerons cette galerie de portraits par le président à vie et, jusqu'à présent, le seul membre du Vlaams Blok élu au Parlement européen.

Karel Dillen (°16/10/1925) fut et demeure le mentor d'un bon nombre d'organisations néonazies et d'extrême droite. La carrière politique actuelle de Karel Dillen commence en réalité le 1er octobre 1977, date à laquelle Dillen, mécontent de la signature du Pacte d'Egmont, annonce la création du Vlaams Nationale Partij (VNP) (Parti National Flamand). Le 20 novembre de la même année, Lode Claes, dissident de la Volksunie, décide de fonder pour des raisons semblables, le Vlaamse Volkspartij (VVP) (Parti Populaire Flamand). Quelques mois plus tard, les deux partis décident de former un cartel électoral et de participer aux élections législatives du 17 décembre 1978 sous la dénomination « Vlaams Blok ». Contre toute attente, Lode Claes n'est pas élu à Bruxelles tandis que Dillen est choisi à Anvers. Peu de temps après, Claes quitte la vie politique. Dillen hérite de ce qui reste du cartel, qui conserve le nom de Vlaams Blok.

Dillen devait sa victoire électorale en grande partie au soutien de toutes les organisations néonazies et d'extrême droite dont les quartiers généraux où les partisans sont pratiquement tous situés à Anvers : le TAK, Were Di, le VMO, le Voorpost et le Sint Maartensfonds. En octobre 1980, la direction du VMO traduisit la situation dans le journal de l'organisation en ces termes : « Lorsque Karel Dillen s'est retrouvé à la direction du Vlaams Blok, tout allait changer pour les Vlaamse Militanten (les militants flamands). Nous avions à nouveau le soutien d'un parti politique ! Ceci représentait un avantage non négligeable pour les groupes militants... Là où, autrefois, chacun voulait devenir le petit führer de sa propre petite organisation, la personnalité de Karel Dillen a jeté les ponts indispensables. » Deux citations de la bouche même de Karel Dillen démontrent clairement la position politique qu'il a adoptée. A propos

de l'invasion par les nazis du 10 mai 1940 : « Pour nous, c'est comme si les vacances avaient commencé trop tôt. » Et à propos de l'occupation allemande « je le reconnais franchement : pendant la Guerre, j'étais un partisan passif de ce que l'on appelait l'Ordre Nouveau, parce que j'espérais que l'émancipation de la Flandre allait enfin se réaliser. » (Les deux citations sont tirées de l'hebdomadaire Panorama du 8 novembre 1988). Les racines de la carrière politique de Karel Dillen remontent au « temps des catacombes », ainsi qu'on a l'habitude d'appeler la période d'après guerre durant laquelle de nombreuses figures de proue du Mouvement Flamand qui avaient collaboré furent condamnées à l'emprisonnement ou s'exilèrent à l'étranger. Ceci n'empêcha toutefois pas le milieu de la collaboration de faire de nombreuses tentatives pour se réorganiser en créant des magazines ou en fondant des organisations, mais leur existence fut

éphémère. Dillen était de la partie : le mouvement de jeunesse Sint Arnoutsvendel, formé sur le modèle nazi (1946), le Jeugdverbond der Lage Landen (Union des Jeunes des Pays Bas) d'inspiration VNV (1947), le Pélerinage de l'Yser (1948), l'Algemeen Nederlands Zangverbond (Union Générale de la Chanson Néerlandaise, 1948), la Vlaamse Concentratie (Concentration Flamande, 1949), le magazine de la collaboration Opstanding (1949), le Vereneging voor Vlaams Nationale Aktie (Rassemblement pour l'Action NationaleFlamande, 1950), le Vlaams Nationale Landdag (Assemblée Générale Annuelle Nationale Flamande, 1953). De 1962 jusqu'à la fin des années septante, l'organisation Were Di et le magazine Dietsland Europa ont été dirigés par Karel Dillen, Bert van Boghout (exWaffen SS), Karel Lacroix (ex-VNV et SS), Roeland Raes et Luc Vermeulen (par après,

ces derniers joueront un rôle important au sein du Vlaams Blok). Les Principes de base sommairement rédigés de Were Di, furent plus amplement développés en 1973 par Roeland Raes dans la brochure Onze Grondslagen (Nos Principes). Le contenu de cette brochure ressemble étrangement au programme politique du Vlaams Blok. Dans une interview accordée le 27 décembre 1988 à l'hebdomadaire Knack, Dillen dira à propos de cette parenté : « Il était évident que les deux finiraient par se ressembler. » L'idée clé de cette brochure est l'inégalité humaine au point de vue des dons, des performances, de la force créatrice et de la force de caractère. Pour rédiger cette notion de base, les idéologues du Vlaams Blok et de Were Di, d'après leurs propres dires, se sont inspirés de textes d'auteurs comme Konrad Lorenz, Alain de Benoist, Alexis Carrel, Cyriel Verschaeve, Wies Moens, August Borms et Joris van Severen.

L'apologie des criminels de guerre, impunis ou non, et la demande pour une amnistie générale de tous les collaborateurs forment, en quelque sorte, la terre nourricière dont sont issues toutes les initiatives et les organisations mentionnées cidessus. Par ailleurs, au début des années cinquante, Dillen, qui avait à l'époque 25 ans, entretenait de bons contacts avec le Mouvement Social Européen (MSE) dirigé par trois partisans célèbres du nazisme : René Binet, Maurice Bardèche (dont Dillen a traduit le livre révisionniste) et Per Engdahl. Le MSE représentait la première tentative de mise en chantier d'une structure internationale sur le modèle nazi. L'apologie des nazis est une constante dans les discours de Dillen. Le 23 avril 1963, Karel Dillen rendit hommage au héros nazi flamand Ward Hermans, le fondateur de Algemene SS Vlaanderen et rédacteur en chef du magazine De SS Man (condamné à perpétuité, pour être finalement relâché en 1955) en ces termes : « Lors de votre procès,

vous vous êtes élevé pour devenir le symbole et le père des opprimés ! » Dillen prolonge cette ligne politique à travers le Vlaams Blok. Non seulement Dillen ne voit pas d'inconvénient à ce que des révisionnistes entêtés (comme Jos Rogiers, André van Hecke, Jeanine Colson,...) figurent sur les listes électorales du Vlaams Blok, mais en outre les nazis restent les bienvenus chez Dillen et vice versa. C'est ainsi que le SS Obersturmführer de la Brigade SS Langemark, Jef François, trôna au premier rang de l'auditoire, juste à côté de Karel Dillen, en tant qu'invité d'honneur du Congrès électoral de 1988. D'autre part, Karel Dillen entretient une liaison particulière avec la presse en général et avec la presse néerlandaise en particulier. Dillen déclara lors d'une conférence de presse du Vlaams Blok (18.01.1989) : « Nous avons depuis

longtemps expérimenté le fanatisme, l'intolérance maladive, la haine enragée que les faiseurs et les suggéreurs d'opinion en Ollande sans H peuvent manifester à l'égard de tous ceux qui s'écartent, fût-ce d'un millimètre de la voie tracée par ces faiseurs et suggéreurs d'opinion (pour plus de détails sur l'histoire en question, voir le curriculum vitae de Gerolf Annemans, H.G). Finalement, la seule solution qui reste pour préserver la tolérance dans le Nord, serait d'envoyer une armée de libération flamande. » A partir de 1947 et jusqu'à sa pension, Karel Dillen fut employé à l'usine Renault Belgique, située à Anvers. De 1978 à 1987, il siégea à la Chambre pour le Vlaams Blok. Fin 1987, Dillen fut élu sénateur. Aux élections européennes de juin 1989, il devint parlementaire européen. De 1967 à 1978, Dillen rédigea pour le magazine d'extrême droite t'Pallieterke sous le pseudonyme R.Sch. la rubrique Kroniek

der Dode Zielen (La Chronique des Ames Mortes). Dillen a également publié l'hagiographie du chef du VMO Wim Maes et traduit le livre de J.E. Holloway, Apartheid, a challenge (L'Apartheid, un, défi). Enfin, en 1991, il publia un recueil de poèmes choisis écrits par Borms qu'il intitula Europese Gedichten (Poèmes Européens). En janvier 1992, Dillen présenta sa candidature mais sans succès pour le poste de président du Parlement européen au nom du groupe des Droites Européennes de Jean Marie Le Pen. Il obtint 16 voix sur 518.

Les parlementaires Gerolf Annemans (°08/11/1958), député, a été rebaptisé par des étudiants anversois « Geweerkolf Ananas » (crosse de fusil ananas). Ce protégé de Dillen se situa lui même, vers la moitié des années quatre vingts comme étant à « l'extrême droite » (!) de Dillen. Annemans est avocat, il a fait ses études dans deux universités d'Anvers, l'UIA et l'UFSIA. A l'époque, il militait dans la branche de droite du Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond (KVHV, Union des Etudiants Universitaires Catholiques Flamands). Lors d'une interview accordée au magazine d'extrême droite Dietsland Europa (décembre 1985), Annemans déclare que : « En réalité, lorsque j'étudiais, je portais la casquette du KVHV tout en étant militant au NSV. Mais je connais Karel Dillen depuis que je suis étudiant. Cependant, la première

fois que j'ai opté pour le Vlaams Blok, c'était à la demande (personnelle) de Karel. » Au contraire de Filip Dewinter (le concurrent direct d'Annemans pour la direction du parti), Gerolf Annemans est un nationaliste populaire fervent qui marche en toute confiance dans les foulées de Dillen. Dans le magazine Vrij Nederland (23 janvier 1986), il exprima avec force sa position en ces termes : « Mustapha qui égorge des moutons dans sa baignoire n'est pas mon pire ennemi. Mon pire ennemi, c'est l'État belge. » Pendant sa période KVHV, Annemans était le rédacteur en chef du journal du KVHV Tegenstroom (Contre courant) ainsi qu'administrateur au sein du Conseil des Etudiants de l'université. A ce titre, il se mit à écrire quelques petits articles pour la rubrique estudiantine du t'Pallieterke, l'hebdomadaire d'extrême

droite dont il prendra par la suite la charge de la rubrique télé sous le pseudonyme « dr. ius Tinus van Bikschote ». En 1985, il fut admis par Karel Dillen au sein du parti en tant que successeur de ce dernier. Effectivement, le 12 mars 1987, il succéda à Dillen et entra au Parlement. Depuis, l'aversion qu'on lui connaît de longue date à l'égard des immigrés, de l'avortement et de la BRTN est empreinte d'encore plus d'animosité. Avant tout, Annemans est un farouche opposant aux syndicats et un partisan fervent de la gendarmerie (belge !). Gerolf Annemans adore se présenter comme le politicien légaliste ferme dans ses principes qui n'admet ni les mensonges ni la violence. C'est ainsi que le 11 février 1993, il annonça qu'il ne voulait plus représenter, comme avocat son camarade de parti Rob Verreycken. Verreycken (voir plus loin) est un militant violent du Vlaams Blok d'Anvers impliqué dans plusieurs affaires judiciaires. Annemans ne pourrait plus concilier la

défense de Verreycken avec son mandat politique. Ce blason qu'il a pris la peine de redorer lui même s'est quelque peu entâché en 1988 à cause d'un incident. Cette année là, Annemans avait été contacté par deux journalistes du magazine hollandais De Nieuwe Revue qui se s'étaient fait passer pour des hommes d'affaires de Rotterdam, plus précisément des représentants du « Havenclub » de Rotterdam. Ils avaient offert à Annemans la somme de 50 000 couronnes; en échange, ce dernier devait leur fournir une équipe de colleurs d'affiches du Vlaams Blok qui serait chargée de coller des affiches racistes dans tout Rotterdam. Annemans tomba dans le panneau et leur proposa même de rédiger une fausse facture pour « conseil juridique » pour les 50 000 couronnes versées. Lorsque Veronica (télévision hollandaise) et De Nieuwe Revue exposèrent publiquement l'affaire, Annemans tenta de tout nier. Malheureusement pour lui, les journalistes avaient caché une caméra et des micros et,

par conséquent, les tractations avaient été enregistrées. Lorsque le Vlaams Blok fut unanimement critiqué par la presse et les milieux politiques suite à l'attaque sur la personne de Willem Vermandere pendant les fêtes du 11 juillet 1992, Annemans tenta de blanchir le parti lors d'une interview accordée au journal De Standaard (ler août 1992) : « Nous subissions les événements comme un conducteur qui sait qu'il va rater le prochain virage. Lorsque l'organisateur Rigo Peeters annonça quelques jours avant le 11 juillet que Vermandere allait se produire, j'ai pensé : ‘Oh, non!’. Et lorsqu'il ajouta que les extrémistes n'allaient probablement pas apprécier, la seule chose qui nous restait à faire était de tenir le volant et de penser: ‘Voilà bientôt le virage’. » Dans la même interview, Annemans eut une réaction incroyable suite à la

comparaison faite par Fred Erdman, sénateur SP, qui avait soulevé plusieurs ressemblances entre le programme en septante points concernant les immigrés rédigé par le Vlaams Blok et le programme anti-Juif mis au point par les nazis avant la guerre. Il déclara : « Il veut tout simplement faire peur à mes électeurs Juifs qui veulent voter pour le Vlaams Blok. » On peut d'ailleurs se demander si le Vlaams Blok a des électeurs juifs. En outre, Annemans a toujours déclaré qu'il ne se laisserait jamais traiter de raciste. "Si lors d'un forum important, au Parlement par exemple, quelqu'un me traite de raciste, je le poursuivrai en justice. Mais si l'un ou l'autre bavard de gauche m'accuse de racisme dans son journal, cela ne m'empêchera pas de dormir », déclara Annemans le 23 janvier 1988 dans Vrij Nederland. Pour autant que l'on sache, Annemans n'a pas « poursuivi en justice » Fred Erdman.

Il faut vraisemblablement ranger « mes électeurs Juifs » au rayon des déclarations fracassantes grâce auxquelles Annemans essaye d'attirer l'attention des médias et de l'opinion publique. En adaptant cette stratégie médiatique, Annemans y met grossièrement le prix. Pour preuve, deux citations extraites d'une interview accordée le 4 février 1992 à l'hebdomadaire Dag Allemaal : « Personnellement, je n'éprouve aucun complexe parce que nous vivons mieux (en comparaison avec le Tiers Monde, H.G.). Dans les milieux de gauche par contre, ce sentiment existe. Savoir qu'il y a des enfants mourants ne m'amène pas à la conclusion que je devrais m'arrêter de travailler pour mieux vivre. Je ne crois pas qu'un transfert de nos richesses vers là bas fera disparaître la misère du monde... » « Dans l'avortement, il y jeu. A savoir l'avortement sur

la discussion sur a autre chose qui est en si l'on peut obtenir simple demande. A la

limite, pour des raisons de confort social. Une piscine que l'on n'a pas fini de payer par exemple... » Gerolf Annemans est membre de la direction du parti, président du Vereniging van Vlaams Blokmandatarissen (VVBM, Assemblée des mandataires du Vlaams Blok) et coordinateur du Groupe Parlementaire.

Filip Dewinter (°11/9/1962), député, est d'après le diagnostic de Louis Tobback un « psychopathe » et selon le président du SP, Franck Vandenbroucke, un « authentique nazi ». En tout cas, depuis qu'il a présenté en juin 1992, au colloque d'Anvers, son programme en 70 points concernant les immigrés, les profanes le considèrent comme étant la figure la plus controversée du Vlaams Blok.

Quand, en décembre 1987, Dewinter fut élu sur la liste du Vlaams Blok à la Chambre, il devint par la même occasion le plus jeune parlementaire belge. Malgré son jeune âge, il peut se vanter d'avoir à son actif un palmarès musclé. Au début des années 80, le brugeois Dewinter devint le président du Nationalistische Studentenvereniging (NSV, Union des Etudiants Nationalistes), section d'Anvers. Le NSV est une dissidence d'extrême droite du KVHV. Pendant trois ans, Dewinter est resté à la présidence du NSV pour ensuite passer à la présidence du Nationalistisch jong Studenten Verbond (NJSV, Union des Jeunes Etudiants Nationalistes). Par ailleurs, le secrétariat national du NJSV était établi à l'adresse privée de l'époque de Dewinter. Aujourd'hui, le NJSV NSV a évolué et est devenu un véritable commando de choc néonazi, dur et enclin à la bagarre. Les deux organisations soeurs ont créé leur

propre milice privée : de Verbondswacht (Groupe de sécurité de l'Union). Cette troupe de choc regroupe des militants actifs qui sont chargés de l'ordre et de la protection au sein des sections locales. Le contenu de ce que l'on appelle le « chant de combat » du NSV ne laisse planer aucun doute quant à l'idéologie de Dewinter et de ses amis étudiants (voir la première partie du livre). Il n'est pas étonnant non plus que sous l'impulsion de Dewinter, le NJSV ait carrément pris des allures antimarxistes. Un antimarxisme développé d'une manière très particulière. C'est ainsi qu'en février 1992, Filip Dewinter organisa à Bruges une foire du livre antimarxiste. Parmi les personnes qui tenaient les stands, il y avait entre autres Bert Eriksson (ex-Hitler Jugend et VMO), Luc Vermeulen (Voorpost) et Philippe van der Sande (NSV). Sur ordre du parquet, les écrits du criminel de guerre Léon Degrelle furent saisis. Les pamphlets du NJSV étaient alors ornés de la croix celtique, l'emblème

par excellence de la plupart des organisations néonazies européennes. Grâce aux interventions de Dewinter, le NSV NJSV est devenue l'organisation de jeunesse du Vlaams Blok. En 1987, le Vlaams Blok Jongeren (VBJ) fut créé et dirigé par Filip Dewinter. Fin 1990, Jan Huybrechts succéda à Dewinter à la présidence du VBJ. Bien que Dewinter nie avec force avoir quoi que ce soit en commun avec le nazisme ou la collaboration, il reste cependant un invité de marque de la cérémonie commémorative annuelle en l'honneur des nazis au cimetière de Lommel. Dans une interview accordée au mensuel néonazi Deutsche Nationalzeitung (18.11.1988), Dewinter s'est dévoilé. Répondant à la question de savoir quels étaient selon lui les champs de bataille les plus importants de l'histoire, il déclara : « La bataille de Poitiers, la bataille des Eperons d'Or et la bataille de la Légion Flamande au Front de l'Est russe. »

Ce jeune parlementaire n'hésite pas non plus à retrousser les manches quand l'occasion se présente. C'est ainsi que, le 9 juin 1989 par exemple, Filip Dewinter et quelques uns de ses acolytes ont rossé un jeune de dix-sept ans parce que ce dernier refusait de prendre un tract électoral du Vlaams Blok. Un témoin hollandais qui avait photographié la scène fut suivi par Filip Dewinter qui le menaça. Une semaine plus tard, le 3 juin, Filip Dewinter et un petit groupe de ses partisans furent une nouvelle fois « à l'honneur » pour avoir frappé une dame de 53 ans, simplement parce qu'elle n'avait pas déplacé assez rapidement son vélo de l'endroit où les membres du Vlaams Blok voulaient garer leur bus publicitaire. La malheureuse dut être emmenée à l'hôpital. Et le 16 juin de la même année, l'agence de presse Belga informa du fait suivant : à Gand, un groupe de militants du Vlaams Blok, sous la direction de Filip Dewinter, ont brutaIisé des membres de Jongeren tegen Racisme (jeunes contre le

Racisme) et du groupe d'initiative de Gand pour une société multiculturelle. Quiconque en Flandre prend fait et cause pour les immigrés peut compter sur une thérapie subtilement administrée par Dewinter. Lors d'un meeting organisé à Malines pendant la campagne électorale de 1991, il a formulé la position de son parti à l'égard des immigrés en ces termes : « Il n'existe qu'une seule politique correcte : le renvoi de tous les immigrés.Vous ne vous attendez quand même pas à ce que votre plombier qui, étant venu réparer une fuite dans votre salle de bain, s'asseye ensuite dans votre fauteuil, boive votre meilleur whisky, pour finalement se retrouver dans le lit de votre femme ». De même, aux élections parlementaires du 24 novembre 1991, Dewinter ne s'est pas gêné pour comparer Madame Paula D'Hondt, Commissaire Royal à l'Immigration, à une prostituée : « Seules les prostituées laissent leur porte ouverte. Nous ne voulons pas

transformer la Flandre en un bordel public ouvert à tous les étrangers d'Afrique et d'Asie. » Dewinter fit cette déclaration lors d'une « fête de famille » du Vlaams Blok. Dans la salle où se déroulait la « fête », on pouvait voir des affiches représentant Paula D'Hondt voilée ainsi qu'un grand panneau publicitaire où Paula D'Hondt apparaissait comme un morceau de viande coincé dans un petit pain. Au dessus du dessin, on lisait le commentaire « Heten D'Hondt » (« Chaude D'Hondt »; « hond »=chien, N.L.). En outre, tout le quartier où habite Paula D'Hondt était placardé d'autocollants anonymes sur lesquels figurait le texte suivant : « Seules les prostituées profitent de l’immigration ». On peut à juste titre se demander où le Vlaams Blok situe la frontière de la violence verbale et physique. Le 3 mars 1990, un commando du Vlaams Blok avait déjà pénétré dans la maison de Paula D'Hondt « dans le but de l’ntimider ». Deux

semaines plus tard, le 14 mars exactement, un groupe de cinquante membres du Vlaams Blok, emmené par Filip Dewinter, attaqua Paula D'Hondt à Anvers alors que celle-ci se rendait pour une conférence au siège central de la BBL. Depuis le choc électoral du 24 novembre 1991, la lutte contre la prétendue criminalité croissante au sein de la classe politique figure en tête de l'agenda des politiciens. Il est pour le moins curieux que la criminalité organisée du Vlaams Blok n'ait jamais figuré à l'ordre du jour du Conseil Flamand ou du Parlement. Filip Dewinter n'a pas seulement des problèmes avec les immigrés et les racistes. Les femmes qui travaillent en dehors du foyer familial et les féministes ne trouvent pas non plus grâce à ses yeux : « (...) n'est-ce pas le féminisme qui a incité à légaliser l'avortement, a provoqué un accroissement des divorces et a poussé à l'utilisation des moyens contraceptifs ? Le féminisme déstabilise notre société car il en fait

trembler les fondements, l'essentiel, c'est à dire la famille. » D'après des documents du parti et différents journaux d'extrême droite à l'étranger, nous savons que Filip Dewinter entretient des liens étroits aussi bien avec le Front National de Jean Marie Le Pen qu'avec les fascistes grecs de l'EPEN, les néonazis du Deutsche Volksunion et du Nationaldemokratische Partei Deutschland, ou les racistes du Centrumpartij et du Centrumdemocraten en Hollande. Par ailleurs, Dewinter étale son intolérance par delà les frontières flamandes (voir la seconde partie, chapitre « Contacts internationaux »). Lorsque la Fondation Anne Frank organisa en juillet et en août 1990 une exposition antiraciste et antifasciste qu'elle intitula (judicieusement) « Eigen volk eerst! », Dewinter fut hors de lui. Avec Egbert Perée du Centrumdemocraten, il essaya de mettre sur pied une conférence de presse contre

l'exposition à Amsterdam et à Dordrecht. Il écrivit également une lettre au Ministre des Affaires Etrangères, Mark Eyskens, dans laquelle il conjura le Ministre d'intervenir auprès des autorités hollandaises afin de faire interdit l'exposition. Finalement, Dewinter, Dillen et Perée déposèrent plainte pour diffamation devant le procureur de la justice d'Amsterdam. Même si cette « campagne hollandaise » échoua sur toute la ligne, elle démontre néanmoins que le Vlaams Blok, le Centrumpartij ainsi que le Centrumdemocraten hollandais cherchent à tout prix à travailler en étroite collaboration. L'exposition « Le monde d'Anne Frank » circule en Flandre tout au long de l'année 1993. Le 5 février 1993, le Vlaams Blok a annoncé que Filip Dewinter et Roeland Raes allaient déposer plainte contre Fred Erdman, sénateur SP et éditeur

responsable de la brochure distribuée pendant l'exposition. Dans le même communiqué, le parti a en outre déclaré, le 5 février 1993, qu'il avait réclamé la saisie de la brochure en question. Au moment de l'impression de ce livre, cette saisie n'avait à notre connaissance pas encore été effectuée. Filip Dewinter est membre de la direction du Vlaams Blok et responsable de l'organisation du secrétariat.

Xavier Buisseret (°5/1/1949), député, est, depuis la création du Vlaams Blok, chef de la propagande et collaborateur permanent à la rédaction du journal du parti. Xavier Buisseret signe ses articles du cryptogramme XA4. Depuis des années, ce chauffeur de taxi d'Edegem s'est forgé une solide

réputation d'extrémiste incurable, une réputation qui ne se limite pas à Anvers, bien au contraire. C'est en 1973 qu'il a commencé à acquérir cette fameuse réputation en participant à l'Opération Brevier, c'est à dire « l'enlèvement » du corps du prêtre collabo Cyriel Verschaeve, enterré dans un cimetière autrichien. La réputation de Buisseret s'est confirmée entre avril 1974 et octobre 1977, période durant laquelle il fut le führer incontestable du VMO. C'est sous sa direction que le VMO fit régulièrement l'actualité avec le récit de ses exactions violentes : les bagarres lors du Pélerinage de l'Yser, le fait d'avoir empêché la représentation d'une pièce de théâtre sur la vie de Cyriel Verschaeve et d'avoir blessé des étudiants progressistes à Louvain. Le tapage autour de la personne de Buisseret arriva à son point culminant lorque

le mensuel du VMO publia en juin 1977, sous la responsabilité du chef de l'organisation, un « éditorial » dans lequel le VMO appela à la formation d'une guérilla générale contre les francophones (voir dans la première partie, le chapitre « Le VMO, plaque tournante de l'extrême droite »). Ce précurseur quelque peu impétueux du slogan du Vlaams Blok « Eigen volk eerst ! » a finalement eu droit à une enquête judiciaire et c'est sur l'insistance de son avocat que Buisseret publia dans le numéro de septembre 1977 du magazine Alarm un rectificatif dans lequel il écrivit entre autre : « En outre, de tels actes exposeraient les Flamands de Bruxelles à des représailles encore plus sévères, étant donné que les francophones disposent de dizaines de milliers d'alliés, qu'il ne faut pas mésestimer et qui sont en outre bon marché : les travailleurs immigrés. »

Peu après cette affaire, Buisseret quitte le VMO et crée en septembre 1977, avec Roeland Raes et Siegfried Verbeke, un nouveau magazine du nom de HARO, un « mensuel de la révolution conservatrice ». Officiellement, le rédacteur en chef est Verbeke et Buisseret le secrétaire de rédaction. Le secrétariat de direction est d'ailleurs domicilié à l'adresse privée de Buisseret, qui est en outre l'éditeur responsable du magazine. Pour compléter le bagage politique et historique des bagarreurs de rue néonazis, HARO diffuse des enregistrements de discours d'Hitler, Goebels, Göring et des publications comme Stierven er werkelijk zes miljoen ? (Six millions de Juifs morts... le sont ils réellement ?), Erfgoed en de Germaanse Voorgeschiedenis (L'Héritage et l’Histoire germanique), Moeder, vertel eens wat van Adolf Hitler (Maman, raconte-nous une histoire sur Adolf Hitler).

Déjà dans le premier numéro de HARO, Buisseret étalait un antisémitisme malsain ainsi qu'une haine virulente à l'égard des immigrés. Pour couronner le tout, il y eut la publication, en collaboration avec la rédaction du magazines hollandais De Wende, d'un « numéro spécial » particulièrement exécrable intitulé Holocaust... hoe lang nog (L'holocauste, combien de temps encore), un numéro dans lequel on affirme que l'extermination par les nazis de six millions de Juifs est « une fiction et une manipulation de la réalité historique ». En juin 1979, HARO disparut de la circulation et la majorité de la rédaction passa au Vlaams Blok. Bombardé « chef de la propagande » et responsable du « Jongeren Aktief » (le mouvement précurseur du Vlaams Blok Jongeren), Buisseret devint également cadre du parti et fut également accepté au sein de la direction du Vlaams Blok. En passant au Vlaams

Blok, Buisseret n'en a pas pour autant renié ses amis nazis du VMO. Lors des élections parlementaires de novembre 1981, lui, l'épouse d'Eriksson, le führer du VMO, et Cesar Spitaels, le chef de la fanfare du VMO, ont mené ensemble la campagne électorale. Entre temps, Buisseret est resté un client fidèle du tribunal d'Anvers. En 1980, il comparut devant le tribunal lors du procès du VMO et en 1985, il dut se présenter devant le tribunal correctionnel pour avoir distribué des autocollants antisémites. En octobre 1989, la Cour d'Appel le condamna à verser une amende pour avoir brutalisé un homosexuel en 1985. Deux semaines avant les élections du 24 novembre, il fut condamné à deux mois d'emprisonnement avec sursis parce qu'il avait tabassé et dépouillé un jeune Marocain de 15 ans. En mai 1992, et pour les mêmes faits, la Cour d'Appel d'Anvers l'acquittera.

Pour conclure, ajoutons que Buisseret ne manque pas d'humour. En 1988, dans le mensuel du Vlaams Blok, il proposa de transformer le service de propagande du parti en un Nationaal Secretariaat Dienst Algemene Propaganda (Secrétariat National de Propagande Générale), en abrégé le NSDAP, le nom du parti nazi d'Adolf Hitler.

Marijke Dillen (°11/12/60), députée. Elle habite Borgerhout, une des villes de prédilection du Vlaams Blok. Elle est avocate et représente entre autres Xavier Buisseret. C'est la fille aînée de Karel Dillen. Elle est mariée à Hans Carpels, dont elle a trois enfants, et qu'elle a rencontré au NSV à Louvain. Carpels est administrateur du Nationalistisch Vormingsinstituut van het Vlaams Blok (Institut de formation

Nationaliste du Vlaams Blok) et rédactrice en chef du journal du parti.

fut

Marijke Dillen a fait ses premières armes politiques en tant que vice-présidente du NSV, dans les années quatre-vingt. Elle travaillait à la rédaction du journal du NSV Signaal en même temps que Filip Dewinter et Hans Carpels. En mai 1991, Marijke Dillen devint la première femme de l'histoire du Vlaams Blok à prendre la parole dans un Congrès. Le sujet de son discours était la femme au foyer, pour laquelle elle exigeait un « salaire d’éducation ». Admise au sein du Vlaams Blok grâce à l'intervention de Filip Dewinter, élue aux élections du 9 octobre 1988, elle entra au Conseil communal d'Anvers où elle dirige depuis 1990 le groupe du Vlaams Blok, qui est composé d'une dizaine de membres. Marijke Dillen remplaçait alors le président démissionnaire du groupe, Eric

Deleu, qui a quitté le mouvement parce qu'il était en désaccord avec la ligne politique dure dont il rendait Dewinter responsable. Dans une interview accordée au journal syndical De Basis, à propos de cette démission, le conseiller communal socialiste Lode Hancké dit : « Auparavant, Deleu, mécontent, avait déjà quitté la Volksunie pour passer au Vlaams Blok avant que le parti n'adopte un profil nettement antiimmigré. Il n'est absolument pas d'accord avec la ligne politique dure développée par Dewinter. Par exemple, il avait les larmes aux yeux le jour où il s'est rendu dans un musée en Israël et qu'il a vu ce que le peuple juif avait enduré. Lors d'un récent Conseil communal, Deleu s'est même déclaré scandalisé par l'attitude de gens qui nient ou minimalisent l'holocauste. » « Des gens comme Le Pen méritent d'aller en prison », déclara-t-il en substance. Ce sont là des considérations qui ne pèsent absolument pas sur la conscience de Marijke Dillen.

Bien que le Vlaams Blok ne soit pas très constructif au sein du Conseil communal, Marijke Dillen ne manque pas d'ambition politique. L'ambition est également la raison pour laquelle elle essaye de trouver une certaine respectabilité auprès du grand public. Dans une interview accordée au Standaard, Marijke Dillen déclara sans détours qu'elle échangeait régulièrement des idées avec Fatima Bali, Conseillère communale d'origine marocaine d'Agalev à Anvers. Trois jours plus tard, le même journal publia une lettre de Fatima Bali dans le courrier des lecteurs, et dans laquelle on pouvait lire : « La base raciste de Dillen peut être rassurée. je n'éprouve pas le besoin de discuter avec des gens qui foulent au pied les droits humains fondamentaux et qui détruisent notre communauté dans la haine et dans la violence. Marijke Dillen a l'air d'avoir compris cela puisqu'elle n'a jamais engagé de conversation avec moi. »

Le 16 décembre 1991, lors d'une conférence donnée à Anvers, Marijke Dillen revendiqua l'écharpe de bourgmestre de la ville et deux sièges d'échevin (pour son parti) : celui du personnel et celui du port. Une requête insensée car le prochain Conseil communal d'Anvers ne sera élu qu'en octobre 1994.

Karim van Overmeire (°14/10/64), député, fut élu à la chambre le 24 novembre 1991. Il est licencié en droit. Pendant un certain temps, il a travaillé au secrétariat de Filip Dewinter et, jusqu'à sa prestation de serment, il fut secrétaire stagiaire de direction au service juridique de l'Autonome Raad van het Gemeenschapsonderwijs (ARGO, Conseil Autonome de l'Enseignement Communautaire). Karim van Overmeire a commencé a militer à Grammont une ville située en

Flandre Orientale où son père est commissaire adjoint. Là, il devint membre administrateur du Nationalistisch jongstudenten Verbond (NJSV, Union Nationaliste des Jeunes Etudiants) et organisa avec le mouvement des actions dirigées contre Broederlijk Delen, la BRTN et le mouvement pacifiste. Au niveau national, le NJSV se situe ouvertement dans la mouvance d'extrême droite. Des fondateurs de la pensée fasciste comme Julius Evola sont les exemples idéologiques de ce mouvement. En 1983, le groupe tenta d'usurper le Conseil communal des jeunes de Grammont en demandant l'adhésion de quatre associations différentes : NJSV, TAK Jongeren, Volksunie Jongeren et Vlaamse Mindervalide Jongeren. Un an plus tard, suite à de violents conflits, ces groupes furent exclus. La même année, le NJSV de van Overmeire se fit connaître en organisant une marche flamande dans la région. Le

groupe des cinquante manifestants défilait dans le but d'obtenir plus de facilités pour les Flamands à Enghien, la création d'une école flamande à Deux Acren, etc... A chaque halte, il y avait des empoignades et personne ne comprenait vraiment pourquoi on voulait allumer un incendie communautaire dans cette région de Belgique. Le NJSV disparut de la scène politique. En octobre 1985, le Vlaamse Jeugd Geraardsbergen (VJG, Jeunesse Flamande de Grammont), un mouvement de fusion créé à partir des initiatives précédentes, entra en scène. Karim van Overmeire était le rédacteur du magazine VJG Tribune. Sa tâche principale consistait à taper des textes mais pratiquement aucun texte rédigé de sa plume ne parut dans le magazine. Le VJG prétendait lutter contre le totalitarisme et,

dans ce sens, il défendait « l'exclusion dans notre société de partis comme le SAP (trotskiste), le KPB (communiste) et le PVDA (maoïste) ». Deux phrases plus loin, on pouvait lire qu'on ne peut accuser des mouvements comme le Vlaams Blok et le Front National (les bagarreurs de Werner van Steen, ex-VMO) d'avoir des tendances totalitaires. Dans toutes ses publications, le VJG de Van Overmeire plaide en faveur du solidarisme comme étant le trait d'union entre le communisme et le capitalisme, afin de réduire les distances entre les employeurs et les employés. Finalement, le VJG disparut de la circulation et la plupart de ses militants atterrirent à Gand, tout comme van Overmeire. A Gand, van Overmeire milita au sein du NSV, l'aîné du NJSV, et participa aux actions dures du mouvement. Et lorsque

les meneurs gantois se joignirent à l'une ou l'autre manifestation violente, van Overmeire était de la partie. Le 13 décembre 1992, Karim van Overmeire a succédé à Jan Huybrechts à la présidence du Vlaams Blok Jongeren (VBJ). Le 11 mars 1993, sous la direction de Karim van Overmeire, les VBJ ont lancé une action à l'intention des jeunes immigrés marocains et turcs de la deuxième et de la troisième génération. Dans 16 000 tracts signés par van Overmeire, ces jeunes sont confrontés à un choix bien précis : « les Marocains et les Turcs de Flandre ont le choix. Soit, ils restent en Flandre et demeureront des citoyens de second rang manipulés par toutes sortes de groupes et perdront leur identité. Soit, ils retournent dans leur pays d'origine dans des conditions tout à fait humaines, où ils pourront jouer un rôle important dans la construction de leur pays. (...) Le véritable conflit réside entre les partisans du maintien de l'identité marocaine

ou turque et les prophètes pour une société multiculturelle. »

John Spinnewyn (°03/02/1953), député. A l'origine technicien agriculteur, il est sous chef de gare à Turnhout. John est le fils du fameux leader régional du VMO de Bruges, Roger Spinnewyn. Depuis sa plus tendre enfance, il a milité, ainsi que ses frères Jim et Willy, sous l'aile protectrice de son père, au sein du VNJ, à l'AVNJ, à la Volksunie et au VMO. C'est ainsi qu'en 1973, il participa à l'Opération Brevier en compagnie de Roger Spinnewyn, Bert Eriksson et Xavier Buisseret. Ils « enlevèrent » le corps du prêtre collabo Cyriel Verschaeve qui reposait au cimetière du village de Solbad Hall, en Autriche, pour le rapatrier à Alveringem. En 1978, il assista à la naissance du Vlaams Blok.

En 1980, lors du procès du VMO, il fut condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 8 000 francs ainsi qu'à une seconde amende pour dommages et intérêts de 650 000 francs (entre autre parce qu'il était directement impliqué dans l'attaque du Beffroi de Bruges, en avril 1980, opération durant laquelle le carillonneur de la ville avait été grièvement blessé, ainsi qu'à l'occupation de la Maison Communale de Fourons, en octobre 1979). En 1984, il fut une nouvelle fois condamné à six mois d'emprisonnement et à une amende de 18 000 francs pour avoir participé à différentes attaques de cafés progressistes à Bruges. En 1989, il mena le raid organisé par le Vlaams Blok contre le Centre culturel de Geel où se déroulait une conférence débat sur le Vlaams Blok. Depuis 1988, John Spinnewyn est président du Vlaams Blok pour l'arrondissement de Turnhout. Il est en outre

membre du Club Hertog Jan van Brabant, une organisation du Brabant composée d'anciens SS, combattants du Front de l'Est et de leur sympathisants, ainsi que la section jeunes de l'organisation, le Vlaamse Jeugd. Spinnewyn milite également avec le chef de Voorpost, Luc Vermeulen, dans le Comité d'Aide à la Croatie, une organisation qui fournit une aide matérielle aux nationalistes croates à Zagreb.

Luc van Nieuwenhuyzen (°16/06/52), député, est employé au Vlaamse Dienst voor Buitenlandse Handel (Bureau Flamand du Commerce Extérieur). Il est l'un des membres de la Volksunie qui a quitté le parti après la signature du Pacte d'Egmont pour ensuite entrer au Vlaams Nationale Partij de Karel Dillen. En 1980, l'année où il déménagea de Bruxelles pour aller habiter à Sint Amands sur l'Escaut, il devint membre du Vlaams Blok. Il fit partie de Were Di et de Voorpost dans les années

septante. A l'époque, il était également le rédacteur en chef de De Geus, le « journal de contact » de Voorpost dans la région. Par ailleurs, l'adresse officielle du secrétariat local de Voorpost était l'adresse privée de van Nieuwenhuyzen à Bruxelles. En outre, van Nieuwenhuyzen a été président du club Hendrik Conscience à Bruxelles pour l'organisation Vlaams Nationalistische jongeren. Il est secrétaire de la section Klein Brabant Vaartland, membre de la rédaction de la revue de l'arrondissement pour les membres du parti et collaborateur au mensuel du Vlaams Blok. Lui et Marijke Dillen revendiquent tous deux une rémunération pour les mères au foyer.

Filip de Man (°11/11/1955), député, originaire de Roulers, habite momentanément à Ternat et se dit publiciste. Il a étudié la communication et le

journalisme à la VUB (il s'appelait alors Jean-Philippe). A l'époque où il était étudiant, il militait aux côtés du NSV contre le mouvement des étudiants progressistes à l'Université de Bruxelles. Il dirigea le mouvement d'extrême droite « l'Union des Etudiants ‘Klauwaert en Geus’ », qu'il avait lui même fondé. Durant l'année académique 1978-79, de Man obtint de justesse son diplôme. Le sujet de son mémoire est sans détours : « Vrijdag : ébauche et échec d'un hebdomadaire progressiste ». Le choix de cette thèse est dû au fait que Filip de Man est le fils de Jos de Man. Ce dernier, au début des années septante, fut le cofondateur et le rédacteur en chef du magazine Vrijdag qui, de novembre 1971 au 18 février 1972, connut une existence éphémère certes, mais néanmoins spectaculaire. Lorsqu'il défendit

son mémoire, Filip de Man déclara que, grâce à ses relations avec d'anciens collaborateurs, il eut la possibilité d'utiliser les archives de Vrijdag. En 1989, Filip de Man collabora à ce que l'on appela le Zwartboek progressieve leraars (Livre Noir des professeurs progressistes) qui était le résultat de la campagne de dénigrement déclenchée par Filip Dewinter dans les écoles flamandes. Le service de renseignements du Vlaams Blok (KOSMOS, dirigé par Luc Dieudonné, exVMO) et l'organisation Vlaams Blokjongeren (à l'époque dirigée par Filip Dewinter et Jan Penris) ont co produit ce Livre Noir. En 1990, Filip de Man collabora au livre de Filip Dewinter Eigen volk eerst. Antwoord op het vreemdelingenprobleem, un ouvrage violemment opposé à l'immigration.

Pour l'instant, De Man occupe différentes fonctions : collaborateur à la rédaction du mensuel du parti et président pour le Vlaams Blok de l'arrondissement Bruxelles Hal Vilvorde. Depuis les élections parlementaires du 24 novembre 1991, Filip de Man est la figure de proue de la campagne de haine menée contre les immigrés et surtout contre les candidats réfugiés politiques dans le Pajottenland.

Joris van Hauthem (°29/11/1963), député, a, d'après l'hebdomadaire Knack (03/06/1992), obtenu ses galons politiques dans l'organisation de jeunesse d'extrême droite Vlaams Nationaal Jeugdverbond (VNJ, Union de la Jeunesse Nationale Flamande), où il était le responsable du « Hoofddienst Vorming » (Service Principal de Formation). Dans un droit de réponse (Knack, 05/08/1992), il nie avoir jamais fait partie du VNJ. Toutefois, nous sommes en possession d'une lettre non datée

(probablement de 1984 ou 1985) ayant comme en tête le cachet du VNJ Hoofddienst Vorming et le nom de Joris van Hauthem. A cette époque, cette organisation faisait appel à des « personnalités » comme Luc Vermeulen (Voorpost), Erwin Brentjes (TAK) et Jef Eggermont (VMO et groupe ODAL) pour former les jeunes qui lui étaient confiés. L'idéologie du VNJ est un curieux mélange d'idées développées par Joris van Severen, Wies Moens, Cyriel Verschaeve et August Borms, des figures qui sont régulièrement à l'honneur dans le magazine de VNJ, Storm. Par ailleurs, dans le passé, le VNJ servait de vivier de recrutement pour le VMO, Voorpost et le groupe ODAL. Ces dernières années, l'organisation a également renforcé ses liens avec le Vlaams Blok. Joris van Hauthem a fait ses candidatures à l'UFSAL de Bruxelles et a suivi des études en histoire et en sciences de la communication et en audiovisuel à

l'Université Catholique de Louvain. Lorsqu'il étudiait à Louvain, il était militant du mouvement d'extrême droite, le Nationalistische Studentenvereniging (NSV, Union des Etudiants Nationalistes) et en 1986, il devint rédacteur en chef du magazine Branding de NSV. En avril 1991, il lança avec Filip Dewinter et Roeland van Walleghem la campagne du Vlaams Blok intitulée « Bruxelles aux Bruxellois ». D'après eux, le but de la campagne était « l'occasion pour la population de prendre publiquement la parole afin d'énoncer les problèmes auxquels elle est quotidiennement confrontée et pour lesquels les responsables publics ferment systématiquement les yeux. Nous pensons notamment aux problèmes de criminalité, aux problèmes de cohabitation avec les étrangers nord-africains, la drogue, l'insécurité, les réfugiés politiques, la formation de gangs,... »

En prenant connaissance du texte du tract qui a servi à la campagne, et dont l'éditeur responsable est van Hauthem, on se rend compte que derrière le slogan « Bruxelles aux Bruxellois » se cache en fait une campagne véritablement raciste : « Un récent rapport de gendarmerie démontre que les étrangers se rendent plus souvent coupables que notre propre population d'actes criminels... Bruxelles est devenue également la proie des trafiquants de drogue et des toxicomanes. Ici aussi, les statistiques démontrent que la majorité du trafic de drogue est aux mains des étrangers... Sur dix personnes, cinq ont des parents d'origine étrangère. Cela signifie, à court terme, la conquête démographique de Bruxelles par la culture islamique. Les Arabes usurpent de plus en plus de quartiers, dans lesquels ils prétendent jouer les chefs... Bruxelles doit rester une ville de cathédrales et non une ville de mosquées et de casbahs, même si Paula D'Hondt s'efforce d'obtenir des félicitations de la part des immigrés. Petit à petit, les jeunes familles quittent Bruxelles

parce qu'il devient de plus en plus difficile de trouver un logement à un prix abordable qui ne se trouve pas dans un ghetto nordafricain ». Lorsque les organisations catholiques Pax Christi, Chiro, VVKSM, Welzijnszorg, Broederlijk Delen et le MOC ont émis une opinion favorable en faveur du droit de vote pour les immigrés en 1991, Van Hauthem fut scandalisé. Il rédigea avec Roeland van Walleghem une lettre enflammée à l'attention des prêtres des paroisses de Bruxelles (voir dans la seconde partie le chapitre « L'église »). En 1988, Van Hauthem devint le secrétaire de Filip Dewinter et un an plus tard, il put devenir membre du Conseil siégeant dans la capitale. En tant que rédacteur en chef du mensuel du Vlaams Blok, Van Hauthem fait également partie de la direction du parti.

Frans Wymeersch (°13/09/1952), député, est le petit fils d'un échevin de Saint Nicolas, et a également trouvé ses racines politiques au VNJ jusqu'au 23 décembre 1986, date à laquelle il dut démissionner de l'organisation en raison de son âge, Wymeersch était le vice président du VNJ. En 1976, il fonda avec Wim Verreycken et Piet de Pauw l'organisation d'extrême droite « Republikeinse Beweging » (Mouvement Républicain) qui, en septembre 1977, devint le Vlaamse Republikeinse Partij. Par ailleurs il a fait partie de la Volksunie, du TAK et du Vlaams Nationale Partij et assista à la création du Vlaams Blok. Dans le Pays de Waas, Frans Wymeersch se déclare spécialiste de l'environnement. Le 19 juin 1992, lors d'une réunion du parti à Tamise, il expliqua sa propre vision du problème : « Ce ne sont pas les Verts qui détiennent la réponse exacte. Nous, le Blok, fûmes les premiers à aborder

le problème de l'environnement. Certainement pas ces saboteurs de Greenpeace, ou les rigolos qui collent des affiches sur les voitures mais qui utilisent une Volvo pour se rendre au Parlement. Nous savons de quoi nous parlons en matière d'écologie, nous connaissons la vie à sa base : nous allons discuter avec les fermiers, qui cotoyent la nature depuis cent ans. » A Saint Nicolas, là où les amis politiques du commerçant Frans Wymeersch terrorisent depuis des années les immigrés en tirant sur le centre pour immigrés, en saccageant régulièrement un café d'immigrés, en commettant une tentative de meurtre sur la personne d'un jeune Marocain, pour ne citer que quelques unes de leurs exactions, ce député a lancé une campagne de diffamation virulente contre les immigrés durant les dix dernières années. Grâce (?) à cette campagne, il a obtenu un siège au Conseil communal de Saint Nicolas

en 1988; toutefois la même stratégie ne lui a pas été favorable le 24 novembre puisqu'il a perdu et a été remplacé par Guido Vergult au Conseil communal.

Jan Cauberghs (°18/10/1930), député. Dans le milieu de l'extrême droite, on le surnomme de Leeuw van Beringen (le Lion de Beringen). A Hasselt, Cauberghs a récolté les fruits de tensions créées au sein du Vlaams Blok suite à la volonté du parti de renforcer sa position dans le Limbourg. En effet, depuis la percée aux élections parlementaires de 1988, le parti a récolté suffisamment de voix pour se créer une base plus sûre dans la région. Le groupe du Vlaams Blok qui, du reste, reçoit le soutien du Voorpost à Genk et à Hasselt, trouva un nouveau souffle. A Bree et à Heusden Zolder, de nouvelles sections se sont

implantées. Grâce aux campagnes de dénigrement contre les mosquées du Limbourg, aux affichages, aux soirées débats et aux caravanes publicitaires, le Blok est parvenu à progresser dans la région. Lors d'une conférence à Hasselt (le 16 octobre 1992), Cauberghs déclara que le parti y comptait 1 100 membres et sept sections cantonales. Pendant cette même conférence, on présenta également un « projet d'avenir pour le Limbourg » dont une des revendications est l'adaptation du Programme en 70 points à la situation des immigrés dans le Limbourg. Toutefois, ce ne sont pas les vieux ténors qui ont récolté les fruits de cette campagne mais bien le « transfuge » Jan Cauberghs qui, de 1982 à 1989, a siégé au Conseil communal de Beringen au nom de la Volksunie. Ce jardinier à la retraite fut, en 1954, un des cofondateurs de la Volksunie. Depuis 1990, il est le représentant d'arrondissement du Vlaams Blok.

Francis van den Eynde (°01/04/1946), député, ancien compagnon de route de Karel Dillen, et également ancien membre de la Volksunie. A 21 ans, il était déjà le président d'une section de la Volksunie à Bruxelles. En 1977, après la signature du Pacte d'Egmont, il quitta le parti. Depuis longtemps déjà, van den Eynde militait au sein de Were Di et de Dietsland Europa. En avril 1979, on le retrouve parmi les membres fondateurs de l'association Voorpost, la scission paramilitaire de Were Di. Peu après, il remplaça Roeland Raes à la direction de l'organisation. C'est à cette époque que van den Eynde a intensifié les contacts avec la section néerlandaise de Voorpost. La même année, il assista à la naissance du Vlaams Blok.

Avec Filip Dewinter, van den Eynde a fondé le comité Uilenspiegel, une filiale du Vlaams Blok chargée de protéger politiquement les personnes condamnées lors du procès du VMO. Bien que quatre néonazis seulement aient effectivement été condamnés à des peines d'emprisonnement (malgré leur dossier judiciaire faisant, par exemple, état d'actes répétés de brutalité, de vol, de tirs sur plusieurs personnes, de vols avec violence, etc.), les fondateurs de ce comité ont estimé que ces derniers étaient des « Martyrs flamands » : « Cette troisième répression, qui touche de plein fouet le mouvement national de droite, est une des nombreuses manifestations de la haine que l'Etat belge entretient à l'égard des Flamands. » Francis van den Eynde appartient au noyau raciste dur du Vlaams Blok. Depuis des années, il mène une campagne virulente à l'égard des immigrés à Gand, son bastion (politique) personnel, où il s'oppose

violemment à l'intégration des immigrés et leur attribue « les problèmes de tapage nocturne, le vandalisme, l'insécurité, la taudisation,... » Lorsqu'en mai 1992, le Centre d'Etude Historique du Racisme et du Fascisme organisa à Gand l'exposition antiraciste intitulée Eigen volk eerst mise sur pied par la Fondation Anne Frank, van den Eynde n'apprécia pas l'initiative. Il entama des démarches judiciaires afin d'empêcher l'exposition et envoya partout un communiqué de presse dans lequel il accusait la Fondation Anne Frank d'être une « association hollandaise d'extrême gauche ». A la même époque, Van den Eynde se heurta également à la BRTN. Le 26 mars 1992, le journal diffusa un reportage de Gui Polspoel qui montrait que Filip Dewinter et Francis van den Eynde étaient présents lors

de la fête d'anniversaire d'Agir, une organisation d'extrême droite en Wallonie. Dans ce reportage, on parlait également du groupe néonazi francophone Assaut, dont certains membres avaient brutalisé des participants à la manifestation « Hand in Hand » (Main dans la Main). Parmi les auteurs de ces brutalités, on pouvait reconnaître Philippe Snauwaert, dont le reportage de la BRTN affirma qu'il faisait partie du cercle gantois de Voorpost. Francis van den Eynde exigea un droit de réponse que la BRTN refusa. Il assigna la BRTN qui fut obligée de diffuser une version abrégée du droit de réponse. Le tribunal, ayant pris connaissance du reportage de la BRTN, n'y trouva aucune erreur. Francis van den Eynde et Roeland Raes entretiennent tous deux des contacts étroits avec la « Veuve Noire » néerlandaise, Florie Rost van Tonningen, la figure de proue du Consortium De Levensboom (qui se définit lui même comme un groupe de

pression national socialiste). Francis van den Eynde est également un hôte apprécié des réunions néonazies en Hollande, où il fut récemment le représentant du Vlaams Blok et de Voorpost. Voorpost est surtout connu en Hollande grâce à son « service de livres », un service de vente par correspondance qui propose aussi bien les publications de Karel Dillen et d'Arthur de Bruyne que les ouvrages de la Librairie Française (Evola, Duprat, Faurisson) ou encore les livres du criminel de guerre Robert Verbelen. Depuis les élections communales de 1988, van den Eynde siège comme chef de groupe Vlaams Blok au Conseil communal de Gand.

Wim Verreycken (°03/01/1943), sénateur. Depuis qu'il a pris la place de Karel Dillen au Sénat, il est l'homme qui

monte au sein du parti. Les cheveux presque blancs, la voix mélodieuse, il est le parfait démagogue qui, lors des Congrès du Vlaams Blok, dirige la chorale (Vlaamse Leeuw, Wilhelmus et Voix d'Afrique du Sud). Son influence ne se limite pas au noyau dur des fidèles du parti. Le 24 novembre 1991, il a obtenu à Anvers 10 440 voix de préférence (contre 1 063 en 1987). Seul Filip Dewinter, avec 11 840 voix de préférence, fit mieux. Ce succès personnel n'est pas dû au hasard. Verreycken détient un palmarès impressionnant. Au début des années soixante, il militait au sein du VMO et fut impliqué dans des émeutes violentes qui se sont déroulées à Ostende, ce qui l'a d'ailleurs amené devant le tribunal. En outre, Verreycken fit partie de la direction du Taal Aktie Komitee (TAK) et fut cofondateur du groupe Wim Maes, une filiale du VMO. Verreycken milita activement au sein du VNJ où il fut à la fois « Dienstleider Cultuur » (chef du service culturel),

dirigeant de la chorale et responsable pour la presse et pour la propagande. En 1977, il fit partie de la commission d'experts provisoire du Vlaams Nationale Partij (VNP), le prédécesseur du Vlaams Blok. De 1987 à 1989, il représenta le Vlaams Blok au Conseil régional de Borgerhout. De décembre 1987 à juin 1989, date à laquelle il succéda à Dillen au Sénat, Verreycken siéga au Conseil provincial d’Anvers. En tant que responsable de la société titulaire d'une licence d'émission, la « Nationalistische Omroep Stichting » (NOS, à ne pas confondre avec la chaîne de télévision hollandaise NOS), Verreycken siège également à la direction du parti. A ce titre, il fut responsable de la diffusion sur la BRTN, le 16 mars 1984, d'une émission produite par NOS et dont le caractère est particulièrement raciste, malgré le fait qu'elle ait été prélablement « épurée ». En diffusant cette émission, le parti a pris un virage définitivement raciste, confirmé lors

du sixième Congrès du parti, le 25 mars 1984. En lisant un article de Humo daté du 17 octobre 1991, on réalise que Verreycken et sa société de radiodiffusion ne sont pas très férus de déontologie journalistique. « Il fallait tourner un sujet autour des fêtes 40/60 du Roi. Il y a eu des interviews dans la rue, qui se déroulaient à la sortie de la Fête de la Chanson Nationale Flamande. La première question posée était : ‘Allez vous fêter le Roi cette année ?’ Malgré l'endroit choisi, les personnes interrogées (...) donnaient systématiquement une réponse modérée. Et évidemment, le Vlaams Blok ne se contente pas d'une réponse modérée. On a donc commencé la question en demandant : ‘Voulez vous collaborer au programme du Vlaams Blok ?’ et la majorité des gens répondaient aussitôt : ‘Non, non !’ (...) Que fit alors le réalisateur Wim Verreycken avec ce ‘Non, non !’? Et bien, au montage, il fit

suivre la question : ‘Allez vous fêter le Roi cette année ?’ par cette réponse là... » Apparemment, dans la famille Verreycken, le fruit ne tombe pas loin de l'arbre. Rob Verreycken, le fils du sénateur Wim Verreycken, membre du NSV et de la direction de la section du Blok à Borgerhout, maintient la tradition de son père. Le 26 octobre, Rob Verreycken attaqua le docteur Kris Merckx du PVDA alors que ce dernier distribuait le programme de son parti. Kris Merckx s'en sortit avec une lèvre fendue et dut être soigné à l'hôpital. Le 18 décembre 1991, l'hebdomadaire Solidair publia une photo de Verreycken présent lors de l'attaque de la manifestation contre l'apartheid qui s'est déroulée en mai 1988 à Borgerhout. Et le 19 décembre 1991, Rob Verreycken eut affaire à la justice pour affichage illégal et pour coups et blessures (bien que le Ministère public ait requis trois mois de prison ferme, il fut relâché pour ces

dernières accusations pour manque de preuve.) Le 3 octobre 1992, Rob Verreycken fut reconnu comme le dirigeant du commando NSV qui a attaqué la foire alternative du livre à Anvers au moment où allait se dérouler un débat sur l'extrême droite et le Vlaams Blok. Suite à ce raid, deux personnes ont dû être transportées à l'hôpital pour commotion cérébrale. Le même jour, le commando NSV fut mêlé à d'autres incidents. On put y remarquer la présence d'une auto dont la plaque d'immatriculation était P 144. Lorsque la presse se fit l'écho de l'attaque de la foire du livre, le porte-parole du Vlaams Blok, Niek Lootens, déclara que le parti n'était en aucun cas impliqué dans l'affaire et qu'il n'existait officiellement aucun lien entre le NSV et le VIaams Blok. Or, Rob Verreycken siège à la direction du

NSV à Anvers tandis que Dominiek Lootens siège à la direction du NSV à Bruxelles. Le 16 novembre 1992, on identifia Rob Verreycken parmi les personnes impliquées dans l'agression commise sur des colleurs d'affiches pour la manifestation multiculturelle « Antwerpen helemaal Anders » (Anvers totalement différente). Lors de cette attaque, un des colleurs d'affiches, Kris Berden, fut grièvement blessé. Souffrant d'une fracture du crâne, il fut transporté à l'hôpital et immédiatement opéré. Kris Berden a gardé des séquelles de cette blessure. Lors du procès pour coups et blessures sur la personne de Kris Merckx, le tribunal décida, à la demande du parquet (le 12 février 1993), de reporter le procès jusqu'en septembre et de réunir, entre temps, toutes les plaintes déposées dans lesquelles figure le nom de Verreycken.

Le 17 juin 1992, Wim Verreycken fut nommé par l'exécutif flamand membre du conseil d'administration de l'orchestre philharmonique de Flandre.

Roeland van Walleghem (°08/10/1949), sénateur, est marchand en produits laitiers à Bruxelles. Il est l'un des rares membres du Vlaams Blok dont la photo figurait sur le tract électoral du parti rédigé en français pour les élections du 24 novembre 1991. Roeland van Walleghem a un passé politique semblable à celui de Verreycken. A partir de 1966, il devint membre du VMO à Bruxelles. En 1968, il entra au comité de direction de la Volksunie de la section de Laeken et, à partir de 1972, il siégea au comité directeur de la Volksunie pour l'arrondissement bruxellois.

Le 12 septembre 1970, van Walleghem fut impliqué dans l'attaque d'une équipe de colleurs d'affiches du FDF, à Laeken, au cours de laquelle trois militants du FDF furent blessés tandis que le quatrième, Jacques Georgin, mourut avant qu'on ait pu le conduire à l'hôpital. D'après le sénateur FDF Emile Guillaume, témoin de cette attaque (qui, par ailleurs, pense qu'au départ, cette attaque était une tentative de meurtre contre sa personne, étant donné qu'il ressemble très fort à Jacques Georgin, mais que les membres du VMO se sont trompés de cible), les militants du FDF étaient en train de coller des affiches avenue Houba de Strooper. Vers une heure du matin, deux voitures s'arrêtèrent à hauteur de Jacques Georgin, l'isolant ainsi immédiatement du reste du groupe et le rouant de coups. Alors que Georgin était déjà étendu sur le sol, ses agresseurs le tabassèrent avec des pieds de table. En guise d'adieu, ils crièrent « De la part du VMO ». Georgin parvint à se traîner jusqu'au café le plus proche, demanda un

verre d'eau et succomba peu après d'un infarctus. La nuit même, les auteurs furent arrêtés. Parmi les neufs personnes composant le commando, se trouvait Roeland van Walleghem. Suite aux manoeuvres des avocats du VMO (dont Piet de Pauw du TAK) pour ralentir l'enquête, qui ont demandé que l'on fasse des recherches sur les « causes réelles » de la mort de Georgin, il fallut attendre le mois de mars 1978 pour que la Cour d'Appel de Bruxelles puisse prendre l'affaire en main. Les neufs furent condamnés pour meurtre sans préméditation à des peines d'emprisonnement allant de trois mois à un an avec sursis et à une amende de deux millions, à verser en guise de dommages et intérêts à la veuve et aux enfants de Georgin. Pour sa part, van Walleghem écopa de quatre mois de prison avec sursis (dont trois mois déjà purgés en préventive).

Le fromager van Walleghem continua à faire son fromage pendant quelques temps encore. Il passa de la Volksunie au Vlaams Blok et devint président du Vlaams Blok pour l'arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde. Ces dernières années, il participa aux élections, mais chaque fois sans succès, En 1988, il n'obtint pas suffisamment de voix pour être élu au Conseil communal de Molenbeek. Le palmarès étoffé de ce défenseur de la cause flamande ne l'empêche pas de se présenter comme le champion de la sécurité du citoyen. Aux élections européennes de 1989, il se présenta même sous le slogan « Stem 5 stem veilig » (Votez 5, votez sécurité). En mars 1991, il faxa à toute une série de personnes plusieurs propositions visant au renforcement de la sécurité dans les chemins de fer et les stations de métro

bruxellois. On peut les résumer par : plus d'effectifs policiers au chemin de fer, plus de patrouilles, plus d'armes, la fermeture des entrées et des sorties inutiles et enfin : « La vermine et les fainéants qui déambulent sans raison toute la journée et toute la soirée dans les bâtiments de la gare du nord, doivent être expulsés. » Roeland van Walleghem est également président de l'association Stichting Steun aan Vrienden (SSAV) (Fondation pour l'Aide aux Amis) créée en 1986, une organisation de bienfaisance du Vlaams Blok. Sous prétexte d'aide aux déshérités, l'association essaye d'obtenir des subsides de la part des autorités pour des projets qui ne fournissent explicitement aucune aide aux immigrés. Un de ces projets porte à juste titre le nom de « Eigen volk eerst ».

Roeland Raes (°04/09/1934), sénateur, est l'une des figures de proue de l'extrême droite en Flandre. Raes est fondé de pouvoir à la « Noord star en Boerhaave », une compagnie d'assurances qui, dans les années trente, sponsorisait le Verdinaso et qui, après la Deuxième Guerre mondiale, n'hésitait pas à soutenir des initiatives prises par l'extrême droite. Ces dix dernières années, Raes se révéla être l'idéologue du néonazisme en Flandre. En 1955, Roeland Raes devint membre de la Volksunie. Un an plus tard, il assista à la naissance du mouvement Volksunie studenten (les étudiants, Volksunie), une organisation dont il fut le premier président. De 1970 à 1977, Raes fut le président de la section gantoise de la Volksunie et viceprésident de Were Di (dont le président était Dillen). A cette époque,

Raes et Dillen menaient un combat d'arrière garde pour contrecarrer la progression de personnalités démocratiques au sein de la Volksunie comme André de Beul, Nelly Maes, Hugo Schiltz et Maurits Coppieters. A ce moment là déjà, Raes lançait un avertissement contre « les gens de couleur qui nous envahissent » (1968). Raes veilla également à ce que l'auteur raciste français Alain de Benoist devienne la source d'inspiration de Were Di et du magazine Dietsland Europa. De Benoist est le promoteur des théories pseudo scientifiques du réalisme biologique, de l'eugénisme et de la pureté de la race. Lorsqu'il énonce ses positions néonazies, Raes aime faire étalage d'auteurs français obscurs. C'est ainsi qu'en 1979, il publia dans HARO, le journal de Xavier Buisseret, une importante notice élogieuse concernant le travail d'un théoricien du racisme français, René Binet. Il en profita pour conseiller aux lecteurs de HARO de lire la bible du racisme

rédigée par Binet, Contribution à une éthique raciste. Plus récemment, en octobre 1989, Raes publia dans Dietsland Europa un article flatteur Een steen in de kikkerpoel (Une pierre dans la mare aux grenouilles) sur Robert Faurisson, l'éminence grise des négationnistes français, tristement célèbre pour avoir nié l'existence des chambres à gaz durant la Seconde Guerre mondiale. Dans le même article, Raes ne tarit pas d'éloges pour le magazine Annales d'histoire révisionniste, une publication qui nie l'holocauste. Il ne faut donc pas s'étonner que, début février 1993, le Vlaams Blok ait annoncé que Roeland Raes et Filip Dewinter porteraient plainte contre le sénateur SP Fred Erdman, l'éditeur responsable de la brochure Wereld van Anne Frank een dagboek voor de toekomst (Le Monde d'Anne Frank - un journal pour l'avenir). Cette brochure est gracieusement offerte à tous les visiteurs de l'exposition Anne Frank.

En 1971, Roeland Raes devint viceprésident de la Nederlandse Volksunie (NVU, Volksunie Hollande), fondée par Joop Glimmerveen. Depuis, Raes est un hôte que l'on accueille volontiers lors des réunions néonazies en Hollande. En 1976, sous l'impulsion de Luc Vermeulen, le groupe d'action Voorpost fut créé. Roeland Raes est membre de la direction du groupe. Au début, il en fut le président. Raes demeure très actif au sein de Voorpost. Sous la direction du duo Raes Van den Eynde, l'organisation se transforma rapidement en un groupe néonazi radical qui, très vite, acquit une réputation de mouvement violent, vraisemblablement à cause de son comportement paramilitaire dans les Fourons et à Comines, de son intervention mouvementée aux réunions du Conseil communal de Kraainem et de Linkebeek, des manifestations à Anvers contre les immigrés et pour l'apartheid en

Afrique du Sud, pour l'amnistie, en 1980, lors de la visite officielle du Roi Baudouin à Anvers et des « cérémonies commémoratives » houleuses en l'honneur des SS à Lommel et à Stekene. Pour la plupart de ces actions, le Voorpost put compter sur la participation active de personnalités du Vlaams Blok comme Veerle Dillen, Gerolf Annemans et l'incontournable Filip Dewinter. Le Voorpost organise également des camps d'entraînement paramilitaires dans les Ardennes et à Wittgenstein, en Allemagne (avec les junge Nationaldemokraten, la section jeunes du NPD néonazi). Au Voorpost, on soigne la condition physique des militants en les soumettant à un entraînement régulier. D'ailleurs, depuis octobre 1985, le Voorpost dispose de sa propre « Vlaamsnationale Sportschool » (Ecole Nationale Flamande de sports). Les militants de Voorpost s'exercent chaque semaine aux sports de combat dans la la

salle de gymnastique d'une école catholique, avenue Sint Amelberga, à Tamise. En novembre 1977, Roeland Raes particpe déjà au Vlaamse Volkspartij mis en chantier par Lode Claes. Lorsqu'en mai 1979, on fonde le Vlaams Blok qui est une fusion du VVP et de VNP, Dillen en devient le président tandis que Roeland Raes est vice-président. Malgré ses nombreuses activités, Roeland Raes trouve le temps de rassembler des abonnés et des fonds pour le magazine De Schakel. Cette publication bimensuelle fut lancée en 1954 par des Flamands et des criminels de guerre qui n'ont pas voulu attendre le prononcé de leur peine et qui se sont réfugiés en Argentine. Ajoutons que Raes entretient des contacts à l'étranger avec des organisations

ouvertement néonazies ou néofascistes comme le Centrumdemocraten, le Centrumpartij, le Consortium de Levensboom, le Voorpost et le Vikingjeugd, en Hollande, le MSI en Italie, le Front National en France, le NPD et le DVU Liste D en Allemagne.

Roger Bosman (°18/11/1928), est sénateur et fervent admirateur du père Brauns et de Wies Moens. Bosman, médecin radiologue à la retraite, exerçait à l'hôpital Saint Joseph de Malines. Membre du Vlaams Blok depuis 1982, il est devenu le trésorier à la direction d'arrondissement et siège depuis 1989 au CPAS de Malines. Roger Bosman est connu comme un ardent défenseur de l'apartheid en Afrique du Sud et comme un opposant farouche à la légalisation de l'avortement. Il est, avec Guido Thijs, un des organisateurs

des réunions pro-apartheid dont le thème est « Ons vir jou Suid Afrika ». Depuis qu'il a été élu sénateur, Bosman s'est mis en tête de rechercher les personnes qui ont été contaminées par le virus du SIDA. Bosman voudrait qu'on oblige les séropositifs à se présenter et que l'on instaure un système d'attestation médicale obligatoire lors d'une embauche et pour l'obtention des allocations de chômage et des allocations sociales. En outre, Bosman est un ardent défenseur d'une Flandre indépendante sans immigrés. Dans l'hebdomadaire Vrij Nederland (16/11/91), il formula ce voeu par ces mots : « Nous avons un programme très cohérent. Tout est placé sous le signe de la sécurité de notre population. Nous avons combattu longtemps les francophones en Flandre. Aujourd'hui, la rue est l'objet de luttes pour la domination. C'est une question

d'autodéfense, de sécurité pour notre propre population et de maintien de son identité... Evidemment, il n'est pas question de comparer les cultures. Mais les Wallons parlent une autre langue et ont une mentalité différente. Ils sont moins honnêtes lorsqu'il s'agit d'appliquer la loi. Il existe une mentalité de profiteurs en Wallonie, en comparaison avec l'honnêteté naturelle du Flamand. »

Walter Peeters (°05/05/1925), sénateur, est domicilié à Schoten. Depuis le « temps des catacombes », il est actif au sein de l'aile droite du Mouvement Flamand. A partir de 1948, il milita aux côtés de Karel Dillen dans la Vlaamse Concentratie. Plus tard, il devint membre de la Volksunie, un parti dans lequel il siégea au Conseil pendant huit ans.

Au moment du procès du VMO, Peeters était administrateur du StrackeNoodfonds. Cette organisation veilla à ce que le VMO reçoive suffisamment de subsides afin de pourvoir aux besoins des nombreuses personnes condamnées pour divers actes de violence et pour formation de milice privée (la présidente de ce fonds est l'épouse de Karel Dillen et le siège de l'organisaion est situé à l'adresse privée du couple Dillen). Walter Peeters est membre de la direction du Vlaams Blok en tant que conseiller financier. Il siège également à la direction du Vlaams Nationale Debatclub. Cette association, succursale du Vlaams Blok, fut fondée en 1980 et s'inspire des idées de Were Di.

Isidoor Buelens (°08/03/1936), sénateur, milite au sein du Mouvement Flamand depuis les années soixante. Il était membre du Katholieke Arbeidersjeugd (jeunesse Ouvrière Catholique). En 1965, il devint membre de la section bruxelloise de la Volksunie, un parti dont il aida à développer les sections de Jette, Molenbeek et Dilbeek. En tant que détaché d'arrondissement pour la Volksunie, il s'appuyait sur l'extrême droite du parti qui était équipée par le VMO. En outre, Buelens était membre du TAK. Isidoor Buelens est un opposant farouche à la légalisation.de l'avortement. Lorsqu'au milieu des années septante, la Volksunie prit une position favorable à l'avortement, il quitta le parti. En février 1992, Buelens lança une campagne contre une conférence de l'écrivain Tom Lanoye. Ce qui le gênait par dessus tout, c'est que

Lanoye soit un homosexuel qui « ridiculise la foi » (voir, dans la seconde partie, le chapitre « culture »). En tant que membre du Vlaamse Volksbeweging (Mouvement Populaire Flamand), il s'opposa également à la signature du Pacte d'Egmont et par conséquent, en 1979, il intégra le Vlaams Blok. Buelens qui a entre temps déménagé à Edegem est représentant commercial en technique de réfrigération et président provincial du Vlaams Blok à Anvers.

Les personnages secondaires Paul Beheyt (°25/01/1963), est président du groupe Vlaams Blok au Conseil provincial de Flandre Orientale. Beheyt est originaire d'une famille nationaliste flamande. Dans sa jeunesse, il a fait partie d'un groupe d'action local qui est un des prédécesseurs du NJSV. Lorsque Beheyt étudiait le droit, il militait au NSV dirigé par Filip Dewinter. Beheyt est un partisan farouche de l'apartheid en Afrique du Sud : il est membre du conseil de direction des Amis de l'Afrique du Sud et fut en outre président de l'union des étudiants Protea. Il a également rédigé des articles pour le magazine proapartheid Zuid Afrika Magazine. Durant l'été 1992, il a organisé une « expédition » en

Afrique du Sud, dont il a fait la promotion dans le journal du parti. Depuis début 1990, Beheyt est rédacteur en chef du magazine bimensuel VBJ Nieuwsbrief, des Vlaams Blok Jongeren. Il est en outre membre du conseil de Voorpost et publie de temps en temps un article dans Revolte. Beheyt fut chargé par le Conseil provincial de Flandre Orientale de le représenter du Vlaamse Vereniging van Provincies (Union Flamande des Provinces).

Annelies de Boeck Van Boxem (°19/10/1963), habite à Borsbeek et siège au Conseil provincial d'Anvers. Ses aspirations nationalistes flamandes proviennent de l'époque où elle faisait partie du VNJ. En 1982, elle adhéra au Vlaams Blok et à la fin

des années 80, son domicile privé devint l'adresse de contact du parti à Nieuw Borgerhout

Steven Bosselaers (°03/08/1968) est membre du Conseil provincial d'Anvers. Bosselaers a étudié à l'Institut Supérieur du Travail Culturel et Social à Bruxelles. Il est ainsi devenu assistant social. Bien qu'il provienne d'une famille nationaliste flamande, il n'est devenu membre du Vlaams Blok qu'en 1987. Avant, il militait au Vlaamse Volksbeweging, au TAK et à Pro Vita, et il était moniteur dans les camps d'été du VNJ. Hendrik Broeckx (°19/09/1948), habite Wuustwezel et est directeur d'entreprise. Broeckx siège au Conseil provincial d'Anvers. Il milite au sein du Mouvement Flamand depuis 1968. Depuis 1982, il est membre du comité directeur du

Vlaams Blok. Il est président de la section du parti en Campine du Nord. Broeckx est membre du service d'études du Vlaams Blok, responsable du thème de l'Europe. Début 1993, Broeckx est devenu l'éditeur responsable du nouveau magazine bimensuel Barrikade, une publication qui, depuis janvier 1993, est envoyée gratuitement à tous les membres du Vlaams Blok de l'arrondissement d'Anvers.

Geert Brouwers (°01/06/1956), est un membre du Vlaams Blok de la première heure. Il est le président de la section de Wilrijk et siège au Conseil provincial d'Anvers. Brouwers a étudié l'économie à l'UFSIA où il militait aussi activement au sein du NSV. Il lança une action pour défendre l'apartheid en Afrique du Sud et rédigea quelques articles pour le magazine

Zuid Afrika Magazine. En 1985, il publia une lettre ouverte qui s'adressait au Consul des Républiques soviétiques dans laquelle il ridiculisait totalement les négociations en matière de désarmement entre l'Est et l'Ouest. Geert Brouwers est également un partisan ardent des nationalistes croates. Il proposa au Conseil communal d'Anvers de verser à la Croatie une partie des subsides que la ville accorde habituellement à l'aide au développement. Brouwers est l'époux d'Anneke Luyckx, qui siège au Conseil provincial d'Anvers.

Agnès Beuten Buisseret (°29/03/1944), fut, avec son époux Xavier Buisseret, l'un des premiers membres du Vlaams Blok. Elle siège au Conseil communal d'Edegem, où elle traite en

particulier des sujets comme l'avortement, la drogue, la criminalité et la femme au foyer.

Johan van Brusselen (°02/01/1957), est un ancien du VMO qui siège depuis 1988 au Conseil communal d'Anvers pour le Vlaams Blok. Au début des années 80, il fit partie des accusés au procès du VMO. Après la publication de la version néerlandaise de ce livre, la direction du Vlaams Blok a fermement démenti ce fait. Pourtant, si l'on prend connaissance du jugement prononcé, on apprend que Johan van Brusselen fut le 74e inculpé à comparaître lors du procès du VMO. Il est membre du parti depuis qu'il a été créé. Dans son programme électoral personnel, il s'attaque aux syndicats et aux immigrés. Depuis le début de 1992, il est responsable du secrétariat provincial du Vlaams Blok.

Tony de Cabooter (°04/08/1962), fait partie du Vlaams Blok depuis 1990 seulement, mais fut néanmoins élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial de Flandre Occidentale. De Cabooter est plombier et amateur de chevaux. Il habite dans une caravane à Ingooigem ou chez ses parents à Vichte. Depuis qu'il a été élu au Conseil provincial, son nom figure en tant qu’éditeur responsable sur les affiches de Pro Vita.

Lut Cateau (°30/03/1960) est membre du parti depuis sa création. Elle fait partie de la direction du parti à Grobbendonk et siège au Conseil provincial d'Anvers. Originaire de Gand, Cateau fut active au sein du Mouvement Flamand et milita à Voorpost. Après la signature du Pacte d'Egmont, elle quitta la Volksunie,

entra au Vlaamse Volkspartij et ensuite au Vlaams Blok. Ses thèmes de prédilection sont l'indépendance de la Flandre, l'amnistie, l'avortement, la famille et la sécurité. Elle qualifie les projets multiculturels de « onzinprojecten » (projets absurdes).

Gunter Cauwenberghs (°10/12/1960) fut élu à Malines pour siéger au Conseil provincial anversois. Cauwenberghs est issu d'une famille « Dinaso ». Dans sa jeunesse, il fut membre de l'union scoute Delta et devint ensuite membre du Vlaams Blok après être passé par le VVP de Lode Claes.

Jürgen Ceder : est le premier suppléant de Jef Elbers, et représente le Vlaams Blok au conseil d'administration de la BRTN. Le 13 mai 1992, le Conseil Flamand le désigna pour remplir les mêmes fonctions dans le Vaste Nationale Cultuurpactcommissie. Depuis le début 1992, Ceder dirige une « cellule média » qui, au secrétariat national situé à Bruxelles, surveille de près les médias hostiles au Vlaams Blok et essaye de mettre au point une riposte. Aux élections du 24 novembre 1991, Jürgen Ceder était tête de liste pour la Chambre à Alost. Vers le milieu des années quatre vingt, Ceder étudia à Louvain et devint président du NSV. C'est sous sa houlette que le 7 mars 1984, l'organisation occupa de force les locaux du centre des étudiants (Stuc). L'hebdomadaire De Nieuwe relata le témoignage de Bart Germeys : « Au premier étage, on avait accroché un drapeau du NSV

et une banderole sur laquelle on avait inscrit : ‘Mai '68, c'est du passé’. Vers quatre heures et demie, une quarantaine de membres du NSV sortirent en courant par une issue située sur le côté du bâtiment. Ils chargèrent à l'avant du Stuc avec des barres de fer et des bâtons en bois munis de pointes d'acier. Lorsqu'ils commencèrent à tabasser une jeune fille qui n'avait pas réussi à s'enfuir (assez vite), je tentai de m'interposer. Quelqu'un marcha vers moi. Comme j'avais moi-même suivi quelques cours de karaté, je savais ce qui allait se passer. C'est un des premiers coups que l'on apprend pour estropier quelqu'un à vie. Son but était de broyer ma rotule. Dans un réflexe, j'ai écarté la jambe et le coup me fut porté au tibia. » « Actuellement, Bart est à l'hôpital et souffre d'une fracture complexe », dit ensuite De Nieuwe, « D'après certains témoins qui ont immédiatement porté plainte, l'auteur est Jürgen Céder, le

président du NSV. » S'en suivit effectivement un procès. Céder fut acquitté par manque de preuves...

Fredien de Coen (alias Freddy). Dans les années 80, il avait la réputation dans le Pays de Waas d'être un jeune homme sympa. Il fut le gérant du café « De Panda » sur la Grand place de Saint Nicolas. Il était également fantaisiste et chantait sous le pseudonyme de Fred Stewart. Il faisait partie de l'orchestre De Jumpers. En octobre 1988, il a figuré en cinquième place sur la liste du Vlaams Blok pour les élections communales. Apparemment, de Coen a sa propre interprétation du slogan du Vlaams Blok « Eigen volk eerst ». En octobre 1992, la police a arrêté trois dangereux proxénètes. Il

s'agissait selon toute vraisemblance de la branche belge de la « bande des milliardaires » hollandais. La bande des milliardaires contrôle un des plus grands réseaux de traite de femmes en Europe. Une des trois personnes arrêtées est Freddy de Coen. Il serait la figure clé de l'organisation qui recrute des filles polonaises, hongroises et philippines en promettant de leur trouver du travail comme serveuse ou danseuse en Belgique. A Gand, Freddy de Coen a géré l'agence artistique illégale « International Artist Agency » et à Tamise et à Grembergen il a exploité « Chanel I » et « Chanel II », deux des plus tristement célèbres sexclubs de Belgique. Enfin, de Coen a également été soupçonné d'être impliqué dans la fabrication de fausses cartes d'identité, dans le trafic de drogue et dans un réseau qui organisait des mariages blancs.

A l'annonce de l'arrestation de de Coen, la direction du Vlaams Blok fit savoir que le parti n'avait rien à voir avec cet homme qui avait quitté le Vlaams Blok depuis quelques années. Le 11 février 1993, la Chambre des mises en accusations d'Anvers prononça sa liberté conditionnelle.

Pascal de Coene (°02/02/1960), est fonctionnaire provincial et siège au Conseil communal de Gand. Il est entré au Vlaams Blok via le VVP de Lode Claes.

André Coleman (°11/12/1964), siège au Conseil provincial de Flandre Orientale. Coleman a étudié le TEW à l'Université Catholique de Louvain, est président de la section du Vlaams Blok à Wetteren et secrétaire à la direction de l'arrondissement de Termonde.

Hélène Colombie Wenmeekers (°19/08/1929), est chef du groupe Vlaams Blok au Conseil provincial du Limbourg. Parisienne d'origine, elle fut pendant vingt ans membre de la Volksunie et a participé à de nombreuses initiatives de l'extrême droite dans le Limbourg. Elle a assisté à la création de la section limbourgeoise de Were Di, apporté son aide pour l'organisation de camps pour les jeunes issus de ces « régions du combat flamand » (les Fourons et Bruxelles), et collaboré au Dietsland Europa. Elle s'affilia au Vriendenkring Limburg Voerstreek Overmaas. Elle fait également partie de la section de Genk du Willems fonds.

Willy Corten (°27/01/1943), est le « syndicaliste de service » du Vlaams Blok. Corten habite Brasschaat. Il est réparateur de bateaux à l'entreprise Beliard à Anvers, et

est détaché au syndicat libéral ACLVB. Lors de l'occupation de l'entreprise en 1989, Corten s'arrangea pour qu'une délégation du Vlaams Blok conduite par Filip Dewinter et Wim Verreycken soit autorisée à pénétrer dans l'entreprise, à remette un chèque de 20 000 francs en guise de soutien aux grévistes et puisse tenir un discours dans le réfectoire (le chèque ne fut jamais encaissé par les grévistes). Tous ses collègues de travail reçurent personnellement une lettre, signée par Filip Dewinter et lui même, qui faisait référence à la contribution financière du Vlaams Blok et qui les exhortait à voter pour le Vlaams Blok. Depuis lors, Willy Corten est présenté lors de meetings et dans les publications du parti comme la conscience syndicale du parti. Aux élections parlementaires du 24 novembre 1991, il

figura à la 19e place sur la liste provinciale (aux élections communales de 1988, il figurait en quatrième position à Brasschaat). Corten est un ancien du VMO avec à son actif des états de service « musclés ». C'est ainsi, par exemple, qu'il a participé à des entraînements en arme dans des camps organisés par le groupe illégal Wehrsportgruppe Hoffmann dans la région de Nuremberg, en Allemagne. Au début des années quatre-vingt, il faisait partie des inculpés du fameux procès du VMO pour avoir été membre d'une milice privée et pour avoir participé à des actions violentes menées par le VMO à Thimister, Schilde, Mortsel et Anvers. Il fut condamné à cinq ans de prison avec sursis. En novembre 1988, Hugo Camps publia dans l'hebdomadaire hollandais Elsevier un entretien qu'il avait eu avec Willy Corten dans le café « ODAL » de Bert

Eriksson : « Les Hollandais (...) sont tous des trafiquants de drogue et des pédophiles », lança Willy Corten, un réparateur de bateau d'une quarantaine d'années, vêtu d'une tenue de parachutiste. « D'abord, il faut les castrer et ensuite ils pourront revenir », ajouta une amie. Encore une petite tournée. Zum Wohl, Zum Wohl. « Vous savez ce qui ne va pas », dit Corten, un ton plus bas mais le regard toujours perçant, « vous écrivez que je suis un fasciste mais je ne le suis pas. J'ai obtenu 74 voix de préférence sur la liste du Vlaams Blok à Brasschaat. Vous croyez sans doute que ce sont des fascistes qui ont voté ? C'étaient des jeunes qui cherchaient depuis longtemps quelqu'un qui oserait dire ce qu'ils pensent. J'ose dire que tous ces Mustaphas doivent quitter le pays. Ils viennent ici en rampant, travaillent pour cent vingt francs de l'heure. Nos travailleurs n'acceptent plus ça. je suis pour une jeunesse belle et donc contre les skinheads qui ne savent pas ce que c'est que travailler. Je peux vous le dire, si j'en rencontre un qui me

marche sur les pieds, je lui casse la figure. Avec grand plaisir. »

Luc Dieudonné (°25/07/1955), est la figure de proue de KOSMOS, le service de renseignements du Vlaams Blok. KOSMOS rassemble toutes ses informations via deux boîtes postales : une à Deurne et l'autre à Borgerhout. La première est au nom du Voorpost, la seconde au nom de Luc Dieudonné. Ce chauffeur de taxi originaire d'Anvers présente des états de service bien remplis. Dieudonné était membre du VMO, du Front pour l'Apartheid, du Comité ter Bescherming van Mensenrechten en Maatschappelijke Belangen (Comité pour la Protection des Droits de l'Homme et des Intérêts Sociaux) et de la Fondation Aldegonde (probablement appelée ainsi à cause de l'immeuble située au 58, quai Sint

Aldegonde, à Anvers. Cette maison appartient à la famille d'extrême droite Verbeke et était récemment encore l'adresse de contact de nombreuses organisations d'extrême droite et néonazies). Pendant un bref laps de temps, la Fondation Aldegonde créée par Dieudonné fut le prédécesseur de KOSMOS. En tant que membre du VMO, il participa le 2 février 1980 à l'attentat contre la librairie progressiste « De Rode Mol », située à Malines. Dieudonné est égaiement membre du Vlaams Blok Il travaille depuis 1985 au service d'études du parti et rédigea, pour la formation des cadres, le sujet « la gauche en Flandre ».

Koen Dillen (°06/11/1964), suit les traces politiques de son père (Karel). Au début des années 80, Koen Dillen s'affilia au NSV et collabora au journal de l'organisation, Signaal. Dans un article écrit en 1982, il qualifie Adolf Eichman et Herman Göring d'idéalistes. Depuis le début de 1992, il collabore régulièrement au journal du Vlaams Blok.

Veerle Dillen (°10/10/1963), est la fille de Karel Dillen. Auparavant, elle a fait partie du VNP et s'engagea en même temps que le reste de la famille dans le Vlaams Blok. Au milieu des années 80, elle était éditeur responsable de De Vlaams Nationalist, un mensuel de la section anversoise du Vlaams Blok. Début 1992, Veerle Dillen succéda à Xavier Buisseret à la direction du secrétariat du parti à Anvers.

Guido Eggermont (°01/03/1954), siège depuis 1987 au Conseil provincial d'Anvers. C'est une figure connue de l'extrême droite anversoise. Il était membre du VMO au moment où l'organisation était dirigée par Wim Maes et adhéra ensuite à la Volksunie. En 1982, Eggermont devint membre du Vlaams Blok. En 1987, il fut l'un des cofondateurs et secrétaire du Vlaamse Werkgroep Anti Legalisatie Abortus (VLAWALA, Groupe de Travail Flamand contre la Légalisation de l'Avortement). Eggermont est également secrétaire d'arrondissement du parti. De temps à autre, Eggermont publie des articles dans Alarm, l'ancien magazine du VMO qui, depuis la disparition de l'organisation, mène sa propre existence sous la direction de Jef Eggermont (aucun lien de parenté!). Depuis janvier 1993, il collabore au magazine Barrikade, un bimensuel à l'intention des membres du Vlaams Blok dans l'arrondissement d'Anvers.

Stefaan Eilers (°30/07/1964), fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial d'Anvers. Eilers était moniteur au VNJ et fut également l'un des co fondateurs de la section du VNJ à Malle.

Jef Elbers (°1948) fut chargé, début 1992, de représenter le Vlaams Blok au Conseil d'administration de la BRTN. Le 19 mars 1992, le Conseil Flamand confirma sa nomination. Elbers est un représentant (typique) de la culture nationaliste flamande ainsi qu'on la pratique au sein du Vlaams Blok. Bien qu'il soit lui même à moitié immigré de la deuxième génération (sa mère est ukrainienne), il ne rate pas une occasion d'étaler sa pureté de race flamande.

Depuis 1972, Elbers collabore sous le pseudonyme de Dick Durver (en tant que scénariste) à la programmation audiovisuelle de la BRT : 't Lieg Plafond et aux programmes pour la jeunesse Merlina, Mik, Mak, Mon et Postbus X. Depuis le début des années septante, il a fait plusieurs disques composés de chansons traitant de la Flandre, de la cause flamande et du militant flamand (pour plus de détails, voir infra). Ce sont là des produits culturels qu'il aime présenter lors de soirées « de combat » du Voorpost, du VMO, de TAK et du Vlaams Blok. Jef Elbers a figuré sur la liste électorale du parti à Bruxelles. Sa participation aux élections communales de 1988 a causé pas mal de remous. Le jour suivant les élections communales, Gui Polspoel lut lors du programme télévisé « Confrontatie » un tract que Jef Elbers aurait distribué à Schaerbeek. Dans cet article singulier, on compare Schaerbeek à Casablanca et on décrit en toute subtilité les

immigrés comme des « Bougnouls, des conducteurs de chameaux, des Tchouk tchouks, des Bachi Bouzouks et des Macaques ». Le pamphlet mentionnait les noms de Jef et Wim Elbers. Wim, le frère de Jef, fonctionnaire au Comité Supérieur de Contrôle, est également membre du Vlaams Blok. La lecture de ce tract provoqua pas mal de remous au sein de la direction du Vlaams Blok. Lors d'un débat télévisé, Gerolf Annemans tenta de nier que cette prose avait été rédigée et diffusée par le Vlaams Blok ou l'un de ses candidats aux élections. Or, un témoin déclara avoir vu Elbers distribuer le tract dans un café. Le Vlaams Blok changea de tactique : s'il s'avérait que Jef et Wim Elbers étaient bel et bien les auteurs de ce texte raciste, alors le parti leur retirerait leur carte de membre. Rien de la sorte ne se produisit. Finalement, Annemans jugea que l'affaire n'était qu'une tempête dans un verre d'eau.

Dans les années septante, Elbers était membre du VMO, une étape qui n'était pas sans influencer sa production artistique. C'est ainsi qu'en 1983, il composa un disque intitulé In 't Midden van 't Gewoel dont l'une des chansons parlait du procès du VMO ... même si tu as peur tu recevras quand même des coups sur la figure jette toi donc sans crainte au milieu de la tourmente si tu dois en venir aux mains veille à frapper le premier si tu ne sais pas très bien boxer alors frappe de toutes tes forces. Mais pense que personne, non personne ne peut te forcer à être quelqu'un d'autre que toi si tu ne veux pas tu es un homme. En tant qu'homme un dieu qui a raison un maître de l'Univers.

Bien entendu, Alarm, le magazine du VMO, a présenté ce disque de lutte comme un « must pour chaque militant du VMO ». Elbers est également un « poète occasionnel ». Pour preuve, « l'Ode à Bert Eriksson », écrite à l'occasion du 52ème anniversaire du führer du VMO Eriksson, un homme du Nord purificateur naturel, voilà ce qu'il est dont on a essayé de briser la pensée parce qu'Eriksson a voulu combattre avec le VMO pour la conservation de la race pour ces domestiques flamands apprivoisés comme si c'était une honte... Nous avons déjà parlé de la manière dont Elbers considérait les féministes dans le chapitre « Les femmes » (seconde partie). Bien entendu, il a également des opinions

politiques. Elbers déclare dans De Zwijger (le taciturne) du 12 janvier 1983 : « Qu'estce que la gauche et qu'est ce que la droite ? Je suis un nationaliste flamand. La gauche et la droite, c'est la position de mon pénis par rapport à mes testicules. Mon pénis est au milieu et le reste, ce ne sont que ... euh ... des notions. je ne me laisse pas coller d'étiquette. »

Bert Eriksson (°30/06/1931), n'est peut être pas le membre le plus important du Vlaams Blok mais sans doute le plus célèbre. Bert Eriksson, qui se prénomme en réalité Armand, est le fils d'un marin finnois qui est mort en 1942 au cours d'une attaque aérienne des alliés à Bremen. En 1943, il s'affilia à la Hitler Jugend (la jeunesse hitlérienne), une organisation qui marquera à jamais la vie politique d'Eriksson. « Je ne

remercierai jamais assez Dieu d'avoir eu la chance de devenir membre de la Hitler Jugend, un mouvement de jeunes dont on parlera encore pendant mille ans », déclara Eriksson le 4 juin 1986 dans l'hebdomadaire Panorama, « je suis incapable d'expliquer mon admiration pour Hitler. Cet homme m'enthousiasme, aujourd'hui encore, quarante ans après sa disparition... »

Joris Feremans (°20/11/1936), originaire de Deurne, siège pour le Vlaams Blok au Conseil communal d'Anvers. Avant qu'il ne s'affilie en 1978 au Vlaams Blok, Feremans militait au Vlaamse Volksbeweging, à la Volksunie et au Dietse Blauwvoetvendel. Lorsqu'en 1989, le Vlaams Blok fut impliqué dans différentes agressions sur des militants anti-apartheid qui menaient une action autour de certains supermarchés, Jos Wijninckx (chef de groupe SP au Conseil communal d'Anvers)

déclara que Joris Feremans était également impliqué.

Marcel Feyens (°06/11/1934), technicien, habite à Anvers dans le quartier du Stuyvenberg. Le 24 novembre 1991, il a été élu au Conseil provincial d'Anvers. Auparavant, il était dirigeant du groupe Vlaams Blok au Conseil régional dAnvers.

Etienne van Ginderdeuren, habite à Liedekerke et fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial du Brabant. Dans le magazine du Vlaams Blok Bloknoot de janvier 1992 (une publication de la section de Hal), on peut lire ceci à son propos : « Etienne van Ginderdeuren, que l'on surnomme (familièrement) dans le Pajotteland ‘de Broeder’, est depuis sa plus

tendre jeunesse militant au sein du Mouvement Flamand. D'abord aux Chiros (patros) très flamands de Liedekerke, ensuite au Vlaamse Volksbeweging dirigé alors par Paul Daels et enfin au VMO. Il a suivi une formation théâtrale. Lorsqu'il voulut faire partie de la troupe de théâtre PACT à Alost, on lui interdit la scène : on l'avait identifié à la télévision comme un des militants qui avaient pris d'assaut le cabinet de Paula D'Hondt, sous la direction de Filip Dewinter. Pour le monde artistique, van Ginderdeuren, nationaliste de droite, fait partie de ces individus qui admettent ouvertement mettre au premier plan leur propre culture et leur propre peuple. Etienne van Ginderdeuren est le neveu du chanteur d'opéra Kurt Fleming, qui fut boycotté par la BRTN rouge. Il rêve de fonder une ‘rechtse Theater Liga’ ». Il est responsable, conjointement avec Filip Dewinter, de la campagne haineuse actuellement menée dans le

Pajotteland contre les réfugiés politiques qui « se cachent illégalement, sombrent dans la délinquance ou sont contaminés par le virus du sida. » Leo de Heldt (°05/10/1937), fut élu à Turnhout et siège au Conseil provincial d'Anvers. Ce joueur de drapeaux est arrivé au Vlaams Blok après un passage au Vlaamse Volksbeweging et à la Volksunie.

Lucien Hermans (°l8/03/1951), mineur à la retraite, habite à Heusden et a été élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial du Limbourg. Etant donné l'accord de direction un peu particulier du Limbourg, il a été immédiatement promu trésorier. Il a mené sa propre campagne électorale communale sur une trame Vlaams Blok classique, c'est à dire foncièrement anti-immigrés.

Wim Hilven (°10/01/1933), homme d'affaires de Brecht, est incontestablement une figure pittoresque du Vlaams Blok. D'après Hilven lui même, il aurait été actif au sein de la Vlaamse Concentratie dès l'âge de quinze ans et assista à la création de la Volksunie en 1954. Il est le président fondateur du Vlaams Steun en Actiecomité (1958) et cofondateur de la Bibliothèque Flamande des Fourons. Enfin, il est l'administrateur fondateur de plusieurs associations comme VLAGRO (1969), VLAKO (1972), VLAWA (1980), VLAGEKO (1981), HILAS (1983) et HILAS 2000 (1989). Pour terminer, Hilven s'attribue le rôle de président-fondateur de l'association Distributiemacht, une organisation regroupant toujours d'après ses propres dires 135 000 commerçants flamands.

Aux élections du 24 novembre 1991, il figura sur la liste du Vlaams Blok à la Chambre. Hilven distribua largement avec Gerolf Annemans un tract luxueux, dans lequel il défend par dessus tous les intérêts des commerçants. Peu après les élections, il lança au nom du Vlaams Steun en Actiecomité un magazine trimestriel du nom de Breekpunt (Point de rupture). Il semblerait, qu'à l'origine, ce magazine servait surtout à faire valoir Hilven. Le premier numéro de Breekpunt comprenait également un bref communiqué annonçant que la direction de l'association avait « récemment décidé de rassembler les centaines de millions nécessaires pour créer un quotidien vraiment neutre, qui ne serait lié à aucun parti politique. » Bien entendu, le communiqué fut accueilli avec scepticisme. Jusqu’en mai 1992, il s'avéra que Hilven voulait effectivement utiliser Breekpunt comme

levier pour pouvoir créer un quotidien Vlaams Blok (lui même l'appelant un quotidien flamand neutre). Dans une édition spéciale de Breekpunt (qui aurait été tirée à 60 000 exemplaires), il expliqua son projet ambitieux. Hilven se donne cinq ans pour rassembler 800 millions et créer ainsi un quotidien dont on vendrait à court terme 50 000 exemplaires et 130 000 exemplaires à long terme. Début novembre 1992, pour prouver la faisabilité du projet, Hilven essaya de réunir 5 millions en vendant cinq mille parts à 1000 francs. Il n'est pas certain que son projet aboutisse. Notons qu'Hilven doit dissimuler l'identité d'autres participants. Dans une interview accordée le 24 juin 1992 au journal De Standaard, Hilven a reconnu qu'un certain nombre de promoteurs restent dans l'ombre parce qu'il n'est pas souhaitable

que son journal acquière l'image extrémiste de certains membres de la direction. Entre temps, en juillet 1992, il s'est avéré qu'aussi bien le Vlaams Steunen Actiecomité que Breekpunt ont repris partiellement le programme du Vlaams Blok et ont même fait leur le slogan du Vlaams Blok « Eigen volk eerst ».

Adelin Houben, est, depuis le 23 février 1993, probablement le membre du Vlaams Blok le plus tristement célèbre de la province du Limbourg. Ce jour là, Houben a été condamné par le tribunal correctionnel de Louvain à trois ans de prison, dont 18 mois ferme. Houben a été accusé d'avoir envoyé des lettres de menace au Ministre de l'Intérieur Louis Tobback et à l'ancien président de la Volksunie Jaak Gabriëls, d'avoir diffusé des pamphlets au nom de l’« Anti Islamistisch Moordkommando »

(Commando de la mort anti-islamique) et d'avoir incendié la mosquée d'Hasselt. Dans la lettre adressée à Louis Tobback, il avait joint une balle peinte en noire ainsi que le message « A présent, il est trop tard. RIP. » Tobback et sa famille ont été placés sous protection jusqu'à ce que l'auteur ait été arrêté. Lors du procès, l'avocat de Houben expliqua que son client avait eu l'idée de mettre le feu à la mosquée après une réunion avec trois parlementaires du Vlaams Blok. A l'annonce de l'arrestation de Houben vers la mi-janvier 1993, la direction du Vlaams Blok déclara que le parti n'avait rien à voir avec l'homme en question, ainsi qu'avec les faits qui lui étaient reprochés. Or, Adelin Houben est membre du Vlaams Blok et il a figuré en deuxième place sur la liste du VIaams Blok aux élections communales d'octobre 1988 pour Houthalen Helchteren.

Voici quelques citations extraites des pamphlets anonymes qui ont été diffusés par Houben au nom de l’« Anti Islamistisch Moordcommando » :: « L'A.I.M.C. : le groupe est à présent composé de 450 personnes bien entraînées, très motivées et chaque semaine, il en arrive un peu plus. Ce sont des Allemands et des Flamands qui organisent les entraînements. Nous avons également trouvé quelques entreprises qui sont prêtes à nous soutenir financièrement, un parc de véhicules a été mis à notre disposition. Il a été décidé que si les autorités accédaient à nos revendications, tout notre matériel serait remis! Les revendications : L'expulsion de tous les bâtards islamistes et les chiens galeux musulmans ! Plus d'aide aux soi disant ‘réfugiés politiques’!!

Dehors aussi les bâtards islamistes et les chiens galeux musulmans qui ont un passeport belge!! Dehors tous les singes bruns nord africains et africains!! Dehors tous les chiens galeux qui ne sont pas des Européens de l'Ouest!! Stop à la coopération au développement pour les pays du Tiers Monde dont les gouvernements ont suffisamment d'argent!! Toutes ces exigences plus la fin des droits sociaux comme les pensions, les allocations familiales et tous les biens mobiliers ou immobiliers deviennent la propriété du peuple flamand, et ceci à titre définitif et sans possibilité de remboursement Afin que ces revendications soient respectées, l'A.I.M.C. pose comme ultimatum la date du 22/12/91!!!!!! à 16H!!!!

Après cette date, le 23/12/91 à 16H, l'A.I.M.C aura acquis toute la force nécessaire et passera à l'action, de manière sanglante, très sanglante !!!!!!!!!!!!!!! Le plan d'action: •

Décider au hasard de descendre un macaque dans une commune du Limbourg à un moment indéterminé, à raison de 2 à 5 par semaine, afin de provoquer la peur et la haine, et ça pendant quatre semaines environ!!!!!

Ensuite, attaquer en masse les mosquées lorsqu'elles sont remplies, les cafés et les restaurants marocains et turcs et faire le plus de victimes possible!!

Les conséquences : une vraie révolte des immigrés, qui ne donnera plus d'autre choix aux autorités que de protéger leur propre population contre les macaques, et ainsi la force publique sera obligée de s'ériger

contre les macaques!!! Donner à chaque Flamand une arme à feu et ainsi le problème des immigrés sera vite un problème du passé!!!!! •

Donner la priorité au nettoyage des figures de proue du communisme comme Mieke Vogel, Paula D'Hondt, Louis Tobback, Chris Merckx, Magda Aelgoet, Rik Nouwen(A.C.V.).

Exécuter publiquement d'une balle dans la nuque les trafiquants de drogue, petits et grands, indépendamment de leur nationalité!!!!

Agresser, violer et humilier les filles musulmanes entre 12 et 30 ans, parce que ce sont toutes des putains!!!!

Envoyer dans le camp « Breendonck »' tous les penseurs d'extrême gauche : SP, Agalev, PVDA et les membres de la jeunesse rouge « jeunes prostitués »'!!!!!!!!!!

Toutes ces actions valent également pour les cochons de Sikhs qui sont en Belgique!!! ( ... )

Notre combat sera un combat pour une Flandre libre, non occupée et sûre!!!!!! Les bâtards islamistes, les chiens galeux musulmans et les autres singes non européens : Extermination Adolf Hitler est mort mais son idéologie survit et est la nôtre!!!!!!! Heil Hitler! Heil Hitler! Heil Hitler! Heil Hitler! Heil Hitler! Heil Hitler! Allah est un bâtard!!! L'islam est une religion de putains! La Mecque est le putains!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! »

pays

des

Robert Hulstaert (°08/08/1933), habite Merksem et siège au Conseil communal d'Anvers. Hulstaert est issu d'une famille nationaliste flamande. Pendant la période d'après guerre, il faisait partie de l'Algemeen Diets Jeugdverbond (ADJV) où il entra ensuite au conseil de direction. Hulstaert est membre du Vlaams Blok depuis la création du parti et est trésorier de la section de Merksem.

Jan Huybrechts (°23/07/1962), élu le 24 novembre 1991 sur la liste du Vlaams Blok à Anvers ville, siège au Conseil provincial d'Anvers. Huybrecht est un spécialiste de l'Europe de l'Est et entretient de bons contacts avec les extrémistes croates à Zagreb. Successeur de Filip Dewinter à la tête des Vlaams Blok Jongeren, Huybrechts semble avoir une voie parlementaire toute tracée. Huybrechts est rédacteur au journal du parti et fait partie du comité central du parti. Il est également membre de la

direction du Vlaams Blok Jongeren à Anvers.

Cyriel de Kerpel (°14/11/1928), facteur, fut élu en 1988 pour siéger au Conseil communal de Lokeren au nom du Vlaams Blok. Au milieu des années quatrevingt, son adresse figurait dans le magazine Branding comme adresse de contact pour le NJSV. Daniël de Kniif (°12/04/1949), fut élu à Lochristi et siège au Conseil provincial de Flandre Orientale. Il travaille dans le groupe Argenta et a été membre de la Volksunie. Il est un des cofondateurs du Vlaams Blok. Son nom figure régulièrement, dans toute une série de publications d'extrême droite, dont Signaal (le magazine de NSV NJSV) et Revolte (le magazine deVoorpost).

Jan Laeremans (°23/05/1962) est professeur de néerlandais et d'allemand, habite à Humbeek et fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial du Brabant. Jeune homme, Laeremans milita au sein du Vlaams Radicale Jongeren, un mouvement disparu, au NJSV et au TAK. Il fut également cofondateur du NSV Bruxelles. Il atterrit à la Volksunie par le biais de son père. Après la signature du Pacte d'Egmont, il quitta le parti et entra au Vlaams Blok. Laeremans, musicien et danseur, fait partie du groupe folklorique populaire Nele. Dans le parti, il occupe les fonctions de secrétaire d'arrondissement, de président du canton de Meise et est membre du conseil du parti.

Hilde de Lobel (°04/06/1952), siège au Conseil communal d'Anvers. Elle est contrôleur de la TVA et travaille depuis début 1992 au secrétariat du groupe parlementaire du Vlaams Blok. Elle a fait ses classes au Dietse Meisjesbond « Ik Dien » (Union des Jeunes Filles thioises « je sers ») et au VNJ. Plus tard, elle militera au Voorpost dont elle s'occupera du travail de secrétariat, avec Liliane Verhulst, pour la section d'Anvers. Membre de la Volksunie, elle quittera le parti pour le Vlaams Blok après la signature du Pacte d'Egmont. Hilde de Lobel aime la musique wagnérienne pour ses aspects nationalistes. Elle est régulièrement chargée des dossiers concernant la criminalité et la police. Dans la nuit du 17 au 18 janvier 1992, elle s'est retrouvée au devant de l'actualité (locale) d'une manière peu flatteuse. Depuis un certain temps, de Lobel

en avait assez que certains habitués d'un café situé non loin de chez elle utilisaient la façade de sa maison comme urinoir. Une nuit, elle décida de réagir et déversa sur les trois personnes qui se soulageaient un mélange d'urine et d'ammoniac, les blessant aux yeux, suffisamment pour qu'elles soient obligées de se rendre à l'hôpital. Plus tard, on apprit que les trois victimes en question étaient des sympathisants du NSV.

Dominiek Lootens (°04/05/1965) habite Molenbeek et travaille au quartier général du parti à Bruxelles. Le 24 novembre 1991, il fut élu au Conseil provincial du Brabant. Lootens est arrivé en politique par l'intermédiaire de son père, Etienne Lootens, ancien parlementaire Volksunie. Enfant, il faisait partie du Chiro (scouts catholiques) et

lorsqu'il était étudiant, il milita au NSV à Bruxelles. Entre 1986 et 1987, il fut président de NSV. Lootens siège au Conseil d'administration du Contact en Cultuurcentrum (éditeur du magazine Deze Week in Brussel). Lootens cumule pas mal de fonctions au sein du parti : chef de groupe au Conseil provincial, président cantonal de la section d'Anderlecht, responsable de la presse pour l'arrondissement Hal-Vilvorde, membre du comité central du parti et membre de l'administration quotidienne des Vlaams Blok Jongeren. Lootens est un opposant virulent à l'immigration et aux réfugiés politiques. Il est en outre le moteur du projet « Eigen volk eerst » que l'association Stichting Steun aan Vrienden (une filiale du Vlaams Blok) a présenté devant la Commission

Communautaire Flamande pour obtenir des subsides et qui prévoit d'octroyer une aide exclusivement réservée aux Flamands qui sont dans le besoin, en excluant bien entendu les immigrés.

John van Looy (°15/03/1949) habite Borgerhout, est mécanicien et fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial d'Anvers. Ce candidat du Vlaams Blok de Borgerhout a entamé sa propre campagne électorale en ne mâchant pas ses mots lorsqu'il parle des immigrés « Les partis traditionnels laissent Borgerhout se transformer en une véritable casbah... Ce ne sont pas les travailleurs immigrés qui redoutent les agressions racistes, NON, ce sont les gens de Borgerhout qui ont peur et qui, depuis des années déjà, sont victimes d'agressions racistes de la part des immigrés. »

Ignace Lowie (°02/06/1958), habite Berchem, travaille au secrétariat du groupe parlementaire du Vlaams Blok au Conseil Flamand et fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial d'Anvers. Avant de passer au Vlaams Blok au milieu des années quatre vingt, il fut d'abord un sympathisant de la Volksunie. Lowie est membre de Were Di et rédige régulièrement des articles pour Dietsland Europa dans lesquels il défend l'apartheid en Afrique du Sud. Au Conseil provincial, Lowie se montre fermement opposé à ce qu'il appelle « le tas de fumier qu'est la société multiculturelle », considérant qu'elle s'inscrit totalement à l'encontre des Droits de l'Homme.

Anneke Luyckx (°21/10/1966) est l'épouse de Geert Brouwers (voir plus haut); le 24 novembre 1991, elle a été élue au Conseil provincial d'Anvers. Dans sa jeunesse, elle faisait partie de l'Algemeen Vlaams Nationalistisch Jeugdverbond (AVNJ, Union de la jeunesse Nationaliste Flamande). L’AVNJ est une scission raciste du VNJ qui se rattache au national socialisme, s'appuie sur le VMO et entretient des contacts avec le Wiking Jugend en Allemagne. Début mai 1992, Luyck interpella la députation permanente au sujet de « l'agressivité insupportable des jeunes immigrés, conséquence immédiate de l'échec de l'intégration et de la politique d'insertion »; son intervention provoqua un tel tollé que la majorité des membres du SP et du CVP quittèrent la salle.

Werner Marginet (°15/03/1962), enseignant, habite à Lokeren et fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial de

Flandre Orientale. Au milieu des années quatre-vingt, il était administrateur du NSV et membre du conseil de rédaction ainsi que rédacteur en chef de Branding. Auparavant, il avait fait partie de VNJ et de NJSV. Marginet est secrétaire national du Vlaams Blok Jongeren, secrétaire de rédaction de VBJ Nieuwsbrief et siège au comité central du parti. Il fait également partie de la direction du Davidsfonds, section Lokeren, et du Vormingsinstituut Wies Moens (Centre de Formation Wies Moens). Il publie régulièrement des articles dans le journal du parti et dans Dietsland Europa. Proposé par le Conseil provincial, Marginet est devenu responsable de la Fédération du Tourisme de Flandre Orientale. Début 1992, il a succédé à Ludo Gerits à la présidence de la section du parti à Lokeren.

Lutgard Mertens Debois (°02/01/1932), ancien professeur de biologie, siège au Conseil communal de Schoten. Elle est issue d'une famille qui a milité à la Volksunie. Elle s'intéresse presque exclusivement aux problèmes socioculturels, mais a signé le 20 janvier 1992, de même que Walter Peeters, Hugo van Perte et Walter Verduyn, une publication du Vlaams Blok parue dans De Bode van Schoten qui accuse « les partis traditionnels de pratiquer des méthodes de travail fascistes ». Les signataires critiquent en particulier l'attitude des médias, le fait que leur parti soit exclu du dialogue communautaire, sans cesse interdit de manifestation ainsi que le fait que « le monde politique et les médias associent de plus en plus et exclusivement le parti aux problèmes des travailleurs immigrés ».

Lea Meurrens (°23/12/1927), pensionnée, habite à Deurne et a été élue le 24 novembre 1991 au Conseil provincial

d'Anvers. Elle a atterri au Vlaams Blok en 1978 via le VNP dirigé par Karel Dillen. Auparavant (avant la fusion d'Anvers et des communes de la périphérie), elle siégeait au Conseil communal de Deurne pour la Volksunie. Meurrens est membre de Were Di, du comité de parrainage du VNJ et du Mouvement Populaire Flamand. Elle s'occupe du travail administratif de Dietsland Europa.

Jan Mortelmans (°04/05/1964), employé, fut élu en 1988 au Conseil communal de Lierre. Mortelmans a publié des articles dans le journal du parti et dans le journal Nieuwsbrief du Vereniging van Vlaams Blok Mandatarissen (Association des Mandataires Vlaams Blok). Il s'est fait remarquer au Conseil communal de Lierre pour avoir pris position contre la ville quand elle a reconnu l'Association des Etudiants turcs. D'après Mortelmans « les étudiants turcs, en se regroupant dans un club distinct,

ne donnent pas l'image d'une volonté d'intégration ». Piet Mulder (°16/12/1935) est professeur de physique et siège au Conseil communal d'Anvers. Lorsqu'il étudiait à l'Université Catholique de Louvain, il militait au sein du KVHV. Mulder fait partie du courant traditionnel nationaliste populaire du parti. Staf Neel. Le succès électoral du Vlaams Blok attire les opportunistes. Le plus connu d'entre eux est sans aucun doute Staf Neel, ancien membre SP du Conseil communal d'Anvers. Le 12 novembre 1992, Staf Neel a quitté le SP pour rejoindre le Vlaams Blok. Sa lettre de démission adressée au bourgmestre Bob Cools fut distribuée à 50 000 exemplaires à Anvers et dans la presse. Il « oublia » de l'envoyer à Cools. Staf Neel y déclara qu'il souscrivait entièrement au slogan « Eigen volk eerst ».

Aux communales de 1988, Neel avait obtenu 1 751 voix de préférences. Depuis son adhésion, le parti l'utilise comme alibi social. Le 16 mars 1993, lorsque le Vlaams Blok a présenté son « collège échevinal fantôme », entamant ainsi sa campagne pour les élections communales de 1994, il s'avéra que Staf Neel avait été promu « échevin » pour le bureau du personnel.

Philippe van der Sande (°18/12/1960) est employé au secrétariat national du Vlaams Blok et habite Anvers. Elu le 24 novembre 1991, il siège au Conseil provincial d'Anvers. Avant de devenir membre du Vlaams Blok dans les années quatre-vingt, Van der Sande avait déjà gagné ses galons racistes en militant au sein de NSV et de Voorpost. Le ler mai 1981, il participa à l'attaque perpétrée par le VMO et le NSV du café fréquenté par les immigrés à Saint Nicolas, où ils s'amusèrent à tout saccager. Il fut condamné pour ces exactions

par la Cour d'Appel de Gand en octobre 1982. Van der Sande est un protégé de Filip Dewinter qui l'a introduit au secrétariat du parti. En outre, il fait partie de la direction des Vlaams Blok Jongeren. Depuis début 1993, il collabore au bimensuel Barrikade.

Mark Schampaert (°19/09/1963), employé dans une usine chimique, fut élu en 1988 au Conseil communal de Mortsel. Schampaert a ses racines politiques dans l'organisation d'extrême droite AVNJ, dirigée par Piet Vereecken. On y persuade la jeunesse de la pureté de la race nordique et de la nécessité de la maintenir intacte. Il était également un sympathisant actif de Voorpost. Enfin, Schampaert s'oppose de façon virulente à la décision de la ville d'autoriser les camps de Tziganes à Mortsel.

Guy Schouls (°05/07/1935), transporteur, siège au Conseil communal de Gand. Dans les années soixante, il était membre de VNJ et, plus tard, de la Volksunie. Il quitta la Volksunie pour le Vlaams Blok à l'époque de la signature du Pacte d'Egmont.

Luc Sevenhans (°06/09/1954), travailleur au port d'Anvers, est élu en 1988 au Conseil communal de Brasschaat. Sevenhans est issu d'une famille VNV et est partisan de la ligne nationaliste populaire traditionnelle du parti. C'est un opposant farouche à la légalisation de l'avortement. Il s'attaque régulièrement aux réfugiés politiques durant les réunions du conseil communal.

Johan Stie (°1965) habite Herdersem, est employé dans une fabrique de chocolat et fut élu le 24 novembre 1991 au conseil provincial de Flandre Orientale. Adolescent, il militait déjà au TAK. Il complétera son expérience politique dans les Volksunie Jongeren, et devint à 25 ans président des Vlaams Blok Jongeren à Alost. Depuis, les actions des VBJ d'Alost sont principalement axées contre les immigrés. Le mouvement a également organisé des campagnes d'affichage contre (l'ancienne) Commissaire Royal à l'Immigration, Madame Paula D'Hondt, qui habite Kerksken.

Ludo Switsers (°05/03/1954), habite à Kontich et siège au Conseil provincial d'Anvers. Switsers a été membre du VNJ, plus tard de la Volksunie et c'est en 1978 qu'il passa au Vlaams Blok. Il est également actif au Sint Maartensfonds et au Vlaamse Kring.

Guido Vergult (°04/01/1946), ingénieur technicien, siège au Conseil communal de Saint Nicolas. Vergult a fait partie du VNJ. Actif au sein du Gebroeders van Raemdonck Kring (Cercle des Frères de Raemdonck), il est président d'arrondissement et membre du comité central du parti. Pendant sa campagne électorale et dans la presse locale, Vergult s'est toujours montré fermement opposé à une société multiculturelle. C'est également un partisan farouche de l'amnistie. A cet effet, Vergult a illustré ses opinions politiques dans une tribune libre du 16 février 1990 parue dans l'hebdomadaire régional Het Vrije Waasland : " (...) tout le monde sait pertinemment bien que la répression et tout ce qui l'entoure a été menée par les extrémistes, en particulier de gauche, pour ne pas dire de gauche rouge sang qui sont contre les Flamands... On oublie un peu trop

facilement l'existence de cette gauche, composée aussi bien de socialistes que de communistes et d'anarchistes, qui a tenté pendant et après la Guerre de prendre le pouvoir, sans heureusement y parvenir. Le CVP qui est le grand responsable de cette répression sanglante et scandaleuse, dont chaque citoyen honnête et droit devrait se sentir honteux, ferait mieux de se taire. A cause du CVP, l'amnistie n'existe toujours pas sur cette planète de singes. »

Hubert Verhelst (°24/05/1928), ancien employé à la Sabena, habite Bruges et a été élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial de Flandre Occidentale. Il a été membre de la Volksunie pendant trente ans. Suite à la signature du Pacte d'Egmont, il a rejoint le Vlaams Blok. Verhelst écrit parfois dans le magazine néonazi Deutsche Nationalzeitung

de Gerhard Frey. Il est également actif au Debatclub de Bruges, une filiale du Vlaams Blok, dont il reprit la présidence fin 1991 à Frank Vanhecke, membre du comité de direction du parti. Verhelst est chef de groupe au Conseil provincial. Il milite surtout pour des thèmes comme l'amnistie et l'avortement. Mark Vermost (°1950), fonctionnaire, siège au Conseil communal de Malines. Vermost est un fervent admirateur d'August Borms, Leo Vindevogel et Theo Brouns, ce qui se traduit par un combat incessant pour l'amnistie. Dans le passé, Vermost a été l'un des instigateurs d'une série de défilés aux flambeaux. Il a également milité au sein du TAK.

Didier Versieck (°04/07/1952), d'Ostende, technicien au Service Radio

Maritime, a été élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial de Flandre Occidentale. Il a été membre de la Volksunie mais a quitté le parti pour rejoindre le Vlaams Blok après la signature du Pacte d'Egmont. Il travaille en collaboration avec Pro Vita avec qui il lutte activement contre l'avortement. Versieck est vice-président de la section d'Ostende et trésorier de l'arrondissement Furnes Dixmude.

Hans van Vlierberghe (°01/07/1950), aubergiste, habite à Lennik. Il fut élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial du Brabant. Il était l'un des chefs de la section bruxelloise du VNJ. En outre, il a été pendant des années président de Were Di Bruxelles et cofondateur du Grenslandkampen. Hans van Vlierberghe est également à la base de la création du Jonge Wacht et a assisté à la naissance du VNP dirigé par Karel Dillen.

Joris van Vooren (°15/04/1935) a été élu le 24 novembre 1991 au Conseil provincial de Flandre Orientale. Il est un membre du parti de la première heure et a gagné ses galons politiques à l'ADJV, la Volksunie, le comité du Pélerinage de l'Yser, le Kamiel van Damme Vormingsinstituut et le Broederband. Joris van Vooren est secrétaire provincial du parti.

Erik Waterschoot (°15/12/1935), imprimeur, habite Sint Pauwels et a été élu au Conseil provincial de Flandre Orientale lors des élections du 24 novembre 1991. Dans sa jeunesse, Waterschoot faisait partie de l'ADJV et a également milité au sein de la Vlaamse Concentratie. Plus tard, il a rejoint la Volksunie et a milité activement pour le TAK.

Hilda Wegge Vienne (°11/01/1947), coiffeuse à Borgerhout, siège au Conseil communal d'Anvers. Ses thèmes de combat sont la drogue, l'avortement et surtout les immigrés.

Rob de Wispelaere (°15/10/1969), élu le 24 novembre 1991 à Hasselt pour siéger au Conseil provincial du Limbourg. Avant de devenir membre du Vlaams Blok, de Wispelaere a fait partie du VNJ, du TAK et de Voorpost. Il est le chef de groupe au Conseil provincial. En novembre 1992, de Wispelaere a quitté le Vlaams Blok. Dans une interview accordée au journal De Morgen (22/12/1992), il a déclaré que le Vlaams Blok était une secte totalitaire et a ajouté qu'il s'opposait entre autres au racisme prôné par Filip Dewinter.

Peter Wollaert (°02/04/1963), médecin à Anvers, siège au Conseil provincial d'Anvers depuis les élections du 24 novembre 1991. Wollaert fait partie du Vlaamse Volksbeweging et de Vrienden van Zuid Afrika. Ses thèmes politiques principaux sont l'avortement et la drogue. A la demande du parti, il tient d'ailleurs de temps en temps une conférence sur le dernier sujet. Wollaert est membre de la direction de l'arrondissement, il siège au comité de direction des Vlaams Blok Jongeren et il est président de la section de Merksem.

Johan Zander (°25/05/1945), représentant, habite Nijlen et siège au Conseil provincial d'Anvers depuis les élections du 24 novembre 1991. Zander est l'un des nombreux membres de la Volksunie qui a rompu avec ce parti pour rejoindre le

Vlaams Blok. Dans sa jeunesse, il était actif au sein du Rodenbachbond et de l'AVVKS. De temps en temps, Zander publie un petit article dans 't Pallieterke, il est l'une des personnes du Vlaams Blok souvent présentes dans le courrier des lecteurs des journaux Gazet van Antwerpen et De Standaard.

Postface "Quand ils sont venus arrêter un juif je me suis dit un juif de plus ou de moins il n'y a pas de quoi s'inquiéter Quand ils sont venus arrêter un catholique je me suis dit un catholique de plus ou de moins il n'y a pas de quoi s'inquiéter Quand ils sont venus arrêter un communiste je me suis dit un communiste de plus ou de moins il n'y a pas de quoi s'inquiéter Quand ils sont venus m'arrêter il n'y avait plus personne pour s'inquiéter" B. BRECHT

Le 24 novembre 1991, les démocrates sont interpellés par les réultats des élections et la résurgence des partis d'extrême droite. Près d'une année plus tôt, la Régionale de Liège du Centre d'Action Laïque avait lancé l'opération « Itinéraire des Droits de l'Homme ». Eduquer et sensibiliser aux Droits de l'Homme et donc favoriser l'émergence de comportements tant individuels que collectifs visant à défendre et promouvoir ces droits, tels sont les objectifs poursuivis par cette initiative laïque. L'idéal humaniste qui s'exprime dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme resterait lettre morte si les hommes et les femmes omettaient de le redéfinir et de le confronter aux réalités d'un monde qu'il leur apppartient de construire. Laïques, nous avons la volonté de définir une éthique qui précisera les objectifs sociaux, économique

et politiques avec pour but la création d'une communauté d'hommes et de femmes solidaires, égaux et responsables, la construction d'une société juste, progressiste et fraternelle. Aussi est-il important de déceler les dangers et les aliénations de toutes sortes, de s'ouvrir aux changements, de prendre nos responsabilités envers nous-mêmes et envers les autres. Aussi est-il important, si nous voulons dégager cette optique de paix, de faire rendue dans le coeur des hommes la foi en l'Humanité. Car la liberté se mérite. Elle n'est pas un acquis qui ne puisse être remis en cause. La liberté reste fragile, la liberté est souvent menacée. Notre devoir est d'être attentifs, vigilants, actifs.

Le « Plus jamais ça » ne suffit plus. Nous devons donner aux jeunes cette indispensable attention à la démocratie. Notre tâche sera longue, elle sera difficile. Il importe de propager les Droits de l'Homme par une information et une éducation du public en général et des jeunes en particulier et d'en poursuivre l'application concrète en renforçant les institutions et les structures qui généralisent ces Droits de l'Homme. Il convient de condamner le racisme sous toutes ses formes et de maintenir le respect constant de la dignité humaine. Il faut dénoncer les préjugés, prôner la coexistence fraternelle et reconnaître le droit à la différence. Pour faire un autre monde, il faut d'autres hommes, d'autres femmes. Il faut plus qu'une éducation, il faut une autre éducation.

Forgeons des hommes et des femmes qui auront la force de résister aux menaces anti-démocratiques. Ces menaces peuvent être si insidieuses qu'elles en deviennent indolores. Pour peu que les « Droits de l'Homme » se vident de leurs sens, que l'homme accepte d'être un assisté, qu'il se laisse distraire par des habitudes de consommation, qu'il soit réceptif aux discours d'autorité renaissants, voilà que tout est à refaire. , « Itinéraire des Droits de l'Homme » veut contribuer à cet éveil indispensable. Il paraissait donc évident d'associer cette opération à la sortie du livre de Hugo Gijsels et donner un outil supplémentaire pour prévenir. Centre d'Action Laïque de la Province de Liège Boulevard d'Avroy, 86 4000 Liège Tél. : 04/222 25 41

Bibliographie Amnestierapport van de Vlaamse Raad, 1984. Gerolf Annemans, Filip de Man e.a., De gezinspartij, 1991. Johan Anthierens, Hugo de Schampheleire, Hugo Gijsels e.a., De Vlaamse Kronijken, 1987. Russ Bellant, Old nazis, the new right and the Reagan administration, 1989. André Belmans, De waarheid aangaande Joris van Severen, 1945. Walter de Bock e.a., Extreem rechts en de Staat, 1981. Eddy Boutmans, De toepassing-smogelijkheden van de racismewet, 1989. Arthur de Bruyne, Trouw, 1973. Patrice Chairoff, Dossier néonazisme, 1977. Lode Claes, De afwendbare nederlaag, 1986. Michel de Coster, Het Vlaams Blok. Een partij analyse, travail de mémoire, 1984. Rik Decan, Wie is wie in Vlaanderen, 1980. Luc Delafortrie, Joris van Severen en wij, 1942. Filip Dewinter, Eigen volk eerst, 1989. Filip Dewinter, Immigratie. De oplossingen, 70 voorstellen ter oplossing van het vreemdelingenprobleem, 1992.

Paula D'Hondt, Mens voor mens. Een openhartig gesprek over het migrantenbeleid, (Opgetekend door Manu Adriaens), 1991. Karel Dillen, Europese gedichten, 1991. Karel Dillen, Vlaanderen in Straatsburg, 1991. Jaap van Donselaar, Fout na de oorlog, 1991. Serge Dumont, Les brigades noires, 1985. Frans van der Elst, De bewogen jaren. Mijn memoires, 1985. Frans van der Elst, Encyclopedie van de Vlaamse Beweging, 1973. Francis van Eycken et Staf Schoeters, Het Vlaams Blok marcheert, 1988. Hajo Funke, Republikaner, 1989. Hugo Gijsels, De Bende & co. 20 jaar destabilisering in België, 1990. Hugo Gijsels, Veerle Hobin, Hoessein Boukhriss e.a., De Barbaren. Migranten en racisme in de Belgische politiek, 1988. Hugo Gijsels et Jos vander Velpen, Het Vlaams Blok 1938-1988. Het verdriet van Vlaanderen, 1989. M. van Haegendoren, De Vlaamse Beweging nu en morgen, 1962. Pierre Havelange, La révolution inaperçue, 1992. Piet van Haver, Onmacht der verdeelden, 1983.

Marijke van Hemeldonck e.a., De strijd tegen racisme en fascisme in Europa, 1988. Marijke van Hoorebeeck, 'Oranje dassen', 1986. Luc Huyse et Steven Dhondt, Onverwerkt verleden. Collaboratie en repressie in België 1942-1952, 1991. Leopold Janssens, Zwartboek over Amnestie, 1970. Hilde Kammer, Elisabeth Bartsch et Koos Groen, Lexicon van het fascisme, 1986. M. Kirfel et W. Oswalt, Die Rückkehr der Führer, 1989. Frédéric Laurent, L’orchestre noir, 1978. Maria Macciocchi, Vrouwen en Fascisme, 197 7. Ruud Martens, Van Adamo tot Zamouri. Belgische migranten over Belgische migranten, 1991. Henri Rousso, La collaboration, 1987. Hugo de Schampheleire et Yannis Thanassekos, Extreem rechts in West Europa, 1991. Els Schelfhout, Het politiek programma en het imago van het Vlaams Blok in de periode van de Europese verkiezingen (meijuni 1989), travail de mémoire, 1990. Gill Seidel, De ontkenning van de Holocaust, 1988. Etienne Verhoeyen en Frank Uytterhaegen, De

kreeft met de zwarte scharen, 1981. Jan Vincx, Vlaanderen in uniform, 1981. Jan Vincx et Victor Schotanius, Nederlandse vrijwilligers in Europese Krijgsdienst 1940-45, 1988. Selle de Vos, Gido Dumon e.a., Zwart en geel en een beetje rood, 1979. Els Witte et Jan Craeybeckx, Politieke geschiedenis van België, 1981.

Lexique ADJV

Algemeen Diets Jeugverbond

ANSAV

Algemeen Nederlands Suidafrikaans Vlaams Verbond

ANZ

Algemeen Nederlands Zangverbond

AVNJ

Algemeen Vlaams Nationaal jeugdverbond

AVVS

Algemeen Verbond van Vlaamse Syndicaten

BDAC

Borms Documentatie en Actiecentrum

CAW

Comité Algemeen Welzijn

CD

Centrumdemocraten (Hollande)

CP

Centrumpartij (Hollande)

CVP

Conservatieve Volkspartij (Hollande)

DAP

Dietse Arbeidspartij

De Vlag

Deutsch Vlämische Arbeitsgemeinschaft

DMO

Dinaso Militanten Orde

DOP

Dietse Opvoedkundige Beweging

FOK

Fascisme Onderzoeks Kollektief (Hollande)

IPOC

Interprovinciaal Ouder Comité

JLL

jeugdverbond der Lage Landen

JNG

Jong Nederlandse Gemeenschap

KOSMOS

Kring voor Onderzoek naar de Socialistische en Marxistische Ondermijning van de Samenleving

KVHV

Katholiek Vlaams

KVV

Katholieke Vlaamse Volkspartij

MSE

Mouvement Social Européen

MVP

Moslim Volkspartij

NAC

Nationaal Actiecomité

NJF

Nationaal Jeugd Front (Hollande)

NJSV

Nationalistisch Jong Studenten Verbond

NKW

Nederlands Kroatische Werkgemeenschap

NOE

Nouvel Ordre Européen

NOS

Nationalistische Omroepstichting

NSB

Nationaal Socialistische Beweging (Hollande)

NSBiV

Nationaal Socialistische Beweging in Vlaanderen

NSJV

Nationaal Socialistische Jeugd Vlaanderen

NSV

Nationalistische Studentenvereniging

NVU

Nederlandse Volksunie (Hollande)

TAK

Taal Aktie Komitee

UHGA

Unie van Hand en Geestesarbeiders

VAKOC

Vlaams Actiecomité Oost Europa

VBJ

Vlaams Blok Jongeren

Verdinaso

Verbond van Dietse Nationaal Solidaristen

VHO

Vrij Historisch Onderzoek

VLAWALA Vlaamse Werkgroep Anti Legalisatie Abortus VMO

Vlaamse Militanten Orde

VND

Vlaams Nationaal Directorium

VNP

Vlaams Nationalistische Partij

VNR

Vlaams Nationale Raad

VNV

Vlaams Nationaal Verbond

VSAG

Vlaamse Scholieren Actiegroep

Vum

Volksunie Militanten

VVP

Vlaamse Volkspartij

VVR

Vereniging Rusland

voor

een

vrij

9 juin 1989 – Antwerpen Philippe Dewinter dans ses œuvres. Elu député du Vlaams Blok en 1987, il en est devenu une des figures de proue.

7 mars1984

Dans une interview au Deutsche Nationalzeitung (18/11/88), Dewinter a précisé que les batailles de l’histoire étaient « la bataille de Poitiers, la bataille des Eperons d’or et la bataille de la Légion flamande au front de l’Est ».

Tract électoral de Roeland Van Walleghen, candidat à Bruxelles quelques années après y avoir été impliqué dans l’assassinat d’un colleur d’affiche FDF, Jacques Georgin, le 12 septembre 1970

Cette bande dessinée est parue en 1978 dans HARO. Sous le titre « La traumatisme de l’intégration », une féministe est violée par un marocain et un noir.

La librairie « De rode mol » à Anvers après le passage d’un commando VMO

Le NSV en action à l’université de Gand

Bert Eriksson, le membre le plus célèbre du Vlaams Blok. Il s’est inscrit à la Jeunesse Hitlérienne en 1943, et à déclaré à l’hebdomadaire Panorama en 1986 : « Je ne remercierai jamais assez Dieu d’avoir eu la chance de devenir membre de la Hitler-Jugend, un mouvement dont on parlera encore pendant cent ans ».

Dans les années 70, le VMO participait aux camps d’entraînement paramilitaire illégaux du groupe « HOFFMANN » en RFA

André Wuyts, candidat du Vlaams Blok à la Chambre à Anvers en 1991, a diffusé cette « vraie fausse » ordonnance dans les boîtes aux lettres de sa circonscription. Il s’agit d’un « vomitif » prescrit à la malade « Madame Belgique »

On peut y lire, entre autre : un gramme de poudre de Happart, 4 grammes d’extraits de mosquée, 4 grammes de citron d’avortement. Au verso de cette « ordonnance », le candidat Wuyts précise qu’il est médecin. L’Ordre des médecins n’a pas encore réagi.

Publicité électorale du Blok. Le dessin ne manque pas d’intérêt. A l’avant plan, on distingue un groupe constitué d’étranger caricaturaux : marocains, femme voilée, sikh, asiatique, noir... Parmi la foule une personne se détache du lot et semble indiquer au groupe la voie à suivre. Il s’agit d’un « capitaliste juif » portant un chapeau haut de forme, avec un cigare en bouche et un nez crochu, comme les nazis aimaient dépeindre les juifs avant et pendant la seconde guerre mondiale

Avec l'appui : - du Centre d'Action Laïque; - de l'ASBL « Initiatives jeunes en Europe Youth Initiatives in Europe »; - de l'ASBL « Vent du Nord Vent du Sud »; - de l'Union des Etudiants Juifs de Belgique; - de Diffusion Alternative; - de la Fondation Léon Lesoil. L'auteur souhaite remercier les personnes sans qui ce livre n'aurait pas été possible: Geneviève, Koula, Magda, Annabel Kosynski, Ruud Martens, Filip de Bodt, Alain Meynen, le personnel de la bibliothèque du Vlaams Raad et le service de documentation de Humo. Adaptation de la traduction: Lysiane de Sélys, Cécile Gouzée, Marc Jacquemain, Dominique Parizel © Copyright 1993 pour la traduction française : Tournesol Conseils – Editions Luc Pire.

© Copyright 2001 pour la version numérique en français: Tournesol Conseils – Luc Pire Electronique. Tous droits de reproduction (copie, prêt, duplication numérique, impression à d’autres fins que strictement privées) strictement réservés. ISBN : 2-930001-09-7 Dépot légal : D-1993 2731-4 Cet ouvrage est disponible sur le site http://www.lucpire.be

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